Dingle : le facteur |
Irlande Monique et Jean-Paul MOUREZ
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Devant un pub à Dingle : bicycle and Guiness |
Première partie :
1. De CAEN à NEW GRANGE Deuxième partie : 5. De PORTNOO à DOO LOUGH Chacun des 8 chapitres comprend la carte agrandie du secteur découvert |
Mercredi 10 juillet 2002 : de CAEN à CHERBOURG (120 km)
Le ferry Normandy, d’Irish Ferries
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Embarquement sur le Normandy, d’Irish Ferries, à Cherbourg. Le ciel clair est légèrement nuageux et la mer calme mais le vent très frais nous fait abandonner le pont lorsque la côte du Cotentin disparaît à l’horizon. |
Installés dans le lounge, Monique attaque un premier bouquin « Zita Impératrice Courage », une biographie de la dernière impératrice d’Autriche, pendant que j’entame ce journal puis poursuis la rédaction de l’itinéraire de notre tour d’Irlande commencé à Montréal. | Monique commence
à lire sur le pont du Normandy
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Ste-Foy : Jean-Paul bricole dans l'Aigle |
Il a en effet fallu reconstruire en PVC le caillebotis de la douche dont les lattes de pin avaient pourri, dérouiller le parement intérieur du lanterneau puis en étanchéifier l’extérieur qui avait fui, démonter, nettoyer puis remonter la fenêtre latérale au-dessus de la porte à glissière soupçonnée de causer une autre fuite au-dessus de la porte du passager. Le pare-chocs arrière avait bien besoin d'être redressé, et le bas de caisse de retouches de peinture noire un peu partout. J'avais dû également installer un nouveau radio-CD pour remplacer le radio cassette brisé et, tant qu'à faire, déplacer et réinstaller les haut-parleurs depuis le toit où ils étaient encastrés et sonnaient fort mal. Un convertisseur 12 V – 220 V était devenu nécessaire pour alimenter le chargeur de batterie de la nouvelle caméra vidéo DV, et il m'avait fallu colmater en catastrophe la fuite de l’un des vases d’expansion puis resserrer tous les raccords du circuit d’eau qui s'étaient mis à fuir à la première remise en pression. Tout cela sans parler du décrassage de la carrosserie envahie par les mousses et les champignons... |
Restent l’installation du ventilateur du lit haut fabriqué à partir d’un petit ventilateur d’ordinateur, et surtout la réparation du rétroviseur droit dont l’axe vient de lâcher…
L’arrivée à Rosslare est prévue vers midi, après 18 heures de
traversée…
Jeudi 11 juillet 2002 : de ROSSLARE HARBOUR à RATHDRUM (132
km)
Nuit longue entrecoupée de nombreux réveils, dans l’inconfort de nos sièges couchettes inclinables où il faut se tortiller pour retrouver une position familière permettant le sommeil. Mieux eut valu apporter, comme plusieurs autour de nous, oreiller, duvet et tapis de sol pour s’allonger dans les espaces libres devant ou entre les rangées de fauteuil... Nous émergeons vers 9:00 pour aller
déjeuner dans le lounge encore une fois bondé et
très bruyant, dérangés par les nombreux enfants énervés
qui courent et se bousculent en criant comme sur une
cour de récréation… sans surveillant !
Sur le pont il fait frais, mais le soleil presque tout le temps présent nous fait attendre sans trop d’impatience l’apparition de la côte irlandaise vers 11:30. À 12:30, débarquement comme prévu sur le quai de Rosslare, une grande gare maritime entourée de quelques maisons. |
Notre route vers le nord sur la côte est de l'Irlande |
Sur le quai de
Wexford
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Il faut gagner la première petite ville, Wexford, pour faire réparer le rétroviseur droit indispensable ici où l’on conduit à gauche. Traversée superficielle de la petite ville portuaire très achalandée pour trouver à la sortie est un aimable carrossier qui accepte de percer le bras de support et de poser un rivet comme je le lui suggère, après son déjeuner puisqu’il est déjà midi et demi. Cela nous laisse le temps de faire un petit tour le long du quai animé : bateaux de pêche amarrés et foule de touristes dans les petites rues commerçantes aux façades anciennes, sans grand style mais gaies et colorées. Nous nous perdons un peu dans le dédale des ruelles mais finissons par retrouver notre atelier et notre rétroviseur fort bien réparé. Notre mécanicien refuse une rétribution pourtant méritée, je remonte immédiatement le miroir et nous prenons la route du nord. |
Chaussée excellente mais route plutôt étroite, sinueuse et très fréquentée, dans un paysage rural assez vallonné. Le ciel se charge et nous essuyons plusieurs ondées avant d’arriver à Enniscorthy, une pittoresque petite ville médiévale où nous pique-niquons entre la rivière à truite (pêcheur en fonction !) et les tours du château dominant les vieux toits. Quelques plans vidéo de l’antique pont de pierre et des façades anciennes des magasins puis nous repartons vers le nord. | Au centre ville
d'Enniscorthy, la rivière à truite et le
château-fort
|
À Arklow nous remontons la jolie vallée de l'Avoca jusqu'à Meeting of the Waters, confluent de deux rivières sauvages en pleine forêt souligné par un agréable petit jardin. Puis nous remontons par les près et les bois des Wicklow Mountains jusqu’au Avondale Forest Park, une ancienne propriété de Parnell, « le Grand Libérateur ». Petit tour à pied dans le parc dont nous apprécions grands arbres, arbustes et vastes greens mais la maison « classique » du XIXème nous paraît quelconque, sans mériter une visite intérieure détaillée demain matin comme envisagé.
Vendredi 12 juillet 2002 : de RATHDRUM à LOUGH TAY (226 km)
Val de
Glendalough et ses les deux lacs
|
Il fait presque chaud dans notre chambre à roulette lorsque nous nous réveillons vers 9:15… sous le soleil. Inutile de dire que la nuit a été calme bien que le trafic se soit révélé plus animé que prévu en début de matinée. Douche puis déjeuner, nous décollons vers 10:00 pour emprunter d’abord la jolie vallée sauvage de la Clara qui nous mène au fameux val de Glendalough, berceau de l’église irlandaise puisque c’est là que saint Kevin fonda au VIème siècle l’un des plus célèbres monastères du pays. |
Glendalough : la
tour ronde au dessus des ruines du monastère
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Glendalough : la
tour seule émergeant au-dessus du cimetière du
monastère
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Glendalough : la tour ronde et les tombes |
Dans une vallée déserte, un enclos monastique entoure un ancien cimetière planté d’antiques croix celtiques et surtout d’un clocher rond typique haut de 30 mètres parfaitement conservé. Parmi les pierres tombales, quelques bâtiments monastiques plus ou moins reconnaissables dont les pierres noircies par le temps confirment la vénérabilité du site. |
Nous nous lançons ensuite dans une longue promenade en forêt, sous une futaie d’énormes chênes, qui contourne le Lac Inférieur assez riant ... | Glendalough :
le site et la rivière
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Glendalough : Upper Lake |
... pour gagner le Lac Supérieur beaucoup plus austère entre ses rives escarpées. Pause sur sa petite plage de sable avant de prendre le chemin du retour par la rive nord du lac qui offre lui aussi quelques vues dégagées sur ce site exceptionnel. |
Nous trouvons quelques cartes postales évocatrices dans le centre d’accueil puis retrouvons notre Aigle dans le stationnement paysager. | Glendalough dans la brume |
Moutons sur la route ! |
Monique prépare le lunch pendant que je fais le plein d’eau sur une borne d'arrosage, nous déjeunons et repartons vers le nord en traversant les Wicklow Mountains par des vallées boisées sur d’étroites routes sinueuses. |
En nous égarant et en cherchant un peu, nous finissons par aboutir aux Powers Court Gardens, un opulent et magnifique domaine dont les jardins s’étalent en terrasses jusqu’au fond d’un vallon occupé par une pièce d’eau envahie par des nénuphars et décorée d’un grand jet jaillissant. | Powers Court : le
jardin et le paysage d'arrière plan
|
Alentour une splendide collection de grands arbres sous lesquels serpentent les allées, et un jardin japonais, un peu décevant car au goût plutôt kitsch des années 1908.
En remontant vers le château, on traverse deux jardins clos garnis de mixed borders multicolores, et surtout une fort belle roseraie abritée par la résidence reconstruite après un incendie en 1974. Il ne reste plus rien d’intéressant dans ses murs, sinon boutiques, restaurant et salon de thé… | Powers Court : porte en fer forgé du jardin clos |
Au total une agréable balade à pied dans un environnement soigné, mis en valeur par son cadre de petites montagnes (le Sugar Loaf s’élève à 503 m). Une brusque ondée nous frappe au moment de reprendre la route. | Powers Court : le jardin et le parc depuis la terrasse |
Powers Court : Monique au pied de la cascade |
Nous voulons enfin admirer la Cascade, elle aussi fort impressionnante avec ses 120 m de dénivelé, à 5 kilomètres du château. Nous ne quittons son cadre reposant qu'à à la fermeture du parc à 19:00, pour entreprendre une jolie route accidentée dans les monts Wicklow. |
Remontée de la longue vallée de Glencree, de plus en plus sauvage, puis route d’altitude dans les tourbières déserte jusqu’à Sally Gap d’où s’étend un vaste panorama dans toutes les directions. |
Bivouac au dessus
de Lough Tay
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Encore quelques kilomètres de montagne et nous atteignons le belvédère dominant le Lough Tay, un sombre lac de montagne où nous installons notre bivouac dans le soir qui descend, profitant de l’air pur et du silence des hautes terres, en compagnie d’un autre fourgon, allemand celui-là. |
Samedi 13 juillet 2002 : du LOUGH TAY à NEWGRANGE (136 km)
Ciel nuageux mais clair au réveil pour un autre coup d’œil au grandiose panorama étalé à nos pieds.
Lough Tay
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Le domaine de Lough
Tay
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Dublin : Four Courts |
Nous démarrons tard (passé 10:00) pour gagner le centre de Dublin par une toute petite route vagabondant dans les collines et les montagnes parcourues hier. Il fait beau, la circulation est clairsemée jusqu’à rattraper la N 11 à Enniskery, beaucoup plus chargée. À notre train de sénateur nous finissons par traverser les interminables faubourgs de la capitale et allons stationner en plein centre sur le quai de la Liffey, juste en face du grand bâtiment néoclassique de Four Courts, l’ancien Palais de justice. |
L’allure générale, l’urbanisme et l’architecture de la ville ne nous impressionnent guère : pas ou peu de grandes perspectives, de rares monuments assez quelconques en brique ou en crépis, même les pierres grises de la grande cathédrale Christ Church paraissent trop neuves… | Dublin : Christ Church Cathedral |
Nous parcourons quelques rues animées mais sans chic en nous rapprochant du château. Lui aussi manque de « gueule », on ne s’aperçoit de sa taille qu’une fois à l’intérieur de sa grande cour centrale qui mélange architectures médiévale, classique et moderne. Délaissant la visite habituelle des Grands appartements d’apparat, nous nous dirigeons plutôt vers la Bibliothèque Chester Beatty dont les salles contemporaines ont été aménagées près d’un joli jardin. |
Chester
Beatty Library : peinture japonaise
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Chester Beatty Library : enluminure persane |
Chester Beatty
Library : Coq menaçant un coq peint, par Totoya
HOKKEI, estampe japonais sur bois (surimono) ca.
(1825)
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Chester Beatty Library : Carpe nageant parmi les algues, par Katsushika TAITO II ca. 1832 |
Nous ne faisons guère d'autres découvertes stimulantes sur le chemin du retour vers notre Aigle. En quittant la ville nous tentons bien d'aller admirer la fameuse bibliothèque de Trinity College mais l'intense circulation du samedi après-midi dans le centre ville nous fait renoncer à l'entreprise. Nous quittons plutôt la ville en nous dirigeant vers le nord. | Dublin : les quais le long de Liffey River |
Les jardins signalés par le Guide Vert ne sont pas accessibles car ils font partie d'un golf dont l’entrée est réservé aux membres… Reste un petit tour sur la digue protégeant le port de la petite station balnéaire (bateaux de pêcheurs et de plaisanciers mêlés). Je la parcours jusqu'à son extrémité pendant que Monique s’expose au soleil, une denrée plutôt rare ici…. | Dans le port de
Howth
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Nous reprenons ensuite la direction du nord par la N 1. Détour vers le parc de Newbridge sur le point de fermer. Ses grands arbres dispersés sur le green ont fière allure mais point de parterres fleuris, et encore moins d'eau pour remplir notre citerne… Nous poursuivons la grande route coupée de quelques sections d'autoroute toute neuve. Finalement nous faisons le plein d'eau sur une station service puis nous bifurquons vers l'ouest peu avant Drogheda pour remonter la vallée de la Boyne jusqu'au site préhistorique de Newgrange. À notre arrivée à 19:00 le Centre d'accueil est évidemment fermé et nous ne pourrons bivouaquer sur son stationnement clôturé. Nous trouvons à proximité un petit espace derrière une haie au bord de la route où nous serons tout proches pour la visite à la première heure demain matin. Espérons qu'il ne pleuvra pas cette nuit car le terrain fort boueux risque alors de nous retenir longtemps !
Dimanche 14 juillet 2002 : de NEWGRANGE à SAUL (187 km)
Réveil plutôt tardif (8:45) mais décollage sans anicroche après le petit déjeuner vite expédié. Au Centre d'accueil du site préhistorique de la vallée de la Boyne j'obtiens des billets pour la deuxième tournée (9:20) du petit autobus qui grimpe sur la colline où se trouve la grande tombe à couloir de Newgrange.
Entrée du tumulus
de Newgrange
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Le monument datant de près de 5000 ans a été magnifiquement restauré et c'est avec émotion que l'on franchit le seuil puis le long couloir étroit formé de grosses pierres dressées pour s'enfoncer dans le souterrain menant jusqu'à la chambre sépulcrale, au cœur de l'énorme tumulus. |
Architecture démesurée pour les moyens de l'époque… Étonnante voûte en encorbellement,... | Newgrange : plafond en encorbellement |
Newgrange : le
rayon du soleil de solstice d'hiver
|
...démonstration par le guide du rayon de lumière solaire perçant par une fenêtre étroite jusqu'au cœur du monument durant quelques minutes lors du solstice d'hiver. |
De retour au centre d'accueil je parcours avec intérêt l'exposition présentant le mode de vie, les croyances et les technologies pratiquées par les cultivateurs établis sur les rives de la Boyne qui construisirent les titanesques monuments funéraires dispersés sur la colline. | Newgrange : pierre
sculptée en façade
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Monasterboice :
grande croix celtique dans le cimetière au pied du
clocher rond
|
À 10 km au nord en pleine campagne nous découvrons le cimetière de la petite église de Monasterboice : trois fort belles croix celtiques y disputent l'intérêt avec un clocher rond haut de 30 m. |
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Notre longue recherche du point de vue de Bernish Rock au-dessus de Newry nous entraîne sur quelques chemins empierrés des plus rustiques, avant de retourner faire le tour de Mourne Mountains. |
Vallée près de
Mourne Mountain
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Mourne Mountain depuis Newcastle |
Côte agréable sous le ciel maintenant complètement dégagé, mais trop fréquentée et trop « domestiquée » à notre goût, sans compter l'important trafic du dimanche. |
Joli coup d'œil sur la baie de Dundrum depuis la route en corniche avant Newcastle, et surtout depuis les ruines du château de Dundrum qui domine la ville du même nom. | Dundrum Castle : panorama |
Strangford : paysan et son âne |
Promenade matinale |
Strangford Lough :
drumlins
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Reste l'environnement pittoresque du Strangford Lough, vaste étendue mi-maritime mi-lacustre aux horizons incertains, semé d’îlots arrondis caractéristiques, les drumlins, qui donne tout son prix à la balade. |
Puis longue route côtière assez plate le long du Strangford Lough dans une campagne riche - quelques cultures, beaucoup d'élevages laitiers - jusqu'à Grey Abbey où nous déjeunons avant un petit tour dans les ruines de l'abbaye cistercienne. | Grey Abbey :
cimetière
|
Nef de Grey Abbey
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Toute une partie des bâtiments a disparu mais ce qui reste est assez bien restauré ou est en voie de l’être, et le cadre de grands arbres et de gazon court, vert et dense, met joliment en valeur les vieilles pierres. |
Peu après nous arrêtons pour de bon sur le stationnement de Mount Stewart, une immense propriété du XVIIIème entourée de magnifiques jardins tracés au début du XXème par Lady Londonderry. Ceux-ci ont été repris en main et admirablement restaurés par le National Trust, l'extraordinaire Fondation pour le Patrimoine anglaise. |
Mount Stewart : Main Hall |
Visite d’abord de la maison,
princière et richement meublée, dont les amples
proportions convenaient à la vie sociale intense de ses
propriétaires riches et célèbres.
|
Longue nuit mais plusieurs réveils successifs au matin : un « voisin » passe sa haie d’ifs irlandais à la tronçonneuse… Lever tardif en fin de compte (vers 10:15) sous un ciel très gris pour gagner le centre de Belfast. La ville manque totalement de cachet : immeubles très quelconques, couleurs ternes, animation clairsemée… Nous stationnons en plein centre devant l’Opéra pour un petit tour à pied qui confirme notre première déception. | Opéra de Belfast |
Belfast : City Hall |
Seul le grand bâtiment classique avec colonnades et coupole qui loge l’Hôtel de ville, tout blanc au milieu d’un carré de gazon vert vif, tranche sur la grisaille environnante. |
Autre surprise : quasiment un magasin sur deux le long des trottoirs du centre est un bar, un pub ou un restaurant ! J’en compte 5 en ligne encadrant le fameux Crown Liquor Saloon, prototype du genre (et propriété du National Trust !). | Belfast : Crown Liquor Saloon |
Belfast : fresques et banderoles nationalistes de l'UVF |
Déçus et un peu frustrés nous ne nous attardons pas et prenons la route du nord, non sans observer dans les faubourgs pauvres de grandes affiches et fresques murales faisant l’apologie de l’UVF, l’Ulster Volunteers Force, sorte de milice nationaliste et orangiste en guerre ouverte avec l’IRA républicaine et tout aussi agressive. Ambiance plutôt tendue dans ces quartiers chauds où quelques pompiers sous escorte policière s’emploie à étouffer les restes d’un incendie de toute évidence criminel dans des bâtiments saccagés. |
La route côtière très habitée
nous mène à Carrickfergus, dont le château-fort
anglo-normand construit vers 1180 par John de Courcy
et très semblable à ceux d'Edward II au Pays de Galles,
garde l’entrée du Belfast Lough depuis l’époque médiévale.
J’en parcours en tous sens tours, chemins de ronde et donjon
après avoir longuement cherché avec Monique un moyen de
rejoindre par téléphone Juliette à Montréal, notre carte
d’appel mondial Primus ne semblant pas fonctionner. Lorsque je la rejoins dans l’Aigle sur le stationnement au pied du château elle se montre très heureuse d’avoir pu finalement parler tout à loisir à notre fille laissée au travail mais confortablement installée avec sa chatte dans notre appartement. |
Carrickfergus : le
château médiéval anglo-normand
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Cushendun Bay
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Un détour à l’intérieur des terres nous mène dans la jolie vallée de Glenariff. Nous hésitons à passer la nuit sur ses hauteurs d’où l’on aperçoit les côtes d’Écosse (Mull of Kyntire) sous un ciel maintenant dégagé. Nous préférons regagner la côte pour nous arrêter un peu plus loin, sur le petit stationnement des ruines de l’église de Layd. Ses restes architecturaux sont mineurs mais ils occupent un site romantique en haut d’une falaise au-dessus de la mer, offrant un large panorama sur Garron Point, et surtout nous garantissent une paix royale… |
La petite route côtière à flanc de colline nous emmène au pittoresque village de Cushendun dont plusieurs bâtiments ont été construits dans un style italien par l’architecte de Port Meryon, au Pays de Galles | Jean-Paul devant
Runabay Head
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Depuis Torr Head, la vue sur Fair Head et l'île de Rathlin |
Le beau temps nous incite à explorer plus à fond la Baie de Murlough. Nous grimpons d’abord sur le promontoire de Torr Head d’où la vue s’étend largement sur le détroit séparant l’Irlande de la côte écossaise. |
Puis une forte descente nous mène à la plage de sable de Murlough Strand nichée dans les rochers, | La plage sableuse de Murlough Bay nichée dans les rochers |
Fair Head au delà des
rochers écumants
|
avant de longer le chemin de crête sur la falaise jusqu’à Fair Head qui s’avance en promontoire au-dessus de Rathlin Sound et de son île renommée pour ses colonies d’oiseaux. Le temps est clair et la visibilité superbe. |
Redescendant jusqu’au village de pêcheur de Ballycastle, nous faisons provision de cartes postales et d’épicerie dans les petits magasins bordant le quai d’où s’étale une jolie vue sur le bassin du port. | Le petit port de Ballycastle |
Carrick-a-rede :
panorama sur le cap, l'îlot et la passerelle
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Peu après c’est Carrick-a-rede Rope Bridge où un pont de singe relie un îlot à la rive abrupte. |
Carrick-a-rede et la passerelle |
Autre vue de la passerelle de Carrick-a-rede |
Sur la passerelle |
Monique très impressionnée renonce à s’engager sur la passerelle branlante et m’observe de loin faire la traversée finalement peu vertigineuse. | La passerelle
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Nous allons traîner ensuite un moment autour du bassin du minuscule port de pêche de Ballintoy qui offre toutes sortes de sujets pittoresques pour ma caméra. | Le petit port de Ballintoy |
White Park Bay
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Puis la route longe les longues plages de White Park où un nombre inhabituel d’estivants en maillot prennent le soleil sur le sable et se risquent dans les eaux fraîches de l’Atlantique Nord. |
Dans le soir qui descend nous finissons par atteindre Giant’s Causeway, la fameuse Chaussée des Géants dont tout l’espace a été acquis par le National Trust qui en assure la préservation. |
Giant Causeway au
coucher du soleil
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Il est passé 19:00 et la navette qui relie le centre d’accueil aux premières formations géologiques prismatiques a cessé ses trajets depuis longtemps. Il ne nous reste qu’à nous lancer à pied dans la longue descente jusqu’à Causeway Head en espérant arriver à temps pour voir le soleil se coucher sur la mer et sur les rochers aux formes caractéristiques. |
Ciel clair au réveil, qui se dégage de plus en plus, ce qui nous décide à regagner Giant Causeway par le chemin côtier qui longe le haut des falaises. Nous abandonnons donc notre Aigle dûment cadenassé sur le stationnement désert devant la tour en ruine, chaussons nos souliers de marche et en route pour une superbe balade de 8 km qui offre toute une suite de panoramas magnifiques sur les falaises tombant à pic dans la mer. | Giant Causeway : le cap |
Nombreuses pauses photos et vidéo tant pour tenter de fixer le souvenir des paysages que celui de la flore particulièrement abondante et éclatante, tout le long du sentier fort bien aménagé par le National Trust. Cris des oiseaux de mer nichés sur la falaise, roulement des vagues se brisant sur les rochers ou les récifs 100 mètres plus bas… c’est la grande paix, d’autant plus que nous ne croisons personne sur les 6 premiers kilomètres. |
Le grand soleil qui s’est
maintenant complètement établi ne tarde pas à nous
rougir la peau, et c’est les jambes un peu lourdes que
nous finissons par atteindre le centre d’accueil de la
Chaussée, après toute une série de vues plongeantes sur
les formations géologiques caractéristiques du rivage et
de la côte. Nous pouvons alors fouler de près cette
étonnante curiosité géologique et errer un peu sur les
rochers prismatiques baignés par l'Océan. Deux jeunes français avec lesquels nous engageons la conversation en attendant le bus - qui tarde à arriver - nous proposent gentiment de nous raccompagner dans leur Renault 4 jusqu’à notre Aigle. |
Fourbus, brûlés par le soleil, affamés par l’exercice et le grand air, nous faisons la pause en tout confort, avant de poursuivre notre exploration de la route côtière. Nous renonçons à visiter la distillerie de whiskey de Bushmills - visite déjà effectuée en Écosse il y a quelques années - mais faisons un long arrêt devant le site exceptionnel de Dunluce Castle dont les ruines monumentales surgissent au détour d’un virage et occupent un piton décroché de la falaise. Malheureusement des travaux de consolidation en interdisent l’accès. | Dunluce Castle sur son rocher |
Les falaises blanches de White Rocks dorées par la lumière du soir |
Depuis un belvédère un peu plus loin beau point de vue sur la longue plage de sable doré de Portrush et les falaises de craie blanche de White Rock. En revanche la traversée des deux stations balnéaires très achalandées de Portstewart et de Coleraine nous heurte par sa laideur, son aspect vulgaire et sa foule grégaire. |
Détour par des routes de campagne jusqu’à l’agréable domaine de Beuvarden dont nous apprécions particulièrement les jardins clos, soignés et florissants mais sans affectation, et le Woodland Pond ("étang boisé") créé en 1850 mais repris en main depuis peu, orné principalement d’une belle collection de plantes et fleurs sauvages. | Porte de Beuvarden Garden |
Bishop's Gate à
l'entrée du jardin géré par le National Trust
|
La fatigue qui se fait sentir nous amène à faire une autre pause et une collation avant de reprendre la route côtière jusqu’à Downhill. L’excentrique évêque de Derry y a élevé en 1772 plusieurs bâtiments dont on peut visiter les ruines. La jolie Bishop’s Gate donne accès à un autre charmant jardin fleuri du National Trust... |
...puis, au milieu d’un grand champ dénudé, à Downhill Castle, brûlé 1851 et dont il ne reste que la façade, et surtout au Mussenden Temple, une élégante adaptation du Temple de Vesta à Tivoli. Sous un ciel de plus en plus gris le petit édifice rond vaut le coup d’œil mais plus encore la vue splendide qui se déploie sur la plage, l’estuaire de la rivière Bann et la rive sud-est de la péninsule d’Inishowen, puisque sa rotonde classique surplombe la falaise. Retour à travers champs, entre vaches et moutons qui, tout occupés à tondre l’herbe drue, prêtent fort peu d’attention aux rares visiteurs. | Mussenden Temple |
Magilligan Strand
qui s’avance dans le Lough Foyle
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Nous finissons par grimper quelques kilomètres plus loin jusqu’au belvédère de Gortmore où, dans la nuit qui descend, nous installons notre bivouac en vue de la longue langue de sable de Magilligan Strand qui s’avance dans le Lough Foyle jusqu’à le barrer presque complètement, avec en toile de fond les hauteurs de la presqu'île d'Inishowen. |
Vendredi 19 juillet 2002 : de GORTMORE à MALIN HEAD (142 km)
Lever tard sous une pluie triste qui noie le
paysage dans la grisaille. En redescendant vers Limavady
j’aperçois un vendeur de pneus Michelin. Devis, discussion (!)
dans un anglo-irlandais très approximatif, et après examen de la
marchandise proposée, la décision est bientôt prise : nous
remplaçons les 2 pneus achetés à Nabeul en Tunisie en février 97
qui sont usés très irrégulièrement et dont l’un montre une bosse
inquiétante.
Une demi-heure plus tard nous entrons dans Londonderry. Ville triste, sombre, mais surtout atmosphère tendue. Guère de monuments attirants en dehors de la cathédrale St Columba près de laquelle nous stationnons, à l’extérieur des remparts. Un peu partout des graffiti, de hautes barrières de grillages, des tours de guet aux vitres blindées et des caméras de surveillance… On ne se sent guère en sécurité ici ! Je me contente donc d’une visite rapide de la cathédrale, de style gothique perpendiculaire assez réussi, puis d’un bref détour vers le Diamond, la place centrale du vieux Derry, sans grand style, avant de remonter Bishop’s Street et de regagner l’Aigle en passant sous Bishop Gate. Monique s’y est barricadée en m’y attendant, poursuivant la lecture d’un des nombreux romans emportés pour les circonstances. | Cathédrale de
Londonderry
|
Sur la petite route
vers Malin
|
Retour à Moville par une petite route rurale étroite et tortueuse qui nous emmène, à petite vitesse, jusqu’au village de Malin surtout remarquable par son long pont de pierre aux arches étroites lancé au-dessus de la rivière peu avant qu’elle se jette dans Trawbreaga Bay. |
Une autre route encore plus étroite nous entraîne ensuite sur les hauts, ponctuée de plusieurs belvédères magnifiques donnant sur les collines de l’intérieur, la vaste plage de sable où viennent mourir les grandes lames de l’Atlantique nord, et la suite de baies et de caps qui s’étendent au loin dans l’ouest bleuté. | Inishowen Head |
Malin Head
|
Arrêtés sur l’un de ces belvédères tourné vers le nord et vers les hauteurs du Cap Malin enfin en vue, dans un vent de plus en plus intense, nous sommes rejoints par un jeune français - Sébastien - qui découvre seul l’Irlande au volant de son LT 35 fort semblable au nôtre, quoique beaucoup plus sommairement aménagé. |
Nous sympathisons en regardant le soleil se coucher sur le grandiose panorama. Nous partageons le souper en vidant une bouteille de Merlot avec lui et passons la soirée à échanger à propos du pays, de voyages, des différences de mentalité entre la France et le Québec, de camping-car, de perspectives sur le boulot - il est éducateur - pour enfin nous coucher fort tard vers 2:00… | La lande sur Malin Head en soirée |
Bivouac à Malin Head au matin |
Un vent formidable a soufflé toute la nuit, secouant le camion et sifflant dans ses superstructures, ce qui ne nous a pas empêchés de bien - et longtemps - dormir. Ciel clair et presque totalement dégagé vers 10:00 lorsque nous nous dirigeons enfin vers l’extrême point nord de l’Irlande, ce Malin Head d’une saisissante beauté. |
Mais nous ne nous attardons guère au pied de la tour matérialisant le point géodésique malgré le beau point de vue sur la côte rocheuse, les récifs blanchis par les vagues et la grande lumière, car le vent toujours soufflant en force nous refroidit trop vite ! | Jean-Paul devant
Malin Head
|
Anse de Malin
Head
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Je préfère traîner un peu devant le petit port puis autour de la vieille église de Malin Head, point de vue tout aussi charmants à défaut d’être grandioses mais beaucoup moins réfrigérants ! |
Longue route de retour ensuite par la côte ouest de la péninsule d’Inishowen qui nous donne quantité d’autres occasions d’admirer l’étendue marine du Louggh Swilly, d’autant que l’étroitesse et les sinuosités des routes nous laissent tout le temps de contempler les vastes horizons et les reliefs de la côte. | Plage de Portsalon
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Grianan of Alleach
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Nous passons ensuite Fahan sans voir trace de la croix celtique annoncée par le Guide Vert, avant de monter un peu plus loin la côte raide menant à l’ancien fort circulaire (IIIème ap. J.C) du Grianan of Aileach. Architecture massive quoique fort simple (couronnes de pierres concentriques formant rempart avec une simple porte percée dans le bas). |
Mais depuis le chemin de ronde s’étend une extraordinaire panorama circulaire à 360º sur Inishowen, le Lough Swilly parcouru cet après-midi et le Lough Foyle visité hier, Londonderry dans le lointain et les vertes collines d’Irlande, cultures et près bordés de haies au sud. | Depuis le Grianan of Alleagh vue sur Inishowen |
Lande dans Glenveagh
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La contrée devient ensuite beaucoup plus sauvage et, par un dédale de toutes petites routes, nous gagnons en soirées les grandes tourbières et les paysages semi-désertiques du Parc national de Glenveagh, un domaine de 10 000 hectares créé par un Américain au début du XIXème, dont nous visiterons demain le château. |
Bivouac en soirée sur le stationnement désert, à l’extrémité du lac. | Lac de Glenveagh |
Entrée du manoir de
Glenveagh
|
Temps variable aujourd’hui, alternant quelques percées de soleil avec un plafond bouché, jusqu’à ce qu’une bruine persistante s’installe en soirée. |
La visite du château, un « manoir médiéval » comme aimait en recréer la riche bourgeoisie du XIXème, n’en est guère affectée, d’autant plus que le mobilier et le décor en apparaissent sans originalité ni valeur particulière. | Glenveagh : Drawing
Room
|
Glenveagh : retour à
travers le Walled Garden
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En revanche les nombreux jardins, aménagés avec beaucoup de goût sur la pente derrière la maison par le dernier propriétaire (1937-1983) également américain, pâtissent de l’avarice du soleil : leurs splendides bordures, les fleurs éclatantes un peu partout présentes sur les arbustes, et même la variété des verts des feuillages et des greens ne donnent tous leurs effets que lorsque avivés par sa chaude lumière. |
Nous parcourons à loisir d’abord le
vaste jardin clos où de haies miniatures en buis encadrent
six grands parterres carrés tandis que de larges bordures
florissantes garnissent les murs qui l’encadrent.
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Glenveagh : Jean-Paul
dans l'allée du Walled Garden
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Monique dans l'allée
du Walled Garden de Glenveagh
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Alentour, magnifique décor de grands arbres, murs et tours en granit gris du château, montagnes aux pentes rousses au-delà. Puis nous passons au jardin des Roses, plus intime sur une terrasse au-dessus, |
et enfin à une suite d’enclos fleuris qui traverse la Pelouse circulaire avant de franchir une grille menant à un petit belvédère donnant sur la perspective du Lough Veagh. | Glenveagh : vue sur
le lac depuis la tour
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Glenveagh : Jean-Paul
dans les Pleasure Grounds
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Remontant ensuite sur le vaste terrain boisé aménagé au nord, nous faisons un large tour des Pleasure Grounds, un joli parc à l’anglaise avec ruisseau, plantation de rhodos et brillantes plates bandes entourant un superbe green parfaitement tondu. |
Glenveagh : hibiscus
et arums dans les Pleasure Grounds
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Glenveagh : Pleasure Grounds depuis le boisé et ses rhododendrons |
Décidément ces grands jardins construits de toutes pièces en suivant les mêmes principes qu’à Inveriewe (Écosse) - une large ceinture de pins faisant écran à un climat trop rude - sont tous aussi beaux et étonnants ! | Glenveagh : le
château et le lac
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Glenveagh : le Walled
Garden en quittant
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Retour au stationnement du Centre d’accueil par la navette, achat de quelques cartes postales puis pique-nique dans l’Aigle avant de reprendre la route. |
Sauvage et défoncée, elle contourne la pyramide tronquée du Mont Errigal en longeant une suite de lac, dans un paysage désertique de landes à bruyères, de tourbières et de fondrières humides. On n’aperçoit même plus de moutons dans ces étendues désolées qui font penser aux Highlands ou aux hautes terres de Norvège. | Mount Errigal
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Baie et plage de
Gortahock
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Nous atteignons la mer à Gortahork, au bord d’une vaste lagune offrant d’immenses plages de sable séduisantes mais tellement fraîches… |
Commence alors une longue et pénible route côtière offrant pourtant de jolis points de vue sur les falaises, entrecoupée de villages aux petites maisons typiques - quoique neuves pour la plupart, ce qui nous surprend : d’où vient cette soudaine opulence dans un pays par ailleurs quasi désertique ? | Péninsule des Rosses
: Donegal
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Quai de Portnoo
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Fatigués par les cahots et les virages incessants de cette chaussée d’un autre âge, nous coupons court à la péninsule des Rosses, et gagnons enfin sous la pluie la petite station balnéaire de Naran. Un grand « No overnight parking » est affiché en grosses lettres rouges près de la plage - et du terrain de camping… Nous poussons jusqu’au petit port voisin de Portnoo où nous stationnons tout près du môle, les roues avant sur les rochers du rivage, dans le vent et dans la pluie. |
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