Juillet - août 2006
Varennes : vue sur le fleuve et Montréal depuis l'église |
Départ de Montréal vers 15:00. Il fait aujourd’hui encore très humide, mais la température est plus supportable que les derniers jours, en l’absence du soleil masqué par la couverture nuageuse. Le camion est vite rempli, puisque cela fait des jours que j’attends ce départ… Nous gagnons la Route 132 en passant le Pont Jacques-Cartier, puis nous enfilons tranquillement sur la vieille route qui rétrécit en longeant le fleuve vers le nord-est. Bref arrêt à Varennes devant l’église et près du sanctuaire consacré à Marguerite de la Jemmerais, épouse du Sieur d’Youville et fondatrice des Soeurs Grises, pour contempler depuis le pied de la statue de la sainte le panorama sur le fleuve, le skyline de Montréal en toile de fond. |
La chaleur humide nous oblige à rouler fenêtres fermées avec la clim. On traverse la suite connue de petits villages anciens (Verchères, Saint Antoine, Contrecoeur…) datant des débuts de la colonisation française. Quelques vieilles maisons de pierre agrémentent le trajet, malheureusement perdues au milieu d’une architecture domestique d’une banalité affligeante… De rares maisons au design un peu plus audacieux profitent de leur agréable situation au bord du fleuve déjà très large. | Guépard devant l'église de Varennes |
Extérieur de la cathédrale de Nicolet |
Il est passé 18:00 lorsque nous
arrêtons faire le tour de la cathédrale moderne
normalement fermée. Par chance un homme est là qui
décape la cire du plancher et qui accepte de nous
laisser entrer. Si l’extérieur en béton armé nous paraît
un peu tarabiscoté, les grandes courbes intérieures des
voûtes ont beaucoup plus d’allure, et la grande verrière
multicolore enchante l’œil, même en l’absence du soleil
jouant à travers les centaines de verres colorés.
|
Grande verrière de la cathédrale de Nicolet |
Cathédrale de Nicolet : St-Jean-Baptiste |
À Port St-François, une petite route nous fait rattraper puis suivre le cours de l’eau. Joli paysage fluvial, jusqu’au village de St-Angèle de Laval en face de Trois-Rivières, au-delà du grand pont Laviolette, l’un des plus grands ponts cantilever au monde. Sur la rive nord se devine le dôme de l’oratoire de Cap de la Madeleine. | St-Angèle-de-Laval : toit du sanctuaire de Cap-de-la-Madeleine |
Crépuscule sur la fleuve aux Becquets |
Le soir descend et la
lumière prend des teintes dorées. Agréable vue sur le
fleuve St-Laurent aux Becquets, derrière l’église formant
belvédère. Souper au pied de l’église de Deschaillons,
dans le vacarme de la musique pop d’une bande de jeunes
passant la soirée dans un petit parc à proximité. Nous cherchons activement un bivouac que nous finissons par trouver derrière l’église de Leclercville. Monique se couche bientôt tandis que je fais un peu de ménage sur l’ordi et écris ces lignes. Couvre-feu à 23:30. |
Bien que l’air soit demeuré humide
durant toute la nuit, la température s’est avérée
nettement plus fraîche qu’à Montréal et nous avons bien
– et longtemps - dormi puisque nous nous éveillons passé
8:30… L’écran formé par l’église - néogothique d’assez
mauvais goût - rendant imperceptible la rumeur de la
route, et la proximité du cimetière de l’autre côté nous
ont garanti une paix souveraine.
Décollage vers 9:30, après un coup d’œil au large panorama ensoleillé sur le fleuve à travers une trouée dans les arbres bordant le rivage escarpé. |
Vue sur le fleuve depuis l'église de Leclercville |
L'église de Saint-Nicolas |
Long arrêt à
Saint-Nicolas pour visiter la nouvelle église à la nef
arrondie surmontée d’un clocher en forme de voile. Ses
volumes extérieurs nous semblent assez réussis,
malheureusement ses portes sont closes et nous ne pouvons
que deviner l’agencement intérieur à travers les baies
vitrées qui en font le tour, à hauteur de la galerie qui
l’enserre et offre un beau panorama sur le fleuve. Nous demandons l’aide d’une jeune hôtesse du presbytère fleuri tout à côté, elle nous invite à parcourir une exposition consacrée à une collection de croquis de peintres québécois contemporains… Si les artefacts présentent un intérêt très variable, en revanche l’architecture traditionnelle du luxueux presbytère retient davantage notre attention, au fur et à mesure que nous en parcourons les grandes pièces simplement mais agréablement décorées. |
Après quelques
tâtonnements qui nous valent de découvrir plusieurs forts
belles maisons modernes dotées de jardins luxuriants et
d’une vue impressionnante sur le Cap Diamant en face, nous
stationnons juste devant la fameuse terrasse, en fait un
petit parc bien aménagé pour la promenade et le
pique-nique. Comme il est presque 13:30, Monique prépare rapidement le déjeuner (poulet rôti Maxi garni de haricots verts sautés aux échalotes…) et nous transportons nos assiettes remplies sur une des tables qui nous attend, à l’ombre des grands arbres. Regards amusés de nos voisins venus prendre le soleil en discutant avec des amis… |
Le Cap-Diamant depuis le jardin de Lévis |
Vue sur Québec depuis la terrasse de Lévis où nous piqueniquons |
Le point de vue sur la ville est superbe, comme sur la courbe du grand fleuve contournant le Cap Diamant dominé par la silhouette du Château Frontenac… Passe un gros cargo entouré d’une flopée de petits voiliers qui profitent du soleil et du vent. Nous dégustons le café en admirant le paysage, avant de reprendre notre route vers le nord-est. |
Prochain arrêt : Montmagny où nous tournons un peu avant de découvrir le manoir Couillard-Dupuis censé présenter une intéressante exposition sur les oies blanches et le centre de quarantaine de Grosse Île que nous visiterons une prochaine fois. Hélas ses portes sont fermées, et le petit bâtiment, qui a perdu le plus gros de son caractère à force de restaurations, est maintenant devenu un Musée de l'Accordéon. | Montmagny : le manoir Couillard-Dupuis |
Rivière-Ouelle : l'église au delà de la rivière |
Route sans encombre jusqu’à ce que Monique aperçoive un gros marché aux puces aux alentours d’une grange en bord de route. Demi-tour pour aller attendre à l’ombre de grands arbres providentiels que madame ait fait son petit tour… Puis c’est L’Islet (Musée maritime fermé…), Saint-Jean-Port-Joli et ses boutiques de sculpteurs sur bois, St-Roch-des-Aulnaies dont nous avons déjà visité manoir et moulin, La Pocatière sans originalité, Rivière-Ouelle pittoresque mais empoussiéré par un grand chantier de voirie autour de son clocher qui se reflète dans l’eau tranquille de sa rivière… |
À Saint-Denis, la maison Chapais (ce
Québécois qui fut l’un des co-signataires de la
Confédération en 1867) est, elle aussi, fermée vu
l’heure tardive. Un peu après, le village de
Kamouraska nous semble toujours aussi charmant, dans
la lumière chaude de fin d’après-midi. Long arrêt à la halte routière de Notre Dame du Portage où nous sommes abordés par le chauffeur d’un Westphalia qui m’a reconnu grâce à mon site web consulté l’an passé… Longue discussion sur la conception d’un CC, sur nos voyages (nous leur vantons l’Alaska, ils nous racontent leur virée sur la Côte Nord jusqu’à Natashquan…). |
N.D.-du-Portage : le fleuve en amont |
N.D.-du-Portage : le fleuve en aval |
Le
soleil est descendu sur le fleuve, colorant le paysage
d’exquises couleurs. Nous soupons un peu plus loin au
bord de l’eau en contemplant le coucher du soleil
derrière les montagnes bleutées de la rive nord, et
faisons encore quelques kilomètres pour traverser
Rivière-du-Loup. Nous gagnons ainsi Cacouna et allons bivouaquer au crépuscule devant un petit parc au bord de l’eau, au lieu-dit Fontaine Claire. Coucher passé 23:00. |
Nous sommes à Matane vers 12:30. Traversée de la petite ville toute en longueur pour faire le plein dans une station Couche Tard où je peux profiter d’un escompte de 5% grâce à ma carte CAA, puis retour au quai du traversier pour une longue attente dans la ligne des véhicules sans réservation. Heureusement nous sommes 2ème sur la file, et lorsque enfin les véhicules ayant dûment réservé ont fini d’embarquer vers 16:45, nous avons la chance de trouver une petite place en bout de pont… Notre longue attente durant laquelle nous avons tué le temps en déjeunant d’abord puis en effectuant de menus travaux sur l’ordi ou en lisant (pour Monique) aura porté fruit. | Monique sur le traversier Matane-Baie-Comeau |
Sur le traversier de Matane vers Baie-Comeau |
La mer étant calme, la traversée de deux heures et demie se passe bien, quoique Monique éprouve à mi-chemin quelques embarras gastriques… Aucun problème de cet ordre quant à moi, mais la fraîcheur du vent sur le pont panoramique m’empêche d’y demeurer autant que je l’aurais voulu, à observer le rivage sud s’éloigner derrière nous, à guetter les grands mammifères marin qui hantent ces eaux froides, puis à regarder les reliefs de la rive nord tranquillement se rapprocher. Que n’ai-je emporté blouson et chapeau ! |
Le soleil est couché
lorsque nous passons le long pont franchissant la rivière
Godbout, à l’orée du village homonyme. Quittant la grande
route qui continue à quelque distance du rivage, nous
gagnons le quai de débarquement du traversier (le prochain
arrivera demain matin vers 8:00), poussons jusqu’au bout
de la rue tranquille en front de mer jusqu’à aboutir à une
vaste esplanade dominant l’estuaire de la rivière. Dans la solitude et le plus grand calme, nous nous installons pour passer la nuit. Il fait frais, de gros nuages sombres annoncent de petites averses, nous sommes loin du climat étouffant de Montréal ! |
Godbout : clair de lune sur le fleuve au crépucule |
Bivouac devant la rivière à Godbout |
Notre tranquillité m’a amené à
travailler assez tard hier soir, aussi la matinée
est-elle bien avancée lorsque nous émergeons encore une
fois dans un silence quasi absolu. Toilette,
petit-déjeuner, il est presque midi lorsque nous
reprenons la route.
|
Celle-ci continue son parcours sinueux et montueux. Le paysage est sauvage, un tantinet austère, les seules vues vraiment différentes étant les échappées sur la côte qui s’imposent par leur horizon sans limites, leurs couleurs franches, et la grande lumière inondant l’ensemble. | Le rivage vers la Pointe-des-Monts |
Le site (un îlot
rocheux asséché à marée basse) est charmant, la
vidéo amorçant la visite fort bien montée, et
l’escalade des 6 étages du phare lui-même, qui
servit pendant plus d’un siècle d’habitation au
gardien et à sa famille, fort instructive et parfois
émouvante. Des objets usuels, des données et
anecdotes biographiques, des cartes et des dessins,
et surtout une quantité de photos familiarisent avec
les dures conditions de vie de l’époque et les
dangers de la navigation dans l’estuaire du
Saint-Laurent (où l’on a enregistré à ce jour plus
de 25 000 naufrages…). Admirable aussi la façon dont les générations de gardiens ont rempli une mission pas toujours facile mais essentielle à une époque où n’existait ni moteur ni radio, ni radar, ni GPS ni route ni aucune de toutes les facilités technologiques qui ont rendu la vie tellement plus sécuritaire et facile. |
Cinquante-cinq
kilomètres de route côtière encore, dans l’ensemble
assez spectaculaire sous la grande lumière et un ciel
bleu dont quelques petits nuages accusent la
profondeur. Impression d’immensité quasi déserte. On passe le hameau de Pointe-aux-Anglais - un autre souvenir de naufrage, celui de l'Amiral Walker venu prendre Québec en 1711 - pour arriver devant le joli site de Rivière-Pentecôte, en fait un énième village qui doit son nom à Jacques Cartier lui-même. La petite église maintes fois restaurée ne présente aucun intérêt architectural, non plus que la chapelle centenaire voisine, mais la vue sur l’embouchure de la rivière séparée de la mer par un long banc sableux vaut la petite demi-heure de visite. |
Rivière-Pentecôte depuis la Route 138 |
Temps frais mais
ciel encore clair au matin. Nous décollons vers 9:30,
faisons un petit tour en ville (bôf...) et nous
retrouvons sur le Vieux Quai où une cabine
téléphonique nous permet de prendre des nouvelles de
Juliette et Mathieu. Ils ont renoncé à partir en
voyage et profiteront de leurs longues vacances
pour achever les rénovations de leur maison avant leur
déménagement de la rue Drolet à Lachine… Une balade sur les aménagements du Quai ne nous emballe guère, l’animation est quasi nulle en ce mardi matin, la boutique de vieux bouquins n’offre rien d’intéressant pour nous, et c’est le panorama sur la baie et les îles qui sauve la mise. Comme le Musée régional de la Côte Nord ne nous inspire pas non plus, il ne reste qu’à reprendre la route. |
Sept-Îles : le Vieux Quai |
Sept-Îles : la plage Levesque |
Heureusement la chaussée demeure bonne et nous progressons très régulièrement en longeant la côte que l’on aperçoit de temps à autre. Jolie vue sur le fleuve et les îles à la sortie de la ville, dans un lotissement en bordure de plage (Plage Levesque). |
On aperçoit au passage les eaux vives de la Sault-Plat dévalant dans une cannelure glacière, rareté géologique, semble-t-il. | Sault Plat |
Chute Manitou |
À environ 85 km de Sept-Îles, arrêt pour aller admirer la chute de la Rivière Manitou : un court sentier dévale à travers bois jusqu’à rejoindre le roc dénudé. L’eau de la rivière bouillonne en descendant les 35 m de dénivellation avec une force telle qu’Hydro-Québec a déjà fait les plans d’une usine destinée à récupérer toute cette énergie brute. |
On passe ensuite les premiers villages de Minganie, sous un ciel qui s’est brusquement ennuagé et assombri : Sheldrake, Rivière-au-Tonnerre, Magpie, Rivière-St-Jean où le panorama vanté sur l’esplanade du bureau touristique perd son impact, faute de lumière. | Plage de Rivière-St-Jean |
Bivouac Baie Johan-Beetz devant la maison |
75 km plus loin, nous atteignons le joli village soigné de Baie-Johan-Beetz, dont les petites maisons blanches entourent la belle résidence de l’artiste, négociant et biologiste belge venu s’installer là à la fin du XIXème. Nous stationnons au bord du quai longeant la route où il ne passe quasiment personne et nous y installons pour la nuit. Coucher tôt dans le grand calme et sous les petites ondées qui se succèdent. |
Nuit des plus calmes mais ciel encore gris au réveil. À 9:00 nous sommes à la porte du « Château » qui vient d’ouvrir. Nous y visiterons la demeure de cet aristocrate belge, Johan Beetz, qui vint s’installer ici en 1862 et y initia un florissant élevage de bêtes à fourrures. Il vécut ici 25 ans, y éleva une grande famille, rendit de grands services à la communauté avant de rentrer dans son pays natal. | Baie Johan Beetz : extérieur du «Château» |
Château Johan Beetz : porte peinte de l'étage donnant dans les chambres |
Chambre à l'étage du Château Johan Beetz |
Une quarantaine de
km nous amène à Aguanish que nous traversons
rapidement sans faire l’excursion vers le canyon de la
Rivière Aguanish, surnommé le « Trait de scie » :
trop longue (3 km) et surtout trop chère (30
$/personne). Encore une petite demi-heure et nous sommes à Natashquan. Sous un ciel gris peu invitant nous poursuivons 5 km plus loin jusqu’à Pointe-Parent (rien de particulier à voir, sinon l’ample estuaire sableux de la Natashquan). Puis je tiens - malgré les réticences de Monique - à aller « jusqu’au bout de la route ». C’est une excellent chaussée de gravier non encore revêtue qui continue vers l’est et cesse abruptement au moment de franchir la large rivière, faute d’un grand pont encore en projet. Là s’arrête pour l’instant la Route 138 Est, l’autre extrémité Ouest se situant à Gatineau, à deux pas d’Ottawa et à près de 1 500 km… |
Fin de la Route 138 sur la rivière Natashquan |
Natashquan : la vieille école - un peu beaucoup restaurée... |
Nous retournons alors tranquillement au centre de Natashquan où je vais visiter la Vieille École. La maisonnette de bois, désaffectée depuis longtemps, a été convertie en un joli petit musée évoquant les personnages des chansons de Gilles Vigneault, le grand homme de l’endroit. Comme son inspiration est ancrée dans la réalité des choses et des gens de son village, plusieurs visiteurs, indigènes, reconnaissent les portraits et objets ayant appartenu à des amis ou à de la parentée. L’évocation est délicate, réaliste sans être crue, les photos et récits rappellent une époque encore proche mais déjà révolue. |
Nous ne voulons pas quitter le
fameux village sans aller contempler les Galets, un
ensemble de cabanes de pêcheurs installées sur une
presqu’île dans la baie. Site dénudé, qui n’est pas
sans rappeler lui aussi une époque révolue où la
pêche était l’activité essentielle à la survie de la
petite communauté. La promenade le long de la plage
bordant la baie serait agréable si le vent ne
soufflait aussi frais. Nous retrouvons avec plaisir
l’abri du Guépard et entamons notre route du retour
vers l’ouest.
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Natashquan : les Galets |
Taïga sous le soleil |
Nous retrouvons la taïga longuement parcourue hier et ce matin, mais éclairée maintenant par un soleil tardif qui joue à travers les nuages et offre des vues renouvelées sur le paysage. |
Il nous reste le temps d’un dernier tour près de la marina où je trouve à faire le plein d’eau derrière la petite cabine du gardien, avant de chercher un stationnement pour la nuit. Nous pensons le trouver en plein centre près du quai des matériaux en vrac, mais le bruit du chargement de camions ou de wagons ne tarde pas à nous déranger. C’est donc dans le secteur est du village, le long d’une route peu passante, que nous allons nous installer. | Le Guépard sur le boulevard le long de la mer à Havre St-Pierre |
Havre-St-Pierre : Monique sur la plage |
Nous dormons assez
bien et traînons un peu au lit sous un ciel trop gris
à notre goût, si bien que nous sommes devant la plage
près du petit port seulement vers 11:00. Promenade sur
le sable, histoire de tâter la température… Elle est
décidément trop fraîche à notre goût, et sans
vêtements adéquats (nous les avons laissés à
Montréal…) et faute de soleil, nous risquons
d’attraper la crève sur les îles venteuses où le
bateau devrait nous laisser pour 2 heures d’excursion
pédestre. À regret, nous renonçons donc à la balade sur Niapiskau et sur l’Île du Fantôme. La découverte des monolithes et de la flore très particulière de ces îles sera pour une - éventuelle - autre fois. |
Il ne reste plus qu’à prendre la route, en profitant cette fois de toutes les ressources qu’elle offre pour faire plus ample connaissance avec la région. Premier arrêt pour découvrir l’église montagnaise de Mingan, dont le chaud décor de pin verni abrite toute une collection d’objets et de mobilier réalisés par les paroissiens autochtones. Les œuvres sont parfois surprenantes, très colorées, un brin naïves et toujours intéressantes, donnant une personnalité et une vie rarement autant présentes dans une église. | Chœur de l'église montagnaise de Mingan |
Saint Joseph dans l'église montagnaise de Mingan |
Tabernacle de l'autel latéral du Sacré-Coeur |
Vitrail dans l'église de Mingan |
Vitrail dans l'église de Mingan |
Tout près du pont
sur la grande rivière Mingan, nous repérons le chemin
annoncé menant à une chute spectaculaire, selon le
guide Côte-Nord Duplessis. Cinq km de bonne
piste serpentant à travers la toundra, et nous
débouchons sur un amoncellement de rochers usés par le
courant, pour l’heure en grande partie à sec, sur
lesquels nous nous hasardons pour aller admirer le
fort courant dévalant d’une quinzaine de mètres. Je guette un moment mais en vain quelque saumon en montaison; on nous apprendra plus tard qu’ils sont maintenant beaucoup moins nombreux qu’autrefois, et qu’au surplus le plus gros de la saison est déjà passé… |
Chute de la Rivière Mingan |
Pointe-Mingan : Centre d'interprétation des mammifères marins |
Retour à la grande route jusqu’à La Pointe Mingan pour visiter cette fois le Centre d’interprétation de Parc Canada et le Centre de recherche sur les mammifères marins du Saint-Laurent. Si le premier est pauvre en documentation et a perdu son exposition permanente désuète, ce dont se désole l’aimable guide de l’accueil, reste quand même un excellent film présentant les îles du Parc national sous leurs différents aspects : géologie, faune, flore, etc. Installés seuls dans la salle de projection, nous voilà partis pour 50 minutes de visite virtuelle qui nous console un peu de notre abandon de ce matin. |
Le film s’achève à peine que commence juste à côté la visite conférence sur les baleines et autres cétacés du Saint-Laurent. Accueillis par une biologiste, nous avons droit à toute une présentation fort bien documentée (maquettes grandeur nature, photos, graphiques, cartes, etc.) sur la mission du centre de recherche, ses méthodes et surtout sur son objet d’étude : les baleines et, principalement, le grand rorqual bleu. Un excellent film mettant en vedette le fondateur du Centre achève une visite passionnante qui laisse avec beaucoup plus de questions que de réponses… |
Nef de l'église de Rivière-au-Tonnerre |
Quelques kilomètres encore sous un ciel qui commence à bleuir et nous sommes devant la grande église de Rivière-au-Tonnerre. Ici pas de décor autochtone chaleureux mais une belle structure plus classique tout en bois peint en blanc et bleu pâle qui donne un air frais et presque enfantin au décor. Beaucoup de fleurs fraîches coupées, un environnement clair très nettement dessiné un peu inattendu dans ces régions éloignées plutôt sauvages et rustiques. |
Ce village se vante
aussi de posséder une superbe chute à proximité. Nous
zigonons donc sur 8 km d’une piste très carrossable
pour atteindre le Grand Sault de la
Rivière-au-Tonnerre. Au bout d’une petite descente bien aménagée à travers bois, nous atteignons un magnifique ensemble de chutes, hautes de 33 mètres, qui dévalent avec fracas le rocher abrupt. Photos, balade sur les rochers polis amassés au pied de la cascade par l’érosion millénaire, nous reprenons la route les yeux et les oreilles pleins de ce spectacle grandiose. |
Chutes de la Rivière au Tonnerre |
Sept-Îles : bivouac près de la station de pompage Avenue Arnaud |
Sous un ciel
maintenant presque entièrement dégagé mais où le
soleil descend, nous continuons notre confortable
progression régulière et, vers 8:30, retrouvons le
stationnement du Wal Mart pour quérir un sac de glace.
Souper rapide et vaisselle des derniers jours avant de
partir à la recherche de notre bivouac paisible d’il y
a 3 jours, devant la baie de Sept-Îles. Nous retrouvons sans trop de peine le petit parc entourant la station de pompage au 801 avenue Arnaud et nous y installons en paix devant les lumières dansantes de Pointe Noire sur l’autre rive de l'autre côté de la baie. |
Sept-Îles : entrée du ravin du Jardin Bois-joli |
Nous n’irons guère loin, puisque je repère bientôt les jardins communautaires de Ferland, une banlieue de Sept-Îles qui a la particularité d’être la plus grande agglomération de maisons mobiles au Québec. Grâce à ses habitants, on a créé le long d’un ruisseau une suite de jardins linéaires qui prend progressivement de la maturité : quelques massifs de fleurs assez rustiques pour résister au climat plutôt rude, une rocaille de vivaces, des allées empierrées sinuant sous un couvert d’épinettes noires… |
Bref une petite balade agréable dans un aménagement intelligent d’un ravin humide séparant 2 rangées de maisons mobiles, espace inutilisé qui aurait pu demeurer terrain vague boueux et pollué de toutes sortes de déchets et rebuts sans cette heureuse initiative communautaire appuyée par Hydro-Québec (le principal employeur des habitants, semble-t-il). | Sept-Îles : astilbes dans la jardin du ruisseau Bois-joli |
Sept-Îles : jardin du ruisseau Bois-joli |
À Pointe-aux-Anglais je m’arrête devant le petit cimetière en bordure de plage puis pénètre dans la petite église à la recherche d’un monument ou au moins d’un plaque à la mémoire des marins et miliciens anglo-américains morts tout près, sur les récifs de l’Île aux Œufs, lors du naufrage des navire de la flotte de Walker échoués en 1711, mais n’en trouve aucune trace… | Cimetière de Pointe-aux-Anglais |
Baie-Comeau : façade de l'église Ste-Amélie |
Baie-Comeau : nef de l'église Ste-Amélie |
Baie-Comeau : chœur de l'église Ste-Amélie |
Baie-Comeau : «Moïse» dans l'église Ste-Amélie |
Baie-Comeau : le port en quittant |
Nous quittons donc sans regret la petite ville industrielle pour continuer à longer la côte vers le sud. |
Longuerive : bivouac à côté de l'église |
Nous décollons tard (passé 11:00) mais sous un ciel bien dégagé qui offre une vue agréable sur l’anse depuis la pointe rocheuse derrière l’église. |
En entrant à
l’intérieur de celle-ci, je suis frappé par la
pérennité du style architectural de l’antique
basilique romaine qui a réussi à se transmettre
jusqu’ici, 2 000 ans plus tard et en des lieux combien
lointains et reculés ! Grande nef centrale, bas-côtés
délimités par deux rangées de colonnes aux chapiteaux
corinthiens, voûtes et fenêtres en arceaux… Tout y est ! De chaudes couleurs pastels apportent une ambiance agréable. L’immeuble est impeccablement entretenu, l’église classée recevant des subsides du Ministère des Affaires culturelles, comme l’indique discrètement une petite affiche. |
Nef de l'église de Longuerive |
Un peu plus loin c’est la chute de la Rivière du Sault-au-Mouton qui me retient quelques minutes. Le temps de descendre jusqu’à la passerelle qui enjambe le cours inférieur de la rivière, juste en dessous de la chute, pour en donner un aperçu pleine largeur. La grève encadrée par de grandes plaques rocheuses rouges ne manque pas d’allure elle aussi. | Chute de la rivière Sault-au-Mouton |
Le Saguenay depuis la route vers Anse-de-Roche |
À partir de Grandes
Bergeronnes, nous nous éloignons de l’eau et
retrouvons un paysage très vallonné et boisé. Celui-ci
se poursuit le long de la rive gauche du Saguenay que
nous décidons d’explorer à partir de l’intersection
avec la Route 172. Peu après Sacré-Cœur, une petite route assez abrupte nous conduit au charmant village de Anse-de-Roche qui jouit d’une superbe situation (au fond d’une anse rocheuse…) sur la rive nord du fjord. |
Peu après Sacré-Cœur, une petite route assez abrupte nous conduit au charmant village d'Anse-de-Roche qui jouit d’une superbe situation (au fond d’une anse rocheuse…) sur la rive nord du fjord. Nous déjeunons sur le petit stationnement de la marina, puis je m’installe sur le bout du quai pour une courte sieste au soleil, devant le magnifique paysage : à ma gauche l’étendue marine disparaissant derrière un promontoire, devant moi le fjord s’enfonçant dans les terres en rétrécissant à travers une suite de caps. Quelques voiliers mettent un peu de vie dans cet environnement totalement désert et sauvage. C’est Monique qui vient interrompre ma contemplation une demi-heure plus tard pour m’inviter à poursuivre notre excursion. | Saguenay : Anse-de-Roche |
Malheureusement la route passe assez loin à l’intérieur des terres, sans offrir aucune ouverture sur le fjord, et ce n’est que 50 km plus loin, au niveau de Sainte-Rose du Nord, que nous découvrons un autre joli quai au bord du fjord. Le temps s’est hélas couvert, une ondée nous frappe, et il faut composer avec les nuages pour photographier notre petite balade jusqu’au belvédère à la pointe toute proche. | Saguenay : arrêt sur le quai de Ste-Rose-du-Nord |
Nous quittons ensuite la zone du parc; une autre tentative pour descendre jusqu’à l’eau à la Pointe-aux-Pins se solde par un échec (le chemin déjà très pentu devient non carrossable…) et nous arrivons devant la grande étendue plus marécageuse des battures de Saint Fulgence qui marquent la fin du fjord. Souper sur la grande halte routière bien aménagée où nous passons un moment à observer le coucher du soleil sur l’eau… | Les bâtures de St-Fulgence |
La Baie : bivouac sur le quai devant le Saguenay |
Puis nous entrons
dans la partie est de Chicoutimi, devenue
arrondissement de la nouvelle grande ville de
Saguenay. Épicerie au IGA, plein d’essence. Comme rien
ne nous semble vraiment passionnant ici, nous
repartons immédiatement dans la nuit établie pour
chercher un bivouac sur la rive sud du Saguenay. Nous n’irons pas bien loin puisque, en traversant La Baie, nous apercevons un grand stationnement aménagé en parc au pied de l’hôpital des Ha-Ha, devant la zone portuaire. Nous repérons un coin peu fréquenté (de toute façon c’est un cul-de-sac) et nous y installons rapidement pour dormir. À 22:15 Monique est couchée, tandis que j’écris le journal. |
Une première
incursion à partir de Rivière-Éternité nous fait
dévaler la rivière torrent du même nom jusqu’au fond
de la Baie Éternité. Le petit plan d’eau qui donne sur
le vaste Saguenay est encadré par deux hauts caps, les
Caps Éternité et Trinité, ce dernier portant côté
fjord un haute statue de la Vierge que les navigateurs
aperçoivent de très loin. C’est ce superbe belvédère qu’on nous propose d’atteindre par un sentier très raide faisant près de 6 km A/R. La distance est faible mais le dénivelé de 300 mètres plus conséquent, d’autant qu’il faut le franchir 3 1/2 fois, d’abord pour grimper sur le sommet du cap puis en redescendre jusqu’à la statue installée au tiers inférieur (du cap), et ensuite tout parcourir à l’envers pour rentrer au stationnement. Monique refuse de s’embarquer dans une telle aventure, je pars donc seul caméra et jumelles en bandoulière, walkie-talkie en poche. |
Baie-Éternité : départ de la balade |
Baie et Cap Éternité |
La montée est heureusement facilitée par des volées d’escaliers de bois qui attaquent la pente abrupte très rapidement. Mais le nombre de marches qui se succèdent sans presque aucune interruption ne tarde pas à devenir pénible, fatigant, épuisant. J’arrive passablement essoufflé et suant à la halte Bellevue, à 280 m au dessus du niveau de l’eau. Heureusement elle porte bien son nom, et le coup d’œil sur la Baie verdoyante entourée de montagnes récompense de l’effort fourni. |
Ensuite un long passage presque horizontal traverse le presque sommet de la falaise, avant une bonne descente jusqu’au refuge et surtout au flanc du versant nord, vers la fameuse statue. J’hésite à m’engager sur le sentier pentu, craignant la remontée mais un couple de visiteurs à peine plus jeune me convainc de l’intérêt de la balade. Je me lance donc, le sentier me paraît relativement aisé (il descend presque tout le temps…) et offre l’avantage de présenter plusieurs percées sur le fjord, magnifique. | La Baie Éternité débouche sur le Saguenay |
Notre-Dame
du Saguenay Notre-Dame du Saguenay est
l’œuvre du renommé sculpteur québécois Louis
Jobin. Il a sculpté la statue à la demande de
monsieur Napoléon Robitaille, commis voyageur
de Québec, qui remplissait ainsi une promesse
faite à la Vierge. Sauvé des eaux glaciales du
Saguenay et rétabli par miracle de la maladie
qui s'ensuivit, il lance une souscription
publique et fait installer la statue sur le
premier palier du cap Trinité. Le monument a
une hauteur de plus de huit (8) mètres et son
poids atteint trois mille cent soixante-quinze
(3175) kilogrammes.
Trop lourde pour la technologie de l'époque, la statue a dû être sectionnée en quatorze (14) morceaux pour être hissée jusqu'au premier palier du cap. Après huit (8) jours d'un dur labeur, au cours desquels les quatorze (14) sections furent montées en vingt-deux (22) étapes, la statue était assemblée sur son socle. Monseigneur Dominique Racine, évêque de Chicoutimi, procéda à sa bénédiction le 15 septembre 1881. |
Cap-Éternité : la Vierge du Saguenay tournée vers le fjord |
Cap-Trinité : Notre-Dame du Saguenay de dos |
Une petite remontée après avoir franchi un ravin, et me voilà au pied de la fameuse Vierge du Saguenay. Huit mètres de haut et 2,5 tonnes, ce fut toute une aventure que de la hisser jusque là, découpée en 14 morceaux… Qu’on aime ou non son style assez naïf, on ne peut qu’être béat devant le spectacle auquel elle préside : à 240° le grand Saguenay étale ses eaux bleu profond piquetées de vagues courtes frangées d’écume, les rives montagneuses et désertes sont couvertes d’arbres à l’infini, et le vaste canal se poursuit à l’est comme à l’ouest en rétrécissant sans qu’on puisse en deviner la fin. |
Contemplation en changeant plusieurs fois de point de vue, photos, je crois avoir assez soufflé pour rentrer sans difficulté. | Cap-Trinité : panorama sur le Saguenay en aval depuis le pied de la statue |
Sur le sentier du Cap-Trinité |
Mais c’est compter
sans le manque d’entraînement et la rouille qui
s’est accumulée dans les jambes du randonneur
sédentaire depuis trop d’années ! Une légère
sciatique commence à descendre dans la jambe droite,
puis se glisse sournoisement dans la gauche, mes
chaussures pourtant excellentes se font lourdes et
blessantes… bref la fatigue - et les ans - se font
durement sentir. Je remonte péniblement jusqu’au refuge où une bonne pause de 10 mn me fait récupérer un peu, et ensuite je ne fais que suivre la pente qui heureusement est presque toujours descendante. Je bénis ensuite les volées d’escaliers où il m’est beaucoup plus facile de contrôler mes jambes que sur les sections parsemées de rochers irréguliers ou de gravier fuyant. |
Après cette équipée un peu
téméraire vu ma forme physique, je n’ai plus guère
envie de me lancer dans bien d'autres explorations
du fjord. De toute façon les points d’accès sont
rares. Nous irons seulement au bout d’une piste
poussiéreuse et pleine de tôle ondulée jusqu’à
l’Anse de Tabatière, au-delà de l’Anse Saint-Jean.
Là, au pied du grand pylône de l’Hydro-Québec qui
soutient en une seule portée de 2 200 m la ligne
de 735 000 volts reliant le barrage de Manic 5 à
la ville de Québec (2 000 mégawatts !), on a
ménagé un petit belvédère offrant une autre vue
magnifique sur le fjord. Au loin à l’ouest on
devine la découpe en escalier du Cap-Trinité sur
lequel j’étais tout à l’heure, et tout autour, ce
ne sont que vastes étendues désertes d’eau, de roc
et de forêt.
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Anse de Tabatière : le Saguenay vers l'amont et le Cap-Trinité |
Port-au-Persil |
Comme ce sont là les deux seuls accès pratiques au fjord sur sa rive sud, nous reprenons la route sans nous arrêter, direction sud-ouest. Elle continue de monter et descendre en sinuant à travers des falaises rocheuses couvertes d’épinette, traversant de rares hameaux (Sagard, Lac Deschênes) jusqu’à rattraper enfin le fleuve à hauteur de Saint-Siméon. Nous longeons un moment la belle côte de Charlevoix, elle aussi très montueuse, arrêtons dans l’anse charmante de Port-au-Persil pour quelques photos sur le banc de rochers près de la petite église marine. |
Passent La Malbaie puis Saint Irénée dans le soleil du soir, pour enfin aller bivouaquer près de la petite église de St-Joseph-de-la-Rive dont nous apprécions l’environnement calme et sans prétention. Souper devant le traversier menant à l’Île aux Coudres, balade au bord des bâtures au crépuscule, puis extinction des feux à 22:00. | Descente sur Saint-Irénée |
Bivouac devant l'église de St-Joseph-de-la-Rive |
Nuit des plus tranquilles sur le stationnement de la petite église : il a fait frais, sans presque aucun passage, et au matin les activités commencent lentement dans ce village uniquement résidentiel. Petit tour dans les rues aux maisons soignées, entourées de jardins fleuris. |
Les Éboulements : la roulotte à patates de Mado |
Nous reprenons la route vers Montréal sans presque aucun arrêt sinon pour le déjeuner, en photographiant au passage l’originale « roulotte à patates de Mado » montée sur un vieux fourgon peinturluré, que j’avais pris dans un premier temps pour un « motorisé home made », comme on en voit parfois en Europe… |