Juliette, ayant
déclaré que nous avions besoin de repos avant d’entamer
la route du retour, propose d’aller «chiller» sur la
plage de Crescent Beach après avoir fait un tour au
village de pêcheurs de Blue Rocks. Ici, les touristes sont rares, rien à voir avec Peggy’s Cove. Et si le site est loin d’avoir autant de caractère, il présente néanmoins une authenticité de bon aloi. Belle occasion d’une petite marche en suivant le chenal aménagé entre de gros rochers et la rive, bordé de petites maisons rustiques colorées et de quais sur pilotis, jusqu’au bout de la pointe où mouillent quelques bateaux de plaisance et d’excursion en mer. |
Blue Rocks : quais et hangars le long du chenal |
Blue Rocks : cabanon |
Blue Rocks : le chenal et ses barques de pêche |
Blue Rocks : le quai et ses hangars |
Blue Rocks : le quai et ses hangars |
Juliette déçue sur Crescent Beach |
Nous repartons bientôt
sous un ciel des plus variables pour passer le bac de La
Have et gagner le long croissant de Crescent Beach
repéré par notre pilote. Difficile apparemment de poser le convoi Bolt + roulotte sur le tout petit parking à l'entrée du site. D'ailleurs presque toutes les voitures sont arrêtées sur le sable compact de la plage. Pour notre part nous rechignons à nous engager sur ce genre de terrain meuble dont je conserve quelques malheureux et cuisants souvenirs, et Mathieu est encore plus réticent que moi. Nous allons donc plus loin sur la chaussée qui longe la dune/digue servant de trait d’union avec l’ile voisine (George Island), mais à la première tentative de nous arrêter sur un petit espace propice, nous sommes assaillis par une horde de moustiques voraces… Pas question de piquenique au grand air ici comme prévu ! |
Juliette cuisine ses pétoncles aux oignons verts (ciboulette) sur Crescent Beach |
Crescent Beach : début de la plage à l'est |
Finalement nous nous
rendrons jusqu’au village de Bear River, à une quinzaine
de km de la côte nord, où Juliette a repéré une borne de
niveau 2 gratuite. La Bolt y passera la nuit
branchée, tandis que nous trouverons refuge dans le
stationnement très tranquille d’un petit parc
commémoratif découvert au bord de la rivière, derrière
les murs décrépits de la Loge maçonnique. |
Bear River : la Bolt à la borne de recharge |
Captain Anthony Building, ca.1856 |
Captain Anthony Building ca. 1856, posé sur pilotis dans la Bear River |
La loge maçonnique de Bear River |
Réveil sous la pluie qui est tombée toute la nuit. Elle s’est accentuée vers 5:00 sous forme de grosses averses qui m’ont réveillé. Le crachin continue tandis que nous levons le camp après une nuit autrement paisible. | Bivouac à Bear River dans le parc commémoratif |
Colonie de Port-Royal |
LE
DÉFI DE LA COLONISATION DE L’ACADIE C’est ici, sur
les rives de Port-Royal, que les Français ont
édifié en 1605 un complexe de bâtiments. Dans le
passé, plusieurs tentatives par des Européens de
passer l’hiver dans le Canada Atlantique avaient
échoué. Si l’entreprise de Port-Royal dirigée par
Pierre Dugua le Sieur de Mons a réussi, c’est
largement parce que les Mi’kmaq ont accueilli les
colons français, partageant avec eux leurs savoirs
traditionnels et s’alliant à eux durant les
conflits. Les Mi’kmaq étaient invités à prendre
part aux célébrations aux côtés des colons
français et, dans nombre de cas, ont adopté la foi
chrétienne.
LES TROIS PORT-ROYAL 1. Port-Royal est le nom que Samuel de Champlain a donné en 1694 au bassin d’Annapolis actuel. 2. Dans les années 1630. Port-Royal était dans le secteur occupé aujourd’hui par le bassin d’Annapolis, la rivière Annapolis et la côte jusqu’à Paradise 3 De nos jours, l'appellation Port-Royal désigne le présent lieu historique national et la localité voisine. |
À la porte de l'Habitation de Port Royal |
Entrée dans l'Habitation |
RECONSTRUCTION DE L'HABITATION, vers 1940. L’Habitation de Port-Royal reconstruite a ouvert ses portes en 1941, marquant une étape importante du mouvement de préservation au Canada. La reconstruction d’une structure disparue en faisant appel à des recherches approfondies a montré une nouvelle façon de présenter le passé. L'emplacement précis de l’Habitation de 1605-1613 n’a jamais été découvert, mais on croit que le bâtiment reconstruit est tout près de l'emplacement original. LE PIDGIN, LANGUE DE LA TRAITE Les peuples d'Europe et des Amériques, y compris les M'kmaq. ont dû improviser des langues (pidgins) pour communiquer en faisant la traite. En 1609, Mathieu Da Costa, un homme d'ascendance africaine, a été embauché par le Sieur de Mons comme interprète pour ses expéditions au Canada et en Acadie. Da Costa avait une excellente réputation comme interprète, mais les recherches n’ont pas pu confirmer sa présence ici à Port-Royal. |
Dessin de l'Habitation, réalisé par Samuel de Champlain vers 1605 |
Cour centrale de l'Habitation de Port-Royal |
Il s’agit bien sûr
d’une reconstruction des années 1930, la première
entreprise par Parcs Canada pour faire ressurgir
l’histoire du pays auprès de ses habitants. Il y en aura
bien d’autres, mais celle-ci est particulièrement
réussie, tant par le site sauvage au-dessus de la baie
que par l’exactitude de la reconstitution (basée
uniquement sur des documents puisqu’on n’a pas encore
retrouvé ni donc fouillé le site exact) et confirmée par
toutes les recherches historiques subséquentes. Les petits bâtiments tout en bois s’enchaînent autour d’une cour carrée centrée sur le puits, et on en parcourt les pièces les unes après les autres, décorées et meublées comme à l’époque (Henri IV) très simplement, mais efficacement. |
Dans le magasin de traite, les tissus et objets de métal prisés par les Mi'kmaq |
Principal objet d'échanges, la fourrure de castor et un chapeau fait avec son duvet ou «bourre», constitué de poils barbelés très fin qui donnent un feutre luxueux et durable |
Après un tour dans le magasin de traite (fourrures, outils en métal pour échange avec les Mi’Kmaqs) et sa cave (barils de vin), puis dans son grenier je me rallie à deux couples en visite privée accompagnés par un guide costumé plein d’allant et fort disert. | Agrès, filets de pêche et armes (pierrier à boite) dans le grenier du magasin |
Habitation de Port-Royal : sabots dans la salle des artisans |
Charpente de l'Habitation de Port-Royal dans le dortoir/infirmerie |
Habitation de Port-Royal : la Salle à manger de l'Ordre du Bon Temps, institué par Samuel de Champlain pour maintenir la santé et le moral de la troupe pendant le long l'hiver canadien |
Habitation de Port-Royal : la vaisselle en étain |
...avant de passer sur la terrasse avancée fortifiée de 4 petits canons de marine (pierrier à boîte se chargeant par la culasse). |
Habitation de Port-Royal : pierrier à boite sur la terrasse fortifiée Un pierrier à
boîte est un type de pierrier à chargement par la
culasse inventé au XIVᵉ siècle, pouvant pivoter
sur un émerillon. Le chargement est effectué en
insérant une chambre amovible ayant la forme d’un
mug, contenant la poudre à canon et le projectile.
Plusieurs chambres peuvent être préparées à
l’avance, ce qui permet d’obtenir une cadence de
tir relativement élevée en les utilisant
successivement, ce qui en fait une arme efficace
pour un rôle antipersonnel. (Wikipedia)
|
La partie amovible surmontée par sa poignée est ici clairement visible |
Habitation de Port-Royal : la boulangerie et son four |
Habitation de Port-Royal : le Boulanger, par Charles W. Jeffery |
La cuisine et son tourne-broche devant l'âtre |
Dans la cuisine : l'office |
Les ustensiles en fer forgé dans la cuisine de l'Habitation |
Hermione dans la forge |
La visite s’achève dans la petite salle des gardes, près de la porte. Des panneaux y expliquent l'origine du projet de reconstruction de l’Habitation dans les années '30 ; quelques belles illustrations par l’artiste et conseiller historique Charles William Jefferys aident à imaginer les personnages de l’époque dans leur décor. | Habitation de Port-Royal : la salle des gardes près du portail |
At the Priest House, par Charles W. Jefferys |
Dans la résidence du Gouverneur, par C.W. Jefferys |
Je termine mon tour en descendant sur la berge du Bassin où l’on a placé un buste de Samuel de Champlain le fondateur, celui par qui tout a commencé pour ce qui est du Canada français et bien sûr, du Québec avec la fondation de la ville de Québec (où il construisit quelques années plus tard une autre Habitation destinée à durer). |
Il ne reste plus guère de bâtiments ici en dehors de l’unique caserne où logeaient les officiers, transformée en galeries de musée contant les aléas de cet autre point d’ancrage de la colonie française. Il fut si misérablement défendu par la France qu’il tomba peu après Louisbourg aux mains des Britanniques et devint même un des hauts lieux du Grand Dérangement des Acadiens... | Annapolis Royal : seul vestige, la caserne des officiers |
Gabriel et Hermione jouent les factionnaires |
Annapolis Royal : la Grande-Bretagne contre Pierre Dugua Sieur de Mons |
Notre visite se
terminera dehors, malgré le crachin, sur les talus
herbus constituant les remparts de cette citadelle à la
Vauban, jamais vraiment finie et en butte aux attaques
permanentes des hautes marées de la Baie de Fundy qui
les minent. Le vert intense des pentes gazonnées forme
un contraste accusé avec l’étendue marine grisâtre
contenue entre les rives qui s’allongent jusqu’à
l’horizon vers la mer libre. |
Contemplation du Bassin des Mines depuis le fort |
Grandpré : bivouac devant le Centre d'Accueil de Parcs Canada |
Bonne nuit sur le grand stationnement devant le Centre d’accueil de Parcs Canada, la Bolt branchée sur la borne opportunément placée. Le soleil traverse les rideaux près de mon lit et m'invite à me lever… pour une fois ! Renonçant à une quelconque grasse matinée qui pourrait être bienvenue après tous ces déplacements sans «journée off» comme j’en ai l’habitude, je me prépare et rejoins Juliette et Mathieu dans le bâtiment. |
ARRONDISSEMENT HISTORIQUE RURAL
DE GRAND-PRÉ
Les villages de Grand-Pré et de Hortonville, ainsi que les fertiles terres agricoles qui les entourent, présentent un des modèles européens de colonisation et d’utilisation des terres parmi les plus anciens au Canada. Attirés par les vastes marais côtiers, le Acadiens s’établirent dans les environs de Grand-Pré à partir des années 1680. Les fermiers acadiens utilisèrent les techniques ingénieuses de construction de digues développées à Port-Royal pour enclore plus de mille acres de marais qui, une fois dessalés, constituèrent des terres labourables de grande qualité. Les maisons du village de Grand-Pré, situées au milieu des vergers et des boisés des hauteurs périphériques, bordaient la limite sud du marais principal. Après la déportation des Acadiens en 1755, les terres furent divisées en cantons, à la manière britannique en vue de l'arrivée des Planters de la Nouvelle-Angleterre, qui adoptèrent la technologie agricole en place. Le principal établissement des Planters, aujourd'hui les villages de Grand-Pré et de Hortonwille, se développa sur le site de l'établissement acadien précédent. Le paysage rural distinctif de l'actuel Grand-Pré est le produit de l'évolution des traditions agricoles des Acadiens et des Planters. |
Les villages de Grand-Pré depuis le marais dessalé (Plaque de bronze) |
Évangéline et ses compagnons d'exil, par Henri Beau (Musée de Moncton) |
L'EXPULSION DES
ACADIENS (1755-1762) L'expulsion des Acadiens
commence en 1755, à la veille de la guerre de Sept.
ans. Frustrées par la neutralité des Acadiens qui
refusaient de prêter un serment d'allégeance
inconditionnel à la Couronne, les forces
britanniques entreprirent le "Grand dérangement". Au
cours des huit années suivantes, plus de 10 000
Acadiens sont dispersés dans les colonies
américaines, en Angleterre et en France. Après la
fin de la guerre en 1763, beaucoup reviennent. Ils
rejoignent le petit nombre d'Acadiens qui ont
échappé de justesse à l'exil et, avec force et
courage, ils forgent une communauté fière et
dynamique. (Plaque à l'entrée du site)
|
Lors d’une visite à
Port-Royal en 1699, le sieur de Diéreville décrit
comment les Acadiens construisent une digue : « On n’arrête pas le cours de la mer aisément. Cependant les Acadiens en viennent à bout par de puissantes digues qu’ils appellent des aboiteaux et voici comment ils font. Ils plantent cinq ou six rangs de gros arbres tous entiers aux endroits par où la mer entre dans les marais, et entre chaque rang ils couchent d’autres le long les uns sur les autres, et garnissent tous les vides si bien avec de la terre glaise bien battue, que l’eau n’y saurait plus passer. Ils ajustent au milieu de ces ouvrages un esseau [une conduite d’eau] de manière qu’il permet, à marée basse, à l’eau des marais de s’écouler par son impulsion, et défend à celle de la mer d’y entrer ». |
Les terres gagnées sur la mer et les marais grâce aux digues et aboiteaux |
Grandpré : vanne de l'aboiteau |
Acadien construisant une digue avec aboiteau Les témoignages
écrits et oraux indiquent qu’une équipe de 5 à 8
Acadiens pouvait construire, en une journée, une
section d’une digue longue
de 5 m, 1,8 mètre de
hauteur et 3,6 mètres de largeur (épaisseur) à la
base. Une digue située le long d’une rivière aux
marées plus calmes était moins haute qu’une digue
située à côté d’une baie ou d’un bassin. Autrement
dit, plus une digue était exposée à la force des
marées houleuses, plus elle devait être haute et
épaisse. Selon l'emplacement géographique,
la hauteur de la digue mesurait entre 1 mètre et 5
mètres. La largeur (épaisseur) mesurant environ 5
mètres à la base variait entre 2 mètres et 7
mètres.
|
En sortant du Centre
d'Accueil, un sentier agréablement ombragé me mène dans
les vastes jardins fleuris aménagés dans ce qui fut
autrefois un village prospère et dont il ne reste rien.
Je me rends ainsi jusqu’à la chapelle commémorative bâtie dans les années 1930 devant laquelle se dresse une émouvante statue d’Évangéline, l’héroïne du poème de l’Américain Longfellow, (1847) sculptée par Henri Hébert en 1920 et inspirée par Louis-Philippe Hébert son père. |
Grandpré : entourée de jardins, la chapelle commémorative de 1930 |
Grandpré : Évangéline, par Henri Hébert (1920) |
Grandpré : statue d'Évangéline, par Henri Hébert (1920), d'après Louis-Philipppe Hébert |
Évangéline, statuette par Louis-Philippe Hébert (vers 1910), qui inspira son fils Henri |
La statue
d'Évangéline, héroïne de Longfellow Cette statue d’Évangéline,
héroïne du poème épique de Longfellow : Évangéline
- Conte d'Acadie, est un symbole fort et déchirant
de la Déportation. Elle établit le lien entre
l’histoire d’Évangéline et celle de Grand-Pré.
Deux célèbres sculpteurs québécois contribuent à la création de la statue. La Dominion Atlantic Railway (DAR) demande à Henri Hébert de créer l’œuvre. Selon Henri, sa composition s'inspire d’une statuette réalisée par son père, Louis-Philippe Hébert, et intitulée L'Acadie (ci-contre). Une des sœurs d'Henri, Pauline, a posé pour le visage. L'attitude représente Évangéline «pleurant le pays perdu ». La statue a été coulée à la fonderie Hohwiller en France, et elle a été dévoilée en 1920. |
Jean-Paul et Mathieu sur le belvédère de Grandpré |
Nous montons ensuite jusqu’au belvédère aménagé sur la colline au-dessus du site. Il donne un vaste aperçu de l’avancée de l’ancien marais asséché par les Acadiens dans le Bassin des Mines. Quel travail ce dut être, compte tenu des technologies de l’époque et de l’équipement succinct dont ils disposaient ! |
L’air est encore chaud
et humide de toutes les pluies des derniers jours, mais
le vent fort joint au soleil bien présent rend le séjour
agréable. Juliette sort ses chaises pliables à côté de
la paire des fameuses chaises rouges de Parcs Canada, et
nous passerons un bon moment à contempler l’étendue et à
jouir du paysage maintenant si paisible. |
Pause sur le belvédère de Grandprè |
Truro : au matin notre bivouac sur le Fundy Discovery Site au dessus de Salmon River |
Ciel couvert au lever vers 7:00 après un bon sommeil réparateur. Je déjeune rapidement et complète mon carnet, puis vais cueillir des fruits d’églantiers qui poussent ici en abondance et dont j’aimerais garnir le fond de la cour pour leurs belles fleurs mauves ou blanches de roses sauvages. |
Qu'est-ce qu'un mascaret ? Un mascaret est un front d'onde tumultueux qui se déplace vers l'amont dans une rivière, annonçant l'arrivée d'une marée montante. Les mascarets se produisent dans les régions du monde où les marées sont importantes. Cependant, un mascaret ne se produit pas dans toutes les rivières inondées par une marée haute. Trois conditions sont nécessaires pour former un mascaret : - Un lit de rivière presque plat et peu profond. L'eau du fleuve avant l'arrivée du mascaret doit être relativement peu profonde. Si un mascaret rencontre des eaux beaucoup plus profonde que la hauteur du mascaret, le mascaret s'effondre en une vague d'eau douce à peine perceptible. - Le lit de la rivière doit avoir une pente très douce vers l'aval. - Un lit de rivière doit être situé bien au-dessus du niveau de la marée basse, de sorte que la marée monte rapidement lorsqu'elle pénètre dans la partie du fleuve où un mascaret pourrait apparaître. |
Pourquoi la taille du mascaret de la
Salmon River varie-t-elle ? Les plus grands
mascarets de la Salmon River se produisent les
jours de marée de printemps périgélique (lorsque
la Lune est la plus proche de la Terre et se
trouve à sa nouvelle phase ou à sa phase pleine).
Occasionnellement, en raison de fortes pluie et/ou
d'une fonte rapide des neiges, la rivière peut
être trop profonde pour qu'un mascaret se forme.
Cela se produit le plus souvent lorsque la marée
est une marée apogée-nouvelle minimale (la Lune
est la plus éloignée de la Terre et dans sa phase
du premier ou du dernier quartier).
Truro : le mascaret sur la Salmon River devant le Fundy Discovery Site |
Pourquoi les
marées de Fundy sont-elles si hautes ? C’est à cause
de la résonance - comme une poussée sur une
balançoire.
Imaginez un parent qui pousse son enfant sur une balançoire. Une poussée douce et répétitive du parent entretiendra un important mouvement de va-et-vient de la balançoire. Le parent doit coordonner les poussées pour qu'elles correspondent à la période naturelle de la balançoire, une condition appelée résonance. Si la synchronisation est mauvaise, la balançoire ne bougera pas beaucoup. Truro Fundy Discovery Site : pourquoi les marées de Fundy sont elles si hautes ? |
Dans le cas des
marées de Fundy, la "balançoire" est la masse
d'eau peu profonde qui se trouve entre le bord
du plateau continental à l'est de Boston et le
fond de la baie de Fundy. Le "parent" est la
petite marée atlantique au bord du plateau
continental. Lorsqu'une marée montante de l'Atlantique traverse le bord du plateau continental dans le golfe du Maine peu profond, elle se déplace sous forme d'onde longue jusqu'au fond de la baie de Fundy, se réfléchit et retourne au bord du plateau continental. Lorsque la vague atteint le bord du plateau continental, l'augmentation spectaculaire de la profondeur de l'océan fait que la plus grande partie de l'onde se réfléchit à nouveau et retourne vers le fond de la baie de Fundy. La durée de ce cycle est proche de la période de 12,4 heures de la marée lunaire, ce qui signifie que chaque marée de l'Atlantique donne à l'onde précédemment réfléchie une poussée presque parfaitement synchronisée. C'est cette poussée régulière, répétitive et bien synchronisée qui rapproche les marées de Fundy de la résonance, et qui les rend si grandes ! L'amplitude verticale de la marée est la différence entre la marée basse et la marée haute. Dans le système du golfe du Maine et de la baie de Fundy, l'amplitude verticale de la marée augmente progressivement vers le fond de la baie de Fundy et est la plus importante dans le bassin des Mines. L'amplitude verticale de la marée est d'environ 2 mètres dans l'océan Atlantique. Comparez cela à une moyenne de 12 mètres (40 pieds) dans le bassin des Mines. Elle peut même atteindre 16,5 mètres (54 pieds) lors d'une marée de printemps périgélique ! |
À Tatamagouche enfin atteint en début d’après-midi, Juliette, Hermione et moi allons voir le vieux train converti en restaurant et hôtel, sans être emballés par la conservation des décors des voitures et encore moins des équipements techniques. Un autre attrape-touristes de piètre qualité… Le Musée ferroviaire de St-Constant est vraiment d’un tout autre niveau pour évoquer cette épisode épique de l’histoire canadienne ! | Tatamagouche : Train Station Inn |
Nous nous y rendons,
mais son unique prise est occupée… Pas d’autre issue que
d’attendre sa libération en faisant un tour sur le sable
où Hermione et Gabriel feront quelques constructions
sous le soleil descendant. Il se couchera bientôt sous un magnifique dôme de nuages dorés. Les parents préparent le souper lorsque, sur ces entrefaites, apparaît le gardien de sécurité. Bonhomme, il nous informe de l’impossibilité de demeurer ici pendant la nuit comme nous l'avions escompté ! |
Hermione dans le sable de Parlee Beach |
Excellent sommeil quant à moi, un peu moins serein apparemment pour les passagers de la Trillium stationnés beaucoup plus près de Grande Rue. Levé dès 7:30 je prends mon temps pour me préparer et lorsque je mets le nez dehors, voiture et roulotte ont disparu. Un message de Juliette m’informe de leur départ pour aller prendre douche et déjeuner chez leur ami Franck qui les y a conviés. Ils ne seront de retour que vers 10:00, ce qui me donnera amplement le temps de rédiger mon carnet de route d’hier, et de faire un peu d’ordre dans mes photos et mon courrier. | Shediac : solitaire sur le bivouac Place-Victoria... |
Perth-Andover :
au bivouac, souper sous le soleil couchant
|
Il est 19:30, la nuit est presque tombée, nous préparons rapidement notre souper que j’irai prendre avec mes voisins sur la grande table à piquenique mise à disposition sur le gazon. Longs échanges intéressants avec Mathieu tandis que Juliette couche sa maisonnée et appelle sa mère… |
Bivouac derrière la Mairie de Perth-Andover |
Après réveil vers
7:30, douche et déjeuner, je commence par un petit tour
du côté du village en traversant le pont sur le fleuve,
d’une largeur considérable et animé d’un courant
étonnant. Qu’on est loin des dimensions des cours d’eau
européens… Quelques photos, lecture des petits panneaux
informatifs relatant l’histoire de la région, et je
retourne à notre camp. Le patrimoine
irlandais local
Des milliers d’immigrants irlandais ont prospéré au Nouveau-Brunswick au milieu des années 1800 pour deux raisons: la première étant la Grande Famine de 1847-1849 qui a tué près d’un million de personnes et la deuxième étant le manque de bonnes terres agricoles en Irlande. Certains diront qu’il s’agit de la même raison car le mildiou de la pomme de terre était alors causé par de mauvaises méthodes agricoles. Peu importe, le résultat a été le même, des millions d’Irlandais ont immigré vers d’autres pays, dont le Canada. Beaucoup d’Irlandais sont allés directement d’Irlande à Saint John. Ils y sont restés pendant deux décennies avant d’immigrer au Nouveau-Brunswick, dans une collectivité rurale du comté de Carleton, appelée Johnville. À leur arrivée, ils ont dû défricher les terres et construire leurs maisons. Dès que possible, les pionniers ont bâti une église et une école. Toutefois, au fil des ans de nombreux Irlandais se sont installés dans la région de Perth-Andover. Parmi les premiers pionniers d’Andover, il y avait une famille du nom de Murphy. Aujourd’hui, de nombreuses familles de la région, comme les Kennedy, Kelley, Kinney et Curran peuvent faire remonter leurs ancêtres directement à l’Irlande. |
Perth-Andover: le pont au matin |
Perth-Andover :
structure du pont
|
Entre-temps Juliette et les enfants ont émergé d’un sommeil suffisant (malgré la proximité de la route sur laquelle 4x4 tous terrains, pick-up et gros camions aux échappements tonitruants se sont succédé jusqu’assez tard). |
Nous profiterons de
l’attente pour déjeuner, avant de repartir vers la côte
du St Laurent que nous rejoindrons près de Kamouraska
par la route 289. Elle nous fera éviter le détour par
Rivière-du-Loup, emprunté à l’aller, et longer la
frontière avec le Maine. Autre arrêt recharge à
Pohenegamook, après avoir longuement suivi le rivage du
lac Baker puis l’interminable lac Long… Nous sommes maintenant au Québec, les inscriptions et la signalisation sont dorénavant tout en français, on se sent inexplicablement «chez soi». La route n’est plus qu’une longue descente entrecoupée de quelques faux plats, j’ai la surprise – et la satisfaction – de voir la conso baisser jusqu’à 10,4 l/100 ! |
Au Québec, sur la Route 289 descendant vers le St-Laurent |
St-André-de-Kamouraska : notre bivouac dans l'arrière-cour du garage |
Le ciel s’est presque
complètement éclairci en arrivant sur la Route 132 que
nous longerons un peu jusqu’à entrer dans le village de
St-André-de-Kamouraska. Juliette a repéré l’arrière-cour
du garage Danny Lapointe donnant sur les battures,
contigüe avec la digue (l’aboiteau) qui protège les
maisons du fleuve. Après avoir salué le propriétaire qui nous souhaite la bienvenue avec un grand sourire, nous laissons nos véhicules et partons faire un grand tour sur la digue en admirant le paysage sur le fleuve, grandiose, mais aussi en nous défendant contre les innombrables moustiques qui nous souhaitent, eux aussi, la bienvenue à leur façon. |
Nous irons ainsi jusqu’à l’Ancien Quai St-André marqué par un petit bâtiment en forme de phare, pour revenir par la grande rue. Elle rassemble beaucoup de maisons anciennes dont plusieurs ne manquent pas de charme. Juliette s’arrête au Dép du village, une supérette coopérative, pour quérir de quoi nourrir sa tablée, puis nous retrouvons notre petit campement derrière le garage dorénavant fermé. | Les battures et les églantier depuis la digue de St-André-de-Kamouraska |
St-André-de-Kamouraska : sur l'aboiteau vers l'Ancien quai |
St-André-de-Kamouraska : le village depuis l'aboiteau |
St-André-de-Kamouraska : réveil au bivouac devant le fleuve |
Grand soleil au matin qui durera toute la journée et ne tardera pas à réchauffer l’habitacle un peu frais. Comme s’il suffisait de rentrer au Québec pour retrouver le beau temps ! Je traine un peu au lit, espérant récupérer un peu et attaquer cette dernière journée de notre voyage avec un peu plus d’allant. Ces 4 000 km en 20 jours et quasiment non stop commencent à me rentrer dans le corps, en fin de compte pas tout jeune… Puis à 9:00 la douche chaude me ragaillardit, je prends un copieux déjeuner et rejoins mes compagnons de route qui semblent, eux aussi, démarrer lentement. |
Dernier tour sur la
digue pour cueillir une ample provision de fruits
d’églantiers blancs, roses et mauves qui poussent en
abondance au bord de la digue. Passé 10:00 nous
reprenons la route. Juliette m'accompagne dans le ProMaster, et nous admirons ensemble le paysage de battures, de rochers et d’îles qui se déroule le long du fleuve, avec les côtes bleutées de Charlevois au loin, au-delà de la vaste étendue d’eau brunie par les pluies abondantes et les crues des derniers jours. |
Églantine sur l'aboiteau de St-André-de-Kamouraska |
Bief d'amenée d'eau au moulin de la Seigneurie des Aulnay |
Après une bonne heure de lent cheminement sur la Route 132 nous arrêtons au domaine de la Seigneurie des Aulnay pour recharger la Bolt, d’abord sur une borne rapide jusqu’à 80%, puis sur une autre de niveau 2 pour parfaire la charge jusqu'à 100%. Pendant ce temps nous ferons un petit tour dans le parc et surtout suivrons une visite très complète du vieux moulin à eau. |
Moulin des Aulnay : dans le grenier, trémie de descente du grain vers les meules |
Meule du moulin des Aulnay; en arrière le bluteau |
Engrenages d'entrainement des meules |
Engrenages d'entrainement des meules Les grandes
rayures servent à évacuer la farine et le son vers
la périphérie, les petites stries à accrocher et
écraser le grain.
|
Moulin des Aulnay : petites stries sur les meules, servant à accrocher et écraser le grain |
Moulin des Aulnay : l'arbre de la roue à aube et ses engrenages de renvoi |
Entrée du manoir des Aulnay |
Je gagne alors la
salle à manger installée dans l’ancienne maison du
meunier convertie maintenant en boulangerie et
restaurant. J'y dégusterai avec mes compagnons de voyage
une superbe pizza dont la pâte délectable a bien
évidemment été confectionnée avec la farine locale. Ensuite, le temps passe, si bien que l’heure de la visite du manoir est dépassée... Nous nous hasardons quand même dans le parc jusqu'à aller frapper à la porte du haut perron, tandis que Mathieu va brancher la voiture sur la borne lente pour compléter la charge. |
Tombant sur la
«gouvernante» en costume d’époque qui attend un groupe
en retard, nous avons la chance de profiter d’un petit
tour privé qui nous montrera l’essentiel de la grande
demeure luxueusement aménagée. Elle a retrouvé une
partie de ses meubles originaux, et l’on nous montre une
bibliothèque du bureau du seigneur Dionne tout juste
récupérée chez un particulier et qui n’attend que sa
remise en place… |
Manoir des Aulnay : salle à manger |
Manoir des Aulnay : chambre de Madame |
Manoir des Aulnay : le salon avec sa causeuse centrale pour les robes à panier et son piano |
Dans la
cuisine, Juliette s’extasie sur un magnifiques poêle
Royal Bélanger. Cette
visite expresse aura été une belle (re-)découverte.
Dans la cuisine du Manoir des Aulnay, le dessus du poêle Royal Bélanger |
Manoir des Aulnay : Juliette devant le Royal Bélanger de la cuisine |
Sur la Route 132, belvédère vers l'Ile d'Orléans et la Côte de Beaupré |
Nos visites complétées
et la voiture suffisamment rechargée, nous pouvons
reprendre la Route 132 qui continue de remonter le
fleuve, bordée de fermes plus ou moins modernes (hauts
silos de métal, vastes bâtiments de stabulation libre)
et de quelques maisons anciennes en pierre ou en bois
peint, à la silhouette traditionnelle. En approchant de
Québec, un belvédère malheureusement trop arboré offre
un belle échappée sur le St-Laurent et vers sa rive
nord. Arrêt en passant Lévis pour recharger la Bolt sur une borne rapide tandis que je fais un dernier plein d’essence au Costco. |
Nous nous rendrons
ainsi jusqu’à notre étape prévue sur le parvis de
l’église de St-Pierre-des-Becquets, déjà fréquenté à
l’aller. Installation et souper rapide, cette fois nous
sommes seuls devant la grande courbe du St-Laurent sur
lequel tombe la nuit. Gabriel, inspiré par le reflet de
la lune dans l'eau, tient à faire une photo du spectacle
avant que nous allions tous nous coucher après ce bon
parcours. |
St-Pierre-des-Becquets : nuit sur le fleuve, par Gabriel |
Bivouac dans le brouillard sur le parvis de St-Pierre-des-Becquets |
Dernière étape de
notre retour en continuant d’emprunter la Route 132
jusqu’à Montréal. Au lever à St-Pierre-des-Becquets, une brume épaisse couvre le fleuve dont nous apercevons à peine quelques reflets. Nous démarrons rapidement, comme si les chevaux sentaient l’écurie… même Gabriel descend sans rechigner de sa couchette ! |