Sur la A40 vers Québec |
Ciel nuageux avec quelques percées de soleil en quittant Montréal par la A40. J'ai décidé de continuer mes tests de consommation sur cette route assez droite et sans relief, cette fois-ci en adoptant une vitesse constante de 90 km/h. Entre la sortie de Montréal près de Repentigny et l'arrivée à Québec, la conso moyenne s'établit à 10,8 l/100 selon l'ordinateur de bord, contre 9,7 l/100 à 80 km/h sur la même route (mais dans le sens est-ouest). La pluie s'établit en route, et je finis essuie-glace en action mon trajet à Québec sur le stationnement de la SAQ Dépôt en bordure de l'A40. |
J'y ramasse un carton de
3 litres de mon vin de table blanc préféré Pinot Grigio
Delle Venezie (difficile à trouver à Montréal) puis
reprends immédiatement la route en franchissant
l'historique Pont de Québec qui m'amène sur la A20 Est. Le ciel humide et gris s'obscurcit de plus en plus, je rattrape le rivage du St-Laurent à Montmagny et vais poser mon bivouac sur le stationnement quasi désert du Manoir Couillard-Dupuis (Musée de l'Accordéon), à deux pas du quai du traversier vers l'Île aux Grues. |
Montmagny : bivouac devant le Manoir Couillard-Dupuis |
Montmagny : le manoir Couillard-Dupuis; érigé en 1714, le manoir est incendié lors de la Conquête britannique en 1759 et reconstruit en 1789. Il est caractérisé par des ouvertures symétriques percées dans une toiture à forte pente et, au rez de chaussée, par des fenêtres à vingt carreaux. |
Grosses averses durant
la nuit, fort tranquille par ailleurs, et ciel très
ennuagé au lever à 8:00. Après un petit tour extérieur du
manoir Couillard-Dupuis (1781), luxueusement restauré pour
abriter un petit musée de l'accordéon, je suis la
promenade aménagée le long de la Rivière du Sud jusqu'à
l'emplacement de l'ancien moulin seigneurial, maintenant
occupé par un petit barrage hydroélectrique. Jolie vue sur le fleuve et le quai d'embarquement vers l'île aux Grues et Grosse Île, la première déjà visitée et la seconde réservée pour une autre fois, puisque devenue parc national historique du Canada consacré à l'immigration européenne du XIXème, irlandaise en particulier. |
Montmagny : barrage sur la Rivière du Sud |
Histoire du moulin de Montmagny |
Puis je me mets en route en empruntant cette fois la Route 132 qui longe le fleuve au plus près. Elle offre quelques belles échappées sur la vaste étendue d'eau gris vert qui va en s'élargissant vers le nord-est, limitée par les montagnes bleutées de la côte Charlevoix en face. Pause pour le petit-déjeuner et la douche sur le stationnement de l'église de l'Islet, parebrise donnant sur le vaste paysage de bâtures qui a commencé à jaunir, comme beaucoup d'arbres autour de moi. Sentiment d'espace dans une nature encore presque originelle… | L'Islet : les bâtures vers Baie-St-Paul |
St-Denis-de-la-Bouteillerie : la maison Chapais |
En route je n'aurai fait qu'un bref arrêt devant le quai de Kamouraska (large vue sur le fleuve et ses îles, tant en amont qu'en aval) et à St-Denis de la Bouteillerie pour visiter la Maison Chapais, un des Père de la Confédération. Elle est malheureusement fermée et en grande rénovation. Enfin à La Pocatière je me suis hasardé un peu dans le centre, dans la vaine recherche d'une station service arborant l'enseigne CoucheTard. |
À partir de là je regagne la A20 dont le parcours, monotone et sans vue marquante, m'amène à quelques kilomètres de Rivière-du-Loup. Je bifurque alors sur la route panoramique qui longe immédiatement le fleuve après la halte routière de N-D-du-Portage; je me prépare un petit lunch devant l'église dont la porte entrouverte appelle à la visite. Rien de génial, mais un décor un peu chargé comme on l'aimait au milieu XIXème, très bien conservé et mis en valeur, ce qui n'est pas si fréquent ! | N-D-du-Portage : l'église de 1859 |
N-D-du-Portage : nef de l'église |
N-D-du-Portage : Notre Dame et le porteur |
En passant devant le Parc de Bic depuis la Rte 132 |
Je vise alors la
station Esso repérée sur mon téléphone au cœur de la
petite ville de Rivière-du-Loup, puis poursuis sur la A20.
Celle-ci ne tarde pas à s'interrompre - un chantier qui
date de 40 ans et n'a toujours pas abouti ! - et me voilà
à nouveau sur la Rte 132. J'y retrouve plusieurs point d'intérêt connus (St-Fabien, Parc du Bic…) qui mériteraient bien un arrêt si le temps n'était aussi mauvais : la température valse autour de 10°, la pluie ne s'interrompt que brièvement, la visibilité reste limitée et la lumière terne. |
Autre journée grise et pluvieuse (donc froide vu la saison) qui n'incite guère à sortir de ma cabane à roulette. Lever tardif vers 8:15 après une nuit assez reposante (il n'est passé que deux trains avec Klaxon de rigueur sur la ligne de chemin de fer voisine de mon bivouac). Je paresse un peu, me réchauffe en déjeunant (11,5° dans l'habitacle) puis travaille un peu sur ma page web de l'Alaska 2004 en cours. Il faisait alors autrement plus beau à Seward ! | Tide Head : bivouac sous la pluie sur Islandview Drive |
Baie des Chaleurs et côte sud de la Gaspésie (Québec) près de Campbellton |
Par la petite Route 134 qui longe le plus immédiatement la rive je passe le hameau de Tide Head en allant jeter un coup d’œil au panorama depuis Morrissey Rock Park, puis traverse le village d'Atholville autour de sa scierie, et gagne Campbellton, petite ville industrielle sans guère d'attrait. Je m'y installe sur une vaste esplanade ouverte sur l'ouverture de la Baie, au bout de Salmon Bvd. Corbeaux et mouettes se disputent les restes laissés par les piqueniqueurs. J'y poursuis mon ouvrage un autre bon moment, réchauffe l'habitacle en branchant le Webasto, puis me douche. |
L'après-midi passe ainsi, sans relief ni curiosité notable. Je vois le soir descendre tranquillement et décide de ne pas trop m'avancer, espérant que demain sera plus beau. Arrêt précoce donc vers 17:45 devant le quai du gros village de Petit Rocher, isolé au bout d'un mauvais chemin de terre rempli de trous d'eau. Je m'installe juste au dessus du remblai garni de quartiers de roc qui défend la terre contre les assauts des vagues, bien à plat et face aux rochers découverts et épars emplissant l'anse. La Baie des Chaleurs est à ce niveau assez large pour qu'on ne voie plus la côte québécoise de l'autre côté. | Petit-Rocher : l'anse au crépuscule |
Bivouac devant l'anse de Petit-Rocher |
Il a plu toute la nuit, une petite pluie fine dont j'entendais à peine les gouttes frapper seulement les dômes des lanterneaux… Réveillé dès 6:30 je démarre peu après, histoire de réchauffer l'habitacle (le tableau de bord indique 9° à l'extérieur) après quelques photos trop sombres de mon environnement assez pittoresque. |
L'accueil touristique de Grande-Anse |
Je continue à suivre
le rivage pour m'arrêter à Grande Anse devant le Musée
des Peuples fondateurs, malheureusement fermé. Il aurait
remplacé celui consacré aux Papes, abondamment décrit
dans mon guide Ulysse de 2 000, qui ne faisait peut-être
plus recette… Faute de visite, je profite de la vaste esplanade pour me doucher et déjeuner. Le temps a l'air de se stabiliser : toujours gris, mais relativement sec. Il donnera peut-être la possibilité au Webasto de s'assécher, lui qui s'est presque immédiatement arrêté après démarrage ce matin et pour lequel je crains un court-circuit dans le branchement non-étanche. À vérifier ! |
Je repars donc en direction de Caraquet, m'arrêtant une quarantaine de km plus loin devant la grille ouverte du Village historique acadien. Si toutes les attractions sont fermées, le parcours du long chemin serpentant entre les maisons du XVIIIème, XIXème et début XXème montrant la vie des ancêtres dans la région est ouvert aux marcheurs. J'en profite pour faire un peu d'exercice dans ce bel environnement naturel protégé où le boisé commence à afficher les couleurs de l'automne. Nombreuses photos, en me battant avec les moustiques toujours actifs dans le coin plus marécageux entourant le pont couvert et le moulin. | Caraquet - Village historique Acadien : maison rurale |
Il est presque 17:00, la lumière commence à baisser, je prends alors la direction de Shippagan dont mon guide vante la caractère portuaire avec tous ses bateaux de pêche serrés le long des quais dans les bassins. Suite de la route de campagne où les champs entourant des fermes - apparemment pas mal d'élevage - alternent avec des boisés de résineux touffus. Puis c'est un paysage de tourbières et de marais hérissés de conifères rabougris qui s'installe, jusqu'au petit port. Je gagne son bassin : il est vide ! Incompréhensiblement tous les bateaux, dont la flottille de pêche et quelques embarcations de plaisance, sont entassés à sec au dessus de l'eau dans un enclos grillagé. Je risque quelques photos sur fond de ciel très contrasté et à contrejour, puis m'engage sur le pont qui passe au nord sur l'île de Lamèque. | Shippagan : les barques de pêche tirées au sec pour l'hiver |
Pont vers l'ile de Miscou |
Le joli pont moderne en dos d'âne me fait ensuite passer sur l'île de Miscou; densité nettement plus faible ici, quoique l'on construise beaucoup semble-t-il, plus de forêt et, dans le nord en approchant du rivage, des tourbières de plus en plus envahissantes. Ce paysage ne manque pas d'une certaine ampleur. |
Enfin j'arrive
en vue du phare, le plus ancien du nouveau Brunswick et
le deuxième du Canada. Le site est bien mis en valeur,
quoique désert à cette heure. Je fais un petit tour
auprès des bâtiments impeccablement restaurés - le phare
comme le criard de brume ont maintenant perdu leur
vocation maritime - puis vais m'installer dans le soir
descendant sur un petit stationnement adjacent, en
bordure de la longue plage de sable qui marque ici la
frange nord extrême de l'île et la limite sud de la Baie
des Chaleurs. Belle vue à 220° sur l'étendue marine où
étonnamment on n'aperçoit pas une lumière ni même le
clignotement d'un phare. |
Phare de Miscou et son criard de brume en soirée |
LE PHARE DE LA POINTE MISCOU
Au milieu
des années 1800, la navigation intense et
les nombreux naufrages incitèrent le
gouvernement du Nouveau-Brunswick à élever
un phare à l'entrée de la baie des
Chaleurs. La construction du splendide
phare de la pointe Miscou, dont le nom
initial était « Birch Point Light »
remonte à 1856. Allumé pour la première
fois le 4 novembre de la même année, ce
phare était le deuxième à être érigé sur
les rives du golfe Saint-Laurent, le
premier étant celui de la pointe
Escuminac, construit en 1841 sur le
détroit de Northumberland.(notice à l'entrée du site) Au coût de 2 200 livres, le contrat de construction comprenait aussi la maison du gardien, un hangar à bois et la lanterne. À l’époque, le gouvernement néo-brunswickois tenta sans succès de faire en sorte qu'une partie des coûts soient assumés par le gouvernement du Bas-Canada (Québec), puisque ce phare servait aussi aux navigateurs du Québec. Jusqu'à la Confédération en 1867, pour payer l'entretien du phare, une taxe d'un « penny » par tonne fut imposée sur les débarquements de poisson dans les ports du Nouveau-Brunswick à tout bateau ayant fréquenté les côtes de la baie des Chaleurs. Après 1867, tous les phares au pays devenaient la propriété et la responsabilité du gouvernement fédéral. La lourde tour octogonale (huit côtés) en bois du phare s'élève à 23 mètres (76 pieds) au-dessus du niveau de la mer. Deux énormes poutres de pin équarries à la hache forment les colonnes des angles. Le bois a été immergé dans l’eau de mer pendant plusieurs jours pour assurer sa conservation. Au début, une lanterne rouge renfermant des lampes à mèche était visible jusqu'à 12 km (sept à huit milles) par temps clair. Depuis, grâce à de nouvelles technologies, son système d'éclairage a connu de nombreuses modifications. Le phare est situé sur un promontoire s’avançant dans la mer (Birch Point). En raison de l'érosion, on a dû le déplacer vers l’intérieur à deux reprises. La vue spectaculaire à partir de cet endroit en a fait un lieu privilégié pour l'observation de la baie des Chaleurs et du golfe Saint-Laurent pendant toute l'année. |
Réveil en même temps que le soleil
à 6:45 ! Le ciel bleu a repoussé la plus grande partie
des nuages, inaugurant un sunday qui mérite
enfin son nom !
Je me lève sans tarder pour
profiter de l'aubaine et capter quelques images de
l'environnement immense, allume le chauffage qui,
cette fois, démarre sans problème et élève en douceur
la température intérieur de 11° à 21° en 40 minutes.
Je déjeune donc confortablement dans mon salon panoramique en jetant un œil aux oiseaux pêcheurs qui plongent juste devant le parebrise, puis mets à jour le carnet de bord. Douche et enfin décollage vers 9:30. |
Au matin, mon bivouac devant la plage du phare de Miscou |
Phare de Miscou au matin |
Bivouac au pied du phare de Miscou et devant l'Océan |
Arrivée sur l'église Ste-Cécile de Lamèque |
Lamèque : façade de l'église Ste-Cécile |
Quant au décor peint
de l'église qui a fait sa renommée, je le trouve criard,
sans finesse et peu intéressant. La lecture du petit
panneau d'explication à l'extérieur est édifiante !
(ci-dessous) Dire que c'est ici que se tient chaque été le fameux Festival de musique baroque de Lamèque… ! Quelques photos, et je profite de la fin du sermon pour sortir discrètement. |
Lamèque : les peintures de la nef de l'église Ste-Cécile |
Sainte-Cécile de Lamèque
Sous le vocable de Sainte-Cécile, patronne des musiciens Architecte : Ludger Duguay (1860-1949), époux de Louise Duguay (1861-1948) de Pigeon Hill, sur l'île Lamèque Explications sommaires de la décoration intérieure Inspirée de l'architecture romane, cette coquette église en bois fut érigée en 1910 et terminée en 1913. Quoique sobre dans sa structure extérieure, on est séduit par son unité de style, surtout dans ses formes arrondies à l'intérieur. Toute la structure intérieure est en sapin de Colombie. Les enjolivures et les découpages architecturaux, jadis décorés de blanc, lui donnaient l'allure altière et noble des résidences princières de Scandinavie. Les piliers et colonnes, les bancs et les autels latéraux étaient peints en trompe l'œil ou faux bois, éléments décoratifs en vogue au tournant du 20e siècle. Malheureusement, avec le passage du temps, l'huile de lin vint à s'assombrir, laissant une impression triste et morne de couleur brun foncé, presque noire. Envisageant un nettoyage global de la structure intérieure, il parut plus accommodant au curé de l'époque, le Révérend Gérard d'Astous, de tout repeindre, laissant libre court à son imagination créatrice. Les travaux débutèrent le 11 novembre 1968, sous la gouverne du curé, aidé de Paul Gauvin de Petite-Lamèque et Léonce Lanteigne de Pointe-Alexandre. À la fin décembre de la même année, la majeure partie de l'église était déjà repeinte. Suite au départ des deux aides, le Père d'Astous termina seul le travail déjà amorcé. Le tout fut terminé au printemps de 1969. Depuis, on a malheureusement repeint les bancs et les autels latéraux, masquant à jamais ce magnifique patrimoine artisanal, jadis reconnu comme exclusif et original. Quant au chemin de croix monochrome, on l'a repeint il y a seulement quelques années. Dès l'entrée dans le vestibule, on reste étonné par le décor à caractère naïf des murs décorés d'arbres sur la partie inférieure, représentant la terre, alors que la partie supérieure représente la mer, emblèmes de l'économie locale. Vu l'emplacement discret des murs des deux escaliers menant au jubé. c'est là qu'apparurent les premières esquisses des travaux, question de se faire l'œil et la main, camouflant ainsi les erreurs possibles tout en évaluant le gigantisme de cette immense fresque naïve et éclatée à la fois. En franchissant le seuil, on aperçoit au plafond, sous le jubé, toute une iconographie symbolique représentant cloches et notes de musique. Ces symboles invitent gaiement les fidèles à s'approcher des cérémonies du culte en ce temple dédié à Sainte-Cécile, patronne des musiciens. L'enseignement de la Parole est représenté par une référence iconographique aux tables de la Loi. Lieu de prière fervente et de foi profonde, l'église doit être aussi un lieu favorisant les rencontres et les célébrations joyeuses, éclatantes de couleurs vives, criant ainsi la vie. Longeant la bordure extérieure du jubé, on y aperçoit successivement une grande étoile et des bougeoirs représentant la naissance du Christ, notre guide spirituel, éclairant nos vies, tout en guidant nos pas. Dans la nef proprement dite, aux pieds du mur, le lambris est recouverte d'une texture grisâtre, imitant le granit, symbole de la structure inébranlable de l'église. Ce motif un peu flou représente le néant d'où nous sommes tous issus. L'ensemble de la décoration de la nef consiste en un motif continu multicolore formé de languettes étroites agencées verticalement et aux couleurs pastel, créant une étonnante illusion de mouvements ascendants. Cette section maîtresse symbolise nos bonnes actions accomplies au cours de notre vie terrestre, offrandes généreuses au Père. En élevant le regard vers le plafond arrondi, on aperçoit plusieurs motifs de petites croix aux effets stellaires sur fond de ciel bleu et flou, représentant les épreuves de la vie et les fins dernières de l'humanité, la séparation de l'âme du corps. Enfin, le bleu du plafond est une description symbolique de l'éternité bienheureuse avec ses ballons et gâteaux de fête, récompense promise aux fidèles qui ont obéi aux principes de la Loi. Le sanctuaire est essentiellement une redite décorative de la nef, sauf qu'ici, l'iconographie liturgique insiste sur les symboles de l'eucharistie : ciboires, hosties, raisins et candélabres, le tout découpant les formes arrondies des arcs du plafond. Finalement, un détail important pour décrire le fond de ciel bleu derrière les statues de la Vierge et de Saint Joseph : derrière la statue de ce dernier, le ciel est bleu et légèrement nuageux. Quant à l'arrière de la statue de la Vierge, de petits chemins tournent dans le ciel, signifiant que toute grâce doit passer par l'intercession de la Vierge Visitez l'intérieur de l'église et appréciez l'œuvre du père d'Astous. Texte de M. Mathieu Duguay. |
Église Ste-Cecile
de Lamèque : l'autel consacré à St-Joseph
|
Shippagan : les barques de pêche au soleil |
Le soleil rend plus attractif l'alignement coloré des bateaux au sortir du pont reliant Lamèque à Shippagan, ce qui me permet quelques autres photos plus relevées que celles d'hier dans la grisaille. J'apprendrai plus tard dans la journée que les Acadiens ne pêchant pas l'hiver, il est inutile voire nuisible de laisser les coques à l'eau où elle s'abîmeraient pour rien, ce qui explique leur position à sec dans le port. Même explication pour tous les grands hangars près de de bien des maisons dans les deux îles où l'on aperçoit abritées les grosses barques à large pont arrière et fond presque plat typique de la région. |
Je me retrouve donc bientôt sur l'excellente Route 11 en direction sud; elle passe en général loin de l'eau, et le paysage de campagne modérément peuplée ou de petites forêt me parait bientôt assez monotone. Pas de relief, pas de monument pour accrocher l'intérêt, de temps à autre le passage d'une large rivière au cours tranquille car proche de son embouchure. | Pokemouche : la rivière homonyme vers son embouchure |
Route automnale |
Consultant le guide,
je ne trouve rien d'autre de séduisant dans mon
cheminement vers le sud et vers Moncton que l'Éco-Centre
Irving de la Dune de Bouctouche qui offre une
belle promenade de 2 km sur une passerelle de bois au
milieu de ce milieu naturel fragile et passionnant. J'en fais mon objectif pour ce soir et reprends la Route 11 sur laquelle je file à mon petit train tranquille : de 70 à 80 km/h, 11,2 l de conso aux 100 km. Beaucoup de forêt, des feuillus qui commencent à virer au jaune et au rouge. Le soir descend lorsque j'arrive au but, au bout d'une petite route peu passante desservant un habitat dispersé de bord de mer et de nombreux terrains de camping pour l'heure désertés. |
Le site est joliment
et luxueusement aménagé (la fondation d'une pétrolière…
qui veut se donner bonne conscience ?); je vais jeter un
œil au départ de la balade. En haut de la tour
d'observation sur l'immense plage et sur la dune qui
file vers l'est sur 13 km, je rencontre un couple
drôlement apparié : lui au fort accent lorrain est
concierge dans une école de la banlieue de Moncton, elle
avec un accent acadien prononcé est infirmière. Tous
deux sont grands amateurs de plein-air et me donnent
plusieurs conseils pour découvrir la région, et
particulièrement l'Ile du Prince Édouard qu'ils
connaissent bien, notamment les dunes du Parc national,
au centre du rivage nord de l'île. Notre conversation haut perchée dure un moment, le soleil disparait et la fraîcheur s'accentue. Nous quittons notre perchoir et nous séparons, eux pour regagner leur voiture et Moncton, moi pour aller trouver une place tranquille où poser mon bivouac, au fond du stationnement désert de l'autre côté de la route. |
Ciel bleu piqueté de quelques
nuages au réveil vers 7:30, avec une température qui
avoisine les 9° comme hier. 45 minutes de chauffage,
et l'habitacle est suffisamment chaud pour un lever et
un déjeuner confortables. Je travaille ensuite une
petite heure sur la 4ème page du voyage en
Yukon/Alaska avant de prendre ma douche et m'habiller.
À 9:15 le soleil est maintenant assez haut pour bien éclairer et surtout réchauffer la promenade sur la dune programmée ce matin. Je laisse donc le ProMaster bien exposé aux rayons solaires sur le parking qui commence à se remplir et, chapeau sur la tête et veste de polaire bien fermée, traverse la route et m'engage sur les passerelles suspendues au-dessus du sable. |
Bivouac sur le stationnement de la Dune de Bouctouche |
Enfin, cheminant doucement par monts et par vaux, empruntant à deux reprises la Route 11 là où la route de Cocagne (authentique, j'ai traversé le village portant ce nom !) s'interrompt, j'atteins le très long pont (12,7 km) qui franchit le détroit de Northumberland entre le Nouveau Brunswick et P.E.I. Bien peu de trafic en cette saison, je croise quelques gros semi-remorques qui doivent assurer le ravitaillement et exporter les pommes de terre dont l'île est un réputé fournisseur. La traversée à 80 km/h (vitesse réglementaire) ne dure guère, tout en laissant le temps de voir s'élargir les côtes légèrement vallonnées et très vertes. | Sur le pont de la Confédération vers l'Ile du Prince-Édouard |
Port de Victoria |
La chaude lumière descendant déjà (il est 17:30 heure locale, "une heure plus tard dans les Maritimes" par rapport à l'heure du Québec) je décide de remettre à demain la visite de la capitale Charlottetown et prends la petite route suivant la côte vers l'est (Circuit ds Sables rouges). Empruntant des voies étroites, voire un passage en gravelle, desservant de grosses fermes vouées à la culture des patates, je rejoins la mer à Victoria, un petit port autrefois florissant au temps où tous les transports étaient maritimes. Il est maintenant endormi derrière ses quais auxquels sont amarrées quelques barques de pêche. Le bourg a conservé plusieurs vieilles maisons intéressantes que je verrai demain. |
Le quai de Victoria dans le soleil couchant |
Un grand héron pêchant devant la plage de Victoria |
Ciel resplendissant ce matin, sans un nuage ! Il semble bien que cette fois, j'aie «frappé le beau temps» ! Les arbres encore très verts avec parfois une éclaboussure de rouille et une température qui ne tarde pas à grimper annoncent une bel journée d'automne débutant. La nuit a été très calme sur mon petit stationnement devant le port, sans aucune visite ni passage sur le petite route en arrière avant 7:00, lorsque quelques barques de pêche ont rompu le silence en faisant chauffer leur moteur avant de partir en mer. | Bivouac près du port de Victoria |
Victoria : Main Street |
Il commence à faire chaud (29°) dans l'habitacle exposé au plein soleil avec la porte à glissière grande ouverte sur la plage et la mer. Après mon effort couronné de succès je me repose un peu, me douche et poursuis ma rédaction. Lorsque j'ai récupéré, je laisse là mon clavier et décide de profiter un peu du beau temps pour découvrir la Main Street. La plupart de ses maisons date de l'âge d'or du village et de sa plus grande prospérité (mi-XIXème) alors que Victoria était le 2ème port de l'I.P.E. après Charlottetown et avant la généralisation du chemin-de-fer. Effectivement je découvre plusieurs demeures qui valent le coup d’œil (et la photo !) par leur environnement très fleuri et leur style mi-british, mi-irish, le climat comme les traditions culturelles étant très proches. |
De
retour au ProMaster je décide de poursuivre le Circuit
des Sables Rouges déjà entamé en suivant la
route 19 vers la capitale. Il me fait passer par le
petit parc provincial d'Argyle où j'arrête quelques
minutes, le temps de déjeuner au soleil (il est passé
12:30) puis d'aller admirer la petite falaise rouge
grenat qui tombe sur une courte plage de sable
également rouge vif assez spectaculaire. Je suis seul,
les aires de jeux pour enfants sont vides sur le gazon
très vert et dru. Prochaine curiosité : le Fort Amherst que les Anglais au lendemain de la conquête (1758) ont bâti sur l'ancien Port-La-Joye dont les Français avaient fait la capitale de l'île dès 1720. |
Parc provincial Argyle Shore |
Ce Parc
Historique du Canada est bien sûr superbement
aménagé et situé, au dessus de la baie abritant
également la ville de Charlottetown sur l'autre rive
un peu plus haut. Il ne reste quasiment rien des
constructions et aménagements, hormis quelques
levées de terre et creux correspondant aux caves des
casernes.
|
Depuis Port-la-Joye-Fort-Amherst, la baie de Hillsborough River |
Port-la-Joye / Fort-Amherst : talus et creux (caves) du fort anglais |
Présentations de Parcs Canada
LOUIS HYACINTHE CASTEL, Comte de Saint-Pierre et courtisan de Louis XIV, amena avec lui de France en 1720 trois cents hommes, femmes et enfants, pour coloniser l’Ile-Jean. Ces agriculteurs, pêcheurs et artisans, auxquels devaient se joindre bientôt des colons de l’Acadie, fondèrent Port-la-Joye, un des premiers établissements européens permanent de l’île et le centre administratif de la colonie. L’endroit, avec son grand havre abrité et facile à défendre, était tout indiqué pour y établir la capitale. La colonie avait beaucoup de potentiel - des terres agricoles fertiles et une pêche abondante — et se trouvait de surcroît à peu de distance de la mer par Louisbourg et d’autres centres français. PORTE D'ENTRÉE POUR LA COLONISATION ET LE COMMERCE En 1735, les colons avaient construit des habitations le long de la Rivière-du-Nord-Est (la Rivière Hillsborough classée rivière du patrimoine canadien). Cette rivière était alors une voie de navigation importante vers la côte nord de l’île , puisqu'elle reliait Port-la-Joye au principal centre commercial de la colonie, Havre St-Pierre (la baie de St-Peters). GUERRE ET BOULEVERSEMENT En 1745, des troupes venues de la Nouvelle Angleterre attaquèrent et brûlèrent Trois Rivières et Port-la-Joye. Selon l’histoire orale des Mi’kmaq, les Français auxquels se joignirent les Mi’kmaq et les Acadiens, contre-attaquèrent et eurent raison des assaillants. Ce
n’est que quatre ans plus tard que Port-la-Joye
put être reconstruit, La population de la colonie
augmenta en 1755 à la suite de la migration
des Acadiens qui tentaient d’échapper à la
Déportation en Nouvelle-Écosse.
LE GRAND DÉRANGEMENT
l’Acadie fondée par la France en 1604, et
convoitée pour sa situation stratégique, est cédée
à l’Angleterre en 1713 et rebaptisée
Nouvelle Écosse. La fondation de Halifax, en 1749,
entraîne l’exode d’une partie de la population
acadienne vers les territoires français. Les
Acadiens qui restent sont perçus comme une menace
par les autorités britanniques qui, en 1755,
commencent leur expulsion systématique,
fragmentant familles et communautés, confisquant
terres et biens.
C’est le Grand Dérangement. Près de 10 000 hommes, femme set enfants sont entassés à bord de navires et déportés dans les colonies anglo-américaines, en Angleterre et en France. d’autres échappent aux déportations, fuyant en territoires français et formant une résistance. En dix ans, près de la moitié du peuple acadien périt en mer ou succombe à la maladie ou à la famine. La nouvelle Écosse compte à peine 1 600 rescapés en 1765, leurs terres fertiles désormais occupées par des colons venus d’ailleurs. Certaines familles acadiennes prendront le chemin du retour, mais la plupart ne reverront jamais l’Acadie. Plusieurs feront souche au Québec et en France, alors que la Louisiane sera le foyer d’une nouvelle communauté qui donnera naissance à la riche culture cadienne (cajun). Cependant le Grand Dérangement n’aura pas réussi à effacer la présence acadienne de sa terre d’origine. Au Canada atlantique, l’Acadie est bien vivante, parle français et propose au monde une culture fière et dynamique. |
Mais au delà de l'affrontement des deux impérialismes français et britannique, l'intérêt est surtout attiré sur la façon brutale dont le conflit dégénéra avec le Grand Dérangement. Celui-ci chassa une première fois les Acadiens de Nouvelle Écosse après la chute de Louisbourg, puis une deuxième fois lorsque ceux qui s'étaient réfugiés sur l'Ile Saint-Jean (l'actuelle I.P.E.) furent eux aussi déportés soit en France, soit en Louisiane ou les les autres colonies britanniques. Plus de la moitié de ces paisibles familles civiles moururent soit de naufrages ou de maladies. Bien peu revinrent au pays une fois la paix revenue, leurs terres confisquées ou devenues la propriété de grands propriétaires anglais non résidents et dont ils ne purent que devenir les métayers… | Port-la-Joye Fort-Amherst : Déportation de 1758 par Lewis Parker (2011). |
Front maritime de Charlottetown |
Je
trouve à stationner sur un grand terrain vague non
encore bâti à deux pas de l'édifice, gratuit et assez
éloigné des rues passantes alentour pour que je puisse
penser y poser mon bivouac nocturne. Il est près de
18:00 le soleil jaune pas encore couché me permettra
une première balade dans le quartier ancien adjacent. Je choisis de suivre le contour des quais fort joliment aménagés en promenade et en bassins de plaisance : beaucoup de gazon et d'arbustes, quelques statues de bronze contemporaines évoquant des personnalités politiques liées à la fondation de la Confédération, puisque la conférence de Charlottetown en 1864 peut être considérée comme constitutive du Canada fédéral et auto-gouverné. C'est ce qu'expliquent avec détails et anecdotes plusieurs panneaux bien illustrés disposés sur la promenade, à côté de l'histoire de la ville et de la province. |
Sur les quais de Charlottetown :
William Henry Pope (1825-1879), secrétaire
colonial de l'Île-du-Prince-Édouard et
l'un des Pères de la Confédération, est ici représenté au moment où il
se rend en barque jusqu'au SS
Queen Victoria pour souhaiter la bienvenue aux
délégués de la province du
Canada-Uni (soit le Québec et l'Ontario) venus
assister à la Conférence de Charlottetown (œuvre
de Jules Lassale, 2017, à l'occasion du 150ème
anniversaire)
|
Je
me rends ainsi à l'extrémité ouest de la vieille
ville, et reviens tranquillement à mon stationnement
en parcourant quelques rues commerçantes agréables et
soignées. La basilique St Dunstan (néo-gothique début XXème) est maintenant fermée à la visite, on y signale quelques vitraux intéressants que je tâcherai d'apercevoir demain en allant voir le Confédération Centre of the Arts (salle de spectacle et surtout musée des beaux-arts) et Province House où l'on a reconstitué la salle de la conférence de 1864. |
Basilique St Dunstan |
Facades de maisons anciennes sur Great-George Street |
La porte géorgienne de Carroll House sur Great George Street. « So British !» |
Charlottetown : John Hamiton Gray, Premier ministre de l'I.P.E. |
Charlottetown : John Hamiton Gray, député du Nouveau-Brunswick |
C'est par pure coïncidence qu'à la
rencontre des 23 délégués de la Conférence de
Charlottetown de septembre 1864, deux de ces
hommes portaient le même nom.
John Hamilton Gray, Premier
ministre conservateur de l'Île du Prince
Édouard, était président de la Conférence.
Quant à John Hamilton Gray, du Nouveau
Brinswick, député conservateur de Saint-John,
il faisait partie des cinq délégués de cette
province. Les deux hommes croyaient en une
confédération, tous deux étaient favorables au
chemin de fer et l’un comme l'autre avaient
connu des carrières militaires actives. On
peut croire que, s'ils s'étaient rencontrés
sur la rue Great George en cette semaine de
1864, ils auraient eu bien des choses à
discuter.
Écoutez à la porte, vous surprendrez peut-être leurs propos... |
Charlottetown : bivouac derrière le Visitor Information Centre |
Comme annoncé
par l'hôtesse à l'accueil touristique, la journée
s'annonce très belle avec des températures qui
avoisineront les 20°. Lever facile donc, dès 7:15,
sans avoir à faire démarrer le chauffage pour une
fois. La nuit aura été silencieuse sur mon grand
parking vide auprès d'un autre fourgon québécois
gris métallisé comme le ProMaster, mais un Roadtreck
sur Sprinter celui-là.
Après douche et déjeuner je parcours un peu guides et cartes remis hier soir pour décider de mon prochain itinéraire : je partirai d'abord vers le sud-est en suivant le Circuit côtier des pointes de l'est, 475 km qui longent d'assez près le rivage en suivant systématiquement les anses, baies et caps qui ourlent cette façade océane; la portion nord faisant face à la Baie des Chaleurs ést plus rectiligne et laisse une bonne place au réputé P.E.I. National Park de Greenwich avec ses dunes superlatives. |
Puis
je ferme le camion et retourne au centre ville pour
visiter les deux grandes curiosités identifiées hier :
Province House où se réunit le Parlement de
l'Île et où eut lieu la fameuse conférence de 1864 qui
posa les bases de la Confédération canadienne. Et
ensuite le musée d'art du Centre des Arts de la
Confédération, qui inclut aussi bibliothèque nationale
et grand théâtre consacré aux créations canadiennes
(dont une comédie musicale mettant en scène Anne
des Pignons Verts). Le chemin à travers
les vieilles rues est vite parcouru, mais hélas toute
la Province House est emmaillotée dans les
bâches et les échafaudages d'une restauration majeure.
Donc pas question de visite… En revanche les bâtiments
modernes du Confederation Centre sont ouverts,
et j'y pénètre sans tarder. |
Charlottetown : Confederation Centre |
Art Gallery du Confederation Centre : Leviathan (2015) et Émeraude (2017) |
Je gagne ainsi l'entrée de la Galerie nationale, joliment décorée d'une grande fresque et d"une sculpture contemporaine, mais dois attendre une dizaine de minute l'ouverture de sa porte à 10:00. |
Accueil prévenant (je suis le seul visiteur !) et locaux bien dessinés, malheureusement ici comme dans trop de musées contemporains on n'expose plus la collection permanente. toutes les salles sont consacrées à des exposition thématiques temporaires beaucoup plus ciblées, donc partielles et non représentatives de la production locale. Aujourd'hui on a choisi de présenter l’œuvre de Robert Harris, né dans l'Î.P.E. en 1849 mais qui voyagea un peu partout au Canada et en Europe avant de s'établir finalement à Montréal où il mourut en 1919. | Boite à croquis en acajou avec autoportrait, par Robert Harris (1908) |
Bessie in her Wedding Gown, par Robert Harris (1885) |
Elizabeth Putnam, par Robert Harris (1885) |
Charlottetown Confederation Centre : salle de la conférence de 1864 «reconstituée» |
En
sortant de la galerie je passe au bâtiment adjacent où
l'on a installé - assez grossièrement - une réplique
de la salle de la Conférence de 1864. Grande table
avec tapis vert, quelques éléments du décor et du
mobilier, mais des plaques de bronze gravées pour
identifier les participants… Je me serais attendu à
quelque chose de plus suggestif, des portraits en cire
et en costume par exemple. En revanche on y passe en boucle un court-métrage de Parc Canada fort bien fait qui présente de façon claire et complète les intentions, les enjeux, les personnes impliquées et le contexte historique. Du beau documentaire comme je les aime ! Comme je suis là encore à peu près le seul visiteur, cela me permettra un longue et passionnante discussion - en français ! - avec le guide animateur qui connait à fond son sujet et qui, Acadien, analyse finement les positions des francophones à l'époque et m'amène à vouloir reconsidérer le rôle et l'influence de Georges-Étienne Cartier, méconnu et incompris au Québec. |
Charlottetown : basilique cathédrale St-Dunstan |
Cathédrale St-Dunstan : vitrail de la Visitation |
Après cette longue et prenante discussion je regagne mon ProMaster non sans faire un petit tour dans la cathédrale basilique St Dunstan maintenant ouverte. Copie gothique assez réussie, les vitraux début XXème restent très classiques et sans originalité, mais les modernes font chanter les couleurs de façon beaucoup plus vivante. | Nef de la cathédrale St-Dunstan |
Phare de Point Prim |
Phare de Wood Island |
Cape Bear : le rivage du côté est |
Phare du Cap Bear |
Reconstitution du comptoir de Jean-Pierre Roma (1732-1745) |
Je
fais le plein d'eau en passant au Centre d'Accueil de
Tourisme I.P.E. près du Terminal de Wood Islands.
Après avoir atteint Bear Cape et son phare qui marque
la pointe sud-est de l'île, j'aborde une côte beaucoup
plus découpée où la route fait de longs détours autour
des baies qui se succèdent : Murray Harbour, St
Mary'Bay, longs estuaires de Montagüe puis de
Brudenell River. Une petite diversion me mène à l'extrémité de la pointe Roma où l'on a reconstitué quelques bâtiments en bois et pièce sur pièce du poste de traite établi en 1732 par l'entreprenant Jean-Pierre Roma (né à Bordeaux en 1715). Les Anglais brûlèrent l'établissement en 1745… |
Roma : un jardin et quelques uns des bâtiments du comptoir de Jean-Pierre Roma |
Réveil tôt sous un ciel encore une fois presque complètement dégagé; je réchauffe un peu l'habitacle avant de me mettre à la fin de ma rédaction, travaille encore un peu mes photos, me douche et déjeune en profitant du vaste espace maritime dégagé devant moi. Vers 10:30 je décolle pour la suite de mon périple. | Georgetown : bivouac devant le confluent des rivières Brudenell et Montagüe |
Georgetown : MacDonald House (1835) |
En
traversant le village, je repère plusieurs vieilles
maisons (mi-XIXème) assez élégantes, dont
celle où résida Andrew Archibald MacDonald, l'un des Pères de la Confédération
qui assista tant à la conférence de Charlottetown
qu'à celle de Québec, et semble-t-il en tant que
partisan de l'union… (En fait l'I.P.E.
ne se ralliera officiellement à la Confédération que
10 ans plus tard). |
Puis je m'arrête pour découvrir le Jardin commémoratif A. A. MacDonald. Dessin sans génie par un honorable jardinier local, mais choix judicieux des plantes dont beaucoup sont encore en pleine floraison, dans les plates-bandes colorées tout à fait victoriennes dispersées sur le vaste terrain herbu (gazon luxuriant) entre le Tribunal et le Théâtre du King County. | Georgetown : Jardins commémoratifs A.A. MacDonald |
Bassin de Launching Point avec ses casiers à homards et ses magasins |
Les
kilomètres défilent, je fais encore une longue boucle
à partir de Cardigan jusqu'à Launching Point, puis
ensuite de Dundas jusqu'à Annandale, puis jusqu'à Spry
Point et la très belle plage de Sally's Beach. Bonnes occasions d'aller trainer sur les quais de ces petits ports presque déserts : les bateaux sont à quai, les magasins contenant les casiers à homards sont entrouverts, mais personne autour de ce petit univers figé, comme en attente… J'y fais quelques photos de genre, puis continue jusqu'à Souris. |
À Souris, je suis surpris de ne rien découvrir de francophone ou d'acadien, malgré l'étiquette "établissement historique acadien" apposé sur la carte. À la station service où je fais le plein, on ne comprend pas un mot de français et je dois user de «tout mon p'tit change» d'anglais pour obtenir que l'on me dise si le musée provincial de la pêche de Basin Head est ouvert… Pour le reste je ne découvre rien de spécial dans la petite ville, surtout connue au Québec pour être le seul port d'embarquement vers les Îles de la Madeleine québecoises. | Le phare de Souris au dessus du port |
Depuis Spry Point, départ du traversier de Souris vers les Îles de la Madeleine |
Je me rends jusqu'au quai pour obtenir une idée des durées et du coût, mais les bureaux sont fermés, pas même un préposé à l'accueil… Je réaliserai en traitant mes photos - où on l'aperçoit au loin qui s'éloigne vers la pleine mer - que le dit traversier vient de partir et qu'il n'y a donc plus de service jusqu'au prochain départ ou arrivée. Je monte jusqu'au site de l'ancien phare historique juste au-dessus du quai, mais il est bien entendu fermé et ne semble pas offrir d'intérêt particulier ni d'information nouvelle. Pour le reste, vue habituelle et triviale sur le bassin portuaire et boutique de souvenirs - fermée elle aussi. |
L'arrivée à East Point
est assez abrupte, au propre comme au figuré puisqu'au
haut d'une côte dans une longue ligne droite on tombe
sur le panneau fin de route et un damier jaune et noir
sur un rail derrière lequel s'étale l'océan. La falaise
est haute et dangereuse, en tout cas assez pour qu'on
interdise l'accès au bord par une haute barrière
grillagée. Quant au phare il est bien sûr fermé, et l'ancienne salle abritant le Fog Horn (le "criard de brume" québécois) a été convertie en boutique de souvenirs… Plus rien du mécanisme, et aucune info sur le fonctionnement de ce phare pourtant important vu sa situation singulière au sud du Golfe du St Laurent. Finalement beaucoup de chemin pour voir peu de choses, tant au plan technique qu'au plan panoramique. |
Arrivée au phare d'East Point |
Je roule encore un peu
jusqu'à Naufrage (Shipwreck) où je m'attends à trouver
quelques restes ou au moins des anecdotes, mais rien,
sauf un joli phare bien placé sur la lande au bord de la
falaise tombant dans la mer, beau sujet photographique
dans la chaude lumière du soir qui descend. |
Phare de Naufrage sur la lande |
Plage de Beaver Point |
Le soleil est près de se coucher sur la mer, je fais quelques photos dans sa lumière si particulière mais ne m'attarderai pas, assiégé par des nuées de moustiques agaçants. Le soleil disparait complètement, une grande lueur mauve mêlée d'or le remplace pour un moment puis s'évanouit progressivement pour laisser place à la nuit noire où ne perce aucune lumière. Je me retire dans mon confortable habitacle, me débarrasse des quelques mouches et moustiques qui ont réussi à s'y infiltrer puis commence les routines de la soirée : carnet de route, photos, souper… Coucher à 22:30 avec le ressac en bruit de fond. |
Ce n'est pas le ressac qui m'a réveillé à plusieurs reprises, mais bien les rafales secouant le ProMaster. Un fort et continu vent du Nord a dû se lever au cours de la nuit, et ma situation pleinement exposé au-dessus de la plage n'offre aucune protection. Du coup, à mon lever à 7:30 sur fond de ciel bleu envahi par de grands bancs de nuages gris aux franges rosées je n'ai d'autre choix que de déménager mes pénates pour aller m'installer, une quinzaine de kilomètre plus loin, sur le grand stationnement presque vide du Parc National de l'I.P.E., section Greenwich. | Matin sur la Plage de Beaver Point |
Matin sur St-Peters Bay, en route vers les Dunes de Greenwich |
Enfin vers 15 heures je me décide à bouger : douche, préparation d'un plat consistant de macaronis au thon et sauce tomate, me voilà paré pour aller découvrir les Dunes de Greenwich, le sentier le plus renommé de ce parc national fort bien situé sur un promontoire à l'embouchure de la Baie St Peters. |
Promenade facile et très varié qui fait traverser d'abord d'anciens champs retournés à l'état sauvage, puis une forêt mixte que les feuillus parent de belles couleurs automnales contrastant avec le vert sombre des résineux. | Parc National de Greenwich : départ du sentier dans la forêt mixte |
Parc National de l'I.P.E.-Greenwich : sur la passerelle de l'Étang Bowley |
On emprunte ensuite une longue passerelle flottante sur un vaste étang (Bowley) qui remplit le creux jusqu'au pied du cordon de hautes dunes cachant l'océan. La végétation est bien entendu parfaitement conservée et mise en valeur comme dans un parc anglais, et la faune bien présentée et expliquée sur des anneaux clairs et riches en informations. On reconnait la touche Parcs Canada, remarquable et exemplaire. |
Elle est recouverte d'ammophile, cette herbe large et raide dont les racines et rhizomes entremêlés fixent le sable et ralentissent le déplacement de la dune. Vue superbe à 180° sur les hautes dunes couronnées d'herbe mais dont le flanc en partie découvert tombe sur la plage de sable rose. Les gros nuages aux couleurs changeantes donnent du relief au ciel où percent à éclipse les rayons du soleil jaune, un vent froid et constant balaie la grève où picorent de petits oiseaux gris et blancs, des pluviers siffleurs, vite effarouchés. Ils s'enfuient devant moi au fur et à mesure que je m'engage dans une longue marche vers la pointe, histoire de profiter un peu du très beau paysage, mais aussi de me réchauffer en brûlant les calories de mon copieux repas… | Parc National de l'I.P.E. : plage et dunes de Greenwich |
Les dunes de Greenwich |
Une petite incursion vers l'intérieur en montant sur la dune jusqu'à un belvédère bien placé fait découvrir les formations paraboliques qui occupent la péninsule; je poursuis sur la plage sur plus d'un kilomètre, mais ne voyant toujours pas apparaitre l'ouverture sur St Peters Bay, et surtout transi, je fais demi-tour jusqu'à l'escalier me ramenant à l'étang Bowley, puis chemin inverse jusqu'au stationnement. |
St-Peters : bivouac derrière l'église catholique romaine (1881-1926) |
Le soir tombe, j'hésite à m'installer sur le grand stationnement désert du Centre d'Interprétation - fermé pour la saison - où je cherche en vain un robinet pour remplir mes petites bouteilles d'eau potable,. Mais craignant que l'on ferme plus tard les barrières, je gagne un peu plus loin le village de St Peters et vais installer mon bivouac en arrière de St Peters Roman Catholic Church sur une butte, assez loin de la route pour n'en être pas vu et surtout ne pas entendre son trafic. |
Éveil et lever à 8:15, cette fois la nuit a été très calme derrière l'église. Je démarre tranquillement en faisant le plein de mes bouteilles d'eau potable sur le robinet du kiosque à pique-nique au centre du village, tout au fond de la baie. On y a une jolie vue sur la large étendue d'eau, sous un ciel bleu souvent obscurci par des bancs de gros nuages passant lentement. Il fait frais, mais le vent du nord s'est assagi, si bien que je ne sens pas le besoin de chauffer avant de partir. Premier arrêt quelques km plus loin à Midgell, sur le belvédère donnant sur St Peters Bay, où je déjeune en profitant des premiers rayons du soleil dans un ciel qui se dégage de plus en plus. | St-Peter's Bay |
Le quai de Red Head |
Un petit bout de route
me mène à Red Head, un modeste petit port de pêche où
l'on retrouve le spectacle habituel : cabanes de bois
alignées devant le quai remplies de casiers à homards,
quelques bateaux vides attendant l'hiver ? (beaucoup ont
été tirés au sec), et une grande paix devant l'ouverture
sur l'Océan. Je rejoins la Rte 2, large et rapide, qui me mène jusqu'à Tracadie (de consonance français, quoiqu'il dérive du mi'kmaq Telagadik signifiant un lieu de campement) mais sans de trace d'Acadiens (pas d'inscription en français ni d'étoile sur les façades). |
Détour vers la superbe
plage de Lakeside au delà d'un autre système de dunes
plus modeste que celui de Greenwich, mais la plage y est
tout aussi belle. J'en parcours là aussi un grande
section, impressionné par le jeu de vagues sous le grand
soleil et sous un ciel qui s'est maintenant presque
complètement éclairci. Courte vidéo envoyé à Monique
depuis mon téléphone… |
P.E.I. National Park : Dune de
Lakeside
|
Plage nord de l'Ile Robinsons |
Je continue jusqu'au bout où une digue/pont donne accès à l'île Robinsons, acquise par le parc en 1937. D'abord estivage couru (campings renommés près des plages) elle a été peu a peu délaissée et est devenue une réserve naturelle où l'on fait tout pour rétablir la flore et la faune d'origine. Elle est parcourue par un sentier de randonnée mixte (piétons et vélos de montagne) qui offre des vues variés sur le golfe du Saint-Laurent au Nord (plages superlatives même si froides désormais). |
Puis il s'insinue dans un sous-bois varié où joue la lumière, ponctués de petits panneaux informatifs sur la flore et la faune. J'y observe des oiseaux et un écureuil dont je parviens à capter un image malgré sa grande mobilité. | Sentier de l'Île Robinsons |
Rustico Bay |
Au sud ce sont des vues plus calmes sur Rustico Bay qui s'offrent à la méditation du promeneur solitaire… Là encore les pionniers Français des origines avaient eu le bon goût de s'y installer avant de disparaître apparemment complètement, déportés par les Anglais… |
|
Je quitte le parc après mes 4,4 km de marche, contourne le fond de Rustico Bay en arrière et rejoins la Route 6. À Rustico pourtant indiqué sur la carte comme ancien établissement français, aucune trace de présence de ceux-ci… |
Je poursuis vers le port de North Rustico illuminé par les rayons cuivrés du soleil vespéral, rate l'entrée est de la dernière section du P.E.I. National Park, trouve l'accès ouest à Cavendish et suis dans la lumière rouge du soleil couchant la superbe Parkway tracée sur les falaises rouges ponctuées d'anses et de caps. |
P.E.I. National Park, Cavendish : arche près d'Orby Head |
J'établirai mon bivouac
de ce soir sur le stationnement d'Orby Head, qui occupe
une boucle à l'écart de la route. J'y entends vaguement la
rumeur des vagues se brisant sur les rochers, mais pas du
tout le passage des quelques voitures. De toute façon il
s'arrêtera avec la tombée de la nuit. Souper d'une
excellente soupe de lentilles bio de Costco, complété de
fromage, puis d'un avocat et d'une banane arrivé aux
limites de la maturation… Rédaction du carnet de bord, chargement des photos, je suis au lit à 21:30, mes yeux se ferment tout seuls après tous ces bols de grand air. |
Lever vers 8:00 dans mon coin hyper-tranquille, un silence vaguement et occasionnellement éclaboussé par le ressac au bas de la falaise. | Lever de soleil sur mon bivouac à Orby Head |
Puis je reviens sur mes pas en faisant une pause au Cape Turner, dont l'accès est fermé pour cause d'éboulement. Passant prudemment la barrière provisoire, je m'approche précautionneusement du bord de la falaise mais dois limiter mon exploration, le sentier non entretenu ayant été envahi par les ronces. | Cape Turner |
Devant la plage de
Cavendish le grès
|
Là encore plusieurs panneaux explicatifs de Parcs Canada me retiennent un moment. L'un explique la géologie particulière de l'île toute de grès rougi par l'oxyde de fer, issu de l'usure puis de la pression de la couche de glace (3 km d'épaisseur !). En contraste, le sable blanc or des dunes et des plages, soumis au lavage des pluies et de la mer, a perdu son fer et donc sa couleur. |
Un autre panneau présente l'échouement du Marco Polo, l'un des plus rapides des grands voiliers en bois jamais construits (1851), qui portait près de 2300 m2 de voile et faisant la liaison Liverpool-Melbourne en un temps record. Vieillissant, affrontant une tempête dans le golfe du St-Laurent et prenant l'eau de façon dangereuse alors qu'il transportait du bois d’œuvre vers la Norvège, son capitaine choisit de l'échouer en eau peu profonde sur les cordons littoraux de Cavendish où son épave demeure, sauvant ainsi son équipage d'un naufrage en pleine mer. |
|
Une belle histoire que raconta Lucy Maud Montgomery dans ses premières années d'écrivaine, comme le présente le Centre patrimonial Green Gables quelques kilomètres plus loin. |
Ce superbe aménagement muséal de
Parcs Canada précède la mise en valeur de la Maison aux
pignons verts, une petite ferme appartenant à des
cousins, où Lucy Maud Montgomery situa le déroulement de
son roman consacré à Anne-Shirley des Pignons verts.
Ce premier roman (1908) eut un succès retentissant et devint le best-seller canadien le plus vendu au monde (plus de 60 millions !). Les murs du centre d'interprétation retracent de façon très vivante la vie difficile et exemplaire de l'auteure, tandis que la petite maison parfaitement restaurée à l'image du roman est un remarquable témoignage de la vie rurale dans l'Île du Prince Édouard au tournant du siècle. Une visite touchante et instructive, à souligner de ***. Il faudrait y amener Hermione et Gabriel. Je chargerai plus tard le 1er livre de la saga sur Fourtoutici et l'enverrai à Hermione. |
Green Gables : la petite ferme |
Salle à manger de Green Gables |
Chambre d'Anne à Green Gables |
Biographie de Lucy Maud MONTGOMERY d'après les panneaux du Site patrimonial de Green Gables Jeunesse (1874 à 1892) Lucy Maud Montgomery n’a pas tout à fait deux ans à la mort de sa mère. Son père migre vers l'ouest du Canada et ses grands-parents maternels (Macneill) la prennent sous leur aile dans leur maison de Cavendish. Ses talents littéraires se révèlent très tôt. Elle lit et relit tout ce qui lui tombe sous la main : poésie, ouvrages littéraires, revues... Elle griffonne contes et vers sur n'importe quel bout de papier. À l'âge de 15 ans, lors d'un séjour d'une année chez son père à Prince Albert, en Saskatchewan, elle publie son premier poème et ses premiers essais. Nostalgique de l'Île-du-Prince-Édouard, elle y retourne pour continuer ses études. Éducation et ambitions (1893 à 1898) Étudiante intelligente et acharnée, Lucy Maud Montgomery termine deux années de formation en enseignement en une seule au Prince of Wales College de Charlottetown. Elle s'inscrit ensuite à l’Université Dalhousie à Halifax où elle s'intéresse surtout à la littérature. La jeune enseignante doit concilier un horaire chargé et de multiples activités sociales tout en travaillant d’arrache-pied pour développer ses talents d’écrivaine. À la mort de son grand-père, Montgomery revient à Cavendish pour voir aux besoins de sa grand-mère. Une carrière en évolution (1899 à 1910) Tout en aidant sa grand-mère vieillissante à tenir le bureau de poste dans la cuisine même des Macneill, l’écrivaine poursuit l'édification de son œuvre. Esseulée et parfois démoralisée, elle entretient une correspondance épistolaire avec des collègues et se crée un réseau de soutien. Responsable du sac postal, elle expédie discrètement des textes à des éditeurs. En peu de temps, on publie des centaines de ses nouvelles et poèmes au Canada et aux États-Unis. En 1908, après plusieurs refus, Montgomery voit publié son premier roman, Anne, la maison aux pignons verts, qui s’attire un concert d'éloges et remporte un succès immédiat auprès du public. Épreuves de la vie (1911 à 1925) Après le décès de son aïeule, Lucy Maud Montgomery épouse le révérend Ewan Macdonald, un pasteur presbytérien avec lequel elle s'était fiancée en catimini cinq ans auparavant. Le couple s'installe à Leaskdale, au nord de Toronto, en Ontario. Elle se fait une gloire de materner ses deux fils sans jamais cesser d'écrire. Profondément bouleversée par la Première Guerre mondiale, Montgomery subit aussi de nombreuses épreuves personnelles, dont l'accouchement d'un enfant mort-né, le décès de sa meilleure amie Frede et les affres de la maladie mentale de son mari. Même en menant deux procès de front, Montgomery arrive à remplir ses rôles d’épouse et de mère et à répondre aux demandes de son éditeur, en produisant des romans plus populaires les uns que les autres. Une période mouvementée (1926 à 1934) La renommée de Montgomery grandit. Après qu’un long procès pour violation de droits d’auteur ait été réglé en sa faveur, elle continue à écrire et à publier ses œuvres. La famille déménage à Norval, non loin de Toronto. Les accès récurrents et débilitants de «mélancolie religieuse » de son mari minent la santé de L. M. Montgomery. Il lui faut cacher cette maladie mentale mal vue à l’époque, sans compter les inquiétudes que suscitent sa progéniture et sa situation pécuniaire. Elle revient en vacances à l’Île-du-Prince-Édouard et ne rate jamais une occasion de visiter Green Gables et Cavendish, ce qui la rassérène, autant que l'écriture. Journey’s End (1935 à 1942) La famille part s'installer à Toronto dans une nouvelle demeure que Montgomery surnomme «Journey's End» (la dernière étape du voyage). Malgré une santé physique et mentale défaillante, l'horreur que suscite un autre conflit mondial et des tensions familiales éprouvantes, elle continue à écrire jusqu’à ce qu'elle décède prématurément, chez elle, à l’âge de 67 ans. Son dernier manuscrit, The Blythes Are Quoted est expédié à son éditeur le jour de sa mort. La dépouille de Montgomery est exposée solennellement à Green Gables. Elle repose au cimetière de Cavendish, entourée des lieux que cette auteure de grand renom aura affectionnés. |
New-London : maison natale de Lucy Maud Montgomery |
Poursuivant vers l'ouest le Circuit côtier du Centre Green Gable (Rte 6), je gagne New London où, au coin de la Route 20, se trouve la petite maison natale de l'auteure. Ici pas de mise en scène, la bicoque des plus modestes a gardé toute sa simplicité. Mais bien qu'elle ait été elle aussi aménagée en mémorial, sa porte est close, je devrai me contenter de son aspect extérieur. |
L'église d'Indian River (1902) |
À Kensington donc je
reprends vers l'arrière une boucle vers le nord, jusqu'à
Malpeque et Indian River (grosse église au style
particulier) mais n'y trouvant pas d'intérêt particulier
et m'y égarant à nouveau, je rallie l'itinéraire proposé
et me rends jusqu'à Miscouche, point de départ du Circuit
côtier North Cape. |
Le point d'intérêt étoilé dans le G.V. y est évidemment le Musée acadien de l'I.P.E. qui m'intéresse au plus haut point, mais il fermera dans 20 mn… (fermeture à 16:00 le dimanche, 17:00 en semaine !) et il restera fermé demain, Fête de l'Action de Grâce. J'y passerai donc à mon retour dans deux ou trois jours, puisque je suis au noeud de la boucle ouest de mon périple dans l'I. P. E. | Musée acadien de Miscouche |
Le musée Bideford Parsonage (Presbytère) |
À Bideford le presbytère
(Parsonage) a abrité Lucy Maud Montgomery accueillie par
la famille du pasteur alors qu'elle fut, pendant 2 ans,
l'institutrice de la petite école. La maison a été
joliment conservée en musée meublé d'époque, mais est
évidemment fermée vu l'heure tardive Le 28 juillet 1894, après avoir obtenu son diplôme de Prince of Wales College à Charlottetown 2 l'âge de 19 ans, L.M. Montgomery devient enseignante à l'école Bideford n°6 et habite en pension au presbytère du pasteur méthodiste, M. Estey, et sa famille. L'ancien site de l'école est maintenant un parc commémoratif fréquenté par les résidents et les visiteurs comme aire de pique-nique. Deux ans après son passage à Bideford, après avoir mené des études en littérature à l'Université Dalhousie à Halifax, en Nouvelle-Écosse, L.M. Montgomery est revenue dans la région ouest de l'Île-du-Prince-Édouard pour enseigner, à l'école Belmont. |
Les Mi'kmaq de Lennox Island |
Je songe alors à aller visiter le Culture Centre Mi'kmaq de Lennox Island, l'une des deux réserves de l'I.P.E. (l'autre Abegweit Mikmaw Nation se trouve près de Tracadie). Au bout des longs ponts et digues qui relient maintenant l'île au continent, le village est assez propre et bien développé, et l'on m'envoie la main aimablement à mon passage. Mais le petit bâtiment est fermé, apparemment pour la saison; en revanche plusieurs panneaux explicatifs bien illustrés donnent quelques aperçus de l'histoire et de la culture de cette Première Nation qui occupa l'île et exploita Malpeque Bay depuis des millénaires. La ronde endiablée des moustiques du début de soirée me chasse après quelques photos que je déchiffrerai plus tard. |
Mi'kmaq Culture Centre de Lennox Island : séchage du poisson |
Mi'kmaq Culture Centre de Lennox Island : le mode de vie traditionnel |
Croyances
traditionnelles Les Mikmagq maintiennent qu'ils
n'ont pas immigré dans les Maritimes, mais qu'ils
sont originaires de la région. Un chef Mi'kmaq l'a
exprimé en-ces termes à un colonel britannique en
1765 : « La terre sur laquelle vous dormez est la
nôtre. Nous avons surgi de la terre comme les
arbres, l'herbe et les fleurs. »
La création d’Epekwitk Il y a bien des milliers
d'années, le Créateur a façonné l'univers et la vie.
Il chargea Glooscap de prendre une portion du
firmament pour en faire la patrie des Mi'kmaq. Guidé
par le huard, le messager aquatique, Glooscap déposa
un croissant d'argile rouge dans le golfe du
Saint-Laurent. Comme le Créateur l'en avait
instruit, Glooscap décocha ensuite une flèche dans
un arbre. L'arbre se fendit en deux pour livrer
passage à deux formes humaines. Epekwitk devint un
joyau étincelant bercé par les vagues, la demeure
des Mikmaq.
|
Mi'kmaq Culture Centre de Lennox Island : la création d'Epekwitk |