Monique
recoud les rideaux de l'Aigle
|
Il est presque 10:00 lorsque je
tourne la clef dans le contact de notre Aigle
stationné depuis 10 jours devant la maison de
Sainte-Foy. Les réparations et améliorations
projetées sont loin d'être complétées car nous avons
dû consacrer pas mal de temps à des démarches
interminables auprès de l'assurance, du garage, de
l'expert et de notre vendeur à Nantes suite à nos
déboires avec les soupapes qu'il a fallu changer...
Le frigo a cependant été dépanné, des ententes ont
été prises pour les autres réparations sous garantie
et nous avons achevé d'installer le nouvel éclairage
intérieur. Quant à tous les autres perfectionnements
ou retouches envisagés, on y verra en cours de
voyage ou plus tard.
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Mathieu |
Passant par Annecy pour gagner la Suisse puis l'Allemagne, nous avons embarqué l'excédent de bagages de Jehanne qui emmènera Mathieu (16 ans) et Stéphane (son correspondant américain) ce soir ou demain à Saint-Jorioz. Pots de géraniums et effets divers viennent combler les derniers espaces libres à bord de notre petit camion déjà lourdement chargé. De son côté Juliette (13 ans) nous
accompagnera dans ce périple qui lui fera découvrir
d'autres aspects de la Vieille Europe.
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Nous prenons la route vers l'est
en évitant l'autoroute chère et éventuellement coupée
par des barrages de routiers insurgés contre le
nouveau permis à points... Environnés d'effluves
d'essence fort désagréables dont je n'ai pu déceler
l'origine ni colmater la fuite avant notre départ,
nous arrivons au chalet sur le bord du lac vers 14:00.
Si la mécanique tourne bien (heureusement, après les
coûteuses réparations effectuées en janvier dernier
!), le temps en revanche est plutôt moche, les averses
se succédant sous un ciel gris et bas.
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Port de Genève et son jet d'eau |
Genève : Juliette et Jean-Paul devant le grand jet d'eau Quai du Mt-Blanc |
Après déchargement des
colis de Jehanne, nous repartons en direction de Genève.
Nous nous perdons un peu dans les échangeurs à la sortie
d'Annecy, gagnons le pont de la Caille lancé sur l'abîme
impressionnant et passons enfin la frontière suisse à
Saint-Julien. Stationnant devant le Jardin Anglais au
bord du lac, près du Pont du Mont-Blanc, nous faisons un
tour sur le quai très animé en ce dimanche après-midi
maintenant assez ensoleillé. |
Genève : Parc Mon Repos |
Nous reprenons la route longeant le
rivage et passant derrière les opulents parcs de la
"Villa Barton" et de "Mon Repos". |
Le paysage de campagne déroule ses
ondulations pleines de douceur au pied des contreforts
du Jura; vignobles et cultures maraîchères se
succèdent sur les pentes descendant mollement jusqu'au
bord du lac. Nous nous rendons ainsi jusqu'à Nyon où,
sous une pluie légère, nous grimpons à travers le
jardin fleuri sous les remparts et faisons un tour
dans les ruelles médiévales; nous tombons sous le
charme de l'architecture soigneusement restaurée et
des petites places enjolivées de fontaines fleuries.
Depuis la promenade des Vieilles Murailles, la vue
s'étend largement sur le Léman jusqu'au jet d'eau de
Genève dont on aperçoit la gerbe jaillissante dans le
lointain.
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Nyon et son temple romain au dessus du lac |
Mardi 7 juillet 1992 : de CORTAILLOD à WEISSENSTEIN (près de SOLOTHURN)
La pluie qui n'a pas cessé de la nuit révèle une petite fuite dans le jointoiement du lanterneau du cabinet de toilette posé la veille de notre départ. De plus, au moment de brancher les pompes pour la douche matinale, je constate que la batterie est complètement à plat... : elle semble ne pas s'être rechargée du tout depuis notre départ de Lyon !
Neufchâtel : Maison des Halles |
Assez dépités, nous
levons le camp sans enthousiasme pour gagner bientôt
Neuchâtel, une jolie petite ville en bord de lac.
Pendant que Juliette grippée demeure à se reposer dans
le lit haut, Monique et moi gagnons la place du Marché
ornée de sa jolie Maison des Halles avec tourelles et
blasons colorés. |
Poussant au fond de
la rue nous arrivons Place du Banneret qui doit son
nom à la statue d'un soldat du XVIème
portant cuirasse et bannière au dessus de la fontaine
où coule une eau claire et fraîche. |
Neufchâtel : Place du Banneret |
Neufchâtel : Fontaine du Lion d'Or |
Le Banneret (porteur de bannière) sur sa fontaine |
Puis nous grimpons jusqu'à la
collégiale (belles statues dans le choeur) et au
château tout proche, habilement restauré lui aussi.
Sa cour déborde de géraniums qui garnissent les
fenêtres entre les tours et les escaliers.
|
Château de Neufchâtel |
Sur la petite route descendant du Wessenstein vers Oensingen |
Au matin, la
visibilité ne s'est guère améliorée, réduisant à néant
tout espoir d'apercevoir le vaste panorama sur les
Alpes; en revanche la batterie débite normalement et,
comme il n'a pas plu, notre lanterneau (pas encore mis à
l'épreuve) se montre tout-à-fait étanche... Il ne reste plus qu'à redescendre dans la vallée par une jolie route champêtre, d'abord à travers des bois touffus, puis au milieu des alpages où paissent les fameuses vaches suisses à clochettes. Nous rattrapons la grande route à Oensingen pour filer jusqu'à Aarau. |
La vieille cité
médiévale accrochée au dessus de sa rivière nous retient
pendant une bonne heure, le temps d'admirer son site
depuis le grand pont au dessus de l'Aare, |
Toits de tuile
des vieilles maisons d'Aarau
|
Aarau |
...de déambuler dans ses ruelles, sous
ses portes voûtées, |
Rue pavée devant l'église d'Arrau |
...d'entrer dans sa stadtkirche
(église paroissiale) où j'admire un beau buffet d'orgue
datant de 1726, |
Juliette et
Jean-Paul sur la place de l'Église d'Arrau
|
... puis de faire le tour de sa petite place ornée d'une autre belle fontaine de la Justice, face aux maisons couvertes de fresques aux avant-toits décorés. |
Fontaine de la
Justice à Arrau
|
Baden |
Nous déjeunons dans le
stationnement avant de reprendre la route vallonnée
jusqu'à Baden, une autre petite ville moyenâgeuse. Nous
découvrons bientôt ses gradins accrochés au flanc de la
colline, au dessus des eaux vertes et agitées de la
Limmat. |
Si les curiosités sont peu différentes de celles d'Aarau (vieilles maisons, ruelles pavées...), en revanche le cadre naturel est plus grandiose et plus pittoresque. |
Place et église de Baden |
Une jolie route de
campagne que nous avons quelque difficulté à trouver
nous emmène ensuite vers Shaffausen et les fameuses
chutes du Rhin. Nous passons en Allemagne, retournons en
Suisse pour enfin tomber sur le site naturel célébré par
les Romantiques. Ces chutes, les plus importantes
d'Europe en débit, n'ont rien des Niagara Falls, mais
l'aménagement touristique y est plus discret et la
puissance de l'eau tourbillonnante impressionne quand
même. |
Jean-Paul et
Juliette devant les Chutes du Rhin à Shaffausen
|
Puis nous nous dirigeons vers le fameux jardin fleuri de l'île de Mainau. Huit DM pour stationner notre petit Aigle paraît bien cher à Monique qui rechigne, surtout lorsqu'il faut ajouter les 12 DM d'entrée par adulte. La promenade parmi les parterres exubérants de couleurs mérite assurément le déplacement, même si l'aménagement manque d'un peu de fantaisie, d'une pointe de raffinement : on se croirait presque dans les jardins américains visités en Floride où le "flash" l'emporte sur toute autre considération esthétique ! | Bodensee (Lac de Constance) depuis le jardin de Mainau |
Le Grand Escalier fleuri de Mainau |
Décidément les jardins anglais des country houses sont durs à battre... En revanche l'arboretum présente un grand nombre d'essences rares peu ou jamais vues ailleurs (arbres chinois et japonais délicats, curiosités australiennes et immenses séquoias de la côte ouest de l'Amérique...). |
Nous poursuivons jusqu'à
Wasserburg, pique-niquant dans le petit parc tout près
du promontoire où l'église et le château du village
s'avancent dans le Bodensee. Le site est charmant, la
vue sur les eaux s'étale largement à l'ouest et se
butte au sud à la ligne dentelée des montagnes du
Voralberg suisse.
|
Wasserburg |
Lindau sur son île dans le Lac de Constance (Bodensee) vu d'avion |
Encore quelques
kilomètres et nous sommes à Lindau, vieille cité isolée
sur son île. |
Les ruelles pavées bordées de maisons anciennes sont pleines de caractère. | Dans les ruelles de Lindau |
Le Rathaus de Lindau XVIème |
Façade arrière du Rathaus de Lindau |
et débouchent sur son célèbre petit port dont un lion de Bavière et un phare encadrent l'entrée... | Juliette et Jean-Paul devant le port de Lindau |
A Immenstadt, sous la pluie et dans un trafic
assez dense, nous bifurquons vers le nord, abandonnant la
montagne pour gagner la riche plaine de la Bavière. Nous
prenons l'autoroute de Stuttgart sur trente kilomètres pour
emprunter ensuite une petite route de campagne étroite et
accidentée qui nous amène au village d'Ottobeuren.
L'Abbatiale d'Ottobeuren |
Au bas de la côte, les tours jumelles de la célèbre abbaye baroque surgissent à travers une brusque averse de grêle. Nous allons stationner dans le parc juste en avant, faisons une première reconnaissance rapide et réservons la visite guidée détaillée à demain matin. Nous soupons, puis trouvons un point de chute tranquille dans un lotissement neuf en périphérie du village. Juliette et Monique font une partie de crapette tandis que j'écris ce journal, et nous nous couchons tôt. |
Samedi 11 juillet 1992 : d'OTTOBEUREN à NEUSCHWANSTEIN (FUSSEN)
Nous sommes debout à 8:15 sous une pluie qui n'a pas cessé de la nuit et continue de sourdre du ciel bas et plombé. Pas un bruit sur la rue où nous avions établi notre bivouac.
Nous sommes bientôt
devant la vaste élévation de l'abbatiale. J'en commence
seul la visite puisque Monique et Juliette se disent peu
tentées par le baroque triomphant ici partout présent. |
Façade d'Ottobeuren dans la belle lumière du matin |
Nef et chœur d'Ottobeuren |
Sitôt passée la lourde porte de bois sculptée, je suis saisi par la profusion du décor de stuc et de peintures recouvrant presque toutes les surfaces libres des murs et du plafond. Les teintes sont fraîches et vives, parfois même presque acides, les compositions vastes et complexes, usant abondamment de la perspective et du trompe-l’œil pour accentuer encore l'illusion de la profondeur. Les personnages sacrés se superposent vers les cieux jusqu'à la colombe de l'Esprit ou jusqu'au Père Éternel siégeant tout en haut de la Création. |
Putti d'Ottobeuren |
Putti d'Ottobeuren |
Les volumes ne sont pas moins travaillés dans leurs lignes générales harmonieuses, nettes et bien affirmées, comme dans le détails des reliefs sculptés avec minutie et parfaitement finis. Ici ce sont les autels consacrés aux différents saints, là la chaire ou les fonds baptismaux. |
Nef et orgues d'Ottobeuren |
Orgues de chœur et stalles d'Ottobeuren |
Enchâssés dans des stalles délicatement sculptées ou dorées, des orgues magnifique surmontent les deux côtés du chœur. L'ensemble est grandiose mais sans lourdeur, grâce à la lumière qui pénètre en grand par les vastes verrières, et grâce aux murs et fonds blancs qui la répercutent dans tout l'espace non décoré. Tout cela est considérable sans être écrasant, chaleureux sans être étouffant... et laisse une impression profonde. |
Putti |
Putti |
Après une heure de visite, observant maints détails et me laissant peu à peu envahir par l'ambiance merveilleuse des lieux, je quitte la vaste nef et traverse la pelouse sous le crachin pour gagner les bâtiments conventuels. Me méprenant sur les instructions du portier (un autre qui baragouine un anglais encore plus approximatif que le mien !), je flâne un peu dans les longs couloirs. Je passe à la boutique où je trouve un C.D. de la 5ème symphonie de Bruckner enregistré ici "live" par Eugen Jochum en 64 (un chef-d’œuvre que je cherchais depuis longtemps). | Bibliothèque d'Ottobeuren |
|
Je gagne enfin l'étage juste avant la fermeture à 12:00. Le gardien me laisse entrer avant de barrer la porte; je parcours plusieurs corridors discrètement décorés pour me rendre au petit théâtre déjà nettement plus luxueux, puis à la Kaiser-Saal lourdement et richement ornée. On y donne des concerts de musique de chambre au pied des massives statues de bois sculpté et doré montrant les souverains de Bavière dans des poses ou des mimiques presque caricaturales. Là encore, superbe plafond peint et grandes fenêtres donnant sur l'immense cour centrale. Je redescends au rez-de-chaussée par un autre escalier monumental lui aussi peint et sculpté, de grand apparat. Ainsi s'achève ma visite... |
Nous gagnons alors Fussen dont les rues médiévales bien restaurées et animées accueillent une fête populaire avec orchestre bavarois, bière et saucisses... Nous nous mêlons à la foule joviale qui déambule sous un bal de parapluies. Partout des buveurs rubiconds couvrent méticuleusement de la main leur impressionnant bock de bière pour éviter que l'eau ne vienne diluer leur boisson favorite. Sur une estrade abritée d'une tente, des musiciens en culottes de cuir et boléros bavarois jouent consciencieusement, entre deux gorgées de bière, le flonflon traditionnel. Entassés autour de petits kiosques couverts de polythène, des fêtards se bâfrent de saucisses et de tortilloni bizarrement apprêtés que nous avions tout d'abord pris pour de la choucroute... Ambiance bon enfant, un peu ralentie cependant à cette heure avancée où la boisson nationale a déjà pas mal amorti les participants...
Montée jusqu'à l'ancienne abbaye de Saint-Magnus dont seule l'église est encore ouverte : nous devons renoncer à l'exposition attendue d'instruments de musique. La pluie nous dissuade de grimper jusqu'à la terrasse du château pourtant toute proche, aussi retour au camping-car en léchant les vitrines (bel étalage de poupées de tous les coins du monde en particulier).
Nous savons que les châteaux royaux sont fermés à cette heure (il est 17:15), mais nous parcourons quand même les 4 kilomètres qui nous en séparent pour être à pied d’œuvre demain matin. Ils apparaissent bientôt à flanc de montagne, le premier, Hohenschwangau, jaune, médiéval et sans grande originalité, le deuxième, Neuschwanstein, néo-féodal, campé en nid d'aigle, offrant une silhouette élancée beaucoup plus singulière. C'était le chef-d’œuvre préféré de Louis II, le roi "fou"; il domine la plaine verdoyante, isolé au milieu des sapins et des rocs, environné de brume et de lambeaux de nuages sous le ciel gris. Quel tableau follement romantique, planté dans des environnements géographique et atmosphérique qui lui conviennent si bien... | Neuschwanstein émergeant de la brume matinale |
Les salles sont décorées du sol au plafond, tous les grands panneaux étant remplis de fresques aux couleurs vives racontant l'histoire plus ou moins mythique (genre chanson de geste) de la famille Wittelsbach qui gouverna la Bavière du Moyen-Age à 1918. Dans les fenêtres grandes ouvertes s'encadre le magnifique paysage de lacs, de montagnes et de forêts avec, obsédante, la silhouette fabuleuse de Neuschwanstein à distance. Le mobilier Biedermeier de bois clair ne manque pas de charme, les plafonds sont couverts de nervures gothiques, bref l'ambiance et l'homogénéité du décor laissent une impression agréable, et nous sortons finalement satisfaits de notre visite.
Dimanche 12 juillet 1992 : d'HOHENSCHWANGAU à OBERAMMERGAU
Hohenschwangau |
C'est seulement vers 9:30 que nous arrivons sur le stationnement au pied du château d'Hohenschwangau. Brève montée sur les pentes boisées avec vue romantique sur l'Alpsee enchâssé dans les forêts de sapins et les rochers à pic, puis visite de ce premier château où Louis II passa son enfance. Ses murs hérissés de créneaux de fantaisie, entièrement badigeonnés d'un jaune assez vif, lui donnent une allure de forteresse néo-gothique reconstituée à la façon des manoirs anglais. |
Nous retrouvons notre Aigle tout-à-fait emballés par cette magnifique balade mais aussi fatigués, comme brûlés par cette longue journée passée au grand air. Après 5 kilomètres d'une belle route de montagne, nous descendons à Berchtesgaden où nous trouvons une place en plein centre-ville sur un stationnement tranquille qui nous servira de bivouac pour la nuit.
Pause près de l'une des fontaines ornée d'un cygne - l'animal favori de Louis II - sur l'une des terrasses entourant le château, avant de redescendre à travers les grands arbres jusqu'à notre stationnement où nous nous rafraîchissons. Puis nous gagnons la petite poste pour appeler la famille à Lyon, histoire de l'assurer de notre survie en cette terre barbare... |
Fontaine du Cygne sur la terrasse d'Hohenschwangau |
Neuschwanstein dans son magnifique cadre naturel |
Les tours élancées et les murailles de pierre grise nous surplombent vertigineusement, nous écrasant de leur masse. Nous les longeons rapidement en direction de la porte monumentale de grès ocre pour découvrir une queue d'une demi-heure qui nous attend à l'entrée du palais du roi bâtisseur... Juliette garde ma place dans la ligne pendant que je vais faire quelques plans de la cour basse (où nous piétinons) et de la grande cour d'honneur qu'entourent les hautes façades percées de baies romanes. |
Puis nous pénétrons dans la base de la demeure royale. Longs corridors solennels et antichambres sombrement décorées se succèdent jusqu'à ce que nous accédions aux différentes pièces d'apparat : la salle à manger au décor foisonnant de boiseries, de peintures et de tapisseries, la salle du trône couverte de mosaïques dorées empruntant une grande part de sa majesté à son apparence de basilique byzantine, la chambre à coucher du roi à laquelle un grand lit gothique flamboyant de chêne sculpté donne un aspect somptueux. | Chambre de Louis II à Neuschwanstein |
La Salle des Chanteurs de Neuschwanstein |
... et, à l'étage supérieur, la salle des Chanteurs, immense et très salle de bal avec son estrade destinée aux musiciens limitée par un grand panneau peint représentant le jardin merveilleux du magicien Klingsor. Chaque pièce est d'ailleurs décorée d'une quantité de fresques inspirées par les opéras de Wagner : Parsifal, Tristan, Lohengrin, Siegfried, etc. L'ensemble est sombre et chargé, le mobilier lourd, mais réussit fort bien à suggérer l'ambiance médiévale de légende que souhaitait son créateur et propriétaire. |
Rendus au terme de la visite guidée un peu trop expéditive à mon goût (il y a foule en ce dimanche après-midi d'été), nous empruntons le sentier montant encore un peu à travers rocs et forêt pour admirer la noble silhouette du château depuis le Marienbrücke, une passerelle d'acier surplombant l'abîme de la cascade de la Pöllat. | Jean-Paul et Monique sur le Marienbrucke |
Panorama sur Hohenschwangau depuis Neuschwanstein |
Depuis le tablier du pont, la plaine verdoyante et les lacs lui composent un arrière-fond serein de paysage de miniature médiévale. De l'autre côté du pont, le torrent dégringolant les pentes abruptes et dénudées de la montagne brosse un décor sauvage et romantique en face de l'édifice. |
L'escalade d'un mauvais sentier grimpant à flanc de montagne nous offre une vue encore plus cavalière sur Neuschwanstein. Dévalant enfin un autre chemin pentu aux pierres instables qui nous semble bien long (nous marchons depuis 9:00 ce matin et il est 15:15...), nous regagnons notre Aigle pour y dévorer un lunch réconfortant. |
Le trio devant le château |
Lorsque nous reprenons ensuite la route se faufilant par monts et par vaux dans une campagne très vallonnée, nous longeons les Préalpes de l'Ammergebirge sur notre droite. La prochaine étape sera Wies, une basilique de pèlerinage à l'extraordinaire décor baroque, perdue au milieu des champs. | Église de Wies dans son décor champêtre |
Orgue de Wies |
Le site enchanteur, les stucs, les ors et l'ornementation de l'intérieur de l'église me charment, d'autant plus que les fonds blancs et la nef ovale agrandissent remarquablement l'espace. |
Mais le soir tombe, nous finissons par atteindre le village d'Oberammergau où nous décidons de faire étape. Je profite de la recherche du bivouac pour parcourir les rues du bourg paisible, filmant ici une façade fleurie ou peinte, là la vitrine d'un sculpteur sur bois. Nous trouvons enfin le calme recherché dans une impasse donnant sur une prairie au dessus du village. | Oberammergau : gros chalet hôtel dans le village |
Oberammergau : chalet avec fresque présentant l'histoire du Petit Chaperon Rouge |
Je me lève assez tôt, tandis que Juliette et Monique préfèrent continuer à dormir. Je profite du répit pour remplacer la goulotte et la durit du réservoir d'essence qui débordait à chaque virage à gauche. Travail long et difficile, allongé sous l'arrière du camion sur un carton ondulé emporté à cet effet... Une heure d'efforts, et j'ai terminé ; cela donne le temps à mes co-équipières d'émerger, de se préparer et de mettre de l'ordre dans notre intérieur. Vers 10:30 nous levons le camp, quittant notre prairie pour gagner le centre du village. |
Nous nous séparons alors pour une heure; j'aurai ainsi tout le temps de traîner dans les ruelles à filmer les vieilles maisons aux façades parées de fresques, les vitrines remplies de petits personnages en bois sculptés et peints, voire de crèches en bois sculpté, les chalets typés entourés de leur jardinet fleuri ou garnis de géraniums multicolores à toutes les fenêtres. | Oberammergau :
chalet du Chaperon Rouge
|
Crèche
d'Oberammergau
|
Je descends la rue principale, la caméra en action, puis me perds dans le lacis des ruelles enchevêtrées jusqu'à me retrouver à la lisière des champs fleuris. Je finis quand même par tomber sur notre Aigle, mais Juliette et Monique ont plus de difficulté à se repérer et me rejoignent avec une demi-heure de retard. Un lunch rapide et nous reprenons la route. |
Celle-ci s'enfonce
dans une large vallée encadrée de montagnes de plus en
plus imposantes : c'est le massif de l'Ammergau que nous
avons contourné et au creux duquel est niché le château
de Linderhof, une autre folie de Louis II. Les jardins
surtout sont splendides, entourant un palais miniature
et rococo grand comme le Petit Trianon, mais décoré avec
une débauche de rocaille à la française. Louis II
n'admirait-il-pas avant tout Louis XIV et Louis XV ?! |
Jardins de Linderhof |
Chambre de Louis II à Linderhof |
L'or et les motifs précieux débordent de tous côtés, couvrant murs et plafonds, tandis que le plancher montre une magnifique marqueterie de chêne et de palissandre. |
Un large tour dans le
parc nous permet de voir aussi le pavillon turc, un
autre décor rococo dans la lignée des Turqueries du
XVIIIème, |
Pavillon turc :
le trône aux paons
|
Pavillon turc : la fontaine centrale |
Dans le Pavillon turc de Linderhof : Jean-Paul filme |
La grotte de
Linderhof aux motifs wagnériens
|
puis la grotte artificielle toute imprégnée des mythes wagnériens qu'affectionnait le roi... |
Un dernier coup d’œil aux parterres
est et ouest, raccourcis miniatures des jardins de
Versailles avec fontaines dorées, statues
mythologiques, dessins de buis et de fleurs, treillis
et allées de gravier. Nous quittons alors ce petit
coin de civilisation raffinée un peu incongru dans ce
décor de montagnes pour gagner la réputée station de
Garmisch.
|
Linderhof et son
grand jet d'eau
|
Le Zugspitze depuis Grainau |
Sans nous attarder en ville, nous montons à la gare du téléphérique que nous désirons emprunter demain matin. Le massif du Reintal et le Zugspitze nous dominent, de plus en plus dégagés au fil de la montée vers l'Eibsee. Nous trouvons bien la gare au bout de la route en impasse, repérons les lieux pour demain (et le coût élevé de l'excursion...), soupons sur le stationnement mais devons renoncer à y demeurer, le séjour de nuit y étant interdit. Aussi redescendons-nous un peu plus bas dans le village de Grainau où nous nous préparons à bivouaquer sur le grand parking du complexe sportif, un peu à l'écart du centre et au pied des montagnes. |
Mardi 14 juillet 1992 : de GRAINAU à BAYRISCHZELL
Rien ne nous dérange sur notre stationnement après 21:30, à la fin du concert d'harmonie donné dans le parc voisin. Réveillé à 6:30, je lève la chambrée et, après une douche rapide, nous allons nous installer sur le stationnement encore désert du téléphérique; Monique et Juliette y font leur toilette avant que nous prenions notre déjeuner.
A 8:15 nous sommes dans la billetterie : 144 DM pour nous trois (tarif famille...) ça n'est pas donné ! En 10 minutes durant lesquelles s'épanouit le panorama de l'Eibsee et de la vallée de Garmisch au loin, la petite cabine dans laquelle ont pris place avec nous quelques autres touristes nous a hissé des 1 000 m de la gare de départ aux 2 966 m du Zugspitzgipfel. Étonnant ! |
Là-haut, les
galeries vitrées, fermées, du restaurant de rigueur sont
chauffées, mais lorsque nous parvenons sur les terrasses
installées au dessus, le vent froid et le grandiose
spectacle des Alpes nous sautent au visage : du côté
nord c'est le paysage de vallée, de préalpes et le lac
d'Eibsee qui s'étalent à nos pieds; au sud en revanche
ce sont les chaînes enneigées des Hautes Alpes qui
barrent l'horizon à des altitudes proches de celle que
nous avons si vite atteint. |
Jean-Paul et
Monique sur la terrasse du Zugspitze
|
Jean-Paul et Monique devant la croix du Zugspitze |
Au premier plan s'étend le champ de ski de la Zugspitzplatt où, entre 2 300 et 2 800 m, achèvent de fondre les plaques de neige disséminées sur la moraine usée de la cuvette suspendue qui fut naguère un glacier. Alentour les sommets autrichiens du massif forment un large cirque hérissé et dentelé typique de la haute montagne alpine. |
Ce paysage qui autrefois était accessible aux seuls alpinistes chevronnés me fascine. L'air froid est pur, la lumière éclatante et contrastée, l'espace immense. Nous demeurons une heure et demie à errer d'une terrasse à l'autre, contemplant et filmant ces cimes dont nous égalons la hauteur et qui demeureront pour nous hors de portée. | Juliette sur le Zugspitze |
Jean-Paul devant les montagnes entourant le Zugspitze |
Le Zugspitze |
Descente vers
Grainau
|
Descente tout aussi
rapide au retour soumettant nos tympans à dure épreuve;
nous retrouvons notre Aigle 2 000 mètres plus bas en à
peine 10 minutes, un peu sonnés par ce grand bol d'air
pur et de vent. |
Reprenant la route,
nous traversons sans escale la station« animée de
Partenkirchen et poursuivons la Route Allemande des
Alpes jusqu'à Mittenwald. |
Mittenwald : le
clocher de l'église
|
Violon à la fenêtre d'un luthier |
C'est un autre joli
village rempli de maisons peintes et fleuries où nous
visitons un mignon musée de la lutherie. Un authentique
luthier installé à son établi y œuvre, outillé de
minuscules rabots, à la fabrication d'un violon tout
semblable à ceux qu'utilisait Mozart. Nous admirons aussi à l'étage de la vieille demeure une vaste collection d'instruments à cordes (violes, violons, altos, violoncelles et apparentés) construits par des artisans de Mittenwald depuis 1684, sans compter quelques autres spécimens moins courants comme des "violons" chinois ou japonais... |
Mittenwald |
Maison à fresque à Mittenwald |
Grande rue de
Mittenwald
|
Parapente sur le Walberg |
Nous gravissons ensuite le col de l'Achenpass, faisons un détour de quelques kilomètres par l'Autriche pour déboucher sur la large vallée riante du Tegernsee. Juliette y observe avec envie l'atterrissage, dans un champ rempli de fleurs sauvages, d'adeptes du parapente s'élançant depuis les 1 722 m du Wallberg. |
Nous traversons
ensuite l'élégante station fleurie et soignée de
Rottach-Egern (beaucoup de monde), gagnons enfin dans la
lumière descendante le Schliersee; la vue sur le lac
depuis la petite chapelle Saint-Georges, quoique bien
difficile à trouver, y est admirable. |
Jean-Paul et Juliette font la pause devant le Schliersee |
Une dernière manœuvre pour retrouver la grande route et nous allons finalement dormir devant la gare du charmant village de Bayrischzell où la pluie nous accueille à nouveau après une journée de répit.
Mercredi 15 juillet 1992 : de BAYRISCHZELL à BAD REICHENHALL
Les gouttes n'ont pas cessé de tambouriner sur notre toit pendant toute la nuit, mais elles ne nous empêchent pas de poursuivre notre sommeil jusque vers 6:15, lorsque le ronronnement du gros diesel du premier train du matin (nous sommes en tête de ligne) me réveille. Nous paressons, bien au sec dans notre cocon entouré de nuées se résolvant en pluie, jusque vers 8:00, heure où prennent place les routines habituelles : douches, déjeuner, vaisselle.
Wilden Kaiser |
Enfin, vers 9:30, nous reprenons une route étroite et sportive nous menant à Sudelfeld (1 097 m). Beaux paysages de montagne noyés dans la brume et les nuages qui s'effilochent et se convertissent en bruine... Arrêt d'une demi-heure à la cascade de Tatzelwurm dont les bouillonnements et les longues giclées d'eau blanche à travers le chaos rocheux me fascinent un bon moment... |
Malgré le ciel menaçant au sud, nous décidons de poursuivre l'itinéraire planifié vers Marquartstein, un charmant village de montagne avec maisons fleuries, mât traditionnel décoré de silhouettes... | Chalet à Marquenstein |
Défilé et chapelles de Klobenstein |
Par le défilé de
Klobenstein nous passons au Tyrol autrichien. Il fait
très gris mais nous descendons quand même dans le vallon
visiter les deux chapelles accolées séparées par un
rocher fendu tout-à-fait pittoresque : le sous-bois est
touffu, la maisonnette à côté joliment fleurie, voilà
une pause bien agréable. |
La chic ville de cure (eau salée) nous paraît
étendue après tous ces villages sans ampleur traversés depuis
deux jours. Nous en parcourons les longues rues, les parcs
superbes bordés de riches demeures pour enfin aller visiter la
grande église romane de Saint-Zénon (XIIème) : beau portail
avec colonnettes s'appuyant sur des lions lombards, vaste nef
dépouillée et riche retable du couronnement de la Vierge
(1520). Monique admire aussi les habiles arrangements floraux
sur les tombes du cimetière.
Nous finissons par
trouver l'élégante rue principale Ludwigstrasse qui a
été transformée en rue piétonnière, et le bâtiment des
Sources (l'Ancienne Saline) dont je voulais visiter les
installations techniques datant de près de deux siècles.
Mais il est déjà 17:30, tout est fermé, ce sera pour
demain. Il ne nous reste plus qu'à découvrir un coin
tranquille pour la nuit. Nous le dégottons derrière
Saint-Zénon, sur le stationnement désert d'un collège
fermé pour l'été semble-t-il... |
Ancienne Saline de Bad Reichenhall |
Jeudi 16 juillet 1992 : de BAD REICHENHALL à BERCHTESGADEN
Le terrain en bordure du parc, vide et idéalement paisible hier soir, se remplit ce matin vers 7:30 : probablement les profs donnant des cours d'été aux adolescents qui arrivent seuls (en courant...) ou en groupe (en riant ou chahutant...).
Roues actionnant les pompes |
D'abord c'est le coup
d’œil aux deux immenses roues à aubes actionnant les
pompes principales de la saline. |
Suit une balade dans des galeries voûtées et étroites pavées de marbre donnant accès aux différentes sources de saumure dont on extrayait le sel autrefois. Ambiance mystérieuse dans la demi-obscurité de ces longs corridors où suinte la saumure, découverte d'une machinerie antique mais sophistiquée animant des pompes de bronze dispersées dans tout le sous-sol de la saline... |
Galeries et réservoirs à saumure... |
Le trio en tenue de visite... |
Bref une visite
amusante et instructive dont nous sortons enchantés. |
Il est midi lorsque nous prenons la route de Berchtesgaden. Une longue mare couverte de nymphéas juste après la chapelle perchée de St-Pankraz attire bientôt notre attention. | Mare aux nénuphars à St-Pancraz |
Mare aux nénuphars |
Nous en faisons le
tour en photographiant et filmant les fleurs épanouies,
les poissons filant entre deux eaux et les libellules
affairées. |
Un peu plus loin,
apercevant la rive verdoyante et invitante du Thurmsee,
nous quittons la grande route pour aller pique-niquer au
dessus de la pelouse où se prélassent de vieux curistes.
Fromage, bière et salade prennent place sur notre table
installée dehors pour la première fois, devant le
plaisant panorama agrémentant notre casse-croûte. |
Piquenique devant le Thurmsee |
Perspective sur le Königsee |
La route suit la vallée encaissée de la Schwarzbach en grimpant les 868 mètres du Schwarzbachwatchsattel jusqu'à ce que nous rattrapions la bifurcation vers le Königsee. Il y a foule dans le stationnement et dans le petit village regorgeant de boutiques à touristes; mais le paysage grandiose du lac environné de hautes montagnes tombant à pic dans l'eau verte fait accepter cet inévitable inconvénient. Devant le prix de la balade en bateau, nous hésitons quelques instants puis prenons des billets nous permettant d'embarquer à 16:30 dans l'une des petites vedettes électriques faisant la navette sur l'eau tranquille. En l'attendant, Monique et Juliette traînent dans les boutiques de "souvenirs" qui vendent un peu de tout et n'importe quoi, jusqu'à ce que nous prenions place dans la file d'attente. |
Enfin l'on embarque et l'on s'éloigne du quai. Quelle paix tout-à-coup ! Après un coude pour éviter une petite île couverte de sapins, nous débouchons dans le grand axe du Königsee cerné de ses montagnes culminant vers 2 600 m. Le paysage est magnifique: le panorama se déroule lentement au fil de l'avancée paisible de notre esquif silencieux. Le temps malheureusement très couvert éteint les couleurs de l'eau, du roc et des sapins dispersés sur les pentes tandis que des nuées cotonneuses cachent les cimes des pics qui nous entourent... Sensation proche de celle que nous avions à bord de la "Gondola" sur les eaux de l'Ullswaters dans le Lake District, mais ici le cadre est autrement grandiose ! Au milieu de la traversée, le moteur s'arrête, le timonier se poste sur le plat-bord face à la rive, embouche une trompette et joue un air mélancolique pour nous faire apprécier l'écho longuement répercuté par la falaise verticale du Burgstallwand... | En bateau électrique sur le Königsee |
Monastère de
St-Bartholomea
|
Nous atteignons l'abside trilobée blanche et typique du petit monastère de Saint-Bartholomä, une escale que nous sautons pour aller jusqu'au terminus de Salet. |
Le quai auquel nous abordons mène à une chemin sinuant à travers les rochers et la lande d'une ancienne moraine. Celle-ci barre un cirque où, après 20 minutes de marche, nous tombons sur un autre lac encore plus sauvage, l'Obersee; presque circulaire, la muraille verticale des Teufelshörner qui le cerne est barrée par les 400 m de la haute cascade du Röthbach juste en face de nous, accentuant son caractère fantastique. Je tente de faire un plan de Juliette en petite sirène sur un rocher à proximité du rivage, avec un succès mitigé vu le peu de collaboration de mon modèle... | Juliette et Jean-Paul au bord de l'Obersee |
Monique et Jean-Paul dans le bateau sur le Konigsee |
J'ai à peine le temps de me hasarder un peu sur la rive dans le sous-bois pour découvrir des points de vue encore plus frappants, qu'il faut déjà regagner l'embarcadère et le petit bateau qui nous ramène à notre base, à travers les même paysages grandioses mais de plus en plus sombres et sous un plafond progressivement plus bas. |
3. Autriche
Vendredi 17 juillet 1992 : de BERCHTESGADEN à SALZBURG
Peu de bruit dans ce parc urbain, donc repos suffisant
(quoique pluvieux...). Nous profitons de ce que nous sommes au
centre de la petite ville pour traîner un peu dans les
vieilles rues fleuries aux maisons peintes; après avoir
traversé l'église à base romane nous nous rendons jusqu'au
château, en fait l'ancien prieuré des chanoines, un élégant
palais dans ses teintes bleu pastel. En revenant au
camping-car, Monique achète quelques fruits d'un vendeur de
primeurs qui a installé sa charrette à bras au milieu de la
rue pavée. Au retour, sur notre pare-brise, une contravention
est venue souligner le fait que notre stationnement est
destiné aux bus plutôt qu'aux camping-cars !
Nous partons maintenant parcourir la haute route du Rossfeld. Une signalisation un peu confuse près de l'Obersalzberg (où l'armée U.S. a colonisé l'ancien repère d'Hitler sous le nom de "Eagle's Nest") nous entraîne loin de notre but jusqu'au terminus de Vorderbrand. Jolie route, mais qui n'est rien à côté du Rossfeld Ring, une extraordinaire balade de 21 kilomètres qui nous hisse à 1 551 m. Là-haut s'étale un panorama grandiose : d'un côté la haute masse rocheuse du Dachstein culmine à plus de 2 500 m, parsemée de petits glaciers et précédée de verdoyantes prairies où paissent vaches et moutons; de l'autre la plaine de Salzburg se déploie à perte de vue 1 000 m plus bas, encadrée par les derniers contreforts des Alpes. Je parcours à pied les trois ou quatre kilomètres de crêtes séparant la Bavière du Tyrol, puis nous redescendons lentement, avec force freinage, la pente abrupte pour arriver à Salzburg en milieu d'après-midi. |
Nous trouvons rapidement un petit stationnement sur la rive droite de la Salzach, juste en face de la vieille ville hérissée de nombreux clochers et dômes, surmontée par la silhouette massive du château sur la rive gauche. | Salzburg et la Salzach depuis Heittwer Bastei en allant vers Berchegsgaden |
Tanzermeistersaaal |
Monique se sentant
très fatiguée, nous ne ferons qu'un petit tour de ce
côté-ci de la rivière, visitant la "Tanzermeistersaal"
(Maison du Maître de Danse) que la famille Mozart
habita pendant dix ans, |
admirant ensuite le Mirabell Garten, ses roses et ses statues encadrant des parterres multicolores... | Mirabell Garten |
Escalier du
Hettwer Bastei
|
Au retour, Juliette
m'accompagne à l'assaut du Hettwer Bastei: les
escaliers montent très abruptement, mais au fur et à
mesure de leur escalade, une vue des plus pittoresques
se dégage sur la ville épiscopale en face. On atteint
enfin le chemin de ronde ombragé que l'on suit sur
plusieurs centaines de mètres. |
A nos pied, l'étroite Steingasse serpente en
arrière du quai, la Salzach roule ses eaux vertes et agitées,
de hautes maisons aux teintes pastel bordent le quai en face;
puis ce sont les toits, les clochers et les dômes de la
vieille ville que domine la masse du Hohensalzburg (la
forteresse des princes-archevêques); en toile de fond, les
montagnes de la région de Berchestgaden, rosées par le soir,
limitent l'horizon... Superbe !
Nous faisons demi-tour et regagnons notre Aigle par la Steingasse, passant sous l'ancienne porte Steintor (XVIIème) et admirant au passage les demeures anciennes aux façades sculptées...
Pour bivouac, j'ai l'idée d'aller chercher refuge sur le Gaisberg, loin au dessus de l'agitation et du bruit de cette ville animée. La montée nous semble un peu longue, en revanche de là-haut (1 228 m) le panorama s'étend très loin dans le crépuscule sur le bassin de Salzburg, la ville minuscule à nos pieds et les montagnes violacées encadrant le tout. Juliette a même le plaisir d'y observer l'envol de "parapentistes" se lançant au dessus de la plaine, les vives couleurs de leur voile brillant dans les derniers rayons du soleil. Malheureusement un policier, du reste fort courtois, vient bientôt nous informer de l'interdiction de camper sur la hauteur; dommage, l'air vif et frais ajouté à l'éloignement de la ville faisaient augurer une belle nuit. | Au crépuscule, vue vers Salzburg depuis le sommet du Gaisberg |
Nous nous levons tard,
récupérant la fatigue des longues marches d'hier. Puis
nous gagnons le centre-ville où nous avons beaucoup de
mal à trouver un stationnement que nous découvrons
finalement sur la Mirabell Platz. Cela nous vaut une
belle balade à pied à travers le Mirabell Garten déjà
entrevu hier... |
Pégase dans
Mirabell Garten
|
Les clochers de Salzburg |
...puis le long de la
Salzach sur le Franz Josef Kai une fois passée la
passerelle Makart. Nous montons d'abord à la terrasse du
café Winkler pour admirer les toits et les dômes de la
vieille ville, avant d'y pénétrer en passant sous les
anciennes portes voûtées. |
Getreidegasse
|
Jean-Paul et Juliette sur Getreidegasse
|
Nous arrivons ainsi à la maison natale de Mozart transformée en un émouvant petit musée; tableaux, meubles, portraits, instruments anciens sur lesquels joua le Maître... |
Maison natale de Mozart |
Piano forte de Mozart |
Violon de Mozart |
Mozart Trio : père, fille et fils |
Leopold Mozart, le père |
Nanerl la sœur en 1763 |
Wolfgang, le jeune prodige, en 1763 |
Constance Weber, l'épouse, en 1802 |
Famille Mozart en 1781 |
Sur la place du Vieux Marché, la Hofapoteke (ancienne pharmacie) est malheureusement fermée, ses portes et fenêtres obstruées par de gros volets de bois; en revanche, au bout de la Judengasse, une autre rue étroite, nous tombons sur une authentique harmonie au grand complet qui s'apprête à donner l'aubade. Le plaisir de jouer ensemble se devine à la mine réjouie de ces musiciens du dimanche en costume traditionnel (bas blanc et petit chapeau tyrolien) et j'apprécie leur sonorité pleine et leur musicalité. | Place du Vieux Marché et Hofapoteke |
La Domplatz, contiguë,
et la cathédrale sont inaccessibles car on a dressé des
tréteaux pour un spectacle qui se donne (ou se prépare)
sur le parvis. Nous contournons donc le palais pour
visiter l'église des Franciscains, presque nue, avec son
beau choeur roman à voûtes multiples. |
Vierge dans l'Église des Franciscains |
Fontaine de Neptune et Hohensalzburg |
A la sortie de
l'église, le petit cimetière St-Peter dont les arcades
s'accotent à la falaises nous offre son cadre paisible
et fleuri où l'on a plaisir à flâner quelques instants.
On arrive maintenant à la ruelle pavée montant à la
forteresse du Hohensalzburg dont les murailles
imposantes dominent la cité. Mais Monique (qui a mal aux pieds...) et Juliette (qui crève de faim...) refusent d'aller plus loin. |
Nous prenons donc le
chemin du retour, revenant en partie sur nos pas, non
sans hésiter à nous attabler dans un des charmants -
mais coûteux - restaurants voûtés installés au pied de
la falaise... Nous passons devant l'Abreuvoir aux
Chevaux, vaste bassin entouré de balustres et centré sur
la statue au mouvement un peu tordu d'un cheval sauvage
affrontant son dresseur, et encadré d'une dizaine de
fresques équestres en arrière-plan |
Abreuvoir aux Chevaux |
Sur la passerelle Makart à Salzbourg |
Nous longeons ensuite
le Festspielhaus, sinistre longue bâtisse grise, puis
quittons la vieille ville par la porte même qui nous y
avait donné accès, pour enfin suivre le quai de la
Salzach sous les tilleuls... Dernier coup d’œil à la
cité aux silhouettes si caractéristiques avant de
retrouver notre Aigle sur son parking de Mirabell. Nous
dînons rapidement sur un autre stationnement un peu plus
loin puis nous éloignons du centre pour aller dormir au
nord de la ville dans un quartier résidentiel qui a
l'air tranquille. |
Dimanche 19 juillet 1992 : de SALZBURG à SAINT-FLORIAN
La nuit se déroule sans incident, mais au matin, pendant que je vide le réservoir d'eaux usées dans un égout, un citoyen salzbourgeois s'approche et me remet une copie d'une circulaire municipale interdisant le camping sauvage sur le territoire de la commune... Nous levons le camp sans délai et décidons de nous éloigner de cette ville décidément bien exigeante pour des nomades peu grégaires qui veulent garder leur liberté.
Nous prenons la
direction du Salzakammergut et de ses lacs réputés.
Après à peine quelques kilomètres, nous tombons sur le
Mondsee encaissé entre ses montagnes; coup d'oeil sur
les petits bateaux attendant les touristes au quai du
village du même nom, avant de suivre la rive (route 151)
à la recherche d'un coin tranquille pour passer la
journée au bord de l'eau puisque Juliette veut "griller"
au soleil et Monique écrire le courrier en souffrance. |
Salzkammergut |
Nous trouvons un petit bout de berge libre et accessible à l'extrémité est du lac, juste avant Au. Notre quête aura été longue car presque tout le rivage est divisée en plages privées minuscules coincées entre l'eau et la route dont elles sont séparées par une haie plus ou moins touffue... Sur chaque parcelle, un gazon bien entretenu, quelques fleurs, une table de pique-nique, quelques chaises longues... et c'est plein ! Chacun se recrée ainsi son petit paradis au bord de l'eau; seuls quelques mètres de temps à autre ne sont pas clôturés et, si l'on a la chance de trouver une place pour stationner à proximité, on peut jouir du lac en évitant les quelques plages publiques aménagées où là, c'est la cohue.
L'après-midi s'écoule ainsi, paisible. Le
paysage est superbe : l'eau verte et transparente au premier
plan, la haute montagne rocheuse et boisée tombant à pic en
face. Juliette rougit plus qu'elle ne bronze, notre courrier
s'achève, nous faisons la vaisselle puis, vers 17:30, nous
reprenons la route. Elle longe d'abord la rive du second lac
en enfilade : l'Attersee avec, depuis la chaussée étroite et
sinueuse, quelques belles vues sur le plan d'eau miroitant
sous le soleil descendant. On quitte ces attrayants paysages
pour enfiler ensuite l'autoroute en direction de Linz. La
journée a été très ensoleillée sans être trop chaude, la
soirée est tiède, l'autoroute file dans la plaine à peine
vallonnée couverte de grands champs cultivés. Nous approchons
de Linz que nous évitons et, à la nuit tombée, dans les
derniers feux du couchant silhouettant les trois tours de
l'abbatiale, nous allons dormir au coeur du village de
Saint-Florian dont nous voulons visiter la fameuse abbaye
baroque demain matin.
Lundi 20 juillet 1992 : de SAINT-FLORIAN à WALDKIRKEN AM WESEN
Abbaye de Saint Florian : vue générale |
Une autre journée qui
commence au grand soleil. Premier levé, je pars acheter
du pain à la bakerei du village bien assise au
milieu d'autres maisons XVIIIème, en bordure de la jolie
place du marché ombragée d'un énorme marronnier. J'en
profite pour jeter un premier coup d'oeil aux murs
élevés du monastère dont la belle ordonnance
architecturale domine la place. Après lever et déjeuner
de mes équipières, nous montons stationner sur la petite
esplanade devant l'entrée principale du monument. |
Quelques manœuvres pour placer notre Aigle à l'abri du soleil, puis nous pénétrons dans l'avant-cour; je suis frappé par la grandeur du bâtiment : la façade, de près de 220 mètres de long, s'articule autour d'une magnifique porte à décor baroque couronnée d'une tour; elle s'achève par la façade de l'église elle-même surmontée de deux clochers élancés. Grande unité de style, baroque, et de couleur, enduit jaune crème avec encadrements blancs. L'ensemble respire la noblesse et la richesse. | Porte de l'Abbaye de Saint Florian |
Saint-Florian :
façade de l'abbaye
|
Saint-Florian : l'église |
Orgues de
l'Abbatiale de St-Florian
|
Anton Bruckner,
l'organiste de Saint Florian
|
Nous suivons ensuite
la visite guidée qui part de la fontaine de l'Aigle au
centre de la grande cour et nous mène dans la crypte
gothique (avec ossuaire et sarcophage de Bruckner)... |
Fontaine de l'Aigle |
Marmorsaal de St
Florian
|
Chambre du Prince
Eugen
|
Bibliothèque de Saint-Florian |
...pour enfin s'achever dans la
riche bibliothèque, elle aussi pleine de sculptures
baroques. Quel grandiose monument, et dans quel
remarquable état : notre guide affirme qu'avec Melk,
Saint-Florian constitue le plus bel ensemble abbatial
baroque d'Autriche.
|
Visite longue,
impressionnante et chargée d'émotion. Beaucoup
d'informations - quoique en allemand ! - mais surtout un
grand vide, les installations étant désertes et les
baraques en grande partie démolies. On a le sentiment de
traverser un immense cimetière quand on sait que plus de
200 000 personnes subirent le martyr ici, plus de 120
000 y trouvant la mort. Nombreux détails macabres
(données sur la vie quotidienne dans le camp, photos,
barbelés électrifiés, chambre à gaz et fours
crématoires), mais aussi l'impression d'une mécanique
implacable déshumanisant les gardiens autant que les
prisonniers. |
Artère
centrale de Linz
|
Pourtant, que la
vallée du Danube suivie jusqu'à Linz est riante dans la
belle lumière dorée de la fin de l'après-midi ! Nous
stationnons sur le quai tout près du centre de la
vieille ville mais je suis le seul à me lancer dans son
exploration, Juliette et Monique se disant saturées par
les deux précédentes excursions de la journée. |
Colonne de la
Trinité sur la Hauptplaz
|
Façade baroque à
Linz
|
Tours de la
cathédrale de Linz
|
Puis je passe devant
la cathédrale sévère où une plaque et un médaillon
évoque la mémoire de Bruckner qui en tint l'orgue
pendant 12 ans. |
Je gagne enfin le landhaus
(XVIème) surmonté d'une jolie tour à décor
peint, traverse sa cour à arcades fleuries et ressort
par son beau portail Renaissance. |
Cour du Landhaus de Linz |
Le château de
Linz et le Danube
|
La montée jusqu'au château me semble rude, mais sa porte close (il est presque 18:00) m'empêche d'accéder à sa terrasse pour admirer le panorama sur la ville au bord du Danube. Dévalant escaliers et ruelles anciennes, je rattrape le quai ensoleillé offrant de belles perspectives sur la vallée encaissée du fleuve en amont et regagne enfin notre Aigle. |
|
Soir sur Linz, le château et le Danube |
Mardi 21 juillet 1992 : de WALDKIRCHEN à BODENMAIS
Passau au
confluent de l'Inn et du Danube
|
Nuit tranquille mais à découvert : nous sommes réveillés par le rayonnement intense du soleil réchauffant la carrosserie. Rattrapant la vallée du Danube, notre route pittoresque longe la rive droite en nous offrant de belles échappées à travers les arbres touffus sur des plans d'eau étendus en amont de grands barrages. Nous sommes bientôt à Passau. Nous en traversons vite les importants faubourgs industriels pour gagner directement la vieille ville au triple confluent de l'Ilz, de l'Inn et du Danube; il fait excessivement chaud, le soleil tape, les touristes très nombreux occupent tous les stationnements. |
Nous finissons par
trouver une place près du Rathaus et nous enfonçons à
pied dans les ruelles ombreuses et pavées de granit de
la vieille cité. Elégants hôtels particuliers,
cathédrale impressionnante par sa grandeur quoiqu'un peu
austère. Nous boudons le récital d'orgue de midi dont le
programme ne m'accroche guère, ce qui nous empêchera de
contempler un instrument pourtant magnifique (sur les
cartes postales...). La Residenzplatz est plus élégante
que la Domplatz, mais la superbe abside gothique de la
Dom est presque complètement masquée par les
échafaudages des restaurateurs... |
Vieille ville de Passau |
Juliette de vant
la Schlabingsturm de Passau
|
Nous gagnons le quai longeant l'Inn en passant près d'une vieille porte surmontée de sa tour, la Schalbingsturm; nous arrivons enfin au petit jardin un peu desséché devant lequel les eaux des trois rivières se mêlent, celles de l'Inn nettement plus abondantes mais aussi plus bleues (plus propres ?), absorbant lentement, avec une nette démarcation, celles du Danube plus sombres. Dominant le confluent, la forteresse d'Oberhaus, massive et sans originalité, "protège" la cité au dessus d'un épais massif de sapins. |
Nous quittons alors Passau pour emprunter la route touristique de la Forêt Bavaroise : il fait un peu plus frais dans le paysage de collines envahies par les sapins ou de plaines couvertes de céréales et de maïs. Des ondulations, parfois importantes, animent agréablement la campagne qu'une route moderne aux grandes courbes relevées traverse par monts et par vaux.
Arrêt d'une heure à Grafenau pour compléter notre épicerie dans un petit supermarché (bons produits et prix intéressants, mais on est loin de la variété et de la qualité des Continent et autres Carrefour français...). La plaisante route de champs et de forêts mêlés, intensivement cultivés, se poursuit jusqu'à Bodenmais, petite ville aux productions de verre soufflé sans grande élégance. Nous trouvons un bivouac paisible sur le stationnement désert du téléphérique de l'Erzbergwerk. La température est encore très élevée, le ciel orageux et, à chaque arrêt, le moteur très chaud a beaucoup de difficulté à repartir (vaporisation de l'essence et/ou réglage défectueux du carburateur ?). Un autre problème dont il faudra se préoccuper de retour à notre base en France...
1992-07
: Bavière - Rhin - Forêt Noire