La Norvège jusqu'aux Îles Lofoten

Juillet 1998



Jean-Paul et Juliette MOUREZ
à bord de l’Aigle



4. TRONDHEIM et la Route 17

Vendredi 17 juillet 1998 : d’OPPDAL à GRYTA (Namsos) (306 km)

Réveil un peu tardif (8:30) sous un soleil resplendissant : enfin ! Le vaste paysage en est transformé et notre humeur revigorée car je commençais à songer à faire demi-tour pour redescendre vers un sud peut-être plus ensoleillé, plus chaud et surtout moins humide. Juliette prend le volant sur la grande route E 6 menant à Trondheim et se tire assez bien de l’épreuve, maintenant une allure régulière malgré la grande faiblesse de notre petit moteur dans les côtes. Je dois seulement lui rappeler à moult reprises d’occuper toute la largeur de sa voie et d’éviter la ligne blanche à droite sur laquelle elle se rabat après chaque virage, me donnant l’impression de vouloir faucher les pâquerettes…


Le centre historique de Trondheim
Le centre historique de Trondheim

À Trondheim, le ciel bleu, la grande lumière et l’absence de parapluies, ajoutés à l’affluence de touristes, donnent un air de fête aux abords de la cathédrale de Nidaros devant laquelle nous stationnons. Tour du fameux monument, retrait d’argent dans un guichet automatique – oh combien pratique ! – passage à l’Office du tourisme pour quérir informations sur la ville et documentation sur la suite de notre trajet vers le nord. Nous vérifions dans une agence de voyage la possibilité d’avancer notre traversée de retour vers le Danemark au cas où le mauvais temps se poursuivrait. Puis nous rentrons déjeuner dans l’Aigle.

Clocher de la cathédrale de Nidaros illuminée
Clocher de la cathédrale de Nidaros illuminée
Façade de la cathédrale de Nidaros
Façade de la cathédrale de Nidaros

Anciens entrepôts sur la rivière Nidelva
Anciens entrepôts sur la rivière Nidelva
Anciens entrepôts sur la rivière Nidelva
Les quais et entrepôts de Trondheim

Dans les vieilles rues de Trondheim
Dans les vieilles rues de Trondheim

Nous sommes à deux pas de la vieille ville maintenant entièrement réhabilitée dont nous parcourons les petites rues pavées bordées de maisons de bois aux teintes pastel. En arrière d’anciens entrepôts eux aussi rénovés s’alignent le long de la rivière Nidelva. L’ambiance est simple, populaire, le quartier n’a pas succombé au « renouveau touristique », on voit et on sent que ses habitants continuent d’en faire un milieu de vie naturel et sans apprêt. Retour par le centre, plus sophistiqué, dont plusieurs grands immeubles de pierre et de maçonnerie affichent le style « National » ou Art Déco.

Trondheim-Kunstindustimuseum
Nous entrons alors dans le Musée des Arts et Métiers pour admirer ses collections, dont celle de costumes que Juliette est déçue de ne pas y trouver. Elle a laissé place à plusieurs expositions temporaires d’art contemporain (tapisseries et verreries) plus ou moins intéressantes mais nous apprécions la série de meubles et d’objets Art Nouveau, ainsi que des réalisations du design scandinave des 30 dernières années (sièges, meubles, verreries, etc.). Juliette admire... en future costumière !
Juliette admire... en future costumière !

Des «sièges» originaux, mais confortable ?
Des «sièges» originaux, mais confortable ?
Chaise scandinave typique
Chaise scandinave typique


Trondheim-Kunstindustimuseum-recyclage-creatif
Vases en contenants recyclés

Lorsque nous en ressortons en fin d’après-midi, c’est pour passer à la Maison des Étudiants où Juliette a repéré un café Internet gratuit dans lequel elle va prendre son courrier électronique et répondre à ses amis. Après le plein d’essence (elle est ici 20 % moins chère qu’hier en pleine nature !), nous reprenons la route E 6 vers le nord.

Dans le pays de Trondheim
Dans le pays de Trondheim
Il fait toujours aussi beau et les vues sur la côte et le Trondheimfjorden sont superbes : vert des prairies et des cultures parsemées de petites fermes rouge-brun, bleu foncé de l’eau et chaînes bleutées des montagnes de la presqu’île de Fosna à l’horizon. La circulation est dense sur la chaussée cependant – nous sommes pour un moment sur l’unique route menant au Cap Nord – et il est impossible de s’arrêter pour filmer.

À 20:30 nous roulons encore, quittons la E 6 à Steinkjer pour bifurquer sur la petite 17, la route côtière très pittoresque que nous suivrons sur près de 200 km jusqu’à Bødo, dont le parcours paisible est interrompu par le franchissement de 7 bras de mer sur autant de traversiers... (en jaune les distances sur la terre).
Les traversiers de la route 17
Les traversiers de la route 17

Nous soupons et faisons la vaisselle dans une cour d’école, puis parcourons encore quelques kilomètres avant d’arrêter au dessus d’une branche du Namsfjorden, dans un virage abandonné à l’écart de la circulation. Je me couche enfin à 1:00 après l’écriture du journal en retard, dans la douce et chaude lueur du « presque » soleil de minuit.

Samedi 18 juillet 1998 : de GRYTA (avant Namsos) à FORVIK (288 km)

 Aujourd’hui encore un chaud soleil nous accueille à notre réveil, bien que notre chemin détourné, enfoui dans les arbres, nous maintienne à l’ombre jusque passé 8:00. Impossible de lever Juliette avant 9:00, cela me donne le temps de me doucher, de déjeuner puis d’entreprendre le changement de l’huile et du filtre du moteur. Enfin la demoiselle émerge et achève de se pomponner pour notre départ vers 9:45.

Dès le début la route est superbe, longeant l’extrémité du Namsfjorden qui devient rapidement de plus en plus large dans son cadre de petits boisés aux vives teintes de vert. L’eau renvoie un bleu émeraude étonnamment vif qui contraste avec le gris franc des rochers et le rouge sombre des petites fermes éparpillées sur les pentes au bord de la rive tandis que, dans chaque anse, quelques bateaux blancs attendent leurs pêcheurs. Ensuite, après Namsos assez quelconque avec ses petites maisons modernes et soignées, une longue route à l’intérieur des terres longe de nombreux lacs aux allures de fjords. De temps à autres, des villages se signalent par quelques maisons blanches en bois isolées et entourées de jardinets débordant de fleurs, quelques magasins généraux et parfois une petite église, bref des agglomérations rurales fort semblables à ce que nous connaissons au Québec. La nature est superbe, les rivières écumantes sur lit de rochers et de galets, les forêts touffues, les cultures drues vert cru, et toujours en arrière, sur les pentes affleure le rocher gris.

Vers midi, nous arrêtons plus d’une heure et demie pour bricoler. En premier lieu je m’attaque aux phares antibrouillard qui ne s’allument plus. Je repère vite la coupure de masse et arrange un câblage fonctionnel mais je brise aussi la lentille de verre en remontant le phare ! Il ne me reste plus qu’à improviser un couvercle transparent découpé dans le plastique d’une bouteille d’eau minérale. L’ensemble est relativement étanche mais l’effet optique est perdu… Au moins ces feux de jour éclaireront-ils, ce qui est obligatoire en tout temps ici. Je nettoie ensuite le carburateur - il faudrait changer le joint de caoutchouc complètement écrasé qui fuit – et raccorde la sonde de pression d’huile qui avait été débranchée par le mécanicien lors de la dernière mise au point. Puis nous réinstallons soigneusement le capot du moteur en espérant que nous l’entendrons un petit peu moins, particulièrement le cliquetis des soupapes qui finit par fatiguer…

Petit port de Holm
Petit port de Holm
Après déjeuner, nous reprenons la même route campagnarde toujours aussi variée et agréable jusqu’à rejoindre la côte à Holm où nous empruntons notre premier traversier sur la route 17. Prix moins élevé qu’appréhendé grâce à la faible longueur (<5 m) de l’Aigle.

Commence alors notre long cheminement, à petite vitesse (60/70 km/h) dans le magnifique décor caractéristique de cette côte : rivage de sable et galets sur lequel viennent mourir les prairies, masses rocheuses arrondies des collines de l’arrière pays, forme parfois aiguë parfois aplatie ou bien encore arrondie des îles qui doublent le rivage de façon presque continue. Les couleurs s’avivent sous le ciel presque toujours ensoleillé.

À Brønnøyosund, plein d’essence puis traversée du nouveau et haut pont haubané au dessus du petit port qui offre des vues magnifiques sur le détroit de Brønnøy et sur la côte, pour gagner à une dizaine de kilomètres Torghatten. Pont-sur-le-Brønnøyosund
Pont haubané sur le Brønnøyosund

Depuis le tablier du pont sur le Brønnøyosund
Depuis le tablier du pont sur le Brønnøyosund

Depuis le tablier du pont sur le Brønnøyosund
Depuis le tablier du pont sur le Brønnøyosund

Depuis le tablier du pont sur le Brønnøyosund, Torghatten
          à l'horizon
Depuis le tablier du pont sur le Brønnøyosund, Torghatten à l'horizon

 Torghatten
Torghatten
Cette éminence rocheuse haute de 256 m épouse la forme d’un chapeau. Le  trou percé en son milieu a donné naissance à une bien jolie légende. Nous escaladons le sentier assez raide qui grimpe jusqu’au tunnel naturel  aux dimensions impressionnantes (36 m de haut, 20 m de large et 160 m de longueur).

Torghatten
              : le trou
Torghatten : le trou


Panorama depuis Torghatten
Panorama depuis Torghatten
Mais c’est surtout le paysage des deux côtés du rocher qui me saisit par son immensité, l’harmonie des couleurs et le charme du motif - eau – îlots – montagnes…

Panorama depuis Torghatten
 Panorama depuis Torghatten

Nous revenons vers Brønnøyosund puis roulons jusqu’à Horn où nous soupons sur le quai en attendant le traversier menant à Andalsvagen.

Là aussi, très beau paysage baigné par la lumière jaune mais encore très vive du soleil tardif (il est 21:30). L’impression étrange d’un crépuscule qui n’en finit plus se poursuit jusqu’à Forvik, à la recherche d’un bivouac. Il est 22:30, le dernier ferry est parti il y a 30 minutes, il ne nous reste plus qu’à nous installer pour dormir sur un terrain vague au bord du petit cimetière de Forvik, derrière l’élégante petite église peinte en blanc. Il est 23:45 lorsque j’achève d’écrire ces lignes dans mon lit, sous le seul éclairage du lanterneau central de l’Aigle illuminé par le soleil de minuit qui nous accompagne presque toute la nuit.

Dimanche 19 juillet 1998 : de FORVIK à FORØY (203 km)

 Le silence est total puisque les environs sont déserts et la circulation nocturne interrompue par l’arrêt du traversier. J’ai filmé hier soir le « soleil de minuit » qui éclairait fort bien le paysage, si bien que c’est seulement passé 8:00 que je m’extirpe de mon lit. Nous faisons le plein d’eau avec le boyau destiné à l’arrosage du cimetière voisin et sommes à temps sur le terre plein du traversier Forvik – Tjøtta à 9:35.

Sur le traversier Forvik – Tjøtta
Sur le traversier Forvik – Tjøtta
Belle traversée d’une heure entre les îles où l’on embarque et débarque quelques rares autos, entourés de grandioses paysages arides mais très pittoresques. Rares maisons et garages à bateaux, barques de pêches ancrées dans les anses, vastes horizons, montagnes tachetées de neige… 

Nous débarquons à Tjøtta. La même route côtière très spectaculaire se poursuit, aussi belle qu’hier malgré le ciel plus chargé. J’en profite évidemment pour m’arrêter très fréquemment et capter à la vidéo les points de vue les plus prenants, tâchant de fixer le souvenir de ces merveilleux paysages. Juliette-ma-copilote
Juliette ma co-pilote

Berme fleurie sur la route d'Agskatet
Berme fleurie sur la route d'Agskatet

Église et presbytère d’Alstahaug
Église et presbytère d’Alstahaug
La petite église et le presbytère d’Alstahaug nous retiennent un moment, moins à cause de  l’architecture très simple de l’église de pierre que pour l’ambiance (paysage marin et vieilles maisons de bois rouge et blanc) attachée au pasteur/poète Petter Dass qui y vécut au XVIIIème, ce qui a valu au site d’être si bien préservé.

Pisciculture
Pisciculture

La superbe route 17 se poursuit mais nous renonçons au détour vers l’île de Dønna (traversier trop cher et trop peu de curiosités). Autre traversée de Levang à Nesna et tour du superbe Sjonafjorden pour nous arrêter visiter la forteresse allemande de Grønsvika datant de la dernière guerre. Si le site est magnifique, la restauration du fort en est à ses balbutiements et Juliette de mâche pas ses mots à l’endroit des « touristologues » qui ont le culot d’exiger un droit d’entrée pour ces quelques morceaux de béton raboutés : un plan rudimentaire, pas une photo, pas de guide, un seul gros canon encore en état sur les 5 que le fort était supposé contenir, aucun autre artefact… Nous quittons rapidement les lieux pour grimper sur une petite éminence voisine où l’on signale un point de vue intéressant. Il offre effectivement un panorama exceptionnel à 240° sur la montagne, les chapelets d’îles et la mer bleu vert intense.

Forteresse allemande de
        Gronsvika
Restes de la forteresse allemande de Gronsvika

La très belle route se poursuit jusqu’au traversier suivant de Kilboghamm à Jektvika, pour un long cabotage d’une heure entre les îles, devant l’entrée du Melfjorden.
Cabotage devant l’entrée du Melfjorden
Cabotage devant l’entrée du Melfjorden

Le soir tombe et la pluie nous rejoint tandis que nous parcourons les 27 km nous séparant d’Agskatet. C’est le point de départ de la dernière traversée de 10 mn jusqu’à Forøy et notre dernier traversier jusqu’à Bødo où se termine la route 17. La petite route traverse un paysage bouleversé, beaucoup plus accidenté que ce que nous avons vu jusqu’à maintenant, et les profonds ravins, les pics acérés, les pentes raides joints à la profusion de fleurs font déjà beaucoup penser à l’image gardée des Lofoten.

Sur la route d'Agskatet
Sur la route d'Agskatet
Reflets
Reflets

La barrière du petit traversier, qui a fait son plein de voiture jusqu’au ras de la porte, se ferme devant nous, nous obligeant à attendre la ronde suivante à 23:00. Cela nous donne le temps de nous préparer un chili con carne bien épicé, complété par la douceur de leechee rafraîchis, puis de commencer la rédaction du journal avant d’embarquer enfin à 22:20. Traversée morne sous les gouttes. Elles coupent toute visibilité et assombrissent le ciel qui devrait pourtant être encore clair à cette heure. Nous bivouaquons sur le premier espace libre venu, près d’un garage à bateaux au bord de l’eau à Forøy, et nous endormons sous la pluie qui semble bien nous avoir rattrapés.

Bivouac
        au bord de l'eau à Forøy
Bivouac au bord de l'eau à Forøy

Lundi 20 juillet 1998 : de FORØY à BOGNES (396 km)

Aujourd’hui encore la pluie, les nuages gris et le ciel bouché nous accompagnent toute la journée. La route côtière n’en continue pas moins d’être magnifique, avec les mêmes caractéristiques qu’hier : nous longeons presque continuellement la mer, ses rares plages de sable, ses nuées d’oiseaux et toujours l’horizon souligné à distance par des chapelets d’îles aux formes variées. De longs détours autour des fjords nous entraînent quelquefois à l’intérieur des terres, à moins que des tunnels interminables (jusqu’à 7 300 m) qui se succèdent parfois après seulement une bref passage à l’air libre, permettent de franchir les barres rocheuses perpendiculaires au rivage et de gagner ainsi beaucoup de temps.


Nous quittons la chaussée excellente seulement quelques minutes pour aller visiter d’abord la petite église de Gildeskal (1 130) perdue en pleine campagne sous les grands arbres et entourée de son petit cimetière rustique. Dans la nef, d’étonnantes cages de bois enferment les bancs des notables et de leur famille.

Église de
                campagne
Église de campagne
Église de Gildeskal (1130)
Église de Gildeskal (1130)

Glacier de l’Engebreen depuis le Holandsfjord
Glacier de l’Engebreen depuis le Holandsfjord
Plus loin, le glacier de l’Engebreen, dont la langue glacière descend au ras des eaux du Holandsfjord, nous semble trop embrumé sous le ciel chargé de crachin pour que nous nous payions la traversée en bateau qui nous ferait toucher du pied ses névés bleutés. Nous préférons rouler dans le confort et la chaleur de l’Aigle en nous contentant d’admirer le spectacle se déroulant derrière le pare-brise…

Dernier arrêt un peu avant Bødo pour remonter à pied sur le grand pont franchissant le fjord et aller voir le Salstraumen, un fameux maelström annoncé par quantité de publicités. Ce n’est en fait qu’un puissant courant de marée causant de gros tourbillons finalement peu spectaculaires. Un autre piège à touristes qui fait sacrer Juliette, d’autant plus que le « Centre d’interprétation » se limite à quelques pancartes, un bac à tourbillon artificiel où il faut mettre une pièce de monnaie pour voir tourner l’eau… et un énorme magasin de souvenirs d’un rare mauvais goût ! Pont de
                  Bødo
Pont de Bødo

Nous arrivons près de Bødo, au bout de cette splendide route 17 et bifurquons vers Fauske, une « ville » toute neuve rassemblant quelques magasins où nous finissons par trouver du pain. Un dernier bout de la route E 6 maintenant rattrapée est plus rapide, n’étaient-ce les côtes raides montées à 40 km/h en 3ème. Nous commençons à apercevoir vaguement les hauteurs des Îles Vesteralen noyées dans les nuages lorsque nous prenons au passage deux jeunes Polonaises qui montent jusqu’au Cap Nord en auto-stop. Projet courageux (surtout sous la pluie) mais un peu téméraire, d’autant plus que les touristes sont pressés et disposent de peu de place dans leurs voitures surchargées…. La route descend spectaculaire jusqu’au port de Bognes où nous dormons sur le quai en espérant un dégagement pendant la nuit prochaine. La soirée est consacrée à la planification du retour direct en France : 1 700 km de Norvège, plus 1 500 km de Frederikshavn (où nous débarquons au Danemark) jusqu’à Paris.



5. Tour dans les LOFOTEN



Mardi 21 juillet 1998 : de BOGNES à GRUNNFØRDFJORD (258 km)

Arc en ciel du soir près de Lødingen
Arc en ciel du soir près de Lødingen
Après une traversée décevante sous un ciel très gris, le temps se lève et devient magnifique en débarquant à Lødingen. Je retrouve avec un immense plaisir le décor grandiose des îles, où le rocher nu en pentes abruptes forme une frise acérée sur le ciel bleu, entre les plans d’eau bleu profond découpés en anses, en baies et en goulets ouvrant sur le large au loin...

Raftsundet
Raftsundet
Trollfjord
Trollfjord

Trollfjord
Trollfjord

Paysages spectaculaires mais aux dimensions toujours appréhendables, couleurs vives et pures, on se sent en prise directe sur la nature ici. Nous commençons notre balade dans les Vesteralen par une excursion à pied dans le nord de l’île de Langøya vers la petite plage de Stø.

Les
          guimauves de Juliette

Les "guimauves" de Juliette...

Les
          "guimauves" de Juliette...

Stationnant au bout du petit port de pêche, nous nous lançons sur le sentier accidenté qui serpente sur la dune au pied de la falaise à pic, jusqu’au sable dorée d’une petite plage totalement déserte.

Les courbes de la côte rocheuse se succèdent vers le sud, nous contemplons un moment le magnifique paysage avant de faire demi-tour pour gagner par la route de l’intérieur le village de pêcheur abandonné de Nyksund. La piste accrochée en corniche au pied de la falaise fait découvrir d’autres panoramas grandioses jusqu’au restes du hameau en cours de restauration. Ancienne base de baleiniers délaissée maintenant que l’espèce est protégée, ses maisons de bois peint ou de bardeau s’en vont à la dérive ou s’écroulent progressivement. Il n’en resterait bientôt pas grand chose si des jeunes écolos ne remontaient ou réparaient les plus belles pour en faire des home de vacance ou la base d’où partent maintenant des expédition plus pacifiques pour aller admirer les grands cétacés au large. Parfum de nostalgie dans l’unique rue qui fait le tour du bassin abrité derrière une petite jetée de rocs entassés…



Une longue route de terre à l’intérieur puis le long du très beau Eidsfjorden nous mène jusqu’à Melbo, dans les flamboiement puis la longue descente du soleil nordique qui dore les pentes, fait resplendir le vert des prairies et des boisés et scintiller les vaguelettes courant sur l’étendue bleu marin.

Eidsfjorden
Eidsfjorden

Eidsfjorden
Eidsfjorden

Hadsellfjorden
Hadsellfjorden

Un grand pont nous fait passer en soirée sur l’île de Hadseloya pour finalement atteindre Melbo où nous embarquons à 22:00. Nous sommes bien au pays du soleil de minuit, puisque la clarté singulière du gros soleil jaune n’en finit pas de verser sa vive lumière dorée sur toutes choses. En débarquant à Fiskebol sur Austvågøy, la première des Lofoten, nous nous engageons sur une autre petite route de terre pour aller enfin bivouaquer fort tard dans un hameau au fond du fjord.


Mercredi 22 juillet 1998 : de GRUNNFJØRD à UTAKLEIV (181 km)

Nuit plus que tranquille au bord de notre chemin de campagne et au fond du fjord où il ne passe personne passé 22:00. J’ai filmé à nouveau le soleil de minuit descendant sur l’horizon avant de sombrer dans le sommeil, et dors d’une traite jusqu’au lendemain à 9:00. Ciel parfaitement bleu au réveil, au bruit de deux petits tracteurs fauchant et ramassant l’herbe drue dans le champ à côté de notre bivouac. Juliette tente de lambiner un peu, nous finissons par décoller à 10:15.

La petite route, fort jolie, se poursuit encore une bonne heure, serpentant entre mer et montagne, magnifique bien entendu. Une courte vallée grimpant à travers les montagnes nous fait rattraper la grande E 10. Un superbe belvédère à Sildpotten offre une vue grandiose sur le fjord tant du côté nord environné de montagnes que vers le sud où se devine la mer ouverte au loin. Nous sommes bientôt à Solvaer où nous allons quérir beurre et eau minérale, timbres et informations sur le prix du traversier Moskenes-Bødo qui nous coûtera un autre 100 $…

Nous allons déjeuner ensuite devant une très jolie anse à l’entrée de Kabelvag où se reflètent dans l’eau bleue les murs jaunes de l’église.
Kabelvag
Kabelvag
Kabelvag
Kabelvag

Juliette décide de profiter du grand soleil pour aller « s’éfoirer sur une plage » et nous tentons de rallier Kalle où le Guide du routard signale une belle étendue de sable fin. Je rate l’entrée de la petite route et nous entraîne jusqu’à Hemmingsvaer, important port de pêche typique isolé sur une île plate que l’on rejoint en franchissant deux étroits ponts en dos d’âne. Juliette, peu intéressée à faire le tour des quais, est bien plus désireuse de jouir du trop rare soleil. Nous rebroussons donc chemin et trouvons une petite place en bord de route devant un grandiose paysage de falaises tombant dans l’eau, d’îles et de rochers arrondis. Je demeure dans l’Aigle pour bricoler et classer notre abondante documentation pendant que Juliette se met en maillot de bain et part avec sa serviette s’exposer au soleil sur les rochers.

Deux heures plus tard, nous reprenons la route vers le sud, quittons Austvågoy pour l’île de Vestvagoy toute aussi montagneuse et longeons la côte vers le sud jusqu’à Stamsund, un autre port de pêche très chouette avec bateaux, rorbuer (logement de matelots pour la pêche hivernale), etc. Nous y voyons notre premier Hurtigruten (Express côtier) prenant son départ vers le nord. Cette fameuse ligne de cabotage le long de la côte nord de la Norvège fut longtemps le seul lien avec la civilisation du sud.

Il commence cependant à être tard et le ciel se couvre. Nous passons rapidement Leknes, à l’intérieur des terres, où nous retrouvons un paysage beaucoup plus rural avec des prairies fraîchement fauchées, du bétail au pâturage, des petites fermes dispersées dans une large vallée intérieure limitée tout autour par des montagnes. Une petite route à peine asphaltée mène à Uttakleiv où le Routard signale une très belle plage sur laquelle on peut camper gratis. Effectivement le sable est d’une blancheur immaculée, quelques camping-cars et une dizaine de tentes dispersées sur la dune nous ont d’ailleurs précédés. Nous grimpons un peu au dessus du site et nous installons sur un petit terre-plein longeant la route de terre qui se poursuit vers la plage d'Uttakleiv. La vue est superbe mais le vent froid et le ciel de plus en plus gris écourtent notre petite promenade du soir avant le coucher.

Uttakleiv
Uttakleiv et sa plage

Uttakleiv
Uttakleiv

Jeudi 23 juillet 1998 : de UTTAKLEIV à Å (131 km)

Sur la plage
              d'Utakleiv
  Sur la plage d'Utakleiv
Pour notre malheur le ciel est uniformément plombé au matin, un petit vent frisquet balaie la plage et les falaises, et une bruine fine mais continue enveloppe véhicules, tentes, campeurs et vacanciers. Nous en profitons pour faire la grasse matinée jusqu’à 10:00 et devons renoncer à risquer plus que quelques pas dehors tant l’humidité froide nous transperce rapidement tout en estompant à peu près complètement le paysage.

La lecture des publicités touristiques durant l’après-midi d’hier m’a permis de repérer un musée tout neuf consacré à la reconstitution d’une « longue maison », résidence d’un chef viking, découverte à Borg, une dizaine de kilomètres au nord de Leknes. Essuie-glaces en action, nous nous rendons jusqu’au grand stationnement de Lofotr envahi par toute une flotte de camping-cars, puis enfilons bottes et imperméables pour nous lancer à la découverte du site.


La longue
              maison de Lofotr telle que reconstruite dans son cadre
              original
La longue maison de Lofotr telle que reconstruite dans son cadre original

Lofotr dans la tempête de neige
Lofotr dans la tempête de neige
Auprès de la chaleur du foyer de Lofotr
Auprès de la chaleur du foyer

Bien placée sur le haut d’une colline, en arrière du manoir authentique dont on aperçoit encore les fondations, se dresse une longue (83 m) maison viking en bois toute neuve, toiture de petites tuiles de bois à double pente descendant presque jusqu’à terre, murs de planches doublés de hauts talus de tourbe isolante. À l’intérieur divisé en trois sections, une charpente haute de 12 mètres, inspirée des stavkirke contemporaines, abrite des ateliers (tissage et filage, menuiserie, cordonnerie, pelleterie…), les logements du chef  (salle de cérémonie/salle à manger, couchage) et enfin les étables transformées en musée qui présentent trouvailles des fouilles, d’autres objets reconstitués et des panneaux explicatifs.

Le
              drakkar de Lofotr
Embarquement à bord du  drakkar de Lofotr
Une longue balade ensuite à travers champs et le long d’une petite rivière aux berges envahies par des fleurs sauvages mène - sous la bruine persistante ! – à la forge où s’active une blonde et accorte forgeronne qui martèle hameçons, clous et autre quincaillerie, puis au grand hangar à bateaux à l’ancienne sous lequel sèche la grande voile du drakkar amarré juste en avant. Un vrai drakkar sur lequel on peut monter et même ramer  - quand le temps le permet !… C’est une reproduction fidèle en chêne du drakkar de Gokstad admiré il y a dix ans dans son musée d’Oslo : 24 mètres de long, 5 mètres de large et des bancs pour 28 rameurs. Je parcours le pont avec émotion, en pensant au devenir de ces as de la navigation  qui devaient laisser leur marque dans toute l’Europe, la Russie et même jusqu’en Amérique. Fin de la visite sous la pluie et retour à l’Aigle où nous nous séchons à la chaleur du chauffage.

Avec un temps aussi désagréable, pas grand chose d’autre à faire que rouler. Nous retournons donc à Leknes où nous faisons le plein d’essence (60 litres à 9,05 NOK/litre, je préfère ne pas calculer le montant en $ canadien !). Puis nous passons sur Flakstadøy par un long tunnel sous marin (un autre gros 65 NOK…). Ici aussi de beaux paysages côtiers sont noyés dans la pluie, la brume et les nuages qui cachent les hauteurs des montagnes.

Nous faisons le détour jusqu’à Nusfjord, un adorable petit port de pêche où, tout au bout d’un fjord miniature et tout autour d’un quai aux planches délavées sont disposés en fer à cheval de beaux rorbuer rouges.
La route vers Nusfjord
La route vers Nusfjord

Le petit
                port de pêche de Nusfjord
Le petit port de pêche de Nusfjord
« Juste le rouge des maisons et les cris des mouettes » (Le Routard).


Le petit port de
        pêche de Nusfjord
Juliette sur le quai du petit port de Nusfjord

Le
        petit port de pêche de Nusfjord
Dans le  port de pêche de Nusfjord

Nusfjord
Nusfjord

D’autres villages ensuite laissent deviner de belles plages de sable blanc (Flakstad, Ramberg) mais le mauvais temps les masque presque totalement.

Vikten
Vikten
Nous faisons quand même le détour vers la glass-hytta (atelier de souffleur de verre) de Vikten dont les productions ne nous emballent guère mais le travail des deux verriers, toujours aussi fascinant lorsque se façonne la matière en fusion, et la chaleur rayonnée par le four, nous retiennent un bon moment.

Nous passons enfin sur Roskenesøya, la dernière grande île de l’archipel des Lofoten, par un long pont suspendu et suivons un moment la route serpentant sur une plate-forme herbeuse semée de gros rochers. Elle est coincée entre le rivage et le flanc à pic de la montagne dure et désertique dont le roc noirâtre disparaît dans le nuage blanc loin au-dessus de nos têtes.

Juste après le beau village typique d’Hamnøy, apparaît le site fameux et pittoresque de Reine dont les quais ourlés de rorbuer rouges et surmontés des maisons pastel des pêcheurs bordent les circonvolutions basses d’un fjord, encadré par de hautes falaises à pic.

Reine vu du
        ciel
Reine vu du ciel

Reine
Reine

Moskenes vu du ciel
Moskenes vu du ciel

Moskenes
Moskenes

Sorvagen
Sorvagen

Tind
Tind

Passant Moskenes sans grande originalité, nous arrivons enfin à Å, un autre port pittoresque où nous  repérons le Musée du stockfish (la morue) puis allons faire une balade sur le promontoire au-delà du village, là où la route s’arrête. On y aperçoit les dernières îles les plus méridionales de l’archipel des Lofoten : Mosken, Vaerøy et Røst qui se silhouettent à peine dans la brume bleue du soir. Coucher sur le grand parking au-dessus des maisons. Crépuscule
                sur Å
Crépuscule sur Å

Juliette prend la pose à l'entrée de Å
Juliette prend la pose à l'entrée de Å

Vendredi 24 juillet 1998 : de Å à MOSKENES (6 km)

Vue aérienne de Å
Vue aérienne de Å

Å et son Musée de la pêche
Å et son Musée de la pêche



Lever tard pour descendre dans le village à 11:30. Nous découvrons là un autre charmant village de pêcheurs avec ses rorbuer rouge foncé, ses petites maisons blanches, ses quais de bois délavé où piaillent les mouettes rieuses et chicaneuses, et au bord desquels sont amarrées quelques barques colorées.
Les
                rorbuers du port de Å
Les rorbuer du port de Å

Logo-du-Musee-de-la-morue_cabillaud de A La visite du petit musée, installé dans l’ancienne usine de transformation du poisson maintenant désaffectée, s’avère fort intéressante, les anciens outils et appareils ayant été soigneusement préservés et bien présentés, assortis de commentaires en français clairs et circonstanciés. Ils expliquent sans fioritures ni détails inutiles les opérations dans leur ordre chronologique. Accueil charmant du fondateur-conservateur-gardien-guide polyglotte qui pratique aussi bien l’italien, l’anglais, l’allemand et le français que son norvégien maternel.

En quittant le vieux bâtiment de bois rouge et blanc, nous allons faire un tour sur les quais pittoresques avec ses rorbuers typiques sur pilotis et ses barques environnées de mouettes qui piaillent et crient.

Puis nous regagnons tranquillement le stationnement en zigzaguant entre les authentiques et parfois jolies maisons de pêcheurs ou de capitaines dispersées parmi les rochers affleurant l’herbe rase.

L’une d’elles, transformée en café/pension, me paraît particulièrement attirante avec sa charpente en partie extérieure et sa véranda vitrée en bois découpé. Maison blanche de capitaine à Å
Maison blanche de capitaine à Å

Jean-Paul en
        quittante Å
Jean-Paul en quittant Å

Sorvagen
Sorvagen dans son anse

Nous reprenons ensuite la route pour aller faire le tour du lac surmontant Sorvagen, une agréable balade d’une heure dans la nature qui nous fera patienter avant de prendre à 16:30 le traversier de Moskenes à Bødo. Vaste paysage de montagnes, cascades et fleurs sauvages dans ce qui ressemblerait presque à un parc urbain dans une municipalité plus méridionale. Encore 2 kilomètres et, à 15:30, nous sommes au bout de la longue file d’attente sur la route menant au quai de Moskenes.

Moskenes; au fond le quai du ferry
Moskenes; au fond le quai du ferry
 Le quai du
        ferry à Moskenes...
Le quai d'embarquement de Moskenes

Nous ratons évidemment le premier bateau de 16:30 et sommes le 4ème véhicule en surplus pour celui de 17:45. Le prochain traversier pour Bødo (4 heures de navigation) partira à 22:45… Nous décidons alors de rester dans la ligne pour garder notre priorité mais embarquerons plutôt demain matin à 7:00 pour profiter d’une bonne nuit sur le quai dans les couchettes de l’Aigle. Petite balade et bain de soleil sur le promontoire derrière l’usine à poisson très moderne inutilisée l’été, courrier et couture, petits bricolages nous occupent jusqu’au souper puis au coucher à 22:00 pour une excellente nuit avec mes bouchons auriculaires.



6. Retour à travers la NORVÈGE



Samedi 25 juillet 1998 : de MOSKENES à GRONG (526 km)

En
              quittant Moskenes
En quittant Moskenes
Tôt levés à 6:00, nous embarquons comme prévu à 7:00. Nous prendrons notre douche plus tard car notre court trajet hier soir n’a pas suffi à réchauffer le réservoir d’eau chaude. Le temps superbe nous permet de profiter au maximum du spectacle des îles s’amenuisant puis bleuissant dans le lointain au fur et à mesure que nous nous rapprochons du continent. Sentiment de nostalgie : reverrai-je jamais ces paysages splendides ? Il faudrait y venir directement, sans prendre tout le temps que nous avons consacré aux visites et détours en cours de route, surtout avec le temps déplorable que nous avons essuyé.

Sur le
              pont du traversier Juliette prend le soleil
Sur le pont du traversier Juliette prend le soleil
Sur le pont du
              traversier Juliette prend le soleil
Sur le pont du traversier

Adieu les
        Lofoten !
Adieu les Lofoten !

Traversée sans problème, à part un vent assez froid qui nous obliger bientôt à battre en retraite dans le « salong ». Le soleil devient plus timide et le ciel s’ennuage progressivement lorsque nous abordons à Bødo vers 11:00.

Comme la ville toute neuve après sa destruction par les troupes allemandes en 1945 ne présente aucun intérêt particulier, nous prenons aussitôt la direction de  Fauske. Après quelques superbes panoramas sur le Staltfjorden, nous rejoignons la E 6 à Fauske et quittons la mer à Rognan. D’abord route de vallée verdoyante au milieu de cultures puis de forêts de pins touffues, la E 6 monte longuement sur le plateau semi-désertique entourant le Polarssirkelen (Cercle arctique).

Nous allons jusqu’au monument de rigueur, Juliette érige un petit cairn, nous achetons deux écussons souvenirs (très chers) en parcourant la galerie marchande d’un parfait mauvais goût

Juliette et Jean-Paul prennent la pose devant le
              monument du Polarssirkelen
Juliette et Jean-Paul prennent la pose
devant le monument du Polarssirkelen
Juliette et son mini-cairn
Juliette et son mini-cairn

L’environnement redevient plus clément en redescendant vers la vallée de la Ranelva jusqu’à Mo I Rana. C’est une petite ville quelconque où je me contente de faire le plein d’essence et achète un litre d’huile (42 NOK, le prix d’un bidon de 5 l en France ou d’une vidange complète avec filtre au Canada !). Belle route  de fjord ensuite d’où l’on aperçoit la ligne de chemin de fer qui emprunte une suite de tunnels perçant les bancs rocheux perpendiculaires à l’eau, avant de suivre à nouveau les vallées longeant des rivières torrentueuses.
Dans la
          toundra fleurie
Dans la toundra fleurie

Une autre longue montée nous hisse sur le Luttindan d’où l’on jouit d’une vue grandiose sur une série de lacs scintillant dans la lumière du soir perçant sous les nuages gris de plus en plus épais. Depuis le
              Luttindan
Depuis le Luttindan en soirée, les lacs


Plage sur l'Ømmervatnet
La plage sur l'Ømmervatnet
En redescendant dans la vallée, nous longeons le grand Ømmervatnet où je repère la petite plage où nous avions passé un bel après-midi ensoleillé il y a dix ans et le petit bois de bouleau où nous étions resté coincés au moment de repartir…

Bivouac sur
        l'Ømmervatnet
Ømmervatnet et son bivouac

Photos, plans vidéo, nous poursuivons vers le sud, Juliette dormant sur la couchette de la dînette pour compléter sa nuit d’hier trop courte. Les paysages sont très boisés, la route vagabonde un peu en suivant le cours des rivières et torrents qui, de temps à autre, se précipitent en rapides, chutes ou cascades parfois impressionnantes de volume ou de hauteur.

Nous roulons longuement dans le soir qui descend et sous les averses de plus en plus fréquentes en suivant la rivière Namsen (vallée Nam-Dalen). Finalement, étape à la nuit tombante (il est 22:00) sur une aire de pique-nique à Fiskumfossen, devant le superbe panorama d’une courbe de la rivière sur fond de collines boisées, 15 kilomètres avant Grong.

Dimanche 26 juillet 1998 : de GRONG à OSLO (765 km)

Nous repartons vers 9:00, sous la pluie qui n’a pas cessé de la nuit, après un coup d’œil au vaste panorama de la grande courbe de la Namsen. Nous sommes bientôt à Grong, un autre village perdu sans grande personnalité, propre, net, où tout semble neuf et fonctionnel. Nous longeons le grand lac Snåsavatnet, passons Stenkjer où nous rattrapons l’itinéraire déjà parcouru à l’aller.


Un détour vers Stiklestad s’impose pour voir le site de la bataille où mourut le roi Saint Olav. C’est aujourd’hui sa fête et nous apprenons devant le bâtiment où elle doit se dérouler qu’on y présentera cet après-midi le « Jeu de St-Olav », un grandiose spectacle mi-théâtre mi-opéra. Une petite procession sous imperméables et parapluies suivant une croix et un grand drapeau norvégien passe devant nous pour aller célébrer la messe sur les lieux du drame. Nous sommes tentés d’attendre 15:00 pour assister au spectacle, mais le mauvais temps persistant et le fait que tout le texte soit en norvégien nous en dissuadent.

Nous reprenons donc notre route vers le sud pour entrer dès 13:00 à Trondheim. Nous nous rendons directement à la Maison des étudiants où Juliette avait repéré à l’aller un poste Internet sur lequel elle va prendre son courrier électronique. Après déjeuner nous reprenons notre descente vers le sud en veillant à ne pas dépasser les 80 km/h afin de maintenir la consommation d’essence en dessous des 15 l/100 km.

La E 6 est excellente et a été redressée au prix de travaux de voirie considérables si bien que le trajet se fait sans fatigue dans des paysages intérieurs très boisés et peu habités. On suit à nouveau le cours de rivières écumantes coupées de chutes et de rapides spectaculaires, entrecoupés de lacs paisibles
Lac de Rondane
Lac de Rondane

Dovrefjell
Dovrefjell en automne

Lac Velfjord
Lac Velfjord

A Ulsberg nous quittons la grande E 6 pour emprunter la E 3 un peu plus étroite, du moins au début, mais surtout beaucoup plus sauvage : les hameaux se font rares, les postes d’essence sont très espacés – et le carburant très cher ! – les moustiques beaucoup plus agressifs lors de nos rares pauses relax. Nous suivons le cours de la Glomma, la plus longue rivière de Norvège qui s’étale largement dans sa vallée sinueuse. Juliette reprend le volant à 17:00. Vers 19:30 nous arrivons à Elverum où nous appelons Monique et Mathieu à Montréal; Mathieu a retrouvé son ordinateur et son boulot semble-t-il avec beaucoup de plaisir, et Monique rentrée hier a déjà une longue liste de consignes pour notre retour…

Nous continuons à descendre vers Oslo dans le soir qui tombe en retrouvant une circulation beaucoup plus dense à partir de Stange où nous rattrapons la E 6. La route suit longuement le Lac Mjøsa. Bref arrêt à Jessheim pour prendre juste assez d’essence pour se rendre jusqu’à Oslo. Il est 21:20 lorsque enfin nous pénétrons en ville. Après le plein d’essence sur une station où le litre de bensin est à 7,85 NOK au lieu des 9,05 cet après-midi, nous enfilons une suite d’autoroutes et de tunnels qui s’enchaînent vers l’ouest pour tâcher de gagner Holmenkollen où je désire passer la nuit. Nous nous égarons un peu, sortons de la voie express au jugé et nous dirigeons à vue vers le tremplin de saut à ski illuminé. La petite route qui monte sur la colline dominant Oslo nous fait traverser un riche quartier résidentiel aux maisons cossues entourées de jolis jardins qui nous rappelle un peu Westmount.

Oslo depuis la tour Tyrann
Façade maritime d'Oslo depuis la tour Tyrann

Nous achevons de grimper jusqu’au pied de la tour Tryvann mais ne pouvant accéder à son esplanade en voiture, nous allons nous installer sur un vaste terrain destiné au stationnement des skieurs et nous y endormons bientôt en compagnie de deux autres petits fourgons VW venus y chercher eux aussi silence et tranquillité.


L'arrière de l'Aigle bien rangé dans le stationnement au
        pied de la Tour Tryvann
L'arrière de l'Aigle bien rangé dans le stationnement au pied de la Tour Tryvann

Lundi 27 juillet 1998 : OSLO (18 km)

Fatigués par notre longue route d’hier, nous faisons la grasse matinée, d’autant plus qu’on n’entend presque aucun bruit sur notre grand terrain vide. À midi nous démarrons pour descendre vers le centre ville avec l’intention de visiter le Parc Vigeland, la Galerie nationale et le Musée Munch.

Oslo : le
              Grand Portail du parc Vigeland
Oslo : le Grand Portail du parc Vigeland
Passant tout près du parc Vigeland, nous allons stationner à l’arrière et nous lançons dans son exploration. Le jardin est soigné mais ce sont surtout les centaines de statues laissées par le grand sculpteur norvégien qui attirent l’attention et les milliers de touristes en groupes organisés. Leurs troupes grégaires font leur petit circuit en suivant leur guide disert, prennent la pose devant quelques groupes de statues sans trop les voir puis repartent en laissant la place aux suivants… Pourtant ce sont des œuvres puissantes et émouvantes qui illustrent le cycle de la vie, de l’enfance à la vieillesse, et méritent plus d'attention.

Vigeland : Non
Vigeland : "Non!"
Vigeland : L'Enlèvement
Vigeland : L'Enlèvement



  Vigeland : la parc depuis l'entrée
Vigeland : la parc depuis l'entrée
Vigeland
              : la fontaine
Vigeland : la fontaine et la colonne

Vigeland :
        fleurs et fontaine
Vigeland : fleurs et fontaine

Vigeland : bronze de la fontaine
Vigeland : bronze de la fontaine
Vigeland : la colonne depuis la fontaine
Vigeland : la colonne depuis la fontaine

Vigeland
              : la colonne à travers les grilles du portail
Vigeland : la colonne à travers les grilles du portail
Vigeland
              : la grande colonne centrale
Vigeland : la grande colonne centrale

Vigeland : les
              adolescents
Vigeland : les Adolescents
Vigeland : les adolescents

Vigeland : les
              Vieilles 
Vigeland : les Vieilles
 Vigeland : le couple adulte
Vigeland : le Couple adulte

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Vigeland : Vieux et trois enfants
 Vigeland-vieux-et-trois-enfants
Vigeland : Vieux et trois enfants

Vigeland-couple-de-femmes-tete-en-bas
Vigeland: couple de femmes tête en bas
Vigeland : couple
Vigeland : couple

L’artiste a fixé dans la pierre ou le bronze des groupes de personnages nus en interaction et leur a fait exprimer les émotions les plus diverses : plaisir du jeu, tendresse, agressivité, amour, haine, etc. Tous les âges et phases de la vie s’y retrouvent : enfants, couples, triades ou vieillards. Après la grande colonne où les corps s’entassent et s’enlacent sur une dizaine de mètres de hauteur, entourée d’une trentaine de groupes en granit, on descend vers la grande fontaine aux puissants personnages de bronze puis on passe le pont dont les deux cotés sont garnis d’une autre série de figures de bronze. Nous finissons par l’entrée du parc aux grandes grilles de fer forgé de style Arts Déco, très monumentales et décoratives. Retour à l’Aigle en parcourant lentement le parc maintenant connu et en repérant encore quelques perspectives inattendues ou en détaillant quelques figures entrevues ou ignorées à l’aller.

Vigeland : le Vieux et l'Enfant
Vigeland : le Vieux et l'Enfant
Vigeland-La-victoire
Vigeland : Victoire !


Déjeuner (il est maintenant 15:30) dans l’Aigle devant la porte du parc puis descente en ville jusqu’au terminal de la Color Line pour vérifier la possibilité d’avancer notre date de départ si possible sans aller jusqu’à Larvik. Juliette va parlementer en anglais avec l’employée et obtient plus qu’espéré : nous pourrons embarquer dès ce soir à Oslo à 19:30 pour arriver demain matin à Hirtshals (Danemark) à 7:00, moyennant un supplément de 280 NOK pour une cabine à deux couchettes…


Décision vite prise : nous abandonnons les autres visites prévues à Oslo pour une autre occasion ! L’heure qui reste avant le début de l’embarquement  (il est 17:15) est trop brève pour retourner au centre ville, nous bricolons donc un peu, faisons la vaisselle et quelques petits lavages. L’embarquement commence dès 18:30 et, à 19:35, notre navire « Color Festival » commence la traversée de l’Oslofjorden. Fort beau spectacle que nous observons un moment depuis le pont supérieur jusqu’à ce que la fraîcheur du soir nous ramène dans notre petite cabine. Souper de conserves tirées de la cambuse de l’Aigle, puis écriture du journal et coucher à 23:30. Juliette sur-le-ferry-en-quittant Oslo
Juliette quitte Oslo sur le pont du Color Festival





7. Du DANEMARK à PARIS



Mardi 28 juillet 1998 : de HIRTSHALS à RIBE (418 km)

Nuit relativement silencieuse - malgré le ronron des machines du navire – et confortable, quoique je préfère le moelleux du matelas de l’Aigle. En revanche nous apprécions tous deux le flot inépuisable de la douche et la stabilité de sa température… Réveillés un peu tôt par l’interphone à 6:00, nous nous payons un mauvais café dans une machine distributrice avec nos toutes dernières couronnes norvégiennes et nous précipitons dans la cale où notre Aigle est le premier derrière la porte de débarquement. À 7:45 les routes du Danemark s’ouvrent devant nous. Nous prenons aussitôt la direction du sud en visant la côte ouest mais, faute de carte, nous retrouvons bientôt à Alborg… Arrêt pour acheter du pain (nous arrivons au bout de nos petits pains grillés) et obtenir une carte routière de l’Office du tourisme. Nous nous repérons alors beaucoup mieux et rattrapons à travers la campagne très riche - moissons dans les grands champs dorés, troupeaux de vaches nombreuses pâturant l’herbe drue, grosses fermes carrées dispersées dans les terres – la côte près de Thisted. Au bout d’une longue dune marécageuse, un bac nous fait traverser le goulet de Thyborøn, à l’extrémité du fjord, où nous allons flâner un peu. Près des bassins du port de pêche, on s’affaire à réparer, modifier, ressouder ou repeindre plusieurs bateaux, quand ce n’est pas à recoudre ou recâbler de longs filets en nylon vert.

Puis, en nous baladant dans le village parmi les petites maisons des pêcheurs, nous retrouvons, en arrière des batteries de bunkers allemands dispersés sur la plage, la « maison aux coquillages » dont les murs sont tout garnis de motifs formés de différentes écailles, naturelles ou peintes… Juliette apprécie peu le genre, d’autant plus qu’on en a fait une attraction touristique payante appelant cars de touristes embrigadés et photographies en série… Thyborøn et ses façades décorées de coquillages
Thyborøn et ses façades décorées de coquillages

Bateaux
              bleus de Thorsminde
Bateau bleu de Thorsminde
Nous longeons ensuite le cordon littoral qui borde presque toute la côte ouest du Jutland. Juliette prend le relais au volant, nous faisons un seul arrêt à Thorsminde pour admirer les bateaux bleus amarrés au quai du port de pêche et faire le plein d’eau. La route s’abrite en arrière de la dune côtière piquetée de chalets de vacanciers. Du côté des terres, des marais incertains plus ou moins exploités portent quelques beaux exemplaires de fermes typiques dont les bâtiments en carré couverts de chaume entourent une cour intérieure pavée entièrement close.

Le temps se couvre progressivement et les gouttes finissent par tomber de plus en plus fréquemment. Pas question d’aller bronzer sur les immenses plages de la Mer du Nord comme nous l’avions espéré. Nous passons le fjord de Ringkoping et, suivant toujours la route 11, arrivons à Varde où nous nous payons un petit tour à pied dans les rues du centre assez bien remises en valeur. Elles montrent un mélange assez heureux de maisons souvent fort différentes en style, en âge et en richesse de décor mais qui ont en commun d’être joliment restaurées ou entretenues et profitent d’un cadre urbain soigné (rues pavées, lampadaires, boites à fleurs et parterres, etc.).

Nous faisons encore une cinquantaine de kilomètres à travers la campagne très riche de l’intérieur (troupeaux de bovins à l’engrais dans les prairies) pour arriver à la nuit tombante à Ribe, la vieille cité viking. Souper, petite marche jusqu’au parvis de la cathédrale et bivouac sur le stationnement près du quai sur la rivière. Fatigués par notre longue journée, nous regardons rapidement l’itinéraire de demain pour traverser l’Allemagne du Nord et rejoindre si possible Amsterdam aux Pays-Bas. Nous nous endormons enfin sous la pluie battante. Arrivée à Ribe
              en soirée
Arrivée à Ribe en soirée

Vue aérienne
              de Ribe
Vue aérienne de Ribe
Quai de Ribe
Quai et port de Ribe

Quai
        de Ribe
Le vieux quai de Ribe au bord de la rivière

Le poteau sur le quai de
      Ribe
Le poteau sur le quai de Ribebr>
Dans les vieilles
              rues de Ribe
Dans les vieilles rues de Ribe
Ruelle de Ribe
Ruelle de Ribe

Mercredi 29 juillet 1998 : de RIBE (Danemark) à GRONINGEN (Pays-Bas) (562 km)

Ribe
Ribe
Levés à 9:00, nous partons aussitôt en balade dans les ruelles de la vieille ville de Ribe en franchissant la passerelle sur la rivière. Le soleil est au rendez-vous, favorisant l’animation qui règne dans les rues commerçantes et piétonnières. Ici les voitures sont bannies du pavé entourant la cathédrale, si bien qu’on peut déambuler tout à loisir en admirant les antiques façades à colombages et les boutiques old fashion, en se laissant imprégner par l’ambiance provinciale, un peu surannée et soigneusement cultivée par les habitants.

Maisons basses en brique ou en bois peintes de couleurs pastel, dont l’alignement semble incertain le long du vieux pavé bosselé, doubles fenêtres aux vitres irrégulières décorées de bouquets de fleurs, de plantes grasses ou d’objets anciens à moitié voilés par des rideaux de dentelle, vieilles enseignes peintes sur panneau de bois ou en fer forgé, fleurs en cascades débordant des corbeilles ou des bacs dispersés un peu partout…

Nous flânons ainsi jusqu’à la poste où nous avons la surprise de découvrir un ordinateur mis à la disposition du public pour accéder à l’Internet et au courrier électronique. Ici environnement ancien et technologies d’avant-garde font bon ménage ! Un peu plus loin, au détour de la Sct Nokolai Gade nous tombons sur le Vikinger Ribe, un beau musée tout neuf consacré à la Ribe viking. Juliette manifeste peu d’intérêt pour les reliques qui y sont présentées, alors que je crains d’y passer trop de temps si je me laisse entraîner dans ses salles.

Vitrail moderne dans l'église Ste Catherine
Vitrail moderne dans l'église Ste Catherine
Nous nous contentons de quelques achats à sa boutique pour revenir ensuite vers le centre et vers l’église Ste-Catherine dont nous apercevons rapidement l’intérieur très sobre. Autour de son parvis quelques jolis bâtiments anciens abritent une ancienne école et les salles de la manécanterie.

Un autre dédale de ruelles entre de belles maisons anciennes nous ramène à la cathédrale dont les murs massifs et sévères intègrent les éléments successifs apportés par les siècles. Cathédrale de Ribe
Cathédrale de Ribe

Nef
              de la cathédrale de Ribe
Nef de la cathédrale de Ribe
Orgues de la cathédrale de Ribe
Orgues de la cathédrale de Ribe

Là aussi la grande nef austère impose le respect plus que l’admiration esthétique sinon pour son magnifique buffet d’orgue. En revanche l’escalade de la tour s’impose. Elle permet  d’admirer d’abord le mécanisme antique de son horloge qui bat la seconde, et surtout, depuis la petite terrasse au-dessus des grosses cloches de bronze, un charmant panorama circulaire sur les ruelles sinueuses délimitées par les toits de tuiles brunes et rouges au-dessous de nous, les pentes des vieilles charpentes garnies de lucarnes et de chiens assis, et enfin la campagne marécageuse fort bien préservée alentour.

Les vieilles rues de
        Ribe
Les vieilles rues de Ribe

Les jolies portes du Vieux Ribe
Les jolies portes du Vieux Ribe

De retour près du quai du petit port fluvial, nous tombons sur un marché aux puces où Juliette farfouille un bon moment avant de jeter son dévolu sur un abominable thermomètre recouvert de coquillages et un pichet « entre deux guerres » qui compléteront avec bonheur sa collection de « quétaineries ». Nous tâchons d’épuiser en cartes postales le reliquat de notre monnaie danoise mais il nous reste toujours quelques couronnes. Une dizaine de kilomètres au sud et nous sommes à Tønder : la petite ville endormie étalée autour de son centre ancien offre peu à voir, au moins cet arrêt me permet-il de consacrer nos dernières pièces à l’achat d’une boite de fruits en boite au Fakta (épicerie discount locale).

Devant le grand pare-brise de l’Aigle se déroule le paysage plat intensivement cultivé du Schleswig-Holstein. À perte de vue s’étalent des prairies au vert intense sur lesquelles flotte l’insinuante odeur du fumier épandu. La frontière allemande finit par arriver sans apporter aucun changement au paysage. Nous amorçons un détour vers Neukirchen dans l’intention de visiter le musée consacré au peintre expressionniste Nolde mais devons renoncer à trouver le village, faute de carte. De toute façon, vu l’heure tardive (16:00), le musée sera certainement fermé à notre arrivée… Il ne nous reste plus qu’à improviser un pique-nique en pleins champs car nous sommes loin du petit déjeuner. Une interminable route secondaire nous fait rattraper l’autoroute à Heide, à 98 km de Hambourg. Dans les gras pâturages broutent les grosses vaches laitières du Schleswig… Le ciel se couvre progressivement et bientôt la pluie se met de la partie. Juliette prend le volant sur l’autoroute et nous mène à 80 km/h jusqu’à Bremen que nous traversons lorsque la nuit tombe. Plus loin la pluie et l’obscurité qui descend rapidement masquent les voisinages d’Oldenburg, et il fait complètement nuit lorsque nous passons aux Pays-Bas à Niewweschans. Je reprends la volant jusqu’à Groningen où je me dirige au jugé dans l’obscurité vers le centre de la vieille ville pour finir par trouver un bivouac tranquille sur le bord du canal.

Jeudi 30 juillet 1998 : de GRONINGEN à AMSTERDAM (208 km)

Après un bref tour au centre de Groningen qui mériterait une vraie visite à pied si nous disposions de plus de temps, Juliette me guide jusqu’à la sortie de la ville pour retrouver l’autoroute qui file vers le sud-ouest. Pluie et rafales d’un vent assez fort nous fouettent lorsque nous traversons la grande étendue d’eau de l’Ijsselmeer au niveau du Noord-Oost-Polder : la terre est absolument plate, gorgée d’eau, occupée par de nombreux troupeaux de moutons et de bovins éparpillés dans les prairies intensément vertes. D’immenses rangées d’éoliennes (j’en compte 3 lignes de 25 qui se succèdent) bordent le rivage de la mer intérieure. Le mouvement lent mais inexorable de ces grands moulins à vent qui brassent l’air avec ensemble me laisse une étrange impression de puissance contrôlée.

À 12:30 nous entrons dans Amsterdam et allons stationner près du Rijkmuseum après l’avoir confondu avec le Tropen Museum (Musée des Tropiques) construit dans le même lourd style architectural fin de siècle. À 15:00 nous entreprenons la visite du musée, d’abord par quelques salles consacrées aux arts décoratifs (art sacré, céramiques, sculptures, etc.) puis surtout par celles qui présentent la peinture hollandaise des XVIIème et XVIIIème siècles. Bien sûr les Rembrandt occupent la première place, à commencer par la fameuse « Ronde de nuit », à côté de très beaux portraits et de quelques scènes bibliques, mais quelques autres peintres retiennent aussi notre attention comme Franz Hals et plusieurs paysagistes ou peintres de scènes paysannes. Malheureusement deux heures sont vraiment insuffisantes pour seulement apercevoir toutes les richesses du musée, et nous devons abandonner son parquet à sa fermeture de 17:00. Dès lors plus question de faire un tour au Musée Van Gogh comme je l’avais espéré.

Une péniche
              logement à Amsterdam
Une péniche logement à Amsterdam
Canal et
              bicyclettes à Amsterdam
Canal et bicyclettes  à Amsterdam

Nous regagnons l’Aigle pour nous habiller plus chaudement et décidons alors de faire un grand tour du centre ville en nous aidant de la carte découpée dans notre vieux Guide Michelin. Nous repérons en passant les embarcadères de quelques bateaux mouches pour une éventuelle « croisière aux chandelles » sur les canaux. Mais le temps se gâte et c’est bientôt sous la pluie fine puis sous la brusque averse d’un orage que nous longeons les quais si pittoresques. Péniches logement sur les canaux d'Amsterdam
Péniches-logement sur les canaux d'Amsterdam

De hautes façades baroques, souvent fort simples mais parfois très riches et ornées, bordent les canaux comme sur le Herrengraft. Une autre ondée soudaine nous oblige à nous abriter dans la grande galerie marchande du centre ville où nous traversons le magasin Virgin (choix de CD à profusion, surtout en jazz, mais prix prohibitif !). Un peu plus loin, après la Grande Place, nous devons encore nous abriter dans l’entrée d’un coffee shop fleurant la marijuana à plein nez… comme tous les autres qui bordent la rue que nous parcourons jusqu’au bout. Ambiance jeune, très dynamique, relaxe, beaucoup de créativité se reflétant dans les vitrines et dans les décors des vieux appartements  aperçus par les larges et hautes fenêtres. Les gens semblent très décontractés et Juliette repère les touristes à leur « uniforme » voyant et à leur absence de soucis de se fondre dans le paysage ici très social.

L'affichette rédigée par Juliette
L'affichette rédigée par Juliette
Écœurés par la pluie et par le froid qui s’ensuit avec la tombée du jour, nous décidons d’abréger notre balade et rentrons au plus court. Malgré notre hâte nous sommes trempés et, comble de malchance, c’est pour constater en arrivant que la serrure de la porte à glissière de l’Aigle a été forcée. Heureusement le loquet a tenu et nous n’aurons pas en plus à déplorer un cambriolage. J’en serai quitte pour changer le barillet perforé à notre retour en France.

Comme Juliette tient absolument à visiter le Musée de l’Institut du Théâtre, nous déménageons nos pénates pour aller nous installer sur un espace très étroit au bord du quai de Herrengraft, le pare-chocs avant surplombant l’eau et celui de l’arrière empiétant de 20 cm sur l’étroite rue pavée. Au moins ici nous serons tranquilles, sans craindre la circulation, et nous pourrons surveiller l’ouverture des portes du Musée demain matin. Nous nous endormons fatigués mais réchauffés et au sec vers 23:00, dans le magnifique environnement du plus beau quai d’Amsterdam.

Vendredi 31 juillet 1998 : d’AMSTERDAM à BRUXELLES (282 km)

L'Aigle au bivouac au bord du canal
L'Aigle au bivouac au bord du canal
Nous prolongeons à loisir une nuit très tranquille car les lieux sont paisibles bien qu’en plein centre et l’ouverture du musée tardive (11:00). Le temps s’est stabilisé : si le ciel reste gris, au moins la pluie a-t-elle cessé. Pendant que je profite de la vue sur le canal avant de remplacer le contacteur du voltmètre sur la centrale électrique, Juliette se dirige vers la grande maison patricienne et consacre près de deux heures à la visite des expositions et collections permanentes du Musée du Théâtre dont elle revient ravie. Nous sommes maintenant prêts à quitter Amsterdam après un dernier détour fort hasardeux jusqu’au cœur de la vieille ville.

Je veux y quérir des autocollants repérés hier soir dans une boutique de souvenirs où nous sommes entrés nous abriter d’une ondée. Les rues étroites, à sens uniques ou condamnées à la circulation automobile nous obligent à bien des détours mais nous finissons par arriver à nos fins. Il est presque 14:00 et grand temps de reprendre le chemin de la capitale belge. Grâce à l’habile pilotage de Juliette, nous sortons du labyrinthe du centre ville et gagnons le Ring (boulevard périphérique) puis l’autoroute  pour… tomber en panne d’essence après quelques kilomètres. Heureusement le jerrycan de secours est là, et nous repartons bientôt jusqu’à la prochaine station-service où je fais le plein. Surprise, malgré notre circulation urbaine, la consommation de l’Aigle continue à baisser puisqu’il n’a absorbé que 14,6 litres d’essence aux cent kilomètres depuis Hambourg. Tout un exploit, probablement imputable à notre vitesse maximale de 85 km/h.

Nous profitons de l’arrêt pour manger et remplir notre réservoir d’eau avant de reprendre la route du sud à notre train de sénateur. Long cheminement dans les terres basses de la Hollande, champs très verts, troupeaux de vaches, haies de peupliers ployés par le vent d’ouest continu qui ne rencontre aucun obstacle géographique, petites fermes laitières dispersées. Nul besoin de clôture ici, ce sont des petits canaux d’irrigation rectilignes qui entourent chaque herbage et empêchent les bestiaux de passer de l’un à l’autre ou de se rapprocher dangereusement de l’autoroute. On aperçoit parfois la silhouette d’un ancien moulin aux ailes immobiles ou celles d’un hameau noyé dans les arbres et groupé autour d’un clocher… Une erreur d’aiguillage dans un échangeur d’autoroute pendant que Juliette lit la documentation ramassée au musée me mène à Eindhoven, ce qui rallonge la – déjà - longue route nous conduisant jusqu’à Bruxelles où nous arrivons passé 18:30.

Nous ressortons les plans et cartes ramassés à l’aller pour nous diriger immédiatement vers la Rue de l’Étuve, juste au-dessus du fameux Manekenpis, où Juliette avait repéré une boutique qui vend des blasons et autocollants des pays qu’elle a visité en Afrique. Hélas, à cette heure tardive elle est fermée, nous serons quittes pour repasser demain. S’ensuit une longue promenade sur la Grande Place grouillante de touristes, puis dans le cœur  de la ville jusqu’à la Place de Brouckère, en chinant les boutiques de livres et de disques d’occase (peu de choix et prix beaucoup plus élevé qu’à Montréal) avant de remonter tranquillement vers le quartier des restaurants.

Nous aboutissons sur la Rue des Bouchers pour aller déguster chez Léon un plat de moules accompagnées de frites, tradition belge renommée à laquelle Juliette tenait absolument à sacrifier. L’estomac bien garni, un peu affolés par l’affluence des touristes qui se bousculent dans les rues étroites envahies par les terrasses des restaurants, nous regagnons la Grande Place bien plus magnifique encore maintenant que les façades baroques sont illuminées. Flânage extasié, puis retour jusqu’à l’Aigle non sans un arrêt prolongé devant les vitrines « kitsch au boute » du chapelier Elvis Pompilio que Juliette tient à filmer sous tous les angles. Nous décidons d’aller dormir près du Musée Horta à Saint-Gilles. Traversée facile de la ville où nous commençons à nous repérer, recherche un peu ardue de la Rue Américaine sur laquelle nous finissons par tomber malgré l’insuffisance de nos plans beaucoup trop peu détaillés, et bivouac sur une rue adjacente peu passante.

Samedi 1er août 1998 : de BRUXELLES à SENLIS (283 km)

Nuit effectivement paisible, tant du côté circulation automobile que digestion… Nous nous levons assez tard (9:30) mais c’est pour constater que le Musée n’ouvrira pas sa porte avant 14:00. Après un peu d’hésitation, nous décidons de retourner au centre ville pour quérir les autocollants dans la boutique fermée hier soir, puis nous remontons dans ce même quartier d’Ixcelle-St-Gilles pour une longue visite à une amie montréalaise que Juliette s’est faite lors de son voyage en Tanzanie et qui vient de s’installer à Bruxelles pour travailler chez Bayer. Elle est très sympathique, dynamique mais un peu désemparée par la solitude dans laquelle elle se trouve plongée si soudainement. Juliette lui offre le café dans l’Aigle et nous jasons longuement, jusqu’au moment de gagner la Rue Américaine repérée ce matin.

Façade de la maison Horta
Façade de la maison Horta
Balcon de la maison Horta
Balcon de la maison Horta

Détail de la balustrade de la maison Horta
Détail de la balustrade de la maison Horta
Maison Horta : le bel étage
Maison Horta : le «bel étage»

Bas de l'escalier de la maison Horta en 1898
Bas de l'escalier de la maison Horta en 1898
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Bruxelles : bas de l'escalier de la maison Horta

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Bruxelles : salle-à-manger de la maison Horta

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La salle à manger de la maison Horta au début du siècle

Salon
              de la maison Horta
Salon de la maison Horta
Palier de la maison Horta
Palier de la maison Horta

Cage d'escalier central
Cage d'escalier centrale de la maison Horta
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              size=Haut de la cage d'escalier formant puits de lumière

Nous stationnons juste devant la belle maison Art Nouveau que se fit construire Horta en 1898. Rapide déjeuner avant la visite dès l’ouverture à 14:00. La façade à elle seule mérite le détour avec ses structures de balcon et ses grilles rapportées en fer forgé. Autre originalité : la poutre d’acier apparente et intégrée à la maçonnerie qui sert de linteau au rez-de-chaussée. Il s’agit en fait de deux maisons accolées : au numéro 25 la résidence personnelle du grand architecte Victor Horta, au 23 ses bureaux et ateliers, tous deux dessinés avec le même soin et le même luxe de détails. Un puits de lumière central donnant sur l’escalier illumine cette maison très profonde et étroite (6,50 m). Horta a utilisé le fer pour structurer une architecture très légère et aérée, tout en valorisant partout les courbes d’inspiration végétale, les couleurs chaudes, un mobilier de bois clair aux arcs tendus, des tapisseries où l’on retrouve William Morris ou Liberty… L’ensemble donne une grande impression de chaleur et de confort tout en favorisant une organisation très fonctionnelle de l’espace selon les habitudes de vie de l’occupant. Bref une autre visite très agréable dont je regrette que Monique ne profite pas elle aussi, tant elle est complémentaire à nos découvertes de Nancy et de Glasgow (C.R. McIntosch).

Il est quasiment 16:00 lorsque nous quittons Bruxelles avec l’intention de rallier Paris ce soir (300 km). Mais dès que nous quittons les autoroutes belges pour emprunter les nationales françaises, c’est l’embrouille, la confusion, les déviations sur de minuscules routes de campagnes non signalisées… Après une heure de zigonage entre Valenciennes et Cambrais (25 km…), nous finissons par rattraper la N 17 et là nous retrouvons notre rythme de croisière à 80 km/h pour traverser les plaines interminables du nord de la France sous la bruine, le brouillard et les averses impromptues. Nous arrêtons à la nuit tombante dans un lotissement peu avant Senlis, sur une impasse entre deux maisons donnant sur les champs. Calme assuré malgré les quelques trains passant à distance.

Dimanche 2 août 1998 : de SENLIS à MONTMARTRE (82 km)

Il pleut durant la nuit mais c’est bien plus le réveil au « chant » des coqs élevés par nos voisins banlieusards… dès 5:15 qui nous dérange ! Douche, déjeuner, nous sommes sur la route vers 10:30 et arrivons à Vincennes chez Annie et Yves à 12:00, après un impeccable guidage de Juliette jusqu’à un Périphérique assez fluide. La voyageuse retrouve ses bagages et entreprend de sortir de l’Aigle tout ce qui lui appartient pour confectionner des ballots manipulables, tout en respectant les limites de poids acceptables dans l’avion. Elle me fait faire un rapide tour de la maison qui m’en fait apprécier tout le charme et le goût avec lequel Annie et Yves l’on aménagée et décorée. Deux heures plus tard et après une autre grosse averse orageuse, nous sommes prêts à nous diriger vers le centre de Paris pour examiner la documentation de la Maison de l’Expatrié.

Depuis le
              pont, les Invalides
Depuis le pont, les Invalides
Malgré les annonces, la boutique est fermée, ce qui donne à Juliette une autre occasion de sacrer contre les Français et leur organisation pour le moins bizarre… Nous atterrissons tout près, Boulevard des Invalides : la circulation est aisée mais partout se presse la foule de touristes. Monique, appelée à Montréal, nous fait ses dernières commandes dont des exemplaires d’affiches de Dali repérées à l’Espace Dali sur la rue Poulbot à Montmartre. Il est 18:00, donc trop tard pour visiter le Musée Rodin à deux pas.

Il ne nous reste plus qu’à traverser Paris pour aller passer la nuit sur la Butte et être sur place à l’ouverture de la boutique du musée demain matin. Malgré quelques détours occasionnés par l’arrivée du Tour de France qui bloque les Champs Élysées, le bon guidage de Juliette la carte à la main nous mène sur la rue Lamarck, en haut de la rue Caulaincourt. Nous y stationnons juste au pied d’un des escaliers montant à l’esplanade de la basilique du Sacré-Cœur.

Lundi 3 août 1998 : de MONTMARTRE à CAEN (309 km)

Nuit rendue très bruyante par le défilé des voitures escaladant la butte et par les touristes qui dévalent la rue après souper et veillée bien arrosés dans les nombreux restaurants et terrasses de la Place du Tertre. Nous dormons assez bien cependant grâce à nos bouchons auriculaires et sommes devant l’entrée de l’Espace Dali dès son ouverture à 10:00. Il ne reste malheureusement plus d’affiches SNCF d’Auvergne et les deux autres disponibles ne nous emballent guère. Nous traversons à nouveau les petites rues encombrées de boutiques et de restaurants ainsi que la Place du Tertre où déjà affluent les touristes et vers laquelle se dirigent les « artistes », chevalet, boite de couleurs et tabouret sous le bras.
En dévalant
              les escaliers de Monmartre
En dévalant les escaliers de Monmartre

Aujourd’hui encore il fait très beau et la circulation n’est pas trop dense lorsque Juliette me guide jusqu’à La Madeleine et la Rue Royale pour aller chercher les assiettes de porcelaine de Limoges commandées par Monique dans la chic boutique de Bernardaud. Nous attendons un peu leur emballage soigné, puis traversons le Pont de la Concorde pour permettre à Juliette d’aller à nouveau consulter la documentation de la Maison de l’Expatrié, ouverte cette fois-ci. Le temps passe tandis que la demoiselle s’attarde à discuter avec le bibliothécaire puis avec le directeur, et il est passé 12:30 lorsque nous prenons la direction du nord et de la Porte de La Chapelle pour gagner l’Aéroport Charles-de-Gaulle.

Longue traversée de Paris par les grandes avenues et boulevards en zigzaguant entre les sens interdits pas toujours indiqués sur notre plan déjà ancien. Périphérique, autoroute jusqu’à l’immense complexe de Roissypole où Juliette ne sait où me diriger, ayant omis de demander quelle aérogare utiliser en confirmant son vol… Je dois négocier avec un CRS peu amène un bref arrêt devant une porte du Terminal 1 pendant que ma fille file aux renseignements. Puis nous nous dirigeons vers le Terminal 2 où nous déjeunons sur la dépose-minute beaucoup moins fréquentée, avant qu’elle disparaisse dans le bâtiment chargée comme une mule avec sa table londonienne, son gros sac à dos rouge et le sac à documents de Mathieu bourré de livres, revues et autres souvenirs.

Je prends alors la direction de Caen d’abord par une suite d’autoroutes rapides jusqu’à Mantes, puis par la N 13 sur laquelle je fais mon petit bonhomme de chemin  tranquille à 80 km/h. Arrivée chez Maman vers 18:30 après 4 heures de route. Joyeux accueil, souper puis récit de notre voyage dans les pays du nord en feuilletant cartes postales et prospectus étalés sur la table.


Mardi 4 août 1998 : CAEN

J’ai lu assez tard hier soir « L’Art de vivre en Normandie » : si les photos m’ont intéressé, les légendes et le texte m’ont paru un peu pauvres. Le réveil est donc un peu tardif… Je mets un peu d’ordre dans la documentation rapportée de Scandinavie puis vais commander chez Volkswagen le barillet de serrure perforé à Amsterdam. Après déjeuner nous allons prendre le café chez Gilles et Ginette qui attendent avec impatience des vacances pas encore planifiées… De retour à Caen, Maman m’entraîne faire quelques courses à Continent (chocolat et biscuits à emporter à Montréal et huile pour la vidange du moteur) puis nous allons faire le tour du Jardin des Planstes. Si es dimensions en sont réduites, ses grands arbres sont magnifiques, ses parterres soignés et ses pelouses presque aussi régulières que de l’autre côté du Channel. Belles perspectives et utilisation astucieuse des pentes et de la forme alambiquée du terrain. Nous voulons terminer par une visite des serres mais arrivons juste à la fermeture des portes (17:00).

De retour à la maison je parcours l’album Taschen consacré à l’Art Nouveau dont nous avons maintenant découvert tant d’exemples à travers l’Europe. Après le souper, nous regardons une première cassette enregistrée lors de notre voyage vers la Norvège, depuis Rioms jusqu’à notre départ pour Larvik. Coucher tard…


Mercredi 5 août 1998 : de CAEN à BOULOIRE(271 km)

Lever tardif cette fois aussi : j’ai dégotté une série de revues de voyage dans ma chambre… Après déjeuner, je descends les boites laissées par Monique dans le grenier, puis la vieille TV conservée par Juliette, deux transats, etc., et case tant bien que mal tout ce matériel entre les banquettes de l’Aigle et sur le lit haut. Visionnement d’une autre cassette de Norvège jusqu’à Fauske. Maman qui depuis mon arrivée a gentiment entrepris de laver tout le linge sale accumulé durant notre voyage, m’entraîne ensuite à la découverte du « Jardin des Oiseaux », un vaste aménagement paysager créé de toutes pièces il y a maintenant quatre ans sur une ancienne décharge municipale. Si le dessin en général et les différentes compositions ne manquent pas d’intérêt et de variété, il faudra cependant attendre quelques années encore avant que la végétation soit pleinement établie et que les nombreux arbres aient poussé pour profiter vraiment des allées ombragées, des perspectives sur la grande roseraie ou sur le « Normandie miniature » bordée de sa pièce d’eau en forme de Manche… Cette belle, longue et calme balade reposante, à deux pas de l’agitation de la ville et du boulevard périphérique limitrophe, nous mène jusqu’à la fin de l’après-midi.

Quelques courses encore au Continent en rentrant, dernier souper en tête-à-tête avec Maman et à 20:00 je prends la route en direction de Lyon, comptant bien m’avancer un peu dès ce soir. Hélas, en arrivant à Falaise, je me souviens avoir oublié d’embarquer le câble de branchement sur le secteur laissé pendant à la fenêtre de Maman… Retour à la case départ, à nouveau bises à Maman qui a elle aussi constaté l’oubli et a enroulé le fil tant bien que mal malgré son coude handicapé. Je repars à nouveau vers le sud dans la chaude lumière du crépuscule (il est maintenant 21:00) qui dore les blés et allonge les ombres sur la plaine. Je me rends ainsi au-delà du Mans et vais m’arrêter sur la place centrale du village de Bouloire, au pied de l’église illuminée et du château en restauration, près de deux autres camping-cars qui y font aussi étape.


Jeudi 6 août 1998 : de BOULOIRE à LYON (484 km)

Lever à 9:00 après une nuit qui aurait été exécrable si je n’avais utilisé mes bouchons auriculaires : les camions rétrogradant dans le grand virage près de la place n’ont cessé de défiler toute la nuit, l’écho de leurs gros moteurs se répercutant sur les murs de pierre entourant la place. À 10:00, nouveau départ pour une route sans problème à travers la campagne française en pleine moisson, dans la chaleur qui s’élève peu à peu de 24° à 31°C au sortir des marais de la Sologne. Pique-nique au bord du canal du Cher à Mennetou, un endroit agréable et ombragé qui m’a déjà servi plusieurs fois d’étape, et arrivée à 18:45 à Sainte-Foy. À 80 km/h, j’aurai égalé mon record de consommation nordique (13,77 l/100 km). Je vide l’Aigle de tous les colis apportés de Caen, fais le tri des effets personnels à laisser en France, improvise un souper sur l’allée devant le garage en attendant Jehanne qui arrive à 21:30. Affectueuses retrouvailles puis coucher tôt après cette longue journée fatigante.


Vendredi 7 août 1998 : SAINTE-FOY-LÈS-LYON

Journée de rangement dans la cave et le grenier, puis de ménage et de lavage de l’Aigle négligé depuis un mois. Je termine en changeant l’huile et en m’attaquant en fin d’après-midi à la confection de ma valise. Sophie passe à la maison pour voir les quelques plans vidéographiés lors de son mariage fin juin et je lui confie la précieuse cassette pour qu’elle en fasse des copies. Rompu mais fin prêt pour le départ demain matin,  je m’endors satisfait : tout est propre et casé, y compris le reste de nos effets qui dépasse la limite de poids fixée par la compagnie d’aviation et qui attendra notre prochain voyage…


Outremont, le 17 janvier 1999

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