Intéressantes
perspectives philosophico-historiques dans ce fort beau
musée, mais ma longue quête de connaissances - et
l’effort physique déployé pour y accéder… - me laissent
fatigué et affamé. Je prend donc le chemin du retour vers l’Exsis garé en bord du port, de l’autre côté de la basse ville. Je ne ferai guère d’autres découvertes en chemin, puisque tant le Ghetto degli Ebrei (salle d’exposition dans l’ancienne synagogue) que la Basilica di Santa Croce (Jésuite) sont fermés… Je goûte quand même à la belle ambiance sur le belvédère devant le parvis de cette église. Je passe ensuite la torre dell’Elefante (l’éléphant en question sculpté dans la pierre est bien visible sur son flanc, une dizaine de mètres au dessus de la rue) puis continue à descendre par une volée d’escalier assez raide jusqu’à regagner la place Yenne, puis la Via Roma pour retrouver enfin l’Exsis au bout du quai. |
Torre
dell'Elefante
|
Cagliari: Via Spano, au pied de la Haute Ville |
J’ai hâte de
m’assoir et de manger un morceau après cette longue et
fatigante balade. Une boite de saucisses aux lentilles
vite réchauffée fera l’affaire, et 30 minutes plus tard
je suis en forme pour reprendre la route. Je consulte le guide et ne trouve rien d’exceptionnel sur la côte en direction de Villasimius, en dehors de la côte elle-même, très découpée et offrant une multitude de belles plages. |
Cela commence immédiatement à la sortie de
Cagliari, lorsque la route emprunte le cordon littoral isolant
la Molentargius Saline. Il est envahi par toute une suite de
guinguettes, restaurants et autres installations vantant à
grand coups de panneaux publicitaires leur ribambelle de
services…
Au bout d’une dizaine de km cela se tasse, on
atteint la Chaine des Quatre Frères qui tombe dans la mer et
que la petite SP17 parcourt en une superbe route panoramique,
fatigante certes, mais offrant des points de vue superbes sur
la mer, les écueils à proximité des anses et les petites
plages sableuses en occupant le rivage, le tout sous un
somptueux coucher de soleil.
Spaggia di Punta Molensis et ses galets |
Tout au bout du chemin à peine passable, je découvre un parking enserré dans le maquis et sans vue, où de grosses pierres bloquent l’accès à la plage, et non pas de sable mais de gros galets bien peu agréables à la marche… |
35 634 Dimanche 12 janvier 2020 : de
PUNTA PORCEDDUS à BARUMINI (129 km)
À mon réveil vers 7:45, vue grandiose et ciel
serein qui se dégage bientôt.
Suite de la SP18 |
Départ peu avant 9:00
sur la SP18, avec l’idée d’aller jusqu’au Capo Ferrato
(aménagé en parc naturel) en empruntant la petite route
côtière SP18. Mais elle ne fera qu’effleurer de loin la
falaise, et je n’aurai pas le courage de faire à pied le
bon km donnant accès au panorama sur la pointe. De
toutes façons, il ne doit pas être très différent de
celui que j’avais dans mon parebrise depuis mon bivouac.
|
Je renonce donc à ce détour, mais quitte
plutôt la grande route (SP125) suggérée par le G.V. pour
découvrir le bord de l’eau à Villa Rei. Petite station
balnéaire d’assez bon niveau mais quelconque dans son
architecture et ses équipements, elle offre en revanche une
immense et belle plage que ses rues cachent au voyageur … Je
persévère à continuer de suivre la petite route côtière (même
pas indiquée sur le GPS !), et pour cause : d’abord excellente
sur quelques kms, elle se mue soudain en route de terre (en
fait la suite de la nouvelle route, mais pas encore asphaltée)
qui tournicote autour du cap suivant avec indications de
quelques autres belles plages… et surtout de grandes ornières
coupant la chaussée suite aux dernières pluies assez
catastrophiques.
Suivant très doucement quelques autochtones en pick-up ou 4x4, paysans ou chasseurs du dimanche, je finis par retrouver la SP125 et continue ma progression vers le nord jusqu’à Muravera où là, je dois décider : ou continuer à suivre la côte, sans rien de bien emballant au programme, ou suivre la suggestion d’itinéraire vers l’intérieur dans la montagne qui offre au moins deux site archéologiques exceptionnels : Pranu Muttedu à Goni et Su Nuraxi à Barumini. J’hésite, d’autant plus que le ciel s’est couvert et qu’il tombe même quelques gouttes; mais la curiosité est la plus forte, d’autant plus que les distance restent très raisonnables (une centaine de km pour ce détour au bout duquel je rattraperai la côte à Arbatax).
La route SS387, excellente mais assez sinueuse, commence par remonter la vallée du Flumendosa et l’altitude s’élève progressivement jusqu’à dépasser les 500 m. Passent quelques villages ruraux sans intérêt particulier; en revanche les paysages ne tardent pas à s’épanouir, puisque ensuite je me trouve à emprunter une route de crêtes offrant de splendides échappées sur tout l’intérieur de la Sardaigne. | Haute vallée du Flumendosa |
Alignement de menhirs de Pranu Muttedu sous les chênes-lièges |
Arrivé à Goni, je trouve sans difficulté le petit site néolithique (3 200-2 800 av. J-C.) de Pranu Muttedu caractérisé par quelques alignements de menhirs (une soixantaine, isolés, par paire ou en ligne, la plus grande concentration en Sardaigne) et quelques tombes monumentales qui devaient être incluses dans des tumuli dont il ne reste rien. |
LE PARC ARCHÉOLOGIQUE
DE PRANU MUTTEDU A quelques kilomètres du village de Goni, le long de la route départementale qui mène en à peine une demi-heure à Cagliari, vous pouvez admirer le parc de Pranu Muttedu qui représente l'un des sites les plus évocateurs de l'intérieur de la Sardaigne. Le parc qui s'étend sur 200 000 m2 (20 Ha) abrite l'un des plus importants groupements de monuments de la préhistoire sarde. Les fouilles dirigées par Enrico Atzeni dans les années 80 ont révélé de très nombreux objets faits à la main dont la typologie et le mode de fabrication varient; ceux-ci sont attribuables aux communautés de culture Ozieri établies dans ce lieu et datent du néolithique tardif (3 200-2 800 avant J.C.) La présence de nombreuses tombes et menhirs fait penser à une utilisation du site relative à des rites funéraires et religieux liés au culte des ancêtres. Le complexe archéologique comprend la concentration de menhirs la plus importante que l'on connaisse en Sardaigne (environ soixante, disposés en paire, en groupe ou en alignement). Cet ensemble de monuments se dresse sur une aire entièrement couverte de chênes séculaires et d'autres essences typiques du maquis méditerranéen. La combinaison de ces deux patrimoines - celui si rare et riche des monuments et celui des bois et de l'environnement - ainsi que la variété de couleurs et de parfums des nombreuses essences en continuelle floraison confèrent au site son originalité et son charme particulier. |
Alignement de menhirs de Pranu Muttedu |
La tombe II; au fond les menhirs alignés; devant l'espace empierré du Grand cercle |
Tombe Il
Cette tombe devait constituer le
centre de l'aire sacrée. Elle est creusée dans
différents blocs de grès transportés sur les lieux
et placés suivant un plan complexe. Elle est formée
d'une entrée, d'une cella de forme
semi-circulaire et de la tombe à proprement parler.
Celle-ci est elle-même composée d'une façade en
forme d'exèdre et de trois espaces internes, en
partie creusés dans des blocs de grès et en partie
construits avec des murets de pierres sèches,
auxquels on accède par des portes disposées
symétriquement.
|
Vestiges de la Tombe II avec son portail et son tombeau creusés dans le roc |
Tombe II de Pranu
Mutteddu : le pavillon d'entrée et la tombe
alignés
|
Pavillon d'entrée de la tombe II
creusé dans un monolithe de grès. On remarque que la
porte intérieure est creusée de façon à ce que l'on
puisse y adapter un système de fermeture.
Cet ouvrage exécuté manuellement en creusant finement la roche au marteau montre le haut degré d'habileté atteint dans la fabrication des outils et dans le travail de la pierre. |
Pranu Mutteddu : Domus de Janas souterraine |
Une promenade dans
l’autre partie du parc archéologique, également planté
d’une petite forêt de chênes lièges, permet de découvrir
deux autres tombes bien identifiées et surtout plusieurs
domus de janas, ou « maison des fées», des
cavités creusées dans des grosses roches enfouies dans
le sol ou au flanc d’une pente rocheuse, avec
porte découpée et éventuellement quelques marches
d’accès. |
Pranu Mutteddu : domus de janas à flanc de rocher |
L’espace intérieur est exigu, on
signale des gravures et des peintures sur les parois,
je n’en verrai rien, d’autant plus que les quelques domus
au niveau du sol sont presque remplies d’eau… Quant à
celles creusées à flanc de rocher, plusieurs sont
écroulées, d'autres montrent une ouverture mystérieuse
à souhait, sans nul doute à l'origine des
légendes.
Ces espaces artificiels datent du
début du 4ème millénaire au milieu du 3ème et
rappellent les grottes naturelles; étaient-ce des
sanctuaires, des sépultures, ou bien les deux ?
|
Dans le même secteur,
au retour vers l'Exsis, je repère deux autres tombes de
forme caractéristiques. La IV est arasées
jusqu'aux pierres de soubassement, mais son caractère
solennel bien souligné par les trois pierres
dressées contre lesquelles elle s'adossait qui l'a
fait baptiser «La Triade». |
|
Pranu Mutteddu :
Tombe V
|
La tombe V, plus conséquente présente un long couloir d'accès mieux préservé. D'autres, plus informes, se devinent sous les arbres. |
Le soleil est encore
assez haut lorsque je quitte les lieux vers 16:00. Je
devrais avoir le temps de gagner l’autre grand site
triplement étoilé par le G.V., l’exceptionnel ensemble
nuragique Su Nuraxi à Baromini, à une trentaine de
kilomètres de route de montagne. Ce parcours offre d'autres très beaux paysages sous la soleil du soir maintenant revenu. |
Panorama sur la route de Barumini |
Barumini : le complexe Su Nuraxi au crépuscule |
Je trouve sans difficulté le monument remarquable par sa taille et sa complexité, fais un premier tour jusqu'à la billetterie pour vérifier son ouverture demain matin lundi : première visite guidée (obligatoire) et en français à 9:00, la suivante à 9:30 etc… Quelques photos de loin avant que la nuit tombe, puis je vais me parquer dans un coin reculé du grand stationnement, le moins pentu possible, en espérant que personne ne me délogera cette nuit… |
Photos, carnet de bord et souper prennent la suite, jusqu’à un coucher tôt pour récupérer une forme moins évidente qu’à mon départ.
35 763 Lundi 13 janvier 2020 : de BARUMINI à ARBATAX (141 km)
Levé à 7:45 sur mon parking en fin de compte des plus tranquilles, je suis à 9:00 tapant devant la billetterie où un aimable guide me fera faire le tour en français, répondant à loisir à toutes mes questions puisque je suis le seul visiteur francophone à cette heure.
Le village antique enserrant son nuraghe (vue aérienne peu après son dégagement) Complexe nuragique Su Nuraxi de Baromini Le nuraghe Su Nuraxi, situé près de la ville de Barumini, dans le pays marneux des collines du Miocène de la Marmilla, au pied du plateau basaltique de la Giara di Gesturi, est le complexe nuragique le plus connu de Sardaigne. En 1997, l'Unesco l'a proclamé patrimoine mondial de l'humanité. Son histoire fascinante commença d’être racontée dans les années 50 lorsque Giovanni Lilliu, archéologue et membre de l'Académie des Lincei, mit au jour la forteresse constituée d'une tour principale (A), au centre d'une immense cour délimitée par quatre tours (B, C, D, E). L'ensemble était entouré d'une barbacane et d'un vaste village de huttes. L'aspect originel du complexe était celui d'un château médiéval, avec de hautes tours à coupole se dressant contre le ciel. Longtemps après, le “géant de pierre” conserva encore sa monumentalité et sa grande force évocatrice. La tour centrale, ou donjon, de forme tronconique élancée, d'une hauteur de plus de 18 m à l'origine et de 14,10 m actuellement, contient trois chambres superposées dont la supérieure est réduite aux limites extérieures de sa base. Elles sont construites en pierres de basalte posées à sec et aplanies au dessus. La partie centrale et les quatre tours, réunies par des murs-rideaux de maçonnerie en ligne droite, pour des raisons de stabilité et pour une meilleure défense, ont été recouvertes de blocs de pierre et couronnées de corbeaux de basalte qui soutenaient une galerie à mâchicoulis. Cette couverture de pierre bloquait l'entrée sud d'origine, qui a été remplacée par une deuxième entrée surélevée, ouverte dans le mur-rideau nord-est, qui constitue aujourd'hui la voie d'accès au monument. L'entrée à linteau d'origine conduisait à une salle ellipsoïdale avec deux guérites à droite et à gauche, d'où l'on accédait à la cour, dans laquelle se trouve un puits de plus de vingt mètres de profondeur. Sur la cour s'ouvrent également les entrées des tours latérales et la petite porte qui mène à l’étroit passage dans l'épaisseur des murs entourant la tour centrale. Le complexe présente plusieurs phases de construction. Selon l'archéologue Giovanni Lilliu, le plan primitif du XVIème ou XVème siècle av. J.-C. était constitué de la tour centrale, autour de laquelle quatre tours et une barbacane primitive ont été construites du XIVème au XIIème siècle av.J.-C. Au XIIème siècle av. J.C., la forteresse fut couverte et la barbacane renforcée par deux tours, de sorte que sept tours ont été construites en tout. Mais l'archéologue Vincenzo Santoni, surintendant, sur la base d'une récente étude des structures et des matériaux, croit que les constructions du donjon, du bastion quadrilobe et de la première barbacane ont toutes ont été entreprises en même temps ; il les date en fait entre la fin du XVème et le début du XIIIème siècle av. J.-C. Un vaste village de cabanes, de plan essentiellement circulaire mais aussi à plans droits, s'étend à l'est et au sud de la forteresse à tourelles, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur de la barbacane. Le village compte plus de deux cents cabanes, construites à différentes époques et habitées jusqu'à la fin de l’époque romaine. Elles étaient à l'origine couvertes de poutres en bois placées en étoile sur lesquelles on posait du chaume. Des parties des structures en basalte et en marne subsistent encore. Des foyers, des palettes et des objets en céramique d'usage quotidien, des systèmes de canalisation pour l'eau et un puits témoignent de la vie communautaire qui s'y déroulait. Dans certaines pièces, on a trouvé des objets qui peuvent faire référence à un usage rituel. Parmi elles, on peut distinguer la cabane n° 135, de plan sub-rectangulaire et située dans le secteur Est du village, sous le sol de laquelle on a trouvé des fosses votives. Une autre cabane particulièrement remarquable est la cabane n° 80, équipée d’une banquette circulaire et de niches, appelée "Salle du Conseil”, faisant supposer que les réunions à caractère civil et religieux y étaient tenues par les Anciens du village, présidées par le chef. C’est là qu’on a trouvé un modèle de nuraghe en pierre. (Grande affiche à l'entrée du
Site)
|
Mon guide devant
une maison circulaire de Su-Nuraxi
|
C’est donc avec beaucoup d’intérêt et d'attention que je le suis, tandis qu’il me mène d’abord à travers les soubassements des habitations rondes qui ont bien entendu perdu leur toit en bois et chaume mais dont on a assez bien conservé ou restauré les murs de base en grosses pierres empilées à sec. |
Certaines comprennent plusieurs chambres rayonnantes ayant chacune leur fonction particulière, y compris un petit oratoire autour d’un bassin où l’on pratiquait semble-t-il un culte de l’eau. |
Su-Nuraxi : bassin et banc circulaire dans «l'Oratoire» |
Su-Nuraxi : maison du Conseil avec cour avancée |
Une autre maison, de plus grande circonférence, a été identifiée comme la salle du Conseil où les notables (les Anciens ?) du groupe s’asseyaient sur un banc de pierre courant autour des murs et discutaient des affaires de la collectivité sous la présidence du Chef. |
Ces habitations circulaires forment des cellules agrégées les unes aux autres comme les alvéoles d’une ruche, sans ordre apparent ni rien qui rappelle les plans orthogonaux des villes antiques et encore moins modernes. Pas d’évidence d’égout, l’eau provenait de puits, un feu se trouvait au centre de chaque hutte ou, pour les plus grandes, un four occupait un espace encastré dans le mur.
Su Nuraxi: murs de base en gros
blocs de basalte
|
Et tout cela serré jusqu’au pied même de la muraille du nuraghe, un espèce de château-fort en énormes pierres basaltiques brunes, assemblées elles aussi sans mortier et calées par de petites pierres intercalaires ; on s’interroge encore sur la technique utilisée pour empiler jusqu’à 18 m de hauteur ces blocs très lourds. |
Ce mur-rideau de pierre bloquait l'entrée sud d'origine et a été remplacée par une deuxième entrée surélevée, ouverte dans le mur-rideau nord-est. Elle constitue aujourd'hui la voie d'accès au monument. L'entrée d'origine à linteau conduisait à une salle ellipsoïdale avec deux guérites à droite et à gauche, d'où l'on accédait à la cour, dans laquelle se trouve un puits profond de plus de vingt mètres. Sur la cour s'ouvrent également les entrées des tours latérales et la petite porte qui mène à l’étroit passage intramuros entourant la tour centrale.
La cour de Su Nuraxi; à gauche l'ouverture du puits, devant la porte menant à la salle inférieure d'une tour |
Su Nuraxi:
passage intramuros autour du donjon
|
Couloir menant à la salle centrale de la tour donjon |
Dôme en tholos de chaque tour |
Su Nuraxi : base de tour donnant dans la cour et ouverture de l'escalier |
Su-Nuraxi : haut de tour encastrée dans le mur rideau |
Selon l'archéologue Giovanni Lilliu, le plan
primitif du XVIèm ou XVème siècle av. J-C. était constitué de
la tour centrale, autour de laquelle les quatre tours et une
barbacane primitive ont été construites du XIVème
au XIIème siècle av. J.-C.
Au XIIème siècle av. J-C.,
la forteresse a été recouverte d’un épais parement de pierre
et la barbacane renforcée par deux tours, de sorte que sept
tours ont été construites en tout.»
Barumini : Centro
Giovanni-Lilliu le monticule originel avant les
travaux
|
Son principal intérêt
réside dans la série de grandes photos illustrant les
fouilles et le dégagement progressif du monument. À côté, une exposition consacrée à la vie du chercheur, peu parlante pour moi car uniquement en italien, me laisse assez indifférent… |
Je me rends ensuite au Polo Museale Casa
Zapata, une ancienne résidence seigneuriale du XVIIème
donnée à la commune sous laquelle des fouilles ont mis à jour
en 1990 les restes d’un autre nuraghe monumental à trois tours
reliées par des murs-rideaux rectilignes : le Nuraxi' e Cresia
(nuraghe de l'église).
Façade du Palazzo Zapata |
Plan des structure imbriquées : Nuraxi e' Cresia et palazzo Zapata |
Palazzo Zapata : blason aux 3 chaussures |
Le 6 mai 1541, la
région de Marmilla - qui comprenait les fiefs de
Barumini, Las Plassas et Villanovafranca - fut
transmise au marquis Don Agor Zapata. À la tête du
château et de la ville de Cagliari, il obtient une
investiture de l'empereur Charles V, qui lui donne le
titre de baron de Las Plassas. Il s'installe donc à
Barumini, qui entre-temps est élu résidence officielle
de la baronnie. Cela se produit après la prise
de pouvoir par les Rois d'Espagne, lorsque l'île
entière est devenue un royaume mineur, soumis à
l'autorité du nouvel empire, et que toutes "les villas
ont été confisquées par le Patrimoine Royal". Le palais aristocratique a été construit près du plus ancien noyau d'habitation des Barumini Nuragiques, comme le montrent les ruines du complexe nuragique, Nurax'e Cresia (milieu du 1er millénaire avant J.-C.), conservées sous les fondations du palais, et récemment découvertes lors de fouilles et de travaux de restauration. Le bâtiment - connu sous le nom de su palazzu 'e su marchesu (le palais du marquis) - a été commandé par Don Agor afin d'accueillir le siège du gouvernement local. Réalisé par un auteur inconnu, le bâtiment a vraisemblablement été construit entre la fin du XVIème et le début du XVIIème siècle. Le bâtiment - dont les caractéristiques architecturales sont contemporaines de celles du Palazzo Zapata de Cagliari (Via dei Genovesi) - se caractérise par un style strictement classique, néanmoins animé par des éléments de style gothique tardif. Le palais compact et sévère - l'une des œuvres d'art les plus célèbres et les plus caractéristiques de l'architecture civile et rurale sarde du Rinascimento - a un plan rectangulaire et est disposé sur deux étages, reliés par une volée d'escaliers extérieurs en maçonnerie. La façade principale - celle qui donne sur la place de l'église paroissiale - est délimitée par le beau portail en pierre de trachyte et par quatre grandes fenêtres, chacune d'entre elles étant embellie par des éléments élégants du répertoire classique. Sa vue d'ensemble est également animée par la position asymétrique et décalée des ouvertures, le tympan triangulaire en haut, les appuis de fenêtre en grès et les élégantes demi-colonnes aux chapiteaux en forme de boîte : Autant d'éléments de complexe où alternent des expressions classiques et des traits stylistiques, de type gothique, qui témoignent de la vivacité, typique de l'éclectisme artistique de la fin du XVIe siècle. Un signe clair de reconnaissance à la famille Zapata est représenté par les armoiries aristocratiques, situées sur le tympan au-dessus de l'entrée principale : Un écu sur lequel sont sculptées trois chaussures ("zapata" signifie chaussure en espagnol). Bien que la monumentalité de la façade soit presque intacte aujourd'hui, elle n'a pas conservé la division originale des espaces intérieurs, qui consistait autrefois en une grande salle de réception et dix pièces. Le palais a gardé sa fonction d'habitation noble et rurale jusqu'en 1987, date à laquelle il a été acquis par le district municipal et méticuleusement restauré. |
La maison du XVIIème a été entièrement
vidée pour être aménagée en un seul espace muséal. Des
passerelles et un plancher vitré permettent d'y
découvrir les restes de cet autre souvenir d’un lointain
passé. |
À l'intérieur du
Palazzo Zapata : depuis la passerelle,
les vestiges de la tour centrale du Nuraxi e'Cresia |
Dans de nombreuses vitrines suspendues, on a
placé les objets retrouvés dans les 2 nuraghi de Barumini
(essentiellement des céramiques) et toute une série de
panneaux fort bien faits (mais en italien…) décrivant la
culture nuragique. Captés eux aussi et à traduire plus tard,
merci Google Trad !
Je termine ma visite
par un petit tour dans une aile de la billetterie où
quelques vitrines et panneaux sont consacrés aux launeddas,
cette flûte sarde traditionnelle (le plus ancien
instrument méditerranéen) constituée de trois roseaux
accolés et accordés. L'on en joue un peu comme
d’une cornemuse, et sa sonorité m’a paru tout aussi
nasillarde, mais elle ne manque pas d'un certain charme
campagnard… Pour échantillon sur Youtube, écoutez l'un de ses plus grands chantres : Luigi Lai, récital di launeddas - Le Salon de Musique 2009. |
Palazzo Zapata : launeddas Du point de vue de leur
construction, les launeddas sont très simples. Les
parties essentielles sont fabriquées dans une
variété de canne commune des marais, plus charnue et
plus résistante, appelée canna mascu.
Ils se composent de trois tuyaux : . le plus long est appelé tumbu ou bàsciu (généralement divisé en deux parties qui s'emboitent pour des raisons pratiques de transport) qui, agissant comme une bordure, fournit une seule note continue, la note tonique de l'instrument. * le second, de longueur moyenne, est l'anche mélodique appelée mancosa, qui se tient et se joue avec la main gauche ; celle-ci est fixée au tumbu au moyen de solides attaches en ficelle et maintenues à une légère distance de celle-ci au moyen d'un pont, formant ensemble ce que l'on appelle la croba ; « le troisième est l'anche mélodique appelée mancosedda ou dextrina, qui est libre et se tient et se joue avec la main droite. |
Les anches
mélodiques sont pourvues de quatre trous de
section quadrangulaire appelés crais qui,
bouchés par les phalanges, permettent de reproduire et
de moduler les notes, plus un trou rectangulaire
supplémentaire appelé arrefinu, aligné avec
les quatre autres le long de la partie antérieure de
l'anche ; celui-ci a pour fonction de marquer les
pauses musicales au-delà de celle de l'enregistrement
de l'intonation juste de l'instrument. La bouche des
launeddas se compose du cabitzinu, qui est un
court tube de roseau fermé au sommet par le nœud
naturel du roseau lui-même, sur lequel est excisée une
simple anche vibrante, la linguazza. Chaque cabitzinu est inséré dans le tube résonateur correspondant et soigneusement scellé avec de la cire d'abeille naturelle ; le joint est ensuite renforcé par différents enroulements de ficelle. La construction de chaque instrument, encore aujourd'hui entièrement artisanale, se fait généralement en prenant un autre comme modèle, et en essayant de le reproduire de façon similaire dans toutes ses parties, avec une attention particulière aux distances entre les trous des anches mélodiques. L'esthétique et surtout le timbre de chaque instrument restent totalement subjectifs, tandis qu'une grande attention doit être portée à la qualité des matériaux utilisés et à l'ajustement du canon. Afin de préserver les qualités acoustiques des instruments dans le temps, il convient d'apporter le plus grand soin à leur conservation dans des boites particulières (de préférence en bois ou en cuir rigide) et d'éviter, dans la mesure du possible, de les exposer à des températures trop élevées ou de les soumettre à des changements brusques de température et d'humidité atmosphérique. |
Après ce grand bol de culture, je commence
par me restaurer, puis trace l'itinéraire qui doit me ramener
sur la côte Est au niveau d’Arbatax. Il me fera emprunter pour
les 4 longues heures suivantes une magnifique mais très
fatigante route de montagne (SP9, puis SS198), escaladant 2
cols à 834 et 907 m.
Suite incessante de virages souvent serrés, montant et descendant sans arrêt, traversant dans des rues très étroites plusieurs gros bourgs accrochés à la pente. | Village dans la montagne |
En fin de journée (i.e. vers 16:00) les nuages envahissent le ciel et la lumière perd de sa vivacité, les couleurs s’éteignent. Je réussis à refaire le plein d’eau sur une station service vers Gairo, mais ma carte bancaire non reconnue ne me permettra pas de prendre du diesel... | Gairo depuis la
SP11
|
Pour finir j’arrive à la nuit tombante à Arbatax. Soulagé, je me rends tout au bout du grand port vers la pointe et m’installe sur le quai devant le port de yachts. Un peu de bruit jusque vers 22:00, puis le silence ensuite jusqu’à l’aube vers 7:00.
35 904 Mardi 14 janvier 2020: d’ARBATAX
à OROSEI (99 km)
Levé à 8 heures, je commence par un petit tour sur la plage en arrière du port pour découvrir les Rocce Rosse, un petit massif de rocher rouge. De fait, ce porphyre est assez spectaculaire dans son environnement de granit gris pour qu’on en ait fait le décor d’un festival musical en été. Pour l’heure les lieux sont à peu près déserts et je peux en paix faire quelques images de cette curiosité naturelle. | Arbatax : Rocce Rosse |
Dans le grand soleil je mets à jour le carnet
de bord, puis prends la route en complétant un peu ma cambuse
(pain, jambon et soupes déshydratées - ces dernières
introuvables) dans un EuroSpin, une de ces chaines de
supermarché cheap qui pullulent ici. Je refais ensuite le
plein de gasoil (1,509 $/l, ouille !) et entreprends
l’itinéraire proposé par le G.V. vers le Supramonte, une
chaine de montagnes assez élevées et surtout mouvementées qui
tombent dans la mer.
Façade de Santa Maria Navarrese (XIème-XVème) |
Après une section assez plate de la SP125, premier arrêt à Santa Maria Navarrese pour découvrir la petite église du XIème; en fait il n’en reste à peu près rien d’époque puisqu’elle a été amplement remaniée et agrandie… et en plus elle est fermée ! |
Je n’en apercevrai
donc pas grand chose, au-delà de l’abondante
documentation affichée sur un gros panneau voisin, tout
près d’une énorme olivier «millénaire» lui aussi (19 m
de circonférence !). Joli point de vue sur la plage et les îlots au large, avant de m’attaquer à la route de montagne qui grimpe dans le Supramonte. |
L'olivier
millénaire planté devant l'église de Santa Maria
Navarrese
|
Baunei en balcon prend le soleil... |
Elle me mène d'abord à Baunei, gros village en balcon accroché à la montagne où de grands pans verticaux de calcaire jaune dépassent d’une marée de chênes-verts et de chênes-liège. La route est excellente, mais tourne bien sûr continuellement en gagnant de la hauteur. |
Pause de quelques
minute à côté de l’église qui, trop souvent remaniée, en
a perdu tout style et à peu près tout caractère. Mais en trainant un peu je découvre un petit panneau qui célèbre la chèvre de Baunei, partie prenante du paysage et de la culture locale. |
L'illustre chèvre de Baunei |
...et à l'ouest vue sur les montagnes de
l'intérieur de la Sardaigne
Sur la SS198 route de montagne |
Suite de la route de montagne qui continue à monter en offrant des panoramas grandioses et assez sauvages. Je passe quelques cols assez hauts, Genna Arramente d’abord (590 m) puis Genna Sarbene (764 m) qui donne accès à une zone de vallée suspendue où paissent vaches brun-orangé, chèvres innombrables et même quelques ânes… |
Une autre montée progressive me hisse jusqu’aux 906 m du Genna Cruxi, puis sur les 1017 m du Genna Silana avant une longue descente le long du Canyon Gorropu où coule le Flumineddu (dans une gorge profonde de 400 m : un record européen). Je ne m’y hasarderai pas… | Depuis le Col de Genna Silana (1 017 m) en direction du Canyon Gorropu |
Et là, panne de caméra : l’interrupteur
d’allumage brisé tourne dans le vide et ne commande plus rien,
impossible de mettre l’appareil en fonction, et toutes mes
manipulations restent vaines ! Il faudrait le faire ouvrir
dans un atelier spécialisé… Je continuerai à collecter mes
images avec mon téléphone, déjà ancien, dont la qualité est
bien sûr plus faible… jusqu’à ce que je pense à enlever puis
remettre la batterie. Le contact alors remet en route
l’appareil, ce qui permet de prendre des photos, mais au
prix d’une manœuvre fastidieuse à la longue et et d’un
épuisement plus rapide de la batterie. De plus le problème
récurrent de blocage du zoom et la consigne “Éteindre puis
rallumer l’appareil” oblige à procéder beaucoup trop souvent à
cette extraction/insertion de la batterie… Il faudra remplacer
cette caméra déjà ancienne et décidément peu fiable !
Dorgali |
Au bout de la vallée
qui s’élargit, j’arrive au village de Dorgali encore
accroché à un pente, mais dont les attractions ne me
séduisent pas. Je descendrai immédiatement à la station balnéaire locale de Cala Gonone. qui, récente, fait un peu tache dans un paysage par ailleurs assez sauvage. |
Petit tour dans le
port obscurci maintenant par le coucher du soleil,
invisible car nous sommes à l’abri de la montagne et
orientés vers l’est. Quelques pêcheurs sur la jetée, un
joli trois-mats ancré dans la rade, les villas colorées
s’étageant sur les pentes incurvées au dessus de l’anse
et au milieu des pins, le quai bordé des habituels
restaurants et (quelques) boutiques… Après avoir pris un peu l’air et m’être dégourdi les jambes, je retrouve la chaleur de l’Exsis et décide de me rendre un peu plus loin jusqu’à Orosei pour y chercher bivouac. |
La baie de Cala Gonone au crépuscule |
Cala Gonone depuis la petite route remontant vers la SP125 |
La petite route indiquée par le GPS, censée me faire rejoindre plus directement la SP125, après une belle montée étroite et zigzagante, offre des vues grandioses sur la côte maintenant de plus en plus sombre. Mais elle m’embarque ensuite dans un lacis de routes vicinales à peine carrossables, avec plusieurs passage sur la terre, remplis de trous et de flaques… Je progresse à 15 km/h et avec précautions, avant de pouvoir enfin adopter un train normal sur la route provinciale. |
Las, c’est maintenant
le crépuscule et je peux difficilement admirer le
paysage boisé et accidenté que je traverse. Bref arrêt
au milieu des énormes excavations des carrières de
marbre en arrivant à Orosei. Il est passé 18:00, la lumière est trop faible pour me permettre d'être très sélectif sur mon point de chute, je renonce donc à gagner la mer trois km plus loin (mon erreur). Je m’arrête sur la premières place assez dégagée… sans m’apercevoir qu’une rue plutôt passante en fait le tour. Stores baissés, je prépare mon souper, puis transfère les photos de la journée en constatant que la caméra du téléphone donne des résultats passables. |
Carrière de marbre d'Orosei |
Coucher tôt après avoir commencé le carnet de route, mais réveil passé minuit par Monique qui me donne les dernières nouvelles…