Décembre 2021 - Janvier 2022

Blason de la
                Corse

CORSE


Jean-Paul MOUREZ
en solo à bord de l'Exsis

(2 242 km)



3. de CAURIA (Sartène) à CARGÈSE


44 638 Mardi 11 janvier 2022 : de CAURIA à ZOZA (85 km)

Soleil à nouveau ce matin ! Pourvu que ça dure… Je me lève dès 7:00. Incapable de localiser le site archéologique but de mon excursion, j'y renonce et fais demi-tour. Je quitte donc mon bivouac en revenant en arrière sur la route épouvantablement défoncée. Impossible de dépasser les 20 km/h en zigzagant entre les trous. Par chance je rencontre presque aussitôt une femme habitant la maison voisine qui prend sa marche matinale. Elle compatit avec moi sur l'état de la route, m'apprend que j'étais sur le bon chemin, qu'il reste environs 3 km à parcourir pour arriver au Site des mégalithes de Cauria.

Remerciements reconnaissants à mon informatrice, autre demi-tour et après quelques minutes encore de supplice je stationne enfin devant le panneau indiquant le début de la balade à travers champs.
Cauri-promenade-megalithique-carte
Les 3 sites mégalithiques de la promenade sur le Plateau de Cauria

Prairies en allant vers Stantari
Prairies en allant vers I Stantari
Le paysage est très agréable (prairies très vertes encadrées par des montagnes aux rochers rougeâtres empilés comme en équilibre). La petite marche de 3 km qui me fera parcourir le circuit des 3 sites est bienvenue.

D'abord l'alignement de Stantari, dont quelques unes de ses pierres portent gravées la tête et l'épée d'un hypothétique guerrier.

Cauria-alignement-de-Stantari
Cauria : alignement de Stantari, sur fond de  Punta di U Grecu
Cauria-alignement-de-Stantari stèles de
                    guerriers
Alignement de Stantari : stèles de guerriers

Cauria-alignement-de-Stantari
Cauria : alignement de Stantari

SITE DE CAURIA - ALIGNEMENT DE I STANTARI

(affiche sur le site)


HISTORIQUE
Le site a été visité par Prosper Mérimée* en 1839 mais, c’est seulement entre 1964 et 1968 que Roger Grosjean** mit au jour, et restitua cet alignement tel que vous le voyez aujourd'hui. Il dégage, redresse, replante des monolithes pour constituer 2 files parallèles orientées nord/sud, de 11 menhirs, statues-menhirs et stèles.
En 1975, cet alignement est classé Monument historique. En 1992, il est acquis par la Collectivité territoriale de Corse.
En 1994, dans le cadre de la valorisation du site par la CTC, débutent des fouilles archéologiques dirigées par André D'Anna***. Ces travaux concernent d’abord l'alignement de Rinaghju (à 400 m au sud) puis celui d’I Stantari, à partir de 2001.

DESCRIPTION
Actuellement Le site comporte plus d’une centaine de monolithes et fragments dont la majorité est couchée, sous la surface du sol. Ces pierres, essentiellement en granite, ont été extraites d’affleurements rocheux distants de quelques centaines de mètres. Dans l’état actuel de nos connaissances l’on pourrait raconter leur histoire ainsi :
  • 1ère phase : érection au Néolithique moyen (vers 4500 - 4100 ans avant notre ère) de petites stèles de 50 à 80 cm de hauteur ;
  • 2ème phase : construction d’un monument comportant deux files orientées nord-est/sud-ouest. Ce monument semble antérieur à 1500 ans avant notre ère (Age du Bronze moyen)
  • 3ème phase : construction d’un second monument comportant vraisemblablement 3 files orientées nord/sud, intégrant notamment les grandes statues menhirs et Les stèles sculptées. On situe le fonctionnement majeur du site au début de l’âge du Bronze final (entre 1300 et 900 ans avant notre ère). À cette époque le plateau de Cauria était densément habité (sites fortifiés et monuments mégalithiques) ;
  • 4ème phase : le monument se dégrade et tombe en ruine, il serait partiellement détruit entre 200 et 50 ans avant notre ère, pendant la romanisation.
  • Enfin, lors d'activités agricoles modernes, certains monolithes seront remployés dans des murs de clôtures où de bergeries voisines.

LES STATUES-MENHIRS ET LES STÈLES SCULPTÉES
Ces monolithes appartiennent au monument édifié à la fin de l’âge du Bronze. Ils pourraient évoquer des personnages illustres, des guerriers, des chefs de clans...

Les deux statues-menhirs
Elles sont parmi Les plus emblématiques de Corse. Les deux sont similaires quoique de dimensions et de formes différentes.
Leur figuration est double : anthropomorphe et phallique. La face orientée à l’est représente un individu qui porte des attributs guerriers : casque à deux cupules, épée, cuirasse ainsi qu’une forme triangulaire interprétée comme pagne où cache sexe, soutenu par une ceinture. La face orientée à l’ouest présente un phallus en érection, avec des détails anatomiques précis.

Les stèles armées
Trois stèles ont été identifiées mais deux seulement portent des attributs guerriers, aujourd’hui lisibles. Leur figuration humaine n’étant suggérée que par ces attributs : une épée verticale suspendue par un baudrier, sur la face est, la face ouest n'étant pas sculptée.

QUELLE EST LA FONCTION DES ALIGNEMENTS ?
Ils sont généralement orientés nord-sud, la face des menhirs et statues-menhirs tournées à l’est. Ils sont situés sur des voies de passage, à la croisée de chemins, sur des cols ou comme dans le cas d’I Stantari, Rinaghju et Paddaghju.. près de points d’eau et de sources, et peuvent intégrer des sépultures mégalithiques comme ces deux derniers monuments. Leurs fonctions sociale, commémorative, culturelle, symbolique nous échappent mais leur édification illustre une volonté ostentatoire de marquer un territoire, de s’approprier un espace. Leur implantation qui n’a rien d’aléatoire témoignerait aussi de préoccupations matérielles et économiques, liées à la survie d’une société.

En savoir plus : Musée de préhistoire et d'archéologique - Sartè


La promenade à travers champs se poursuit en traversant une zone humide, restes du plan d'eau Pozzu Rossu,  sur le chemin menant à l'alignement de Rinaghju.
Cauria : zone humide en allant vers l'alignement
                  de Rinaghju
Cauria : zone humide (Pozzu Rossu) en allant vers l'alignement de Rinaghju

Les menhirs plus dispersés de Rinaghju apparaissent dans l'ombre d'un petit bois, apparemment dans un désordre plus accusé que ceux d'I Stantari.
Cauria-alignement-de-Rinaghju
Cauria : alignement de Rinaghju
Cauria alignement-de-Rinaghju

SITE DE CAURIA - ALIGNEMENT DE RINAGHJU

(affiche sur le site)
HISTORIQUE

En 1840, Prosper Mérimée* mentionne ce site. Entre 1964 et 1968, Roger Grosjean** inventorie cet alignement qui sera classé Monument historique en 1972. En 1975, Jean Liégeois*** redresse et replante des menhirs (file ouest) et fouille une sépulture ruinée, probablement un coffre, au nord-est, (à votre gauche). En 1992 La Collectivité Territoriale de Corse (CTC) acquiert ce monument.

À partir de 1994 jusqu’à 2000, André D’Anna**** fouille cet alignement, ces recherches étant des études préalables à la valorisation menée par la CTC. Les données issues de ces travaux, ont pour but d’apporter des éléments de réponse sur la datation, la chronologie, l’évolution de ces monuments, sur le lien avec d’autres sites mégalithiques, du Sartenais, et de la Corse, dans un contexte culturel et environnemental.


DESCRIPTION

Cet ensemble de pierres dressées tel que vous le voyez aujourd’hui, d’aspect ruiniforme et apparemment désordonné a subi plusieurs phases d'occupation, de construction, de destruction et d'abandon. Il comprend au moins 170 monolithes.

  • 1ère phase : vers 5700 ans avant notre ère, soit au début du Néolithique (cardial), un petit groupe d’agriculteurs-pasteurs s’installe au bord d’une source, (au pied de l’escarpement en face de vous). Les archéologues ont mis au jour un habitat. Ces hommes n’érigent pas de monolithes.
  • 2ème phase : entre 4500 et 4300 ans avant notre ère (Néolithique moyen), première construction d’un alignement d’une soixantaine de petits menhirs, organisé en 2 files principales, comportant un grand menhir. Dans d’autres régions de Corse, des monuments ont été datés de cette période. Ces datations confirment donc l'apparition en Corse du mégalithisme dans la première moitié du 5ème millénaire.
  • 3ème phase : entre le début du 3ème et la fin du 2ème millénaire (fin du Bronze de Néolithique et début de l’âge du Bronze), à côté du premier monument les hommes en érigent un second comportant 70 grands menhirs organisés en 4 files.

Les constructeurs du 2ème monument ont renversé, étêté, les petits menhirs du premier monument et Les ont parfois utilisés pour caler les bases de leurs menhirs.

        La sépulture au nord-est faisait vraisemblablement partie de cet ensemble. Cette même association se retrouve notamment dans l’alignement de Paddaghju (à 4 km à vol d'oiseau).

Cet alignement a pu être utilisé jusqu’au premier siècle de notre ère, puis a été abandonné. Certains monolithes ont été cassés, détruits, couchés à terre puis remployés plus tard dans des murs parcellaires voisins.


QUELLE EST LA FONCTION DES ALIGNEMENTS ?

Généralement orientés nord-sud, ils sont situés sur des voies de passage, à la croisée de chemins, sur des cols ou comme dans le cas des deux alignements d’I Stantari (à 300 m au sud) et de Paddaghju, près de points d’eau et de sources. I Stantari et Rinaghju ont certainement dû « fonctionner » ensemble à l’âge du Bronze et auraient été implantés de part et d’autre du point d’eau : le « Pozzu Rossu » qui, à l’époque, devait être plus étendu.

Leurs fonctions sociale, commémorative, culturelle, symbolique nous échappent mais leur édification illustre une puissante volonté ostentatoire de marquer un territoire, de s'approprier un espace. Leur implantation qui n’a rien d’aléatoire témoignerait aussi de préoccupations matérielles et économiques, liées à la survie d’une société.


Alignement de Rinaghju : cercle de menhirs
Alignement de Rinaghju : cercle de menhirs au pied de la Punta di u Grecu

Enfin, sur le chemin du retour, se dresse le dolmen de Funtanaccia tout nu dans son enclos circulaire. Celui-ci suggère peut-être le pourtour du tumulus qui a dû le recouvrir il y a bien longtemps...

SITE DE CAURIA - DOLMEN DE FUNTANACCIA

(notice)

Les dolmens sont des sépultures collectives construites dès la fin du Néolithique et utilisées parfois jusqu’au Haut Moyen-Age. On a inventorié une cinquantaine de dolmens en Corse, répartis principalement dans le sud de l’île. Naguère, ce dolmen était qualifié de : «A stazzona di u Diavulu» (la forge du Diable). Il est situé à 300 m de l'alignement d’I Stantari et à 400 m de celui de Rinaghju.

HISTORIQUE

Décrit par Prosper Mérimée en 1840, c’est le dolmen le plus emblématique. Classé Monument historique depuis 1900, il appartient à la Collectivité de Corse depuis 2006. Au lieu-dit « Funtanaccia » fut bâtie une nécropole d’au moins 3 dolmens dont seul subsiste celui-ci.

DESCRIPTION

Ouvert au sud-est, il est composé de 6 dalles de granite qui ont été régularisées. La couverture mesure 3,40 m de long sur 2,90 m de large. De la fermeture du tombeau il ne reste qu’un fragment. On ignore si le monument était recouvert d’un tumulus La chambre funéraire mesure 2,60 m de long, 1,60 m de large et 1,80 m de hauteur.  Ce dolmen pèse environ 15 tonnes !
Le matériel funéraire qu’il pouvait contenir : ossements humains, poteries, armes, parures, offrandes diverses.., n’est pas connu, la chambre ayant été complètement vidée à une époque indéterminée.

Cauria-Dolmen-de-Funtanaccia
Cauria : Dolmen de Funtanaccia, côté entrée

Cauria Dolmen de Funtanaccia
                         Cauria : Dolmen de Funtanaccia vu de dos

Mis en appétit par ces découvertes, je remonte à Sartène sur la même petite route épouvantable qui accuse les bruits multiples affectant la suspension de mon vieux camion (bientôt 187 000 km !). C'est décidé, il faudra que je fasse réviser tout le système en rentrant à Caen...
Arrivee-sur-Sartene-par-le-sud
Arrivée sur Sartène par le sud

L'espace est rare dans la petite ville à flanc de montagne, et le stationnement difficile, d'autant plus que le musée tout neuf ne dispose même pas d'un parking… Je laisse l'Exsis sur la rue, tassé au maximum contre le parapet, et consacre l'heure qui suit à examiner les vitrines qui exposent l'histoire de la Corse en partant de la fin de la dernière glaciation, suite à laquelle commença son peuplement. (8 000 av. n.è.). Sartene-les-toits-et-la-baie-depuis-le-musee
Les toits et la baie de Sartène depuis la terrasse du musée

Beaucoup de tessons, de «pots de terre cassés» et de petits cailloux (pierres taillées en flèches et outils) marquent l'évolution habituelle, de la chasse et la cueillette à l'élevage et à la culture.

Musée archéologique de Sartène : pointes de flèches en
            rhyolite (I Calanchi Sapar'Alta, Sollacaro)
Musée archéologique de Sartène : pointes de flèches en rhyolite (I Calanchi Sapar'Alta, Sollacaro)

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Musée archéologique de Sartène : lame de hache à rebord en bronze et son moule

Musée archéologique de Sartène :moule de lame de hache
            à rebord

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                  height=
Musée archéologique de Sartène : bracelets en serpentine (San Ciprianu)
Sédentarisation, mais aussi constructions, cultes, et traces de quelques activités culturelles. La présentation est nette, les fiches pas trop techniques, j'aurais aimé - comme presque toujours - davantage de dessins représentant ces ancêtres en action, quelques bonnes vidéos, un peu de mise en scène pour rendre plus présent ces prédécesseurs et stimuler l'imagination du visiteur.

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Musée archéologique de Sartène : stèle Cauria VIII (Stantari)
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Musée archéologique de Sartène : stèle de guerrier (Petra-Pinzuta)

En sortant, le préposé à l'accueil me suggère d'aller visiter le casteddu de Cucuruzzu, un peu au nord de Sartène; je m'y rendrai après le parcours d'une autre petite route panoramique descendant jusqu'au village de Campomoro (D21) puis en suivant la côte en direction de Propriano. Jolie route de campagne très sinueuse le long de laquelle je tente de repérer le monument d'Alo Bisucce (un autre casteddu), sans voir aucune indication le long de la route.

En revanche je découvre fortuitement une chapelle de style pisan (San Giovanni Battista, du XIIe) au milieu des champs et environnée de vaches. Mais là encore aucune indication (pas même de nom) ni chemin d'accès… Elle n'est pas même mentionnée dans le G.V., et c'est suite à une bonne recherche sur Google Map que je finis par l'identifier... Grossa-chapelle-San-Giovanni-Battista-sur-la-D21-pres-Alo-Bisucce
Près d'Alo Bisucce à Grossa : chapelle San-Giovanni-Battista depuis la D21

Grossa-chapelle-San-Giovanni-Battista-(XIIe)-sur-la-D21-pres-Alo-Bisucce
Grossa : chapelle San-Giovanni-Battista (XIIe) désaffectée depuis longtemps

Campomoro-la-plage-et-la-tour
Campomoro : la plage et la tour
Au bout de la route, la petite station balnéaire de Campomoro, assez bien préservée, est absolument déserte. À part sa belle plage de sable et le coup d’œil sur la tour, pas grand chose à signaler, sinon la multitude de panneaux interdisant le stationnement des camping-cars… (une manie en Corse !)
Je poursuivrai mon tour en longeant le beau golfe de Valinco par la D121 qui me ramène à la T40, peu avant Propriano. Je reviens un peu en arrière vers Sartène, puis bifurque au nord sur la D69 puis la D268 vers Olmiccia où l'on m'a signalé un fontaine dont l'eau fait les délices de la région. Bonne occasion de renouveler mon stock d'eau potable en bouteille et de mettre à niveau mon réservoir. Opération un peu longue mais sans problème dans la lumière qui baisse. Olmiccia : la-fontaine
Olmiccia : la fontaine en bord de route sur laquelle je fais le plein

Je continue à suivre les virages de la petite route qui grimpe dans la montagne, avec l'intention d'aller dormir sur le stationnement du site de Cucuruzzu. Mais en passant le village suivant de Zoza, avisant un vaste parking vide et bien plat, je préfère y poser mon bivouac tant qu'il fait encore jour.

Il est 17:30, la nuit ne tardera guère à tomber. Je tire presque aussitôt les stores et démarre le chauffage car il semble que la nuit sera fraîche. Routines habituelles et coucher dans un grand silence à 22:00.


44 723 Mercredi 12 janvier 2022 : de ZOZA à OLMETO (81 km)

Bivouac à
                  Zoza
Bivouac à Zoza sur une esplanade à la sortie du village
Lever à 8:00, sans voir le soleil caché derrière les montagnes qui ferment la vallée à l'est. Il finira par apparaître lorsque je prends la route en continuant de monter vers Sorbollano.
Hélas, surpris de ne voir aucun panneau indiquant Cucurazzu, je m'aperçois bientôt que je ne suis pas sur la bonne route, ayant mal situé le site archéologique sur la carte. Il se trouve sur une petite route parallèle que je dois aller reprendre une dizaine de kilomètres plus bas à Olmiccia, où j'ai fait le plein d'eau hier soir…

La D268 n'est guère différente de la D20, aussi tortueuse et montante, jusqu'à l'embranchement encore plus étroit sur le chemin vicinal qui prend à gauche 5 kilomètres après Mela. Le train arrière du camion est encore affecté par les coups et chocs sourds occasionnés par les virages un peu sec, et je suis un peu inquiet de ne pas arriver à identifier la source de ce problème ; il faudra que je repasse au garage de Corte puisque ce «symptôme» se manifeste seulement depuis le changement de la lame de suspension…
Olmiccia : le coeur ancien du village
Olmiccia : le cœur ancien du village aux premiers rayons du soleil hivernal
Cuccuruzzu : chemin en sous bois vers Capula
Cucuruzzu : chemin en sous bois vers Capula et le casteddu
Comme précédemment à Cauria le site se fait longuement attendre, d'autant plus qu'aucun panneau ne vient confirmer que je suis sur la bonne route. Un vaste stationnement vide m'attend au bout du chemin, il aurait parfaitement fait l'affaire comme bivouac, largement exposé au soleil celui-là... J'y laisse l'Exsis dûment cadenassé et, passant la billetterie évidement fermée, pousse la barrière et m'engage dans le joli sentier en sous-bois qui descend jusqu'au casteddu


CUCURUZZU, FORTERESSE DE L'AGE DU BRONZE

(affiche sur le site)


HISTORIQUE

C'est en 1959 que l'archéologue Roger Grosjean mentionne le site de Cucuruzzu. En 1963, il dégage et réalise la première fouille du site alors recouvert d'une dense végétation. Dès 1964, les recherches seront reprises par François de Lanfranchi qui les poursuivra jusque dans Les années 1990 ; ses travaux ont mis en lumière l'important patrimoine archéologique de l'Alta Rocca.

Le site, acquis en 1975 par l'État, classé en 1982 au titre des monuments historiques puis inscrit sur la liste des 100 sites historiques d'intérêts communs aux pays de La Méditerranée, est transféré à la Collectivité territoriale de Corse en 2003.

Érigé par les hommes de l'âge du Bronze sur un chaos granitique dominant le versant nord du plateau de Livia, il surplombe nombre de terrasses naturelles, des abris sous-roches et des vestiges d'habitation (ces vestiges ne sont pas accessibles). (IIe-Ier millénaires avant notre ère)

ARCHITECTURE ET FONCTION

Cet édifice fait partie de la vingtaine de casteddi découverts sur l'île, essentiellement en Corse méridionale. Ces monuments, véritables points de contrôle des territoires, peuvent avoir plusieurs fonctions, à la fois refuges ou encore greniers communautaires.

L'accès principal du casteddu est aménagé au centre d'une imposante boule de granit éclatée. De part et d'autre de l'entrée, 2 murs mégalithiques, hauts de 5 m et larges de 3 m, constituent une enceinte de forme curviligne aux contours arrondis dans lesquels ont été aménagées des loges dont l'utilisation pourrait être liée à des activités quotidiennes telles que la poterie, le tissage ou la boucherie. De même, à gauche de l'entrée, des diverticules dans lesquels ont été trouvés des fragments de céramique et des restes de graines, devaient servir de lieu de stockage.

Les vestiges découverts sont conservés et présentés au musée de l'Alta Rocca à Livia.

Au nord-est du monument s'élève la Torra, tour de 8 m de diam. conservée sur 4 à 5 m de hauteur. Cette construction devait autrefois comporter un étage ; elle possédait un couloir flanqué de diverticules et d'une pièce principale. Sa destination et son fonctionnement restent incertains : sans doute doit-on y voir un lieu de stockage et de transformations des denrées. Une partie de sa couverture a été conservée. Ce type de construction est à rapprocher des architectures de la même période du bassin méditerranéen, plus particulièrement des Nuraghi sardes.

En poursuivant votre promenade vous accéderez au site médiéval du casteddu de Capula. Une statue-menhir de l'âge du Bronze se trouve au pied de l'édifice. 2 fragments ont été réemployés à la base du mur médiéval.


C'est une bonne marche matinale dans laquelle je me suis embarqué, et là encore le chemin emprunte souvent des allures de lit de torrent barré de hautes «marches», en fait des roches barrant le cours naturel de l'eau lorsqu'elle est présente. Une demi-heure passe, et j'arrive devant la butte rocheuse où les hommes du Bronze ont aménagé leur place forte autour d'un amas d'énormes blocs. Mur exterieur de Cucuruzzu
Mur extérieur du casteddu de Cucuruzzu
Cucuruzzu : l'escalier d'accès
Cucuruzzu : l'escalier d'accès
Un rempart circulaire haut de 4 ou 5 mètres bloque le passage entre les rochers, un escalier escalade une brèche dans les rocs entassés. Des anfractuosités dont il est dit qu'elles servaient ou de stockage ou d'atelier ponctuent la face interieure du mur, dominé par la base d'une tour dont il ne reste que le premier étage et son plafond de grosse dalles.

Cucuruzzu : diverticules et anfractuosités dans la
            muraille
Cucuruzzu : diverticules et anfractuosités dans la muraille à l'intérieur de la cour

Cucuruzzu : base et entrée de la torra
Cucuruzzu : base et entrée de la torra

Cucuruzzu : plafond du rez-de-chaussée de la torra
Torra de Cucuruzzu : plafond du rez-de-chaussée en encorbellement

L'accès à la partie supérieure est interdit, tant pour des raisons de sécurité que de préservation du monument. Je fais le tour en tous sens des parties accessibles, et prends quelques photos que je voudrais évocatrices.

Cucuruzzu : muraille et montagnes
Depuis la muraille de Cucuruzzu, les neiges de l'Incudine

Cucuruzzu-Incudine-et-aiguilles-de-Bavella
L'Incudine et les Aiguilles de Bavella depuis Cucuruzzu

Je reprends ensuite le sentier bien délimité dans le sous-bois vers Capula, i.e la chapelle San-Laurenzu et les vestiges du château-fort médiéval des Biancolacci. C'est un autre casteddu, médiéval celui-là, détruit par les Génois au 1249 et dont, en fin de compte, les quelques pans de mur croulants valent à peine le détour.
Capula : base du chateau médiéval des Biancolacci
                  détruit par les Génois
Capula : base du château médiéval des Biancolacci détruit par les Génois
Capula-chapelle-San-Laurenzu-XVIIe
Capula : la chapelle San-Laurenzu reconstruite au XVIIe
De la petite église médiévale du XIIIe qui desservait le hameau au pied de la butte seigneuriale il ne reste quasiment rien, puisque ses pierres ont servi à reconstruire au XVIIe un chapelle des plus sobres dont la porte est fermée.

Je prends donc le chemin du retour vers le parking en parcourant le long du sentier une exposition en plein air consacrée au Moyen-Âge corse. Les panneaux de photographies en couleur bien choisies abordent autant les problème de méthodologie (très peu de documentation conservée, et une tradition orale largement perdue, beaucoup d'habitats ruinés et détruits... ) que le récit d'événements faisant la part large aux conflits entre seigneurs féodaux et les fréquentes révoltes populaires, tant pour s'en affranchir et établir un état plus démocratique que pour lutter contre les hégémonies étrangères (Pise, Gènes, Aragon, etc.). Bref une histoire assez confuse où l'on a donné une large place aux « héros » nationaux… À vue de nez, «l'âme corse» n'a guère changé !

Encore une dizaine de minutes de marche rapide sur le sentier maintenant plat et bien dégagé, et je retrouve l'Exsis qui, bien exposé et réchauffé, a fait son plein d'Ampères. La pause repas (froid) est bienvenue, puis je prends un moment de repos en profitant du calme de cet endroit reculé loin de la circulation et du bruit. J'attaque le carnet de bord de la journée, puis réfléchis à la suite de mon périple puisqu'il me reste encore 16 jours avant de rembarquer pour la France.

Au vu de la lumière qui jaunit, l'après-midi est bien avancé lorsque je me remets en route en visant rattraper la mer vers Propriano. J'en profiterai pour parcourir quelques beaux villages de montagnes recommandés par le G.V. tout en me dirigeant vers Filitosa, une autre fameuse station préhistorique corse.

C'est ainsi que, de retour à Olmiccia par la D268, je redescends jusqu'au Rizzanèse où prend la petite D119 qui s'élève dans les chênes lièges au dessus de la vallée du Baracci vers les maisons d'Arbelllara regroupées sous leur tour de défense carrée. Vues impressionnantes dans la chaude lumière du soir qui anime le granit autrement austère. Arbellara
Arbellara sur sa butte

Tour-d'Arbellara
Tour carrée d'Arbellara

Eglise-d'Arbellara
Église d'Arbellara

Le spectacle continue en poursuivant vers Fuzzà dont les hautes maisons serrées entourent deux anciennes maisons fortes, celles des familles rivales de la nouvelle de Mérimée Colomba. L'héroïne y vécut réellement dans les années 1830, fut au cœur de la vendetta qui fit trois morts et elle y est enterrée.

Fuzza-et-Sta-Maria-Ficanieddda-en-2eme-plan.
Fuzzà et Santa-Maria è Ficanieddda en 2ème plan
Fuzza-tour-de-la-famille-Durazzo
Fuzzà : tour datant de 1548 appartenant aux Durazzo

FUZZÀ : habitat

(notice)


Le village possède un habitat bien conservé du début de l’époque moderne. Deux tours, appartenant à des familles ennemies dont l’histoire tragique a inspiré Prosper Mérimée, se dressent toujours. À Torra Vechja, de la famille Carabelli dont était issue Colomba, est en contrebas de la route. Elle date du XIV siècle. L'autre, de la famille Durazzo, est au bord de la route. Elle porte sur un linteau la date de 1548. On peut remarquer qu'elle a été détruite puis reconstruite comme l’atteste le travail de la pierre.

Le village fut ravagé par les Turcs en 1583. Plusieurs hameaux se trouvent sur la commune. Certains sont abandonnés, comme Ghjilfulù ou Muratu; d’autres sont encore habités comme Burgu et i Martini. Ce dernier fut un site majeur de la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale ; la vallée du Baracci a joué un rôle important durant cette période. Les hameaux et les nombreux édifices de culte de la vallée, comme la Vieille chapelle di a Trinità sous l'habitat médiéval ruiné de Casi Vechji, témoignent d'un peuplement important durant le Moyen Âge.

Fuzza-A-Torra-Vechja-de-la-famillle-Carabelli
Fuzza : A Torra Vechja (XIVe) appartenant à la famille Carabelli

Colomba
(notice)






En 1839, Prosper Mérimée (1803-1870) passe deux mois en Corse en tant qu'inspecteur des Monuments historiques.

«Colomba», sa nouvelle la plus célèbre parue en 1840 dans la revue des Deux Mondes. lui est inspirée par une vendetta qui s'est déroulée dans les années 1830 à Fuzzä en opposant deux des principales familles du village. les Carabelli et les Durazzo. ll rencontra la vraie Colomba., alors âgée de 57 ans qui l'avait fortement impressionné. Cependant, il lui transposa les traits et l’âge de sa fille Murgana que l'on disait très belle.

Il mit en scène deux familles : les della Rebbia et les Baricini. Le père de Colomba a été assassiné par un avocat de la famille Baricini. La jeune femme poussa son frère à la vengeance comme le fit réellement la vraie Colomba qui, elle, perdit son fils dans cette sombre et terrible histoire. Prosper Mérimée contribua avec cette nouvelle à donner une image stéréotypée de la Corse et de ses mœurs. Par la suite. les visiteurs, les écrivains, les touristes, furent fortement marqués par cette image. Ils y recherchèrent les bandits, «rois du maquis» ou du «palais verts» : les histoires. les récits, les articles et même les cartes postales sur ce thème connurent un grand succès.

Colomba devint l'archétype de la femme corse et sa tenue de deuil, austère et dramatique, fut prise pour le costume traditionnel des femmes corses. D'innombrables figurines, statuettes, photographies répandirent l'idée que l'habit des femmes corses était cette tenue et finirent étrangement par en persuader les Corses eux-mêmes en faussant ainsi un pan de leur mémoire collective.

Sta-Maria-e-Ficaniedda
Santa-Maria è Ficaniedda
Je me rendrai encore quelques kilomètres plus haut, à Santa-Maria è Figaniella pour une vue encore plus large sur le Golfe de Valinco embrasé par le soleil couchant.

J'y ferai surtout le tour de son église de style roman pisan du XIIème, en bel appareillage de moellons en granit. Sous son haut clocher assez simple, un remarquable bandeau d'arcatures ceinture la base du toit et porte quelques figures humaines en modillons. Et dire que ce superbe bâtiment semble abandonné ! (porte et fenêtre bouchées par des panneaux cloués).

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Santa-Maria è Ficaniedda : église Santa-Maria-Assunta (XIIe)
St-Maria-e-Ficaniedda : abside de
                  l'église-Santa-Maria-Assunta
St-Maria è Ficaniedda : abside de l'église Santa-Maria-Assunta

St-Maria-e-Ficaniedda-eglise-Sta-Maria-Assunta-XIIeme-facade
Sta-Maria-e-Ficaniedda-eglise-Sta-Maria-Assunta-XIIeme
St-Maria è Ficaniedda : frise de l'église Santa-Maria-Assunta

St-Maria-e-Ficaniedda-eglise-Sta-Maria-Assunta-XIIeme-modillons
St-Maria è Ficaniedda : détail des modillons de l'église Santa-Maria-Assunta

Fozzano-crepuscle-sur-le-golfe-de-Valinco
Fozzano : soleil couchant  sur le golfe de Valinco
Après cette autre incursion montagnarde il ne reste plus qu'à redescendre jusqu'à la mer en suivant la D19 qui offre vers Viggianello quelques panorama intéressants sur le golfe de plus en plus empourpré. Rendu sur la côte je retrouve la T40 à l'est de Propriano dont j'apercevrai à peine les hôtels et restaurants fermés.

J'hésite un peu à reprendre du gasoil : je préférerais garder la jauge au dessus du milieu du cadran, mais crains qu'il soit particulièrement cher ici. Après vérification sur le site https://www.prix-carburants.gouv.fr/, je trouverai un peu mieux à Ajaccio, ainsi que du GPL rare dans le coin… Compromis : je prends 20 l à 1,72 dans une station Total, et ferai les pleins dans les 3 prochains jours, une fois rendu dans la métropole corse.

La nuit est maintenant tombée, mais je ne peux décemment m'arrêter au bord de cette voie à grande circulation. Je fais donc quelques kilomètres à la lueur des phares, puis m'arrête dans le gros village d'Olmeto sur une rue parallèle qui se termine en impasse sur un petit parking bondé devant l'église. Voilà qui devrait m'assurer une nuit tranquille, au moins jusqu'au départ des travailleurs demain matin.


44 801 Jeudi 13 janvier 2022 : d'OLMETO à VERGHIA (66 km)
Ce n'est pas le départ des voitures des résidents, mais plutôt l'arrivée des ouvriers des chantiers voisins, église et hôtel, qui m'a réveillé et suggéré de quitter les lieux. Je me livre quand même à un rapide tour sur la rue pittoresque et à l'intérieur de l'église richement décorée. Olmeto-bivouac-devant-l'eglise-en-chantier
Olmeto : bivouac devant l'église en chantier
Olmeto : tribune et orgue de l'église Ste-Marie
Olmeto : tribune et orgue de l'église Ste-Marie
Nef et autel de l'église Ste-Marie d'Olmeto
Nef et autel de l'église Ste-Marie d'Olmeto
Olmeto
                  : torra (XVIe)
Olmeto : torra (XVIe)
Olmeto-Quartier-Ortale-Haut
Olmeto : Quartier Ortale Haut

Olmeto : façade de l'église au soleil levant
Olmeto : façade de l'église au soleil levant

Un bout de T40 qui continue à grimper dans la montagne me mène à l'embranchement de la D57 vers Filitosa. Un virage n'attend pas l'autre, causant à chaque fois le coup inquiétant sous le plancher… mais le grand ciel uniformément bleu et la campagne riante me font oublier ce souci pourtant permanent.

Toilette et déjeuner sur le grand parking vide du site, au centre du village où le petit bâtiment abritant la billetterie est fermé. Impossible de franchir la haute grille ni de traverser les propriétés voisines qui se jouxtent et forment une clôture privée infranchissable.

Me demandant s'il n'y aurait pas moyen de contourner l'obstacle, je reviens à l'Exsis, branche l'internet et explore sur Google Map satellite les environs du site archéologique aisément repéré. Le plus simple serait de l'aborder par l'arrière, dans la campagne sillonnée de chemins ruraux donnant accès aux champs et pâturages qui entourent les ruines. Filitosa-acces-Google-Map-satellite
Filitosa : accès alternatif (en bleu) au site, découvert avec Google Map satellite

Je repère l'entrée de celui qui me semble le plus favorable, puis me mets en route jusqu'à trouver un espace en bord de la toute petite route près de la barrière en question.

Filitosa-Exisi-stationne-sur-la-petite-route
Filitosa : Exsis stationné sur la petite route

Pas de cadenas, un simple loquet sur la barrière pour empêcher la sortie du bétail… Je parcourrai à peine 500 m sur l'herbe encore glissante de givre - il a dû geler ici cette nuit - et j'aperçois les 5 stèles qui montent la garde au pied du rocher surmonté du petit casteddu. Filitosa : arrivée sur le site
Filitosa : arrivée sur le site

FILITOSA

Site classé monument historique
(Section préhistoire)

Sans égal jusqu'alors en Corse, l'éperon barré de Filitosa est le gisement préhistorique le plus intéressant par l’originalité de ses œuvres d'art et de ses monuments.

L’île prodigue par centaines monuments et sites d'avant l'histoire; Filitosa présente une synthèse de ce qu’il y a de mieux à voir et à connaître de la préhistoire corse.

Les vestiges de plusieurs civilisations, des lointaines époques antérieures à l'écriture en occident, s'y superposent et s'y mêlent à partir du néolithique compris (âge de la pierre polie, antérieur au IIIe  millénaire avant notre ère).

Puis on a reconnu les traces du séjour de la civilisation dite "mégalithique” (du début du IIIe au début du IIe millénaire avant notre ère) avec ses menhirs.

Ensuite les vestiges de la culture terminale de cette civilisation mégalithique, étonnant par la présence du plus gros rassemblement en Europe de statues menhirs, hautes de 2 à 3 mètres et d'un art propre à la Corse: représentation voulue éternelle de chefs guerriers pour la plupart, elles ont été laborieusement taillées dans le granit le plus dur, puis longuement polies (milieu du IIe millénaire avant JC).

Enfin, à l'époque où cette culture artistique mégalithique était à son apogée, débarqua dans l'île une civilisation étrangère, en provenance de la Méditerranée centrale, techniquement plus avancée et mieux armée que les autochtones, constructeurs de forteresses et de grands monuments circulaires. Ces « Torréens » repoussèrent les mégalithiques du sud de la Corse, et s'installèrent entre autres sites, à Filitosa, où ils se sédentarisèrent, construisant un village à l'intérieur de l'éperon et détruisant les statues menhirs dont ils employèrent les tronçons dans l'un de leurs monuments culturels.

Quelques siècles plus tard, vers 1000 avant notre ère, le site de Filitosa fut abandonné par les derniers “Torréens" et le resta pendant 3000 ans, jusqu'en 1955 où il fut authentifié et où commencèrent les fouilles archéologiques. Les travaux de dégagement des habitats "Torréens" sont toujours en cours.

Centre de préhistoire corse
(C.N.R.S. et Ministère des affaires culturelles)


Filitosa-les-steles-dans-la-prairie
Filitosa : les cinq stèles dans la prairie au pied du casteddu
Stèle dns la
                  prairie
Stèle dans la prairie

Filitosa-le-site-archeologique-zoom-sur-l'eperon
Site archéologique de Filitosa : zoom sur l'éperon fortifié

Je m'essouffle un peu en me hissant sur les pierres mal ajustées de l'escalier raide et grossier menant au plateau. Filitosa-prairie-depuis-l'eperon-fortifie
Filitosa : la prairie et ses statues depuis l'éperon fortifié
Filitosa : l"éperon fortifié
Filitosa : l'éperon fortifié
Pas de surprise en ce qui concerne la petite fortification accotée sur de gros taffoni empilés.

Mais en arrière un monument circulaire, entouré de restes de stèles brisées figurant des guerriers portant épée, est nettement plus original. Plusieurs belles stèles, complètes et bien dessinées, garnissent sa couronne, suggérant un monument commémoratif, ou cultuel, ou peut-être les deux ?

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Filitosa : monument principal (cultuel) (Filitosa IX)
Filitosa-stele
Filitosa : stèle

Filitosa Filitosa-monument-cultuel
Filitosa : le monument cultuel et ses statues

Filitosa-stele


Plus loin, un chaos disparaissant dans la mousse et sous l'ombre des chênes est supposé avoir abrité un hameau de huttes où l'on a découvert quelques pièces de vaisselle… Filitosa-quartier-des-habitations
Filitosa : le quartier des habitations

Au total une belle redécouverte pour moi, qui me souvenait vaguement être passé à Filitosa lors de notre premier voyage avec l'Aigle à Noël 1991. Trente ans déjà…

Filitosa-le-dinosaure
Filitosa : le «dinosaure» dans la carrière
Je refais le chemin en sens inverse, ajoutant à mon parcours agreste une incursion à la carrière d'où furent extraite les pierres, et au pied d'un énorme bloc suggérant vaguement la forme d'un dinosaure. En refermant la barrière derrière moi, ni vu ni connu, je regagne la route et l'Exsis qui a continué de recharger ses batteries en plein soleil.
Coup d’œil au guide et à l'atlas. Je me rapprocherai d'Ajaccio en longeant la côte, un liseré vert le long du tracé de la petite route suggérant son caractère pittoresque. Je me rends ainsi jusqu'à la petite station de Porto Pollo où j'ai la chance de trouver une place juste devant le sable, dans le parking d'une épicerie Spar fermée…

Bon spot pour déjeuner, l'ouverture d'une boite de confit de canard pour réchauffer une cuisse avec des flageolets verts soulignera cette belle journée. Sieste ensuite devant le superbe panorama du golfe de Valinco et Propriano, un fois n'est pas coutume, salade de fruits rafraichis et café
Porto-Pollo-plage-sur-le-golfe-de-Valinco
Porto Pollo : plage sur le golfe de Valinco
Plage-de-Cupabia
Plage de Cupabia
Comme j'ai choisi de suivre d'assez près la côte pour profiter des paysages maritimes, il n'est pas surprenant que la route D155 soit très sinueuse et accidentée. Elle traverse des contrées encore très boisées et peu peuplées. Dès qu'elle monte un peu, elle offre de vastes panoramas sur les caps et les anses très découpées propres au sud-ouest de la Corse. Route fatigante donc, mais gratifiante en terme de spectacle et d'espace.

Sur la D155, village au sud sur la Serra di Ferro
Sur la D155, village au sud sur la Serra di Ferro

Capo-du-Muro-depuis-Acqua-d'Oria
Capo du Muro depuis Acqua d'Oria
.
Golfe-d'Ajaccio-depuis-Ariezza
Golfe d'Ajaccio depuis Ariezza
Ma journée s'achève par une vive descente sur le golfe d'Ajaccio à partir d'Acqua Doria, avec d'autres très belles vues sur les côtes et la ville au loin, dans la lumière et les vives couleurs du soleil descendant.

Panoramique-sur-la-baie-d'Ajaccio-sous-Acqua-Doria
Panoramique sur la baie d'Ajaccio sous Acqua Doria

J'irai me poser au bord de l'eau, sur le vaste terre-plein précédant la plage de Verghia. La circulation un peu bruyante encore à 17:30 devrait s'assagir par la suite.

Verghia-bivouac-devant-la-plage-Iles-Sanguinaires
Au crépuscule, bivouac devant la plage de Verghia ; au fond les Iles Sanguinaires


44 867 Vendredi 14 janvier 2022 : de VERGHIA à Pointe de la PARATA (47 km)
Plage de
                  Veghia devant le Golfe d'Ajaccio
Plage de Veghia devant le Golfe d'Ajaccio
Effectivement j'ai bien et longtemps dormi, puisque je ne me suis éveillé que vers 8:00 et sous un grand ciel bleu. Je commence peut-être à ressentir la fatigue de ce long voyage non-stop où je parcours relativement peu de kilomètres mais passe des heures à conduire sur des routes difficiles… Mais ce sont les plus belles !!!

Dès les routines accomplies je prends la route pour tourner presque immédiatement sur la petite D55 montant à Coti-Chiavari à travers une dense forêt d'eucalyptus. C'est le temps d'essayer de répondre à la demande d'Olivier qui souhaitait que je lui en rapporte un jeune plant. Mais j'ai beau chercher au pied de plusieurs gros arbres, impossible d'en trouver le moindre petit, comme si les nombreuses graines pourtant répandues à terre n'avaient pas germé. Je me renseignerai un peu plus tard sur le net pour tâcher de comprendre le processus de reproduction de cet original, il semble que ce soit assez délicat. Olivier rejoint par téléphone me suggère de tenter une bouture en coupant quelques extrémités de branche et en les plantant dans de la terre humide placée dans le pot qu'il m'a confié. J'essaierai lorsque j'en verrai d'autres.

Les côtes du Golfe en allant vers Ajaccio
Les côtes du Golfe en allant vers Ajaccio
Je fais donc demi tour et rejoins la route côtière assez densément peuplée semée d'une suite de plages avec restaurants, campings, etc. À Porticcio comme prévu je fais le plein de gasoil (1,669 le litre de GO tel qu'indiqué sur le site gouvernemental) et poursuis jusqu'à Ajaccio dans une circulation très dense et ralentie par des travaux (il n'y a pas qu'à Montréal !). Comme prévu aussi je prends le GPL tel qu'indiqué (une seule station en ville !) et trouve un stationnement gratuit à proximité, juste avant le port de plaisance où je pourrai laisser l'Exsis cadenassé en plein soleil.
Après un petit casse-croute je me lance dans la visite proposé par le G.V., en commençant par chercher le Palais Fesch qui semble fort riche en peinture italienne. Hélas la marche est longue sur le Cours Jean Nicoli qui mène à la vieille ville. Je découvrirai enfin l'entrée du musée dans une petite rue, mais c'est pour constater qu'il est fermé jusqu'au 15 janvier (fermeture annuelle, ce qu'omet d'indiquer le G.V. qui le présente ouvert toute l'année…). Voilà qui ampute mon tour de ville de sa partie la plus attrayante. Ajaccio-cour-du-Palais-Fesch
Ajaccio : cour du Palais Fesch

Ajaccio : le Cardinal Fesch
Ajaccio : le Cardinal Fesch
Ajaccio-rue-Cardinal-Fesch
Vieille ville d'Ajaccio : rue Cardinal Fesch

Ajaccio-Place-Ch-de-Gaulle-monument-de-Napoleon-et-ses-freres
Place Charles de Gaulle : monument de Napoléon et ses frères
J'errai ensuite pendant près de deux heures dans le centre ville, parcourant le Cours Napoléon rempli de boutiques assez élégantes, aboutissant à la vaste Place Charles de Gaulle où c'est le monument triomphaliste à l'Empereur et ses quatre frères Bonaparte, façon triomphe à la romaine qui retient mon attention.

Ajaccio-facade-de-la-cathedrale
Facade de la cathédrale d'Ajaccio
Ajaccio-nef-de-la-cathedrale
Nef de la cathédrale d'Ajaccio

Puis je me dirige vers la cathédrale Santa Maria Assunta (1584, Renaissance). Façade sobre peinte en jaune assez vif, intérieur couvert de peintures en trompe l'oeil d'assez bon goût qui meublent un espace plutôt sobre. J'y découvre quelques pièces intéressantes, dont une belle Vierge en marbre de Carrare du XVIIIe. Ajaccio-Vierge-Immaculee-Conception-XVIIIe
Ajaccio : Vierge Immaculée Conception (XVIIIe)

En revanche le grand tableau de Delacroix Triomphe de la Religion a été déposé, pour restauration peut-être ? Le grand orgue (1846) sur sa tribune vaut lui aussi le coup d’œil, «l'un des premiers instruments réalisés par Aristide Cavaillé-Coll, figure emblématique de l'orgue au XIXe siècle». On n'en parle pourtant pas dans le G.V., et aucune notice ne le signale à l'attention du visiteur…

Ajaccio orgue Cavaille-Cohl (1846) de la cathedrale
            Santa Maria Assunta
  Orgue Cavaillé-Cohl (1846) de la cathedrale Santa Maria Assunta d'Ajaccio

Ajaccio-l'ancien-port-derriere-la-jetee
Ajaccio : l'Ancien port derriere la jetée
Ensuite je me perds un peu dans les petites rues du coeur ancien de la ville-forte fondée par les Génois et fais un tour extérieur de la citadelle (fermée, car encore terrain militaire). Je pousse jusqu'au quai de l'Ancien port à son pied, puis prends le chemin du retour en zigonant entre les ruelles et les places : Hôtel du duc Pozzo di Borgo, rénové pour devenir un hôtel pour voyageurs, rue Bonaparte où je ne visiterai pas une autre fois la maison familiale du futur empereur.
Je m'attarderai plutôt devant le buste (touchant) du Roi de Rome dans son petit jardin exotique… Puis c'est la Place du Maréchal Foch, avec une autre statue de Bonaparte en Premier Consul, encore une fois revêtu de la toge romaine… sur fond d'hôtel de ville au joli décor méditerranéen et encadré de palmiers. Ajaccio-buste-du-Roi-de-Naples-dans-le-jardin-devant-la-Maison-Bonaparte
Ajaccio : buste du Roi de Rome
dans le jardin devant la Maison Bonaparte

Ajaccio-Bonaparte-en-Consul-romain
Ajaccio : Bonaparte en Consul romain
Ajaccio : bas de la place Maréchal Foch donnant
                  sur le port
Ajaccio : bas de la place Maréchal Foch donnant sur l'Ancien port

Ajaccio-le-Port-de-plaisance-Charles-Ornano
Ajaccio : le Port de plaisance Charles d'Ornano
Je commence à trainer la patte et suis affamé, il est temps de prendre une pause en retrouvant mon home. Mon chemin longe la gare maritime où sont accostés deux gros ferries (Corsica Linea, Corsica et Sardinia Ferries) portant en logo la tête de nègre corse et sarde, Puis je rejoins le grand port de plaisance Charles Ornano dont j'évite les grilles pour retrouver enfin, fatigué, la banquette de l'Exsis pour un repos bien mérité : plus de 7 km non stop enregistrés par mon IPhone !
Il est près de 15:30, je me restaure, puis décide de terminer ma journée par le spectacle du coucher de soleil sur les Iles Sanguinaires, au bout de la Pointe de la Parata qui ferme le Golfe d'Ajaccio au nord. Le GPS m'entraine dans un détour un peu sportif par la montagne pour contourner le centre ville, avant une vingtaine de kilomètre d'une route côtière bordée de villas cossues, de plages et de restaurants. Golfe-d'Ajaccio-depuis-la-pointe-de-la-Parata
Golfe d'Ajaccio depuis la pointe de la Parata
Pointe-de-la-Parata-Iles-Sanguinaires-et-Tour-de-la-Parata
Pointe de la Parata : Iles Sanguinaires et Tour de la Parata à contre-jour
En cette fin d'après-midi la vue sur les îles qui s'avancent en chapelet dans la mer est déjà superbe, elle deviendra bien sûr exceptionnelle avec la descente du soleil qui se couche derrière elles.

Je laisse alors l'Exsis dans le grand parking aménagé pour accueillir les nombreux visiteurs. Ils le sont aujourd'hui, pourtant un vendredi d'hiver… Je me joins à eux pour continuer à pied sur le large chemin d'accès jusqu'à la colline portant la tour de la Parata, l'une des 90 tours construites par les Génois tout autour de la Corse dès 1530 pour guetter l'apparition des raids barbaresques.

Tour-de-la-Parata
Tour de la Parata
Au-pied-de-la-Tour-de-la-Parata
Au pied de la Tour de la Parata

Photos bien sûr pour enregistrer le rougeoiement progressif des flots et du ciel en arrière des iles dont il ne reste que la silhouette sombre puis noire.

Crépuscule sur le Golfe d'Ajaccio
Crépuscule sur le Golfe d'Ajaccio

Je laisse alors le belvédère à mi-pente pour grimper le raide escalier (80 m) qui mène au pied même de la vénérable tour. On l'a coiffée d'un filet pour éviter les chute de pierre les jours de grand vent, je suppose… Je resterai là près d'une heure à contempler le spectacle grandiose du soleil couchant, observant les variations subtiles de teinte et d'intensité de la lumière, jusqu'à ce que le soleil disparu prive les visiteurs de sa chaleur. Tous ferment leurs anorak-parka-doudoune… et reprennent la direction du stationnement.

Pointe-de-la-Parata-crepuscule-sur-la-tour-et-les-iles-Sanguinaires
Crépuscule sur les Sanguinaires

Encore quelques photos du crépuscule sur la baie d'Ajaccio et sur les iles, je quitte les lieux explicitement interdits au CC (quoique…) pour aller poser mon bivouac sur le parking de l'un des restaurants - fermés - qui bordent la route.

Fin de journée plus que tranquille, je transfère et dénomme les photos du jour, soupe, commence à rédiger et, tombant sur mon clavier, monte me coucher vers 21:30.

Crépuscule à la Pointe de la Parata



44 914 Samedi 15 janvier 2022 : de la Pointe de la PARATA à CARGÈSE (109 km)
Lever-de-soleil-sur-mon-bivouac-devant-l'Hotel-Dolce-Vita
Lever de soleil sur mon bivouac devant l'Hôtel Dolce Vita
Nuit relativement tranquille, la circulation cessant bientôt sur cette route sans issue, et de toute façon j'ai dormi mes 9 heures sans me réveiller… Beau temps au lever, avec en prime une vue superbe sur le golfe. À deux pas un jeune eucalyptus me rappelle la demande d'Olivier : je sors mon sécateur pour en couper quelques rameaux en espérant qu'ils deviendront boutures viables… Douche, déjeuner panoramique, j'achève ma rédaction et suis prêt à partir vers 10:15.

Route-des-Sanguinaires-plage-devant-mon-bivouac
Route des Sanguinaires : la plage devant mon bivouac au matin

Je décide de commencer par une incursion vers l'intérieur pour aller découvrir la statue menhir de Tavera, sur la T20 en direction de Corte. Retour donc vers Ajaccio que je me contente de traverser sans m'arrêter, puis commence à remonter la vallée de la Gravona. La route est large, la chaussée en bon état, mais sinueuse et assez fréquentée. En traversant Ajaccio, la Place Maréchal Foch
En traversant Ajaccio, la Place Maréchal Foch
Sur-la-T20-vers-Tavera
Sur la T20 vers Tavera
Paysage rapidement rural, où les pentes très vertes se rapprochent progressivement tandis que des sommets enneigés pointent au-dessus des massifs limitant l'horizon.

Apercevant d'autres eucalyptus, je m'arrête pour tâcher une autre fois de récolter de jeunes pieds : mais les quelques uns que je tente de déterrer sont des rejets prenant sur une grosse racine ou une souche enfouie sous le terreau… J'en prélève quand même une, munie d'une radicelle bien symbolique, que je planterai un peu plus tard avec de courts rameaux coupés sur les branches recueillies ce matin.

Je les enfoncerai jusqu'au fond du terreau bien tassé et humidifié dans le pot remis par Olivier à cet effet, et placerai le contenant sur le plancher de la cabine, bien accroché à la base du fauteuil du passager. En espérant qu'ils tiendront le coup jusqu'à mon retour à Vence…
Pont-d'Ucciani-preparation-des-boutures-d'eucalyptus-pour-Olivier
Préparation des boutures d'eucalyptus pour Olivier

Difficile de trouver le site du menhir, faute d'apercevoir le panneau brun habituel en bord de route; ce n'est qu'en entrant à Tavera que je songe à utiliser Google Map, et cette fois encore j'obtiens la localisation très précise du stationnement dévolu à cette balade à travers champs.
Tavera-l'environement-montagneux-pres-de-la-statue-menhir
Tavera : l'environement montagneux près de la statue-menhir

Tavera-le-ruisseau-sur-le-chemin-vers-la
                  statue-menhir
Tavera : le ruisseau sur le chemin vers la statue menhir
Sentier fort peu tracé dans un premier temps, et bain de pieds dans un ruisseau aux bords très boueux, errement au milieu d'un troupeau de grosses vaches bien cornues mais heureusement placides… je dois encore une fois m'aider de mon téléphone pour trouver la pierre sculptée.

Tavera : rencontres bovines sur le sentier du menhir
Tavera : rencontres bovines fortuites sur le sentier menant au menhir

Un petit panneau en arrière donne quelques explications et souligne la qualité de l'objet en très bon état, sorte de borne dont on ignore la signification exacte. Esthétique fruste, mais puissante, qui renvoie à des pratiques culturelles fort anciennes (2 000 à 3 000 ans) des peuplades corses d'alors.

Tavera-statue-menhir-sans-ombre
Tavera : la statue menhir pleinement éclairée par le soleil
La statue-menhir de Tavera

Au nombre d'une centaine, les statues-menhirs sont inégalement réparties dans presque toutes les micro-régions de la Corse, à l'exception de la haute montagne.

L'homme de pierre

La statue-menhir de Tavera a été découverte lors d’une prospection menée dans la vallée de la Gravona en 1961. Celle-ci gisait à quelques mètres de l'endroit où elle est actuellement visible, à proximité d’un Casteddu médiéval. À l'emplacement de la découverte, les opérations archéologiques ont permis de découvrir des vestiges possibles d’un dispositif de calage ainsi que du mobilier lithique daté de la fin du néolithique ou du début de l’âge du bronze. D'une hauteur de 2,42 m, l’homme de pierre est l’une des statues- menhirs les mieux soignées et proportionnées de l’île. Les traits de son visage sont très expressifs et ses oreilles saillantes se détachent clairement de la tête. La ligne claviculaire est représentée par un arc de cercle à la base du cou. On distingue le schéma des omoplates en relief et la colonne vertébrale en creux dans le dos. La statue-menhir ne possède pas d’arme mais elle a
donné l’occasion de restituer ce qui est interprété comme un attribut vestimentaire. En effet, sur toute la partie céphalique, des gravures aujourd’hui disparues dessinaient la forme d’une résille.

La destination de la statue-menhir

La destination des statues-menbhirs est un véritable problème sur lequel les chercheurs se penchent actuellement. Celle de Tavera se situait au passage d’un col, dominant le cours de la Gravona. La proximité de l’axe de communication entre la plaine et la montagne permet de penser que la statue- menhir de Tavera a été dressée sur ce lieu en raison de son importance stratégique. On pourrait ainsi l'identifier à une herma, terme grec désignant autrefois la borne qui jalonnait les routes et les frontières, et également la rapprocher du culte antique d’Hermès, Dieu des voyageurs et du bornage.

Le pouvoir des pierres

Certaines pierres ont toujours exercé un véritable pouvoir sur les hommes. Pour l'Eglise, les menhirs et statues-menbhirs faisaient l’objet de cultes païens. Les nombreuses décisions prises dans le but de faire disparaître ces croyances restèrent vaines et le peuple continua à avoir pour celles-ci une véritable vénération. Elle tenta donc de les christianiser en traçant des croix sur les monolithes, en les déplaçant près des églises ou même en les intégrant dans leur construction. Celle de Tavera n’en fit pas l’objet, mais selon les bergers parcourant le secteur, elle aurait la faculté de faire pousser l'herbe et de donner ainsi de beaux pâturages. Ils l’appelaient d’ailleurs À Santa (La Sainte). Après sa découverte par les archéologues, quelques habitants du village s'en emparèrent et la transportèrent sur le parvis de l’église Santa-Maria, avant de la rapporter à sa place actuelle.

Je pousse un peu plus loin la balade vers une butte où se devinent quelques murets de pierres : ce sont les restes d'un casteddu médiéval depuis fort longtemps détruit. Intérêt architectural nul, mais large paysage depuis la petite terrasse où devait se trouver le donjon.

Tavera-porte-de--I-casteddi-III
Tavera : «porte» du donjon de I Casteddi III

Tavera-vue-sur-la-vallee-de-la-Gravona-depuis-la-terrasse-du-casteddi-III
Tavera : vue sur la vallée de la Gravona depuis la terrasse d'I Casteddi III

Retour plus direct et rapide au stationnement, maintenant que je connais le chemin… par ailleurs balisé de quelques petits poteaux invisibles dans l'autre sens !

Tavera :
            la statue-menhir
Tavera : zoom sur la statue-menhir depuis le casteddu

Pause-déjeuner au pied de Sarrola-Carcopino et
                  devant les montagnes enneigées
Pause-déjeuner au pied de Sarrola-Carcopino et devant les montagnes enneigées.
Je n'irai pas plus loin sur la T20 que je redescendrai pour rallier le Golfe de Savone plus au nord. Raccourci sur des routes minuscules (D1 puis D101) au flanc des hautes pentes pour rallier Sarcona Carcopino où je déjeune devant un beau panorama de neige sur le Monte d'Oro (2 300 m).

Sarrola-Carcopino
Sarrola-Carcopino

Panorama sur le Golfe de Sagone depuis le Bocca di
            Sarcoggio
Panorama sur le Golfe de Sagone depuis le Bocca di Sarzoggiu (612 m)

Je franchis le Bocca di Sarzoggiu qui m'offre des vues grandioses sur la côte, et redescends par des villages accroché comme Cannedde, San Andrea-d'Orcino le long de la vallée de la Liscia, puis le village belvédère Calcatoggio, et atteinds enfin le rivage du Golfe de la Liscia.
Calcatoggio dans la Cinarca
 Calcatoggio dans la Cinarca

Golfe-de-la-Liscia
En descendant vers le Golfe de la Liscia

Je suivrai la route côtière D81 jusqu'à mon arrivée en fin de journée à Cargèse, sans arrêt autre que pour quelques photos, car les villages traversés sont plus des stations balnéaires récentes que des villages anciens de caractère. Belles plages, restes informes du château médiéval de Capraja aperçu de loin, tours génoises plus ou moins en ruines sur les promontoires à la Pointe Capigliolo et à Sagone… Je surveille le long de la route les endroits propices au bivouac, mais n'en trouve pas car il n'y a guère de chemins tracés vers la mer qui ne soit clos d'une barrière. Punta Puntiglione au soleil couchant
Punta Puntiglione au soleil couchant

Arrivée à
            Cargese
Au coucher du soleil, arrivée à Cargèse au bout du Golfe de Sagone

Cargese-bivouac-sur-le-quai-du-port
Cargèse : bivouac sur le quai du port
Je finis par me rendre jusqu'à Cargèse dont j'aperçois enfin les deux églises (catholique et grecque) en haut du village en amphithéâtre se terminant tout en bas par un petit port. Les rues sont étroites et pentues, j'enfile donc la petite route sinueuse qui dégringole jusqu'au quai bien peu fréquenté ces temps-ci : bars et restaurant fermés, quai de plaisance à moitié déserté et bateaux mis en hivernage… Je m'avance jusqu'au bout du petit port et m'installe immédiatement au bord de l'eau : la nuit devrait y être tranquille...

Le
            port de Cargese au crépuscule
Le port de Cargèse au crépuscule


2022-01  Corse-4 : de CARGÈSE à CALVI

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