CANADA OUEST
Août-sept. 2020

(10 138 km)


Jean-Paul en solo à bord de son ProMaster


Photos visibles en pleine grandeur et en diaporama sur Google Photo :
https://photos.app.goo.gl/JFvjyLSkAPFYUJUG9



Troisième partie : les Rocheuses (suite)


43 749 Mercredi 9 septembre 2020 : de GOLDEN à LAKE LOUISE (136 km)

Nuit très fraîche (4°C annoncés pour 5:00), aussi réveillé vers 3:00 j'ai mis en route le chauffage qui aura fonctionné toute la fin de la nuit et m'aura permis un lever pas trop souffrant… hormis les courbature ! Voilà le métier de randonneur qui rentre !!! Réveil à 7:00 avec la lumière, levé à 8:00 avec le soleil. Douche et déjeuner au calme - il ne passe presque personne sur ma rue - puis je m'attaque au carnet que j'achève à 10:30 en consultant cartes et guides pour planifier la suite de mon périple. Direction Lake Louise, avec le projet de retourner au Lake Emerald et d'en faire le tour, aujourd'hui où le grand ciel bleu devrait mettre en valeur la couleur de ses eaux.

Bivouac devant le parc à Golden
Bivouac devant le parc à Golden

Une montée assez raide de la Transcanadienne, pas encore redressée, donc en corniche et à 2 voies, assez lente, s'achève par une partie déjà convertie en large 4 voies : la Ten Miles Hill. Des travaux gigantesques (voir la haute tranchée taillée dans le rocher) ont permis cette réussite, et les travaux continuent, tout en tâchant de parer au maximum au problème  des avalanches. D'ailleurs celles-ci ont été tout aussi préoccupantes dans la construction des lignes de chemin de fer du Canadian Pacific qui a dû finalement creuser des tunnels dans les zones les plus exposées.

Ten-Miles-Hill en quittant Golden
Ten Miles Hill en quittant Golden

Au-dessus
            de Golden la tranchée dans les Ten Miles Hill
Au-dessus de Golden la tranchée dans la Ten Miles Hill

J'arrive bientôt à l'embranchement vers le lac Emerald, 26 km d'une fort belle route de montagne qui suit le cours de la Kicking Horse River, un  gros torrent aux eaux vert jade. Arrêt au Natural Bridge pour déjeuner et jeter un autre œil sur le phénomène, sous la grande lumière cette fois.

La
                    Kicking-Horse River en amont de Natural Bridge Natural Bridge: la chute La Kicking Horse River en amont de Natural Bridge

Encore une vingtaine de km, et j'atteins la fin de la route devant l'Auberge (Lodge) qui s'annonce par de longues files de voitures garées le long des bermes, tant le petit parking juste devant le lac est bondé. Je me gare sur le premier espace venu, chausse mes Clarks et me lance aussitôt dans les 5,2 km du sentier, dans l'ensemble excellent, qui en longe le rivage.

Lac-Emerald-depart-du-tour-du-lac
Départ du tour du lac; en face le Mt Burgess

Schistes de Burgess - plaque UNESCO
Schistes de Burgess - plaque UNESCO

Fossiles-des-shistes de-Burgess
Découverte de fossiles dans les schistes du Mont Burgess

Quelques panneaux et photos donnent beaucoup d'informations sur les fossiles des schistes de Burgess, découverts il y a maintenant plus d'un siècle et qui sont parmi les plus anciens du monde (550 millions d'années !). L'on aperçoit fort bien, là-haut au flanc du Mt Burgess (2 599 m) qui domine le lac au sud, les zones où se firent et se font encore les découvertes.

Mt
            Burgess
Mont Burgess et la zone fossilifère sur la droite

Ma promenade est plus prosaïque, donnant surtout à voir les eaux très chargées en particules érosives (dite farine de roche) descendant des parois alentours. Ce sont elles qui donnent au lac quasi circulaire cette merveilleuse couleur émeraude, étonnante par sa vivacité et son uniformité. En fait ces particules absorbent toutes les couleurs du spectre sauf ce bleu émeraude qui seul ressort. Quant au lac lui-même, il résulte de la fonte des glaciers alentour dont il ne reste que des bribes sur les plus hautes crêtes. Les forêts qui couvrent les bas des pentes et les éboulis assez abrupts de rocs nus apportent une forte note de vert foncé, elles descendent jusqu'au bord de l'eau, si bien que la plus grande part de la balade se fera à leur ombre, avec de fréquentes ouvertures sur les eaux bleu émeraude piquetées des taches rouge orangé des canoës de location.

Sur le sentier faisant le tour du Lac Emerald
Sur le sentier faisant le tour du Lac Emerald
Les eaux émeraude du Lac Emerald
Les eaux émeraude du Lac Emerald

Pic et glacier Emerald depuis le lac
Pic et glacier Emerald depuis le lac

Parc Yoho - bout du lac Emerald en cours de comblement
Parc Yoho - extrémité nord du lac Emerald en cours de comblement

Parc Yoho-Lac - Esmerald sentier en sous-bois
Sentier en sous-bois autour du Lac Emerald
 

Canotage sur le lac Emerald
Canotage sur le lac Emerald
En famille au bord du Lac Emerald
En famille au bord du Lac Emerald ceinturé de montagnes au nord-ouest

Lac
                  Emerald
Lac Emerald : derrière l'Auberge, le Mt Field ?
Location de canots sur le Lac Emerald
Dernier coup d’œil vers les canots et le Michael Peak en quittant

Au total une bien jolie balade d'une heure et demie, ponctuée d'arrêts photos ou lecture des panneaux expliquant géologie, formation glaciaire, avalanches, etc. aux endroit stratégiques. Voilà qui me repose après mes efforts d'hier sans trop ajouter à la fatigue, et continue de me dérouiller muscles et articulations. Au retour sur la moraine et au trop plein par où s'écoulent les eaux du lac, on traverse le Lodge (Auberge) qui offre un ensemble de charmants pavillons fleuris de 2 ou 4 studios disséminés sur les rochers et noyés dans les arbres (un peu trop à mon goût, car ils coupent la vue pourtant exceptionnelle). Mais quel joli coin pour venir prendre le vert ! hors saison, bien sûr, car en revenant à mon point de départ, je retrouve la foule…

La route du Lac Emerald ratrappe la Transcanadienne à
            Field
La route du Lac Emerald rattrape à Field la Transcanadienne que longe la Kicking Horse

Je ne m'attarde donc pas, prends encore quelques vues, me rafraîchis et me repose en regagnant mon home, puis emprunte à rebours la jolie petite route sinueuse qui me ramène à la Transcanadienne. Encore une dizaine de km en suivant la large lit caillouteux de la Kicking Horse, et c'est l'embranchement vers Takakkaw Falls, qui s'insinue entre le Mt Field (2 635 m) et le Mt Ogden (2 695 m). Entre ces deux énormes blocs rocheux, la Rivière Yoho s'est frayé un profond canyon que remonte la route, au prix d'un passage très raide compensé par une double épingle à cheveux assez acrobatique. Au bout, déboulant d'une très haute falaise verticale de plus de 300 m vivement éclairée par le soleil vespéral, le long ruban de la chute dégringole en 3 ressauts sur 254 m, une des plus hautes du Canada. Un arc-en-ciel se forme dans ses embruns dont, en s'approchant, on ressent la fraîcheur soudaine : l'eau abondante provient directement du glacier Daly au-dessus, et elle se vaporise en tombant.

Takakkaw Falls
Takakkaw Falls
Premier saut de Takakkaw Falls
Takakkaw Falls

Beaux coups d’œil sur la Yoho River dont les eaux bouillonnantes vert jade courent dans sa vallée encadrée de hautes montagnes (Mt Daly 3 152 m, Mont The President 3 129 m).

Yoho River
Yoho River encadrée de montagnes
Rivère Yoho

Vallée de la Yoho depuis la Transcanadienne
Vallée de la Yoho depuis la Transcanadienne

La lumière descend, je fais demi-tour sans pousser plus loin la balade jusqu'aux Chutes Laughing (4,4 km parcourus en août 2000 avec Monique), décevantes. Je préfère gagner directement le village de Lake Louise où j'espère trouver un point de chute pour la nuit.

Mais il faut d'abord achever de monter le fameux col de Kicking Horse (1 627 m) facile mais très long, dont la construction fut un exploit, en particulier à cause des avalanches. C'est d'ailleurs ce qui motiva en partie le réaménagement de la ligne initiale du Canadian Pacific qui passait (entre 1885 et 1909) là où se trouve maintenant la route, avec une pente excessive de 4,5 %. Cette «Grande Pente» fut la source de nombreux accidents, déraillements et emballement des locomotives - dont certaine explosa ! La construction de doubles «tunnels en spirale» au creux des Mts Cathedral et Ogden permit de doubler la longueur de cette section et donc de diminuer la pente de moitié. J'ai la chance de voir passer un long convoi dont une partie entre dans le tunnel inférieur tandis qu'une autre partie en sort à contresens une quinzaine de mètre plus bas. Remarquable exploit technique… bien mis en valeur par la présentation in situ du petit Parc Historique Canada (voir photos ci-dessous).


Spiral
            Tunnels : Courte mais raide !
Spiral Tunnels : le plan
Spiral
            Tunnels : La pente douce

Tunnel inférieur dans le Mt Ogden
Tunnel inférieur dans le Mt Ogden, en arrière le Mt Cathedral où se trouve le tunnel supérieur

Un train passe dans le tunnel inférieur du Mt Ogden
Un train passe dans le tunnel inférieur du Mt Ogden

Ensuite la fin de la montée du Kicking Horse Pass me semble de la petite bière, avec nos moteurs puissants et l'excellente chaussée de la Transcanadienne ici pleinement aménagée et élargie. Je franchis à côté d'un petit lac la ligne de partage des eaux Atlantique - Pacifique, puis une bonne descente très panoramique me ramène en vallée à Lake Louise.

Kicking Horse Pass - ligne de partage des eaux
Kicking Horse Pass - ligne de partage des eaux Atlantique - Pacifique

Il est passé 18:00, le soleil est près de se cacher derrière les montagnes, il est temps de trouver un point de chute pour la nuit. Je tourne un peu dans les quelques rues du minuscule village essentiellement dévolu au tourisme (et autrefois à sa gare de délestage avant la montée du col), hésite un peu à me caser sur une rue bordée de «ressorts» (appartements à louer). Finalement je vais poser ma cabane à roulette sur le petit stationnement devant l'ancienne gare reconvertie en restaurant, en impasse et juste au bord de la rivière. Un petit panneau indique bien «Interdit entre 22:00 et 7:00», mais les campings affichent «Full», et il faut savoir parfois prendre des risques ! Souper d'une de mes dernières (hélas !) excellentes soupes Knorr françaises, chargement et traitement des 99 photos de la journée, début d'écriture… et coucher avant 22:00, encore une fois bien fatigué. Demain sera une autre belle journée !


43 885 Jeudi 10 septembre 2020 : LAKE LOUISE (35 km)

Le parking s'est vidé à 21:30, et je suis resté seul sans subir aucun dérangement pendant la nuit. Même le lent passage tout proche des longs trains de marchandise a fini par s'estomper, ou du moins je ne les ai plus entendus… J'allume le chauffage vers 3:30, la nuit étant encore une fois très fraîche, en mettant cette fois les ventilateurs arrière à leur vitesse minimum, beaucoup plus silencieuse mais suffisante pour assurer le transfert de chaleur, et me rendors jusqu'à 8:00.


Lake Louise Village : bivouac sur le parking de la
            gare, près de la rivière
Lake Louise Village : bivouac solitaire sur le parking de la gare, près de la Bow River

Après lever confortable et déjeuner peinard, je gagne le site du Lac Louise 5 km plus haut. J'y découvre un parking bondé mais réussis à m'y caser néanmoins et, prenant une longue pause au grand soleil et dans la verdure, entreprends de rédiger le carnet en souffrance,  avant de me lancer dans un petit tour du lac vers 11:30.

Petit tour… façon de parler ! La première partie de l'aventure est facile, trop peut-être : une allée en sous-bois descend directement du parking jusqu'à la rive parfaitement aménagée avec plancher de bois, fleurs, muret de pierre, location de canoës, etc.

Lake Louise : arrivée sur la terrasse devant le lac
Lake Louise : arrivée sur la terrasse devant le lac

On passe alors devant le grand palace construit par le C.P. dans les années 1900, puis  un joli sentier absolument plat longe la rive sur le côté droit du lac, puisque le côté gauche, trop pentu et sujet aux avalanches, n'a pas été aménagé. On se rend ainsi jusqu'au bout du lac, côté glacier, qui se résout en un espèce de marécage sableux progressivement conquis par une maigre végétation. En arrivant à ce point j'ai déjà parcouru près de 3 km d'un pas alerte, en admirant les montagnes qui encadrent le lac sur les côtés, et surtout le formidable amphithéâtre formé par le groupe de glaciers, au fond de la vallée glaciaire, en arrière plan des moraines caillouteuses en partie recouvertes de forêts.

Lake Louise : La carte postale
Lake Louise : la carte postale avec, en arrière-scène, les restes du glacier Victoria

Tour du lac Louise : vue vers l'hôtel
Depuis le sentier faisant le tour du lac Louise, vue vers l'hôtel

Tour du Lac louise : vue vers le glacier
Depuis le sentier faisant le tour du Lac Louise, vue vers le glacier et le bout du lac

C'est alors que cela se corse, car je veux, comme avant-hier, aller voir les glaciers de plus près, du moins ce qu'il en reste. Il s'agit apparemment d'une autre - relativement courte - balade de 3,2 km jusqu'à la Plaine des Six Glaciers, où l'objectif est un petit salon de thé bâti dans le style de son pays par Edward Feuz, le plus ancien des guides suisses importés par le C.P. Le hic, ce sont les 365 m de dénivelé sur un sentier pas toujours bien aménagé ou entretenu, et qui prend, trop souvent à mon goût, des allures de pierrier…

Lake-Louise: le glacier Victoria depuis le bout du lac
Le Mt Lefroy (3 423 m) depuis le bout du Lac Louise

Lake
            Louise: spermophile guettant le touriste et ses provisions
Lake Louise: spermophile guettant le touriste et ses provisions

Fond du lac Louise en cours de remplissage
Fond du lac Louise en cours de remplissage et de boisement

Sur le
            Sentier des la Plaine des Six glaciers
En montant sur le Sentier de la Plaine des Six Glaciers

Lake Louise au sortir des arbres
Vue sur le Lake Louise au sortir des arbres

Première partie agréable, ombragée par la forêt, sur un sol bien remblayé et régulier, malgré la pente qui commence. Malheureusement déjà là apparaissent des zones où roches et racines dépassent plus ou moins du sol, forçant à casser le rythme et garder les yeux rivés sur la terre. Cela devient bien pire lorsque la forêt s'efface pour laisser place à une végétation plus basse et plus lâche, buissons mêlés d'herbes et de fleurs, qui a progressivement envahi les moraines latérales. Le sol est souvent chaotique et grimpe allègrement pour atteindre enfin un terrain plat où se trouvait autrefois la base du champ de glace, maintenant très rétréci et perché beaucoup plus haut.

Lake-Louise: Sentier de la Plaine des Six-Glaciers sur
            la moraine
Sentier de la Plaine des Six-Glaciers : grimpée sur la moraine au sortir des arbres

Sur le Sentier de la Plaine des Six Glaciers
Sentier de la Plaine des Six Glaciers : passage sur la barre rocheuse érodée

Sur la moraine spermophile à dos doré
Sur la moraine, un spermophile à dos doré médite...

Suite du Sentier de la Plaine des Six Glaciers
Suite du Sentier de la Plaine des Six Glaciers; au fond Mont et Glacier Victoria

Depuis le Sentier de la Plaine des Six Glaciers, le
            glacier dévasté
Depuis le Sentier de la Plaine des Six Glaciers, le glacier dévasté.
The Mitre (2 886 m) et le Mt Lefroy


C'est au bord de cette «plaine» maintenant herbue, fleurie et partiellement arborée, à proximité d'un torrent descendant de l'un des glaciers, qu'est niché le Salon de thé, un joli petit chalet suisse ou autrichien avec galerie en bois et toit à 2 pentes. Les prix sont évidemment proportionnels à la distance de la civilisation (tisane à 4 $, salade à 10 $, etc), aussi je me rafraîchirai directement sur l'eau pure et fraîche du torrent.

Plaine des Six Glaciers : le chalet suisse de
                  1920
Plaine des Six Glaciers : le salon de thé, un chalet suisse d'Edward Feuz (1920)
Lake-Louise : Glacier Victoria
Lake-Louise : Glacier Victoria et Death Trap

Plaine des Six Glaciers : panorama devant le salon de
            thé
Plaine des Six Glaciers : panorama devant le salon de thé

La vue sur 240° est grandiose, puisqu'on se trouve au centre même du cirque glaciaire qui a donné naissance au Lac Louise, un ensemble de 7 glaciers placés en amphithéâtre. Le babillage du torrent est soudain troublé par l'explosion d'une chute de pierre : c'est une avalanche qui vient de se produire tout en haut d'une petite branche du Lefroy Glacier juste en face, on en aperçoit la trainée brune sur la neige...

Lake Louise-: The Mitre (2 886-m) et le Glacier
                  Lefroy
Plaine des Six Glaciers : The Mitre et Lefroy Glacier en face du salon de thé
Lake Louise : avalanche dans Abbott Pass
Avalanche dans Abbott Pass (au centre dans la photo précédente)

Quelques panneaux explicatifs soulignent non seulement le recul du grand glacier Victoria qui occupait initialement toute la vallée, mais aussi  la quasi-disparition des 7 glaciers historiques restant qui ne sont plus maintenant que de petits carrés blancs près des cimes, loin au dessus de nos têtes. Vous avez donc raison, M. Trump, le réchauffement climatique, c'est vraiment de la foutaise !

Retour sur le Sentier de la Plaine des Six
                    Glaciers
Retour sur le Sentier de la Plaine des Six Glaciers
Le sentier éboullis
Le sentier/éboulis dévalant sur l'ancienne moraine

Je tâche de récupérer le gros effort et les suées qu'il m'a fallu déployer pour me rendre jusque là, fais quelques photos des alentours, prodigieux, et me lance dans la descente sur le même sentier. Au moins l'effort à déployer pour hisser mes 80 et quelques kilos n'est plus là et mon souffle reste-t-il régulier, mais ce sont mes articulations, hanches, genoux et chevilles qui peinent à chaque secousse sur les pierres irrégulières du sentier. Et dans les zones plus plates, ce sont mes vieux muscles, pas assez entrainés, qui me font tirer la patte…

Sentier de la Plaine des Six Glaciers : descente vers
            le lac
Sentier de la Plaine des Six Glaciers : descente vers le lac
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Descente sur la moraine
Descente sur la moraine

Je prends alors davantage le temps de jouir de l'environnement qui valait bien cette petite expédition dans les hauteurs, et admire les forces colossales déployées par la nature. Elle a le temps, les processus sont lents à notre échelle, mais inexorables… et rien ne dit qu'une autre glaciation ne viendra pas un jour bouleverser à nouveau le paysage !

Moraines
Moraine latérale de l'ancien grand Glacier Victoria
Vergerette
Flore : vergerette

Enfin j'achève de descendre l'énorme moraine caillouteuse, passe devant quelques imposants rochers verticaux émergeant de la forêt sur lesquels quelques jeunes s'entrainent à la varappe, et qui me semblent comme les portes fantastique placées là par la haute montagne pour borner son domaine. Ne restent que les 3 km sur le beau sentier confortable au bord du lac pour rejoindre le parking et mon refuge où je pourrai me reposer, boire et manger.

Les Portes de la Montagne
Lake Louise : les Portes de la Montagne

Une canette de bière et une boite de haricots façon barbecue bien dans la tradition de l'Ouest seront mon premier réconfort, sans compter le bâton de crème glacée, et de l'eau, beaucoup d'eau… après ces 13,3 km fidèlement enregistrés par mon IPhone. Je me repose un peu sur le grand parking qui se vide et sous le soleil qui descend : il est passé 17:00 et je suis parti à 11:30 ! Il est donc temps de rentrer au village pour tâcher de trouver un bivouac pour la nuit.

Arrivée au Lac Moraine
Arrivée au Lac Moraine

Sur la petite route qui descend en serpentant dans la forêt je passe devant celle donnant accès au Lake Moraine : elle n'est plus barrée comme ce matin, la voie est maintenant libre pour cette autre curiosité exceptionnelle. Malgré ma lassitude, j'enfile cette autre route de 13 km et me rends tout près de l'eau, jusqu'au parking qui se vide rapidement. Je laisse là le ProMaster et, en titubant un peu, entreprends d'escalader les quelques centaines de mètres à travers d'énormes rochers entassés qui retiennent les eaux du lac.


Déversoir du lac en arrivant au Lac Moraine
Éboulement (à gauche) et déversoir du lac encombré de bois flotté en arrivant au Lac Moraine
Soir sur le Lac Moraine depuis l'Éboulement
Soir sur le Lac Moraine depuis l'Éboulement

Depuis les sentiers aménagés sur le sommet de cet Éboulement se déploie un splendide panorama sur les eaux émeraudes, encadrées par la chaines de Dix Pics pointus dits Wenkchemna, dont les éboulis tombent à pic dans l'eau. Quelques petits canots profitent des derniers rayons du soleil qui descend rapidement derrière les montagnes à l'ouest, densément couvertes de sapins. Les touristes sont encore nombreux à se hasarder sur le chaos rocheux pour jouir du spectacle et prendre force photos et selfies… mais la magie du lieu opère quand même durant les longues minutes que je passe assis sur une roche à contempler le spectacle.


Le soleil descend sur la Lac Moraine
Le soleil descend sur la Lac Moraine.
Le soleil a quitté le Lac Moraine
Le soleil a fini par quitter le Lac Moraine

Le soleil finit par disparaître tout à fait, il est passé 18:00, le froid brusquement se fait sentir, je regagne l'abri du ProMaster.  Le soir tombant, je retourne au centre du village pour faire quelques courses de première nécessité à l'unique petit supermarché, sorte de gros dépanneur qui profite de son monopole pour pratiquer des prix époustouflants : j'y paie 4 $ la cruche de 4 litre d'eau potable (même prix que l'essence !), et encore sont-elles nettement plus économiques que la douzaine de petites bouteilles d'un demi-litre à 9,95$… Puis je me mets en quête d'un stationnement. Partout fleurissent les indications «Interdit de 22:00 à 7:00»; je retournerai donc au stationnement devant la gare, pareillement signalé, mais où personne ne m'a ennuyé la nuit dernière. Une voiture de Parcs Canada passera bien vers 20:00, attirée par deux grosses fourgonnettes où deux familles s'affairent à conclure leur souper (avant de quitter à la tombée de la nuit), mais je ne la reverrai pas ensuite. Je passerai donc ici une autre nuit tranquille et reposante, sinon silencieuse vu le rare passage des trains, et une rapide mise en route du chauffage vers 4:00.

Souper tard vers 22:00 avant de plonger aussitôt dans le sommeil qui me fera récupérer de mes 14,7 km de montagne parcourus à pied dans la journée.


43 920 Vendredi 11 septembre 2020 : de LAKE LOUISE à SASKATCHEWAN CROSSING (82 km)

Lake Louise Village : 2ème bivouac devant la gare
Lake Louise Village : 2ème bivouac devant la gare

Réveil à 8:00 sous le grand soleil. La clé de contact fait un peu des siennes au moment où je veux déplacer le ProMaster devant le soleil, ce qui ne fait battre un peu le cœur, mais ce n'est qu'un effet du système de temporisation (dont je ne comprends miette) et les choses se replaceront vite. J'aurai seulement été incapable de faire griller mes deux tartines…

Écriture du carnet et long téléphone avec Monique me mènent jusqu'à 10:45, lorsque je remets le contact pour prendre la route vers le Nord : au programme vallée de la Bow et Promenade du Champ de Glace. En quittant Lake Louise je ne fais que quelques kilomètres sur la Transcanadienne et bifurque bientôt sur la Route 93 Nord, spécifiquement route du parc pour laquelle il faut obligatoirement prendre une vignette à la guérite. Avec mon permis annuel, j'en suis évidemment dispensé et commence ma longue exploration de cette partie des Rocheuses canadiennes.

Toute cette route n'est qu'un long panorama qui se déroule devant le pare-brise, tout-à-fait spectaculaire. Sur la droite ce sont d'abord les Monts Hector (3 394 m) et Molar (3 002 m), puis Dolomite (2 782 m) qui forment une muraille presque continue.  À gauche la vallée est plus large, i.e. qu'elle contient les lacs issus des glaciers qui les alimentent, eux aussi perchés au dessus ou entre les cimes : d'abord le Champ de glace Waputik (où s'abreuvait la chute Takakkaw vue avant-hier), autour de la crête du Daly, puis je dépasse le lac Hector, à peine visible au milieu de ses sapins serrés. Je passe ensuite un bon moment sur une grand remblai en construction au dessus du Mosquito Creek. Bien à l'écart de la route, je déjeune en profitant du magnifique paysage (Mt Balfour à 3 272 m), du grand soleil et de la paix, sans aucun moustique pour m'achaler…!

Sur la
            93N le Mt Hector
Sur la 93N le Mont Hector

Dolomite
            Peak
Dolomite Peak

Pause déjeuner devant Mosquito Creek
Pause déjeuner devant Mosquito Creek

Après un bon café tranquillement savouré (ah, ma Wacaco dont j'apprécie encore plus le délicat expresso !) je reprends la route qui contourne le Mt Bow (2 868m) et dévoile le Crowfoot Glacier, bien reconnaissable à sa forme tridactyle en patte de corbeau. En dessous c'est le long Lac Bow, où je ferai une autre halte prolongée pour suivre à pied le rivage et voir le Crowfoot Glacier sous son meilleur angle. En revanche le Glacier Bow et sa cascade, par laquelle il se déverse au milieu de la rive du lac qui m'est opposée, sont plus difficiles à capter, car en plein contrejour, et le soleil n'est plus aussi haut qu'en juin… Autre arrêt près de l'Auberge Numti Jahpour admirer ce lac sous un autre angle.

Lac
            Bow
Le Lac Bow depuis l'Auberge Numti Jahpour

Glacier Crow-Foot au-dessus du Lac Bow
Glacier Crowfoot au-dessus du Lac Bow

Glacier Crowfoot
Vu d'un peu plus loin sur la Route 93, le Glacier Crowfoot en arrière

La route continue : sur ma droite (donc à l'est) se poursuit la ligne presque ininterrompue de hauts blocs dont la roche grise ou brun clair culmine à 2 993 m (Mt Cirque), 3 174 m (Mt Observation), 3 080 (Mt Weed), jusqu'à ce que j'arrive à la route d'accès à l'extraordinaire Lac Peyto, malheureusement fermé (et bien clôturé !) pour travaux majeurs d'infrastructure. La route qui a alors atteint son apogée, redescend tranquillement vers les lacs Mistaya puis Waterfowl, au pied des monts Caldron (2 917 m) puis Patterson (3 197 m) et Aries (2 996 m). Entre eux se devine l'extrémité  des glaciers qui les surmontaient et dont il ne reste hélas plus grand chose (de visible en tout cas). La silhouette caractéristique de pyramide très pointue du Mt Chephren (3 266 m) attire l'attention, tandis qu'à droite le «mur» se poursuit : Mts Noyes (3084 m), Totem (3 155 m) et au loin le Mt Murchison (3 333 m).

La pyramide aigue du Mt Chephren pointant à 3 266 m
La pyramide aiguë du Mt Chephren pointant à 3 266 m

Lac Waterfowl
Lac Waterfowl

Mont Wilson
Mont Wilson

J'arrive alors au niveau du Canyon creusé par la Mistaya (qui tire ses eaux du Lac Peyto). Un sentier de 500 m à gauche de la route permet d'aller admirer son cours torrentueux avant qu'elle se précipite dans de profondes marmites de géant surmontées d'une passerelle. Spectacle dantesque que ces gouffres sombres au fond desquels on voit à peine tourbillonner l'eau bouillonnante. Plus loin, autre petit glacier autour du Sarbach (3 127 m).

Ena mont
            du canyon de la Mistaya
En amont du canyon de la Mistaya


Canyon de
                  la Mitaya
Canyon de la Mitaya : l'eau s'engouffre...
Dans les marmites de géants
...dans les marmites de géant

La route toujours aussi spectaculaire continue de descendre jusqu'à atteindre le Saskatchewan River Crossing, où la large rivière qui s'écoule vers l'est s'étale largement dans une magnifique vallée que franchit la route.

Sur la 93N entre Mistaya Canyon et Saskatchewan Crossing
Sur la 93N entre Mistaya Canyon et Saskatchewan Crossing

Saskatchewan Crossing vers le nord-ouest
Saskatchewan Crossing vers le nord-ouest

Saskatchewan Crossing vers l'aval
Saskatchewan Crossing vers le sud-est


Saskatchewan Crossing

Je m'arrête évidemment pour quelques photos, puis apercevant un chemin descendant vers le lit de la rivière au milieu de maigres bouquets d'arbres, je m'y engage et découvre le lieu idéal pour mon étape d'aujourd'hui : terrain plat, pas trop les pieds dans l'eau (on ne sait jamais, un orage…), une vue imprenable dans l'axe de la large vallée vers l'est (pour profiter du soleil matinal) et une distance suffisante de la route pour ne rien en entendre. Il est passé 18:00, je m'installe dehors, sors une chaise et regarde tranquillement le soir descendre sur les montagnes qui rosissent, tout en achevant, l'ordi sur mes genoux, une première correction de ce carnet pour lequel Olivier a manifesté son intérêt.

Bivouac du ProMaster à Saskatchewan Crossing
Bivouac du ProMaster à Saskatchewan Crossing

Bivouac à Saskatchewan Crossing
Mon bivouac à Saskatchewan Crossing

Vue
            sur glacier et neige depuis mon bivouac
Vue sur glacier et sommets depuis mon bivouac

Après le coucher du soleil la lumière restera belle longtemps, mais la nette baisse de température m'amènera à battre en retraite dans la tiédeur de mon home, d'où je continuerai de profiter du panorama jusqu'à ce que tombe l'obscurité. Un autre petit fourgon est venu bivouaquer à quelques distance de moi, tourné de l'autre côté et restera discret. Souper, chargement et dénomination des photos puis début de rédaction de cette page du carnet. À 22:00 je suis au lit.

Crépuscule sur Saskatchewan Crossing
Crépuscule sur Saskatchewan Crossing


Suite : 2020-09 Canada Ouest - 4. Les Rocheuses (fin)

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