Enfin je suis juste à l’heure pour mon rendez-vous sur le quai
où m’attend mon acheteur. Échange rapide du paquet contre les 50
dollars convenus, il se hâte de reprendre le traversier vers son
ile tandis que je vais établir mon bivouac sur le petit
stationnement de l’église de St-Joseph. J’y trouve 2 fourgons (1
vieux Westphalia et un ProMaster Safari Condo) dont les
propriétaires sont en train de prendre la bière en attendant le
souper… L’un revient de Manic 5 et l’autre s’apprête à s’y
rendre… Échange d’informations, puis l’un d’eux m’indiquant un
autre beau spot solitaire au bas de la nouvelle route, là où
s’arrête l’ancienne route maintenant condamnée, je décide de m’y
rendre pour profiter d’une vue beaucoup plus intéressante sur le
village au bord de l’eau et sur l’Ile aux Coudres.

Mon bivouac au pied de la côte
Effectivement l’endroit est superbe. Je m’y installe donc,
soupe légèrement des délicieuses provisions dont Monique m’a
gentiment et abondamment pourvu, et me mets à la rédaction de
cette page sur un banc destiné aux promeneurs méditant devant
le vaste panorama. Je tâche ensuite de rafraîchir l’intérieur
du camion, mais avec quelque difficulté, faute de moustiquaire
interdisant l’accès aux innombrables maringouins qui
commencent leur ronde du soir. Coucher tôt pour décoller
demain aux aurores.
19 575 Mardi 22 août 2017 : de ST-JOSEPH-DE-LA-RIVE
à MANIC 5 (545 km)
Réveillé avant le soleil, je patiente un peu au lit, fais un
petit tour très matinal sur la promenade voisine puis me mets
immédiatement en route, reportant à plus tard douche et
déjeuner. Inutile de dire que dans mon petit coin reculé, le
silence fut des plus complets.
Aube sur mon bivouac à St-Joseph-de-la-Rive

Port-au-Saumon
|
Plutôt que de
rattraper au plus court la grande 138 qui file dans les
terres, je préfère continuer de longer le rivage en
empruntant la petite 362 qui suit la côte au plus près
en épousant ses reliefs très accentués tout en offrant
des vues superbes sur le fleuve. C’est aussi l’occasion
de traverser des villages soignés et charmants :
Cap aux Oies, Saint Irénée, la chic Pointe-au-Pic où
j’arrête quelques minutes devant l’entrée du golf pour
poser le joint de silicone dans la douche, histoire
d’étanchéifier les revêtements appliqués la semaine
passée et d’éviter qu’ils s’abîment prématurément. Passe
ensuite la Malbaie où je rejoins la 138, puis
Cap-à-l’Aigle, l’anse pittoresque de Port-au-Saumon
aperçue depuis la route en corniche mais impossible à
rejoindre directement malgré un détour hasardeux. |
Descente sur Port-au-Persil; au premier
plan la Ferme des ânes
Le rivage rocheux et la chapelle des
McLaren à Port-au-Persil
Dans la chapelle des McLaren de
Port-au-Persil
Fond de l'anse de Port-au-Persil et cascade
J’ai plus de chance à Port-au-Persil dont je peux gagner le
quai, y stationne et y fais un petit tour sur les rochers
jusqu’à la chapelle des Mc Laren (1907). Ragaillardi par ce bol
d’air, je poursuis ma longue montée vers le nord. Le ciel voilé
se couvre de plus en plus, la température baisse, et une légère
brume qui ira en s’accentuant monte du golfe du St-Laurent.
Descente sur St-Siméon
Je finis par passer St-Siméon où, jugeant mon joint de silicone
suffisamment mature, je déjeune et prends ma douche sur la halte
routière en bord de l’eau. Peu après c’est le traversier qui me
fait franchir le fjord spectaculaire du Saguenay.
Traversée du fjord du Saguenay à Tadoussac
Je saute Tadoussac déjà visité à plusieurs reprises, puis
continue à remonter la 138, maintenant nettement moins
panoramique car trop souvent éloignée dans les terres, sauf
après Les Escoumins où je me rapproche du rivage. J’atteins
enfin Forestville, passe tout droit, mais commençant à être
affamé passé 14:00, prends la chemin du quai à Ragueneau où je
découvre un beau paysage de rochers rouges très usés et découpés
baignés par la mer.
Le St-Laurent au quai de Ragueneau
J’y déjeune puis me
délasse un peu les jambes avant de gagner à une
trentaine de kilomètres Baie-Comeau où je quitterai la
vallée du Saint-Laurent pour prendre la route du Nord
directement vers le Labrador.Provision de numéraire à
une succursale de la BMO opportunément découverte en
passant, puis appel à Monique pour la rassurer sur mon
devenir avant de m’enfoncer dans des régions nettement
plus sauvages, en tout cas sûrement pas couvertes par le
réseau cellulaire. Depuis son bureau elle m’indique
précisément là où je suis, ayant réussi à installer sur
son McBook le système de géolocalisation de mon IPhone…
|

Baie Comeau :
avenue du Labrador...
|
Je dégote ensuite la petite 389 en programmant sur mon GPS
Fermont et, avant, le barrage Daniel-Johnson (Manic 5). Sa
chaussée, partout asphaltée, s’avère très sinueuse mais surtout
ne tarde pas à devenir des plus désertiques: pas un village ni
un hameau, quelques rares auberges rustiques qui deviendront
ensuite pourvoiries même pas visibles depuis la route… Paysage
de forêt ininterrompue entremêlée d’innombrables lacs de toutes
dimensions
. Le relief est très mouvementé, quoique jamais
bien haut, si bien que la route monte et descends
continuellement; cela m’oblige à beaucoup d’attention pour
éviter que la transmission du Promaster rétrograde
continuellement, amplifiant indûment la consommation que je suis
en temps réel sur l’indicateur du tableau de bord. Les
dégagements sur le paysage sont très rares, d’autant plus que le
ciel bouché. La dernière cinquantaine des 210 km menant jusqu’au
barrage me parait longue…

Départ de la route 389 vers la Manic
|

|
La sinueuse route 389 vers Manic 5
Au bout de la route, la muraille de Manic 5
Je vois enfin apparaître l’énorme muraille de béton au fond d’un
dernier vallon où je me glisse en tournicotant. Un peu déçu de
voir que les voutes multiples, si spectaculaires, ont noirci
sous l’effet des intempéries…
Il est passé 18:15, la lumière a déjà beaucoup diminué et le
trafic s’est raréfié sur cette unique route québécoise menant au
Labrador. Je cherche un coin où me poser. Le stationnement du
centre des visiteurs, au pied du barrage, est ouvert et vide,
mais trop pentu pour me convenir. Je pense trouver un belvédère
le long de la route au dessus de la retenue, mais sans le
découvrir. Revenant en arrière de quelques kilomètres je
retrouve le vaste parking du Motel de l’Énergie (qui sert aussi
d’unique station service) et me case dans un petit coin, encadré
d’une flopée de gros camions arrêtés là pour la nuit.
Le barrage et son déversoir en aval au
crépuscule
Sous la pluie qui se prolonge, je soupe d’un autre des délicieux
plats préparés par Monique, rédige ces quelques notes et me
couche tôt après cette longue journée assez bien remplie. Au
programme demain : visite guidée du site hydro-électrique dès
9:00 puis autre longue route (349 km), assez délicate
semble-t-il, jusqu’à Fermont, à la frontière québécoise du
Labrador, dont j’espère visiter la mine de fer, l’une des plus
grandes du monde.
20120 Mercredi 23 août 2017 :
de MANIC 5 à FERMONT (369
km)

Bivouac devant le Motel de l'Énergie,
à Manic 5
|
Il pleut durant la
nuit et la température s’est considérablement abaissée
puisqu’il fait un petit 16° dans l’habitacle à mon
réveil vers 5:30, lorsque pointent les premières lueurs
de l’aube. Non que j’aie fait mon plein de sommeil
(quoique m’étant couché peu après 21:00…) mais c’est
plutôt le vacarme des routiers autour de moi faisant
longuement réchauffer leur moteur avant de reprendre la
route qui m’a fait ouvrir l’oeil.
Je demeure au chaud sous ma couette à sommeiller jusque
vers 7:00 et me lève enfin en faisant démarrer le
chauffage (Webasto). La température ne tarde guère à
monter jusqu’à 23°, je peux alors confortablement
prendre ma douche puis préparer mon petit déjeuner.
|
Je gagne ensuite le centre d’information où
l’on reçoit à partir de 8:30 les inscriptions pour la visite
de 9:00. J’ai donc le temps de remonter au dessus du barrage
pour faire quelques photos, maintenant que le ciel s’est
éclairci ; puis je décide d'aller faire le plein d’essence dès
à présent pour être prêt à repartir en sécurité dès la fin de
la visite.
Retour au barrage au petit matin
La brume se lève sur le réservoir
Manicouagan au matin
Le barrage Daniel-Johnson en pleine lumière
du matin
Approche du barrage Daniel-Johnson
Après un exposé
illustré présentant l’histoire du barrage et
d’Hydro-Québec ainsi que quelques notions techniques
élémentaires sur la production et le transport de
l’électricité, notre guide fort compétente
(probablement une étudiante en génie…) nous accompagne
en bus pour un tour de quelques installations,
escortée par un sympathique garde de sécurité. Ici on
ne badine pas avec cette question !
Nous entrons ainsi dans l’usine souterraine de Manic 5
PA (puissance additionnelle), parcourons la salle des
alternateurs, descendons dans les galeries bétonnées
où passent les 6 énormes conduites forcée (6 m de
diamètre !). |

Salle souterraine de Manic 5 PA
|

Au pied du barrage les
installations permanentes restantes
|
Puis nous gagnons au
pied de la grande voûte centrale du barrage (165 m de
haut, 2 millions de mètres/cube de béton !) une
galerie de surveillance ménagée dans l’épaisseur même
de la muraille (27 m à la base). Le tout avec force
commentaires et réponses aux diverses questions posées
par les participants. |

Notre autobus sous la voûte
centrale du barrage Daniel-Johnson |
Pour finir nous remontons dans le bus
pour gagner la route au-dessus du barrage (autrefois ouverte
à la circulation) que nous parcourons tout au long, avec
arrêt en plein centre pour contempler les plaques
d’inauguration et prendre quelques photos de l’immense
réservoir.
La route sur la crête du barrage vers le
belvédère
Plaques inaugurales de 1968-1969
Début du réservoir Manicouagan depuis le
barrage
Enfin l'on gagne à l’autre bout le
belvédère qui offre une vue saisissante sur la ligne des 13
arches grandioses en dessous de nous.
Les 13 voûtes du barrage Daniel-Johnson
depuis le belvédère
Bref 2 heures de visite riches
d’informations et de points de vue spectaculaires sur ce
fleuron du développement technologique québécois.
De retour au centre d’accueil vers 11:10 je démarre aussitôt
pour la longue route (355 km) qui doit me permettre de
rejoindre Fermont.
La première centaine de kilomètres (jusqu’au Relais Gabriel)
m'est très pénible : la route en gravier non revêtue est
très sinueuse, pleine de trous plutôt mal comblés, et rendue
apparemment glissante par la pluie qui a, en revanche, le
mérite de retenir la poussière au sol. Paysage très sauvage
de forêt d’épinettes en général assez fournie, parfois plus
dégarnie comme si un incendie n’avait conservé que les
troncs nus et gris. Beaucoup d’eau toujours présente, soit
sous forme de fond marécageux, soit de lacs innombrables et
de toutes grandeurs.
Sur la route 389 vers le nord
Sur la route 389 : forêt et lacs...
Sur la route 389 : ciel lumineux...
À 12:45 la fatigue et la faim me font
arrêter sur un terre-plein offrant une large vue sur un bel
ensemble lacustre (en fait le réservoir Manicouagan et l’île
René-Levasseur en son centre, un immense cratère d’origine
météorique) qui me rappelle l’ambiance et les paysages
finlandais auxquels toute cette contrée me renvoie de toutes
façons.
Piquenique devant le lac Manicouagan
Devant l'île René-Levasseur «l'Oeil du
Québec»
Arrivée au Relai Gabriel
Après le café expresso (merci Wacaco !)
je reprends la route qui se couvre d’asphalte presque
aussitôt, quelques kilomètres avant d’atteindre le relai
Gabriel. Elle file ensuite, superbe, bien redressée,
revêtue, et très rapide sur près de 100 km. Cela me
console de ma pénible fin de matinée et me permet de
m’avancer beaucoup plus rapidement vers mon but, avec des
pointes à 130 km/h puisque la circulation est ici des plus
ténue et qu’on n’a guère à y craindre de radar !
Sur la Route 389 rénovée
Le paysage ne
varie guère, seulement cette sensation – justifiée -
d’espace et d’immensité sous un ciel bleu pur
offrant de grandioses constructions nuageuses
éclatantes qui se mêleront de gris au fur et à
mesure de ma progression vers le nord. |

Nuages sur la 389 |

Arrivée à la mine du Mont-Wright
sur la route défoncée |
Une autre portion
de la route, cependant toujours asphaltée, se
montrera plus bosselée et donc moins confortable et
rapide, jusqu’à arriver à la mine de Firelake (mine
de fer) après 165 km d’asphalte.
Et là recommence la chaussée en gravier, encore plus
sinueuse et défoncée si c’est possible ! pour une
interminable section de 67 km, sous la pluie (et
donc dans la boue, qui plus est), jusqu’à arriver à
l’énorme mine de Mont Wright. |
Les 17 derniers km
jusqu’à Fermont sont impeccables, j’arrive enfin à
destination vers 16:20. Je me rends directement à
l’Office du Tourisme pour réserver ma visite de
demain, discute avec la responsable un moment de la
route et des autres – rares - curiosités locales
(entre autres le fameux «mur» protégeant la petite
ville des blizzards du nord), passe au centre
commercial quérir un crème protectrice pour mes
mains meurtries, passe à la station Esso faire le
plein d’essence puis vais examiner de plus près
l’urbanisme particulier de cette ville toute récente
(1970) créée toute d’une pièce par la compagnie
minière Arcelor Mittal pour loger ses 3 000
travailleurs et leurs familles. |

Fermont : le mur-écran contre le
blizzard côté nord |
Côté sud, les rangées de maisons de
ville perpendiculaires au mur-écran qui les abrite
Je cherche ensuite
un point de chute silencieux et panoramique que je
trouve vite sur la rive du lac Daviault, rue
Duchesnau en direction de la zone sportive, à
quelques minutes du centre ville.
J’y pose mon bivouac vers 17:45, appelle Monique
pour lui donner des nouvelles, mets en ordre mes
infos et écris mon journal sur mon ordi avant de
souper et de me coucher tôt, une fois la nuit tombée
à 20:45. |

Bivouac au bord du lac Daviault
|
20 489 Jeudi 24 août 2017 :
de FERMONT à WABUSH (37
km)
Réveil dès 6:30 sur mon terre-plein
au-dessus du lac, après une nuit super reposante et
tranquille. Le ciel est un peu chargé mais le soleil
pointe derrière une ligne de nuages noirs. Je me mets en
train lentement pour finalement être en mesure de gagner
l’Office du Tourisme à l’heure prévue (8:15). Je laisse le
camion barré sur le parking en avant, au pied du Mur, puis
gagne le bureau où l’on nous remet l’équipement de
sécurité de rigueur (casque, lunettes de protection,
bouchons auriculaires, masque respiratoire) et nous
embarquons dans un vieil autobus jaune un peu poussif qui
nous fait franchir les 15 km nous séparant du site de la
mine, accompagnés d’une jeune guide sympathique et enjouée
qui tiendra, tout au long du parcours, à nous faire
partager son engouement pour le Nord, son espace, son air
pur, son hiver lumineux et pur…
Invitation...
Dans la mine de Mont-Wright, sur la
piste menant au belvédère
Camion de 260 tonnes
En sa compagnie nous passerons les deux
heures suivantes à parcourir l’énorme chantier que
constitue la mine Arcopel-Mittal. Montant d’abord jusqu’au
belvédère, on jouit qu’une vue étonnante et plongeante sur
la « fosse », une énorme excavation qui a pris la place du
Mont Wright dont le relief s’est inversé.
Depuis le belvédère, la «fosse» : 5 km
x 2 km

Mine de Mont-Wright : la zone
d'extraction
Au fond, des foreuses percent un quadrillage de puits d’une
douzaine de mètre de profondeur à quelques mètre les uns des
autres pour introduire l’explosif qui disloquera le roc.
Mine de mont-Wrigt: forage des puits de
dynamitage
Une ronde d’énormes camions de 230 à 400 tonnes emportera
ensuite les déblais contenant nativement 30% de fer, pour
concassage, tri, séparation du quartz et des autres minéraux
indésirables et obtention d’une poudre grossière d’hématite,
en fait le minerai de fer qui sera ensuite acheminé par de
longs trains jusqu’à Port Cartier. Là, ce granulat, déjà
enrichi à 60%, sera transformé en «boulette» de fonte de
différentes tailles et exporté dans le monde entier.
Un des "petits" camions de 260 tonnes
au travail...

Déchargement des wagons provenant
de la mine de Firelake
|
Depuis notre petit
autobus jaune on nous fait ensuite observer le
déchargement du minerai brut acheminé par wagons
brutalement débarqués depuis la mine de Firelake, à
près de 80 km. Assez brutal, le procédé qui fait
basculer la benne de chacun des wagon avec une pelle
mécanique... |
Mine de Mont-Wrigt : camion de 260 T
transportant le minerai vers l'usine de traitement
puis nous fait
découvrir l’énorme machinerie du crusher
(concasseur) et du moulin permettant un premier tri
des blocs de roc dans un bruit assourdissant (port
des coquilles obligatoire !). |

Mine de Mont-Wright : le
«crusher» (concasseur)
|

Mine de Mont-Wright : spirales du
concentrateur de minerai
|
Nous visiterons
ensuite le bâtiment des spirales où s’achève la
séparation des composants minéraux, ainsi que le
garage où l’on entretient les énormes camions
fardiers (allant jusqu’à 400 tonnes) qui acheminent
le minerai de la carrière jusqu’à l’usine de
traitement. |
Camion Cat de 400 tonnes au garage
À partir de là je suis un peu moins
attentif à ce qu’on nous présente, découvrant pour ma part
– et avec consternation - la disparition de ma clef du
ProMaster… J’inspecte attentivement l’espace autour et en
dessous de mon siège dans la bus, fouille toutes mes
poches à plusieurs reprises, sans rien découvrir !
D’abord abasourdi par ce constat, je songe ensuite qu’au
moins j’ai eu la précaution d’emporter le trousseau de
secours qu’il suffira de récupérer dans la boite à gants.
Pour cela, il me faudra faire appel à un agent du CAA ou
son équivalent qui saura débarrer la portière. L’on
m’assure que je trouverai ce personnage en ville à la
station d’essence où j’ai fait le plein hier soir, à deux
pas du stationnement où j’ai laissé le ProMaster ce matin.
La visite se termine, je renonce à chercher la clef qui a
dû glisser de ma poche et s’enfouir dans la boue partout
présente sur le site, et reprends l’autobus jaune qui nous
ramène au centre de Fermont. Là ultime vérification dans
le Bureau du tourisme d’où nous sommes partis ce matin, et
en regardant par la vitre dans le ProMaster au cas où la
clef serait restée sur le contact… Négatif. Je gagne donc
la station où la propriétaire très aimablement place un
appel au service de dépannage qui devrait être là dans les
20 mn, donc un peu avant midi.
En fait j’attendrai jusqu’à pratiquement 17:00 l’arrivée
du dépanneur providentiel qui soit ne répond pas aux
appels téléphoniques soit avance un nouveau délai avant de
montrer enfin le bout du nez en fin d’après-midi. J’ai eu
amplement le temps de faire connaissance avec les clients
du dépanneur qui viennent payer leur essence ou prendre de
la bière ou jouer à la loto… Le journaliste local a la
gentillesse de me laisser un liasse de ses publications
qui me montrent la vie de tous les jours dans ce coins
reculé mais très vivant du Québec, le jeune caissier me
fait part de ses projets de vie locale après avoir terminé
sa formation de soudeur dans une école professionnelle de
Gaspésie; enfin vers 16:30 un policier de la SQ auquel je
confie ma détresse me mentionne l’existence d’une autre
réparateur, ancien garagiste, susceptible de trouver une
solution à mon problème et me l’enverra s’il le trouve…
Finalement à 17:15 se pointe un jeune ouvrier qui a fini
son quart à la mine de quartz et répond enfin à ma demande
d’aide, retardé par des heures supplémentaires qui lui ont
été demandées à la dernière minute… plus un imbroglio avec
son patron du service de réparation occupé à d’autres
interventions… Me retenant de lui manifester trop ma
frustration, je l'accompagne sur le stationnement où le
ProMaster est resté obstinément fermé à toute intrusion.
L’homme de l’art insère des petits coussins gonflants pour
écarter légèrement le cadre de la porte avant, glisse dans
la fente une forte tige métallique recourbée à son
extrémité et parvient à accrocher la poignée qu’il
déclenche. La serrure électrique débarre les deux
portières, j’ouvre la boite à gant et y trouve avec
soulagement la clé de secours. Me voilà tiré d’affaire,
mais après quel délai !
Je règle rapidement le déplacement et l’intervention de
mon artiste qui me réclame 75$, puis prends aussitôt la
route pour Labrador City. À l’entrée, perdu au milieu des
arbres, un petit centre commercial arbore les enseignes de
Canadian Tire et de Walmart ! J’y fais un arrêt pour
dégotter un cordon porte-clés multicolore que je porterai
autour du cou lors de mes prochains arrêts puisque,
apparemment, les poches de mon pantalon ne sont pas
fiables… Puis en route pour Wabush à quelques 5 kilomètres
dont on m’a dit que l’architecture/urbanisme était
particulier et valait le détour.
Je traverse bientôt quelques alignements de petites
maisons préfabriquées construites en série d’un intérêt
des plus mince et, la nuit tombant, trouve un vaste espace
dégagé un peu à l’écart du lotissement où je pose mon
bivouac. Il est presque 18:00, la nuit tombe dans la
grisaille et un brouillard léger envahit le paysage
habituel d’épinettes sur fond de lac. Je soupe, commence
l’écriture du journal et me couche rapidement, fatigué par
cette journée d’attente bien peu productive malgré
l’intérêt de la visite matinale.
Je traverse bientôt quelques alignements de petites
maisons préfabriquées construites en série d’un intérêt
des plus mince et, la nuit tombant, trouve un vaste espace
dégagé un peu à l’écart du lotissement où je pose mon
bivouac. Il est presque 18:00, la nuit tombe dans la
grisaille et un brouillard léger envahit le paysage
habituel d’épinettes sur fond de lac. Je soupe, commence
l’écriture du journal et me couche rapidement, fatigué par
cette journée d’attente bien peu productive malgré
l’intérêt de la visite matinale.
20 528 Vendredi 25 août 2017 :
de WABUSH à GOOSE BAY
& NORTH WEST RIVER (600 km)

Bivouac à Wabush
|
Ciel gris avec des
lambeaux de ciel bleu qui font espérer une journée
au moins mitigée. En revanche la température (9° à
8:00) m’amène à démarrer le chauffage pour un lever
plus confortable, d’autant plus qu’hier l’attente
dans le vent froid (10°) près du camion pendant que
procédait mon dépanneur m’a laissé, je le crains,
une petite congestion et un embarras nasal.
Décollage à 8:30, en fait 9:30 puisque, maintenant
au Labrador, j’ai changé de fuseau horaire.
Je ne m’attarde guère à Wabush dont les quelques
rues sont toutes semblables à celle au bout de
laquelle j’ai passé la nuit, dans le plus grand
calme il faut le dire. |
Je regagne donc
aussitôt l’embranchement de la Route 500 dont
j’attaque le long parcours. Paysage légèrement
ondulé de forêts et de fondrières plus ou moins
marécageuses, lacs à l’infini, horizon à plusieurs
kilomètres qui s’élargit lorsqu’on franchit l’une
des incessantes ondulations de la route. La chaussée
est excellente, les longues lignes droites succèdent
aux quelques virages bien redressés. Les 240 km
jusqu'à Churchill Falls, annoncé de temps à autre à
côté de Happy Valley-Goose Bay (570 km…) vont être
longs et monotones… |

La longue route 500 vers
Churchill Falls
|
Pause café à 10:00, un excellent expresso qui me tiendra
bien éveillé sur ce trajet limité à 80 Km/h mais que les
quelques véhicules (surtout des pickup et quelques rares
camions) suivis ou rencontrés parcourent aux alentours de
100 km/h. Paysage qui ne se renouvelle guère mais
tellement idiosyncratique qu’il en devient fascinant ; je
porte attention aux formes variables des têtes d’épinette
noire qui occupent quasiment tout l’espace terrestre, à
moins que ce soit une végétation vert très tendre qui
enserre les mares ou autres formations marécageuses aux
contours incertains. Les lacs aussi aux eaux calmes et
bleu foncé, animées d’un léger clapot et aux rives
uniformément rocheuses, offrent un coup d’œil toujours
différent par leur forme, la dispersion des îles plates
auxquelles s’accrochent là encore quelques épinettes
tourmentées. Le ciel enfin montre une profusion de nuages
dont les boursouflures allongées et serrées remplissent un
espace semble-t-il infini jusqu’à l’horizon…
L’uniformité de la route et sa relative rectitude me
permettent aussi de contrôler la consommation du moteur
qui me semble toujours excessive. L’ordinateur de bord
affiche la consommation instantanée aux 100 km, ce qui me
permet de mesurer l’impact de la vitesse affichée sur le
GPS, la pression sur la pédale d’accélérateur, celui
d’utiliser plus ou moins l’erre d’aller en affrontant les
petites côtes qui ponctuent mon chemin. Il semble que ce
soit les 80 km/h (justement la vitesse limite autorisée
sur la Route 500) qui permettent de maintenir la
consommation d’essence en dessous des 10 l/100, soit
approximativement à 1550 t/mn. Je verrai plus tard à me
documenter sur la façon la plus efficace de gérer ce
moteur et sa transmission…
Churchill River depuis la route,
asséchée par le barrage en amont
Churchill River
13:15, rien. 13:30, aucun mouvement indiquant un
quelconque départ. À 13:40 je me rends enfin
compte qu’il est en fait 14:40, car Terre-Neuve
et Labrador sont en décalage horaire d’une heure
par rapport à l’heure du Québec… L’affichette
collée sur le panneau d’information du centre
communautaire m’informe alors que la prochaine
visite aura lieu à 19:00....
|

Rue du village de Churchill
Falls |

Churchill Falls en eau (photo
prise avant la construction du barrage)
|

Churchill Falls en son état
actuel...
|
Renonçant à m’attarder davantage pour
perdre une autre fois 4 heures de mon temps, je renonce
avec regrets à la visite de la centrale et décide de
prendre immédiatement la longue route de Goose Bay : 280
km à parcourir dans un bush à peu près
totalement désertique et identique à celui de ce matin.
Pour donner au moins un peu de sens à cet autre versant
de l’aventure j’en profiterai pour achever mon test de
consommation puisque je devrai faire le plein à Goose
Bay avant d’entreprendre le parcours de la Route 510
vers le Sud dont la presque totalité (510 km) est sur le
gravier.
Sur la Route 500 vers Goose Bay
J’ai donc amplement le temps de
confirmer mes impressions de la matinée, jusqu’à mon
arrivée vers 15:30 dans la «conurbation » de Happy
Valley – Goose Bay ».
Il s’agit en fait de deux gros villages éloignés d’une
dizaine de kilomètres où la presque totalité des
habitations et des commerces s’alignent le long de la
rue principale… Je me rends jusqu’au bout d’Happy Valley
pour découvrir un aimable point de vue sur le vaste Lake
Melville, puis remonte jusqu’à Goose Bay à la recherche
du Musée d’aviation militaire, en fait situé sur la base
aérienne, elle-même fermée à cette heure.
Happy Valley au fond de Goose Bay
La consultation du Guide touristique provincial me
fait repérer un très beau point de vue et un petit
musée ethnologique remarquable (on verra …) à North
West River, à 45 km plus à l’est.